La Sierra Léone

 

Époque précoloniale

Le territoire de l'actuelle Sierra Leone fut le refuge de nombreux peuples, tels que les Kissi, les Sherbro et les Krim, lors des conflits politiques de la savane.

Au XVe siècle, refoulant les premiers occupants, des peuples mandingues s'y établissent, les Mendé sur la côte orientale, les Temne vers la frontière de l'actuel Liberia et les Soussou dans le centre. En 1460, l'explorateur portugais Pedro de Sintra donne le nom de Serra Leoa (rebaptisée plus tard "Sierra Leone" par les Espagnols, littéralement la « montagne du lion ») à la presqu'île où sera plus tard la capitale Freetown.

Au XVIe siècle, la traite négrière commence véritablement. Des Européens, avec la participation des populations côtières, commencent le commerce triangulaire dans le pays.1

 

Un fleuron de l’Empire britannique

Rappelons quelques faits concernant la Sierra Leone. D’une superficie équivalente à celle du Benelux, ce pays est situé sur la côte occidentale de l’Afrique, enclavé entre la Guinée, au nord et à l’est, et le Liberia au sud-est.

Comme tant de pays d’Afrique, la Sierra Leone est une création artificielle du colonialisme. Son origine est un peu similaire à celle du Liberia voisin. Elle remonte au 18e siècle, lorsqu’un groupe d’abolitionnistes fortunés de la bonne société anglaise entreprit d’offrir aux esclaves noirs qui vivaient alors en Angleterre (dont de nombreux esclaves américains qui avaient été mobilisés du côté anglais au cours de la guerre d’Indépendance), un havre en Afrique. Ce fut l’origine de Freetown, qui devint territoire autonome en 1787.

Vingt ans plus tard, le parlement anglais décréta l’abolition du commerce des esclaves. Il ne s’agissait pas de philanthropie puisque, d’ailleurs, le même parlement n’a pas pour autant aboli l’esclavage lui-même, ni dans ses colonies ni même sur son propre territoire. Mais la bourgeoisie anglaise, qui n’avait plus besoin du commerce triangulaire, cherchait un prétexte pour faire la police sur les mers et imposer sa loi aux bourgeoisies rivales. La chasse aux marchands d’esclaves lui fournit ce prétexte. Freetown, qui se trouvait situé en plein sur la route du commerce triangulaire, devint une base permanente de la Royal Navy. En 1808, c’en était déjà fini de l’autonomie de Freetown, dont la péninsule devint colonie de la couronne.

D’autant que les prospecteurs anglais découvrirent de l’or, puis des diamants, à l’intérieur des terres. En 1896, les frontières de ce qui allait devenir la Sierra Leone furent tracées en fonction du rapport de forces entre les empires coloniaux, coupant en deux de nombreuses ethnies locales. Ainsi naquit la Sierra Leone, en tant que nouveau protectorat britannique d’Afrique occidentale, dans lequel la capitale, Freetown, resta colonie britannique. Et ce fut la mince couche implantée de l’extérieur dans cette ville déjà occidentalisée, marquée par ses origines sans aucun lien avec le reste du pays, qui fut chargée d’administrer le nouveau protectorat sous la surveillance des militaires anglais. D’emblée, la Sierra Leone se trouva ainsi coupée en deux, entre d’un côté la région relativement aisée de Freetown et, de l’autre, le reste du territoire dont la population fut privée de tout pouvoir, fossé qui servit bien des fois par la suite à des politiciens sans scrupules pour se tailler une base de soutien.

C’est en 1961 que la Sierra Leone accéda à l’indépendance, sous l’égide du Parti des Peuples de Sierra Leone (SLPP), formation créée de toutes pièces par les stratèges londoniens. Leur idée était que la stabilité politique du pays nécessitait un régime disposant d’une base plus large que la seule population de Freetown. Du coup, ils firent du SLPP un parti basé sur l’ethnie Mendé localisée au sud et à l’est du pays et incluant environ 40 % de la population. Ainsi le pouvoir politique se trouva-t-il accaparé par les politiciens Mendé, tandis que la minorité des « Krios » (descendants des pionniers des 18e et 19e siècles) de Freetown continuait à dominer la vie intellectuelle ainsi que les postes dirigeants de l’économie et de l’administration. La moitié de la population était ainsi ostensiblement mise à l’écart des nouvelles institutions.

La Grande-Bretagne avait ainsi mis au feu un chaudron qui ne demandait qu’à déborder et il ne tarda pas à le faire. D’autant qu’il fallut très peu de temps pour que la corruption liée au trafic des diamants se généralise à tous les niveaux du régime (déjà en 1964, le premier ministre d’alors, Albert Margai, était communément comparé au dictateur cubain Batista). Aux élections de 1967, le SLPP fut renversé par un ancien leader du syndicat des mineurs, Siaka Stevens, qui, tout en dénonçant la corruption du régime du SLPP, avait surtout recherché l’appui des ethnies du nord. En butte à l’hostilité de l’impérialisme, Stevens fut renversé par un coup d’État militaire sans avoir eu le temps de s’installer au pouvoir. Quatre ans plus tard, en 1971, un autre putsch militaire le ramena au pouvoir. Et après une brève phase populiste, son régime multiplia les concessions aux intérêts impérialistes tout en se transformant en un brutal régime policier. La corruption redevint la règle, mais à une échelle sans précédent, au point qu’en 1980-1984, la valeur de l’or et des diamants sortis de Sierra Leone en contrebande avec la complicité des autorités fut estimée à quatre fois celle des exportations légales.

C’est à cette époque que la crise économique mondiale qui frappait plus durement encore les pays du Tiers-Monde commença à prendre un tour catastrophique en Sierra Leone, en entraînant la fermeture aussi bien d’infrastructures publiques que d’installations productives. Pour ne citer qu’un chiffre, on estimait en 1985 que, sur une population « employable » de 1,4 million (donc excluant l’essentiel de la population rurale), seuls 65 000 individus disposaient d’un salaire régulier non pas qu’il n’y avait pas plus de salariés, mais bien souvent les salaires n’étaient tout simplement plus payés.

Face à la montée de la misère et du mécontentement, Stevens finit par s’en remettre à ceux qui n’avaient cessé d’être le seul réel appui de son régime les militaires. En 1985, il remit les rênes du pouvoir au major-général Momoh, qui poursuivit la même politique, mais cette fois sous la forme d’une dictature qui ne cachait plus son visage et qui, surtout, réussit à se faire honnir de toutes les catégories de la population.

 

Du Liberia à la Sierra Leone

C'est en 1991 que la guerre civile commença en Sierra Leone comme sous-produit d'une autre guerre civile qui avait commencé l'année précédente au Liberia voisin. Celui-ci était plongé dans une crise politique, économique et sociale assez comparable à celle de la Sierra Leone. À ceci près qu'en 1990, l'appareil d'État libérien avait pour ainsi dire explosé en une multitude de factions rivales luttant pour le pouvoir.

Après une tentative d'intervention militaire qui tourna à l'échec, les dirigeants américains (le Liberia étant la seule enclave coloniale que les USA aient jamais eue en Afrique) obtinrent de la CEAO (Communauté Économique d'Afrique de l'Ouest, qui regroupe les anciennes colonies anglaises et françaises de la région) qu'elle assume la responsabilité politique d'un corps expéditionnaire équipé et entraîné par l'impérialisme, mais formé de soldats essentiellement nigérians et ghanéens placés sous direction nigériane. Ce corps, connu sous le nom d'ECOMOG, devait avoir pour tâche de rétablir l'ordre au Liberia et d'y imposer, au besoin par la force, la mise en place d'un régime stable. En 1991, ECOMOG occupa le quartier des affaires de la capitale libérienne, Monrovia, et repoussa les bandes armées vers les régions périphériques du pays et vers les pays limitrophes, dont la Sierra Leone.

Il fallut en fait six ans d'une guerre particulièrement meurtrière pour que la paix revienne dans le pays. Le régime "stable et démocratique" que les leaders américains prétendaient appeler de leurs vœux fut en fait celui du chef de guerre qui se révéla le plus apte à imposer sa loi aussi bien à ses rivaux qu'à la population. Une fois que, à l'épreuve des combats, Taylor eut réussi à convaincre les dirigeants impérialistes de son aptitude à tenir le pays sous son joug, il put bénéficier de l'aide officieuse, mais bien réelle, d'ECOMOG contre ses rivaux, avant d'obtenir finalement la reconnaissance officielle de Washington en 1997.

Néanmoins, le règlement politique libérien suscitait certaines inquiétudes à Londres. D'abord, parce que Taylor était connu pour ses liens personnels et militaires avec l'impérialisme français : on disait de lui que c'était un ami personnel de Jean-Christophe Mitterrand. Il avait pu se servir de la Côte d'Ivoire comme base logistique pour l'importation d'armes et l'exportation de diamants, ce qui lui aurait été impossible sans l'accord au moins tacite des autorités françaises. En plus, Taylor n'avait jamais caché que ses ambitions dépassaient le cadre du seul Liberia et qu'elles pourraient bien s'étendre à la Sierra Leone, en s'appuyant en particulier sur les liens ethniques qui existent entre les deux pays.

Quoi qu'il en soit, bien avant que ce règlement politique ait été scellé au Liberia, l'implosion qui avait frappé l'État libérien avait gagné celui de la Sierra Leone. Dès 1990, des éléments mécontents de l'armée sierra-léonaise appartenant à l'ethnie Mendé (commune aux deux pays) s'étaient joints aux bandes armées de Taylor, d'autant plus facilement d'ailleurs que Taylor, qui avait besoin de bases arrières en Sierra Leone, recherchait des appuis locaux. Bientôt ces militaires dissidents créèrent leur propre drapeau, sous la forme du RUF, le Front Révolutionnaire Unifié, sous la direction d'un ancien officier passé par les universités britanniques, Foday Sankoh.2

 

La guerre civile

Pendant les onze ans de guerre en Sierra Leone, le pouvoir politique nominal et la capitale changèrent de mains neuf fois. La guerre opposa jusqu'à quatre factions locales. Deux - le RUF et l'AFRC (Conseil révolutionnaire des forces armées) - avaient été formées par des officiers mécontents et de jeunes nationalistes. Une autre était constituée par ce qui restait de la décomposition de l'armée régulière (elle-même divisée en sous-factions, suivant les ambitions des commandants d'unités). La dernière faction, celle d'Ahmad Tejan Kabbah, un ancien haut fonctionnaire en Sierra Leone, puis à l'ONU, bénéficiait du soutien de Londres et s'appuyait sur une milice tribale, dite des " Kamajors ".

Cette guerre civile vit également l'intervention d'un certain nombre de forces étrangères " officielles ". Le premier contingent étranger fut ECOMOG, au début des années quatre-vingt-dix, cette force multinationale dirigée par la dictature en place au Nigeria, qui avait été initialement envoyée au Liberia, à la demande de Washington, par les pays de langue anglaise de la Communauté économique de l'Afrique de l'Ouest (ses membres de langue française avaient refusé de s'y joindre, sans doute sur injonction de Paris qui voyait plutôt d'un bon œil la rébellion de Charles Taylor au Liberia). Puis vint l'armée britannique en mai 2000 et, dans les mois qui suivirent, l'UNAMSIL, un contingent de l'ONU qui compta bientôt plus de 17 000 hommes. À ces forces " officielles " s'ajoutèrent tout au long de la guerre celles, officieuses mais non moins meurtrières, de petites armées de mercenaires suréquipées et surentraînées, dont celles de la firme britannique Sandline et de son homologue sud-africaine, Executive Outcomes - des noms que l'on retrouve dans la plupart des guerres civiles africaines.

Quant aux combats, ils eurent surtout pour enjeu les bassins diamantifères du pays, ses mines de rutile (oxyde de titane, qui sert dans la fabrication de peintures et d'aciers spéciaux, et dont la Sierra Leone a les réserves connues les plus importantes au monde) ainsi que la capitale, parce que siège du pouvoir central, mais aussi seul véritable port commercial du pays.

Pour la population sierra-léonaise, les uniformes portés par les soudards ne faisaient guère de différence. " Officielles " ou officieuses, locales ou étrangères, toutes ces bandes armées se comportaient de la même façon et dans le même but - celui de la terroriser pour la dissuader de soutenir les camps adverses. Les bandes armées étrangères avaient des avions et des hélicoptères et évitaient en général tout contact direct avec la population. Tandis que les bandes armées locales contraignaient systématiquement les jeunes en âge de combattre à se joindre à leurs rangs, quitte à user de châtiments horribles contre les récalcitrants et leurs familles. Mais les grenades incendiaires d'ECOMOG et les bombes antipersonnel qu'utilisaient les Britanniques et les mercenaires faisaient autant de victimes parmi les villageois que les machettes des bandes locales.

 

La " solution " de Londres

En 1996, profitant d'un nouveau coup d'État dirigé par un général de l'armée régulière qui, lui, se déclarait prêt à se soumettre aux ordres de l'impérialisme britannique, Londres obtint la tenue d'une élection présidentielle. Ce fut une piètre parodie démocratique, ne serait-ce que parce qu'une grande partie du pays était sous le contrôle de factions rebelles tandis qu'un quart de la population, réfugié en Guinée, ne pouvait prendre part au vote. Mais qu'importe ! Elle permit à Londres de présenter Kabbah comme le seul dirigeant légitime du pays, parce que " démocratiquement élu ", et de fournir un soutien politique et militaire aux Kamajors, la milice de Kabbah.

Néanmoins, comme les événements suivants le montrèrent, Kabbah n'avait guère d'appuis dans la population et encore moins dans ce qui restait de l'armée régulière. À peine élu président, il fut renversé par un nouveau coup d'État et contraint à l'exil. Les deux autres tentatives qu'il fit par la suite pour reprendre son poste et rétablir l'ordre furent autant de fiascos, malgré le soutien d'ECOMOG, des Kamajors, de diverses bandes de mercenaires et du premier contingent de l'ONU.

Ce furent les échecs répétés de Kabbah qui incitèrent finalement Tony Blair, le Premier ministre du Royaume-Uni, à envoyer des troupes, d'autant plus, sans doute, qu'il ne souhaitait sûrement pas une situation dans laquelle Washington aurait bénéficié d'une liberté d'action sans partage grâce au fort contingent de l'ONU alors en cours de constitution.

En fait, depuis le deuxième retour de Kabbah à Freetown, en 1998, l'embryon d'appareil d'État installé dans la capitale était déjà directement contrôlé par des " conseillers " britanniques - de l'administration des impôts à celle des finances et de l'armée, en passant par la police, dont le chef en titre, Keith Biddle, avait été superintendant de la police de l'agglomération de Manchester, en Angleterre.3

 

Un enjeu caché - le monopole de De Beers

L’une des raisons pour lesquelles le gouvernement Blair s’est montré si discret sur son intervention en Sierra Leone, lui qui d’ordinaire trompette à tous vents le moindre de ses faits et gestes (quitte à user des mensonges les plus éhontés, d’ailleurs), c’est que ses motifs sont très peu avouables. Ce ne sont pas les atrocités commises en Sierra Leone qui perturbent le sommeil des dirigeants travaillistes, mais bien plutôt les menaces que la guerre civile dans ce pays fait peser sur les intérêts d’un puissant groupe sud-africain dont le siège est à Londres, où il est l’un des plus beaux fleurons de la City le groupe diamantaire De Beers.

L’empire De Beers est contrôlé par une holding financière discrètement installée au Luxembourg, dont les propriétaires sont les membres d’une famille sud-africaine, les Oppenheimer. Les mêmes Oppenheimer contrôlent par ailleurs le géant minier sud-africain Anglo-American. De Beers et Anglo-American ont construit leur fortune non pas seulement sur les diamants, mais sur tous les minerais sud-africains et en grande partie grâce à l’apartheid. Mais dans le domaine des diamants, De Beers a construit un monopole mondial. Non seulement il possède ou contrôle des mines en Afrique du Sud, au Botswana, en Namibie et en Tanzanie (et, jusque dans les années quatre-vingt, en Sierra Leone) et exerce de ce fait un quasi-monopole régional sur la collecte des diamants, mais surtout De Beers dispose d’un réseau mondial au travers duquel il contrôle l’achat des pierres brutes auprès des producteurs (contrôle qui s’étendait même à l’URSS à l’époque où celle-ci existait encore). Ce réseau d’achat alimente un stock situé à Londres, grâce auquel De Beers peut peser sur le marché du diamant brut dans le sens qu’il souhaite, simplement en mettant plus ou moins de pierres en circulation. Pour donner un ordre d’idée de ce stock, sa valeur était estimée à 4 milliards de dollars à la fin de 1999. En 2001 De Beers contrôlait encore plus de 60 % des transactions de diamants bruts, dont la valeur annuelle est estimée à 7 milliards de dollars.

Pour De Beers, le fait d’imposer son monopole d’achat dans certains pays africains comme la Sierra Leone était d’autant plus facile que cela ne nécessitait pas de gros investissements. Les diamants y étant collectés manuellement dans des boues alluviales, il suffisait de s’assurer du contrôle des régions diamantifères. Lorsque des pays comme l’Angola, le Liberia ou la Sierra Leone se trouvèrent pris par des guerres empêchant l’opération normale de ses activités, il lui a suffi de traiter avec les bandes armées qui contrôlaient les régions diamantifères, quelles qu’elles fussent. Cela faisait un intermédiaire de plus qu’il fallait payer, mais sans pour autant remettre en cause son monopole. Et bien qu’un épais voile de secret recouvre les activités de De Beers, on a pu se rendre compte de loin en loin que le groupe se souciait fort peu du fait que les diamants qu’il achetait servent à fournir des fonds à des chefs de guerre, pour se payer des armes ou pas. C’est ce que révéla par exemple le scandale soulevé en 1992 par la révélation que De Beers avait acheté pour 14 millions de dollars de diamants à des groupes armés angolais.

Tant que De Beers conserve son monopole sur l’achat des pierres, seule une faible quantité de pierres « terroristes » ou « illégales », comme les appelle l’ONU, c’est-à-dire vendues en contrebande par des groupes armés qui luttent contre les autorités de leur pays, échappe au stock londonien de De Beers. Et cette faible quantité ne peut guère affecter de façon sensible les cours mondiaux.

Seulement De Beers a alors un problème : le groupe est confronté à des concurrents, qu’il s’agisse de grands groupes miniers comme le groupe australien BHP ou le groupe britannique RTZ, qui voudraient bien mettre son monopole à bas, ou de beaucoup plus petits groupes comme Branch Energy et Diamond Works (deux groupes anglo-canadiens opérant en Sierra Leone) qui, eux, ne visent pas si haut, mais cherchent seulement à se tailler la part du lion dans le domaine risqué de la contrebande de diamants « illégaux » en ayant recours à leurs propres hommes de main sur le terrain. Mais du coup ces « cow-boys » du diamant menacent d’écorner le monopole de De Beers et de rendre la tâche plus facile à ses plus gros rivaux. Qui plus est, ils contraignent De Beers à faire baisser les prix du marché pour leur couper l’herbe sous le pied, ce qui veut dire un manque à gagner.

D’où l’adoption par De Beers d’une attitude soudainement très moraliste quant à l’origine des diamants bruts. Et comme par hasard, c’est au même moment que l’ONU et les grandes puissances occidentales se sont lancées dans une campagne visant à imposer un système de certificats d’origine très réglementé pour les diamants bruts, de façon à interdire le commerce des pierres « illégales ».

De la part de l’ONU et des dirigeants impérialistes, il s’agissait là bien sûr de pure hypocrisie. Comme le montre très bien le rapport produit par les experts de l’ONU eux-mêmes en décembre 2000, le marché des pierres brutes est si bien organisé et hors d’atteinte des autorités qu’il se prête à toutes les contrefaçons. Et puis, qui empêchera un acheteur de pierres brutes d’acheter une pierre sans certificat proposée à plus bas prix dès lors qu’une fois taillée, il sera pratiquement impossible de déceler à coup sûr l’origine de cette pierre ?

Pour De Beers, en revanche, un tel système pouvait présenter bien des avantages et résoudre ses problèmes à court terme. Car, dans la mesure où ce groupe contrôlait l’essentiel des canaux par lesquels les pierres brutes sont commercialisées, il était aussi le mieux placé pour délivrer des certificats d’origine. Déjà De Beers avait pris les devants en se présentant comme le champion de la moralisation du commerce des pierres brutes. Un système de certifications pouvait aider le groupe à obliger les « cow-boys » à trouver un arrangement avec De Beers en échange des certificats dont ils avaient besoin.

Bien sûr, les grands trusts impérialistes préféreraient pouvoir compter sur des forces politiques fiables et stables dans les zones qu’ils exploitent. Mais la dégradation de la situation dans les pays pauvres est telle que le temps des dictatures stables est révolu. Alors les grands trusts comme De Beers se sont adaptés. Ils ont appris à traiter avec les bandes armées et à en tirer profit. Il n’y a que la population qui ne peut pas s’adapter, parce que, elle, c’est avec son sang qu’elle paie cette instabilité.

 

Aux racines de la guerre civile

Pour les dirigeants impérialistes, accuser la contrebande de diamants d’être cause de la guerre civile était évidemment une façon de détourner l’attention des véritables causes, et en particulier de leurs propres responsabilités vis-à-vis de la population qui subissait le martyre de cette guerre (il y a eu environ 120 000 morts).

Mais il faut dire que l’impérialisme n’a que du mépris pour ces populations. Même les représentants de l’intelligentsia libérale britannique n’ont pas eu une autre attitude. Ainsi The Guardian, quotidien représentant ce milieu, décrivait ainsi Foday Kallay, le leader des West Side Boys, responsables de l’enlèvement de soldats britanniques en août 2000 : « une bien piètre figure, vêtue en tout et pour tout d’un T-shirt Calvin Klein sale et de sous-vêtements... Il regrettait tout, disait-il... D’autant qu’il insistait sur le fait qu’il avait été sur le point de relâcher les soldats... Pourtant ce n’était pas l’impression des négociateurs lorsque ce leader saoûl exigeait en marmonnant le départ du gouvernement et la libération de prison de ses camarades criminels ».

Ce que les journalistes du Guardian ignoraient, ou ne voulaient pas voir, c’est que la Sierra Leone, comme tant d’autres pays où la pauvreté a dévasté la société, est pleine de Foday Kallay. Dans ce pays, il est pratiquement impossible de trouver un travail rémunéré. Plus de 70 % de la population vivent en dessous du seuil de pauvreté. Les jeunes chômeurs ont toujours été une source de recrues aussi bien pour l’armée que pour les seigneurs de guerre. La frontière entre la criminalité et la survie n’est pas toujours bien tranchée pour ceux qui sont pris entre les exactions des bandes armées et une misère sans issue, surtout quand c’est l’ensemble de la société qui s’écroule autour d’eux, avec toutes ses institutions et infrastructures collectives.

De même, les « enfant-soldats » qui ont horrifié les médias occidentaux ne sont guère des « enfants » portant une arme. Car dans le contexte d’écroulement social que connaît la Sierra Leone, ces enfants-là assument le plus souvent ce que l’on appelle en Occident des « responsabilités d’adultes » depuis bien longtemps, parce qu’en l’absence de familles, c’est à l’aîné, même s’il n’a que douze ou quatorze ans, de trouver de quoi manger pour ses cadets, voire pour les anciens, et au besoin de les défendre les armes à la main, s’il peut en trouver.

Dans les pays les plus pauvres d’Afrique, cela fait longtemps que la « vie familiale » et la « vie villageoise » ont été brisées par la confiscation des terres au profit des grandes exploitations industrielles destinées à satisfaire les besoins des trusts impérialistes, ou parce qu’on a chassé les habitants des régions riches en minéraux, comme c’est le cas d’une partie des bassins diamantifères de Sierra Leone, ou encore tout simplement par le jeu de l’exode rural. La guerre civile n’a fait qu’aggraver cette situation. Mais cette décomposition sociale a fourni un terreau fertile aux sergents recruteurs des chefs de guerre.

Ce qui alimente ces guerres qui n’en finissent plus d’éclater d’un bout à l’autre de l’Afrique, c’est avant tout la misère des populations. Mais ces guerres civiles, en aggravant encore plus la situation de ces populations, ne font qu’en préparer d’autres.

L’intervention britannique visait sans doute à restaurer la « paix », ou plutôt l’« ordre » en Sierra Leone. Mais l’ordre qu’elle visait à restaurer était celui du pillage impérialiste, un ordre qui permette aux grands trusts comme De Beers de reprendre en toute tranquillité leur exploitation des richesses naturelles du pays et de sa population. Et cet ordre-là ne pouvait pas permettre à la population de sortir de la misère terrible qui l’a plongée dans la guerre.4

 

La fin de la guerre civile

Finalement, après un nouvel accord signé avec les différentes factions, une nouvelle élection présidentielle fut organisée en 2002, pour confirmer la légitimité de Kabbah. Moyennant quoi, la « communauté internationale » proclama celui-ci « librement et démocratiquement » élu, même si, cette fois encore, une grande partie de la population, parquée dans des camps de réfugiés en Guinée ou déplacée à l’intérieur du pays, n’avait même pas pu s’inscrire sur les registres électoraux !

En 2005, les effectifs des troupes de l’ONU ne sont plus que 3 000 et sont censés quitter le pays à la fin de l'année. Les troupes britanniques sont les seules à n’avoir fixé aucune date pour leur départ.

Mais la population était-elle revenue pour autant à une vie « normale », même ne serait-ce que partiellement ? Que dire du vide béant laissé par les 120 000 morts de la guerre ? Quant aux survivants qui ont subi les mutilations barbares infligées par les différentes factions, ont-ils au moins bénéficié de soins médicaux minima, sans parler des membres artificiels, qui sont peu de choses pour la technologie occidentale, mais représentent pour beaucoup la différence entre une survie précaire et une mort plus que probable ? La population dans son ensemble avait-t-elle au moins accès à un strict minimum en matière d’écoles, d’hôpitaux, d’eau, d’électricité ? Tout le monde avait-t-il un toit sous lequel vivre ? Mais non, la population n’avait rien de tout cela.

En 2005, selon les Nations unies, 70 % de la population vivent dans ce que leurs statisticiens appellent une situation « d’extrême pauvreté ». L’espérance de vie moyenne est de 37 ans, ce qui est présenté comme un « progrès » par rapport aux 34 ans de 2003, et la mortalité infantile est 33 fois plus élevée que dans un pays comme la France. Près des deux tiers de la population sont illettrés et pourtant 60 % des enfants n’ont accès à aucune forme d’éducation. Seule la moitié de la population a accès à une source d’eau potable.

En fait, après avoir été classée par les Nations unies au rang de pays le plus pauvre du monde pendant sept années d’affilée (au 177e rang), la Sierra Leone a péniblement réussi à « avancer » au 176e rang mondial en 2005 - et encore, ce « progrès » est-il essentiellement dû à la sévère famine qui a frappé le Niger.

Voilà donc ce qui se cache derrière la « paix » dont se vantaient les dirigeants occidentaux - un pays exsangue et une population épuisée. Et la vérité est que rien n’a été fait contre cette catastrophe.

 

Rien n’avait été prévu pour la population

Les puissances impérialistes tutélaires ont fait preuve d’un total mépris pour les besoins de la population.

En 2005, l’état de l’alimentation électrique offre un exemple typique de cette politique. Dans toute la Sierra Leone, il n’existe que trois endroits bénéficiant d’une alimentation suffisante 24 heures sur 24 - le complexe gouvernemental, le quartier général britannique et UNAMSIL-ville, la base de l’ONU, tous situés à Freetown.

Quant à la population, elle doit se considérer heureuse lorsqu’elle a une heure d’alimentation dans la semaine. Le comble, c’est que cela n’empêche pas la compagnie d’électricité nationale de facturer ses abonnés et même d’avoir augmenté ses tarifs en 2005 dont 30 % en octobre !

L’infrastructure électrique est dans un état quasi terminal. Freetown ne dispose que d’une seule centrale thermique qui serait tout au plus capable de faire face à la moitié des besoins minimums de la capitale. Mais, en plus, l’état de délabrement du réseau de distribution entraîne des déperditions d’énergie énormes. Sur le papier, la Banque mondiale a approuvé un prêt pour une centrale hydroélectrique. Mais sa construction ne commençait qu'en 2006. En attendant, une filiale de la compagnie électrique d’État sud-africaine, Eskom Holdings, était en discussion pour remettre en état le réseau du pays. Mais, si tant est qu’un accord se fasse, Eskom ne ferait rien gratuitement et c'était encore une fois à la population qu’on présenterait l’addition.

Pour compenser l’absence d’alimentation électrique, les Sierra-Léonais achètent donc de petits générateurs diesel - surnommés ironiquement « tigres Kabbah ». Ces générateurs coûtent 160 000 leones, soit environ 46 euros ou près de 5 mois du salaire minimum « légal ». Autant dire que c’est un « luxe » hors d’atteinte pour une population dont la majorité n’a pas de source de revenus réguliers. De toute façon, le fioul de mauvaise qualité importé illégalement de Guinée pour alimenter ces générateurs, à près de 3 euros le litre, est lui aussi trop cher pour la majorité des bourses.

L’état des routes offre un autre exemple du mépris des « faiseurs de paix » impérialistes pour les besoins des populations. Trois ans après la fin de la guerre, les routes principales restent interrompues sur de longues distances, détruites par les explosifs des factions rebelles ou par les bombardements des forces occidentales, ou simplement faute d’avoir été entretenues pendant si longtemps. Du coup, les produits agricoles des zones rurales ne parviennent pas jusqu’à la capitale. Tandis que les produits agricoles sont vendus à des prix exorbitants à Freetown, menaçant une partie de la population de famine, la population rurale survit péniblement sur des stocks de nourriture invendables ! Mais il n’a jamais été question d’utiliser les hélicoptères lourds de la marine britannique ou de l’ONU pour établir un pont aérien entre les zones rurales et Freetown. Pas plus qu’il n’a été question de mettre les unités du génie britannique à réparer au moins les routes les plus importantes.

Il en va de même de la collecte des ordures à Freetown, dont l’état de désorganisation est un danger pour la santé de toute la population. La ville est littéralement couverte d’énormes tas d’immondices. Un quotidien local, le Concord Times, s’en est pris aux autorités, avec ce commentaire ironique faisant référence au Tribunal spécial contre les crimes de guerre mis en place par l’ONU et aux élections législatives prévues pour 2007 : « Les habitants de Freetown travaillent à la mise en place d’un Tribunal spécial pour juger les principaux responsables du maintien de la saleté dans la ville. Ceux dont les efforts auront attiré les bataillons de mouches et de moustiques causes de tant de désordres seront jugés en 2007 lorsque commencera à siéger ce tribunal. »

Pendant ce temps une noria de 4x4 de luxe flambant neuf sillonnent les rues de la capitale, conduits par des officiels de l’ONU, des ONG ou de l’armée britannique, forçant le passage pour doubler les guimbardes des Sierra-Léonais et soulignant leurs privilèges d’un nuage de poussière à la face de la majorité de ceux qui n’ont d’autre moyen de transport que leurs pieds nus.

 

La « reconstruction » de Freetown

Les forces onusiennes et britanniques ont néanmoins contribué, à leur façon, à la « reconstruction » de la capitale, en donnant naissance et en alimentant, voire en organisant, toute une « industrie » - la prostitution. Et cette « industrie » a donné lieu à de nombreux scandales, tous plus sordides les uns que les autres.

L’ONU a dû finir par reconnaître l’influence corruptrice de ses troupes. Aussi ses bureaucrates ont-ils lancé un projet théoriquement destiné à arracher les jeunes femmes à la prostitution. Ce projet consiste à fournir aux prostituées une formation de conductrices de transports en tous genres, pour « transporter personnes et marchandises dans tout le pays ». Mais l’hypocrisie de ce projet a été mise à jour lorsqu’on a appris que la seule dotation prévue par l’ONU consistait en deux taxis, quelques motos et environ 580 euros !

Le travail des enfants est, sans doute, courant dans la plupart des pays pauvres. Mais dans les rues de Freetown, il atteint un point particulièrement révoltant, quand y on voit de jeunes enfants en haillons tenter désespérément de vendre une poignée de noix ou de maïs. Ou encore ces enfants, qui n’ont même pas dix ans, que l’on voit assis au bord des rues, transformer à coups de marteau de gros morceaux de roc en caillasse, qu’ils porteront ensuite sur leur tête dans des paniers jusqu’au chantier de construction voisin.

Car le travail de ces enfants est un ingrédient essentiel du « boom » de la construction à Freetown. Comme il n’existe en général aucune route ou chemin carrossable pour accéder aux chantiers, ce sont ces enfants qui servent de bêtes de trait pour y apporter la caillasse nécessaire.

Après la guerre, un grand nombre de maisons sont à l’état de ruines, marquées par les traces d’obus ou d’incendie, en tout cas dans un état tel qu’elles nécessitent une reconstruction partielle, voire totale. Mais les travaux de construction ne sont pas destinés à la population pauvre.

L’essentiel de ces travaux sont engagés par des entreprises chinoises qui, pour citer un commentaire élogieux du journal patronal britannique Financial Times, en février 2005, ont eu « le courage de s’engager là où d’autres pays ont peur de mettre ne serait-ce qu’un pied ».

C’est ainsi qu’un groupe chinois, le Groupe de construction urbaine de Pékin, a entrepris la rénovation du stade national de Freetown, avec ses 60 000 places, du complexe gouvernemental et du quartier-général des armées. À quoi il faut ajouter l’hôtel Bitumani, un établissement de luxe qui occupe 45 hectares et sera doté d’un « décor à thème chinois » et d’un grand casino - le tout dans le cadre d’une concession de 25 ans au maître d’œuvre. Un autre hôtel de luxe de 250 lits, incluant un centre de conférence, ainsi qu’un grand stade doivent également être construits dans le cadre d’une concession signée par l’Office du tourisme de la Sierra Leone à Bo, la deuxième ville du pays.

Pendant ce temps, la population pauvre n’aura qu’à se contenter de ses ruines !

 

« Justice », corruption et répression

En juin 2004, a commencé le procès des « principaux responsables » des atrocités commises depuis 1996 devant le Tribunal spécial de l’ONU. En tout treize individus sont l’objet de poursuites et encore, parmi ceux-ci, trois sont décédés et un autre, le chef de guerre libérien Charles Taylor, a obtenu l’asile politique au Nigeria. De sorte qu’il ne reste que neuf accusés, pour la poursuite desquels le Tribunal spécial a dépensé la bagatelle de 70 millions d’euros en deux ans, avant même que s’ouvre sa première session !

Fait inattendu, le premier accusé à être cité devant le Tribunal spécial n’a pas été l’un des leaders des factions rebelles mais un ancien membre du gouvernement Kabbah, Hinga Norman, en tant qu’ancien commandant en chef des milices Kamajors. Comme on pouvait s’y attendre, cela a provoqué tant de pressions de la part du pouvoir que l’avocat général américain du tribunal a fini par se résigner à démissionner de son poste.

Cela dit, comme bien d’autres tribunaux du même type, le rôle de ce Tribunal spécial est avant tout de désigner quelques boucs émissaires à la vindicte publique pour détourner l’attention des responsabilités des pouvoirs en place - en l’occurrence, celles de Kabbah et du gouvernement britannique, en particulier.

En même temps, une « Commission vérité et réconciliation » a été mise en place, sur le modèle de celle créée en Afrique du Sud au lendemain de la chute du régime de l’apartheid. Cette commission a un rôle complémentaire à celui du Tribunal spécial, puisqu’elle offre l’amnistie de leurs crimes à ceux qui sont prêts à les confesser en bonne et due forme. Moyennant quoi les tortionnaires d’hier pourront se recycler dans la peau de personnalités « respectables » qui pourront être cooptées par le régime.

Cette farce juridique est d’autant plus cynique qu’au moment même où se déroule ce cérémonial emprunt d’un moralisme hypocrite, le pays est en train de sombrer dans un cloaque de corruption, et cela malgré la mise en place de toutes sortes d’organismes censés lutter contre ce fléau.

Certes la corruption des autorités est proverbiale en Sierra Leone, comme dans la plupart des pays pauvres, et le régime de Kabbah ne fait que confirmer la règle. Mais ce qui aggrave encore les choses, ce sont les richesses minérales du pays, sources d’enrichissement personnel pour les hommes au pouvoir, grâce aux rentes qu’ils peuvent tirer de l’attribution des licences de prospection et d’exploitation. Et la richesse ostentatoire des pontes de l’appareil gouvernemental est d’autant plus écœurante dans un pays aussi dévasté et appauvri.

Néanmoins, il est dangereux pour les journalistes de dénoncer la corruption sous le règne du président Kabbah. En 2002, le quotidien African Champion a été fermé pendant deux mois et son rédacteur en chef interdit d’exercer pendant six mois, pour avoir accusé le fils de Kabbah de corruption et de bénéficier de la protection de son père. La même année, Paul Kamara, éditeur du journal For di people, fut emprisonné pour deux mois et son journal interdit pour six, pour avoir traité un juge de la Cour d’appel d’escroc. En 2004, Paul Kamara a été de nouveau condamné, mais cette fois à quatre ans de prison, pour avoir « calomnié le président » - il avait écrit que Kabbah n’aurait pas dû avoir le droit de se présenter à l’élection présidentielle car il n’avait jamais été innocenté dans une affaire de fraude à laquelle son nom avait été mêlé, alors qu’il était secrétaire permanent au ministère du Commerce, à la fin des années soixante.

Bien plus grave encore, le rédacteur en chef par intérim de For di people, Harry Yansaneh, a été passé à tabac en juillet 2004 par des sbires agissant pour le compte d’une députée du parti de Kabbah, pour le punir de ses critiques envers le gouvernement. Yansabeh est mort par la suite de ses blessures. Ses assaillants furent arrêtés et reconnus coupables de meurtre, pour être finalement libérés sous caution sans que personne puisse (ou veuille) dire par qui ni pourquoi.

 

Les affaires marchent... pour certains

Comme dans la plupart des pays pauvres, la politique officielle de Kabbah consiste à tout faire pour attirer les capitaux étrangers.

Aussi, malgré la banqueroute de l’économie, le programme de privatisations, jadis interrompu par la guerre civile, a été relancé pour 24 entreprises contrôlées par l’État, allant de la finance et du commerce au transport et à l’énergie. Mais la commission chargée de ces projets se plaint amèrement de ce que pour remplir sa mission il lui faudrait au moins 10 millions d’euros pour « graisser les rouages » et attirer les acheteurs. De sorte que la seule privatisable mise aux enchères fut la Rokel Commercial Bank, une ancienne filiale du géant britannique Barclays, que celui-ci vendit à l’État pour une livre symbolique en 1998. Mais près d’un an après sa mise en vente, cette banque n’avait toujours pas trouvé preneur.

Pour rendre la Sierra Leone plus attractive aux investisseurs potentiels, ceux-ci bénéficient de multiples régimes fiscaux privilégiés conçus en collaboration avec la Banque mondiale. Par exemple, tout investissement dans l’agriculture intensive bénéficie de dix ans d’exemption de l’impôt standard de 35 % sur les profits. Ou encore, les entreprises étrangères opérant dans le tourisme ou les mines n’ont pas à payer de taxes sur leurs importations.

Néanmoins, seul un petit nombre de secteurs a attiré l’intérêt des entreprises étrangères - essentiellement les diamants et le rutile, bien sûr, la téléphonie mobile, ainsi que l’agriculture et la pêche intensives.

La téléphonie mobile a l’avantage de ne nécessiter que des infrastructures préexistantes minimales. Mais en Sierra Leone, même cette infrastructure minimale n’existe pas. Ainsi, le directeur du principal opérateur, Celtel, filiale d’une compagnie koweïtienne, se plaint de ce que « l’approvisionnement électrique devient de pire en pire de sorte qu’il nous faut avoir deux générateurs à chaque relais. À quoi il faut ajouter la nécessité d’entretenir un parc de 20 véhicules opérant sur les pires routes d’Afrique ».

Quant à l’agriculture, elle pose d’autant plus de problèmes à Kabbah qu’il a promis lors de son élection que chacun aurait de quoi manger au plus tard en 2007. Mais on en est très loin et le choix de développer des cultures industrielles telles que le cacao et le café ne donne à manger à personne.

Mais c’est bien sûr dans le diamant et le rutile que se font les affaires les plus juteuses.

Avant la guerre civile, Sierra Rutile Limited était le plus gros employeur du pays. Trois ans après, toutes les ressources en rutile, ainsi que celles, moins importantes, en bauxite, sont passées aux mains du Titanium Resources Group, une entreprise cotée à Londres, qui est contrôlée par l’un des plus douteux affairistes de l’industrie minière africaine - Jean-Raymond Boulle, un citoyen britannique résidant à Monaco (paradis fiscal oblige). Son nom s’est trouvé associé à bon nombre des guerres civiles africaines de ces dernières décennies, dès lors qu’il y avait des intérêts miniers en jeu - en Angola et au Congo-Zaïre, entre autres.

Quant aux diamants, en 2004, la production a atteint un tiers des deux millions de carats annuels produits dans les années soixante.

La petite exploitation des dépôts de diamants alluviaux a repris, mais il n’existe encore qu’une seule entreprise exploitant le bassin de Kono à une échelle industrielle. Cette entreprise, Koidu Holdings, est une réincarnation de l’ancien groupe Branch Energy, un groupe minier basé à Londres qui était lié aux organisations de mercenaires Sandline et Executive Outcomes. D’ailleurs Jan Joubert, le PDG sud-africain de Koidu Holdings, reconnaît sans complexe que lui-même et une partie de son état-major sont d’anciens mercenaires d’Executive Outcomes. De là à penser que les concessions accordées à Koidu Holdings pour 25 ans sur une partie du bassin de Kono sont la rémunération des services rendus à Kabbah par ces organisations de mercenaires, il n’y a qu’un pas.

D’autres acteurs se préparent à prendre leur part du gâteau diamantifère. Le groupe anglo-canadien Mano River Resources s’apprêterait à former une « joint-venture » avec le géant anglo-australo-sud-africain BHP-Billiton pour exploiter une autre concession du bassin de Kono. Par ailleurs un nouvel acteur, la Sierra Leone Diamond Company, dit avoir obtenu vingt licences couvrant la totalité du tiers nord du pays. Cette compagnie a une adresse dans les quartiers chics de Londres, est domiciliée dans le paradis fiscal des Bermudes et est contrôlée par un autre personnage très douteux - l’affairiste roumain Vasile Timis, dont le nom a été associé à toutes sortes de scandales liés à la Regal Petroleum et à diverses opérations minières en Roumanie.

Bien sûr, derrière les acteurs de second ordre opérant en Sierra Leone, se profile la silhouette du véritable géant de l’industrie diamantaire - le trust anglo-sud-africain De Beers qui, lui, n’a nul besoin d’aller se salir les mains en Sierra Leone, grâce à son contrôle de 50 % du marché mondial des diamants !

Alors que tout le monde parle du diamant et du rutile comme offrant un véritable avenir à la Sierra Leone, non seulement la population n’en tire aucun bénéfice (sauf une infime minorité de capitalistes et de politiciens locaux), mais en plus ces productions constituent une vraie calamité pour les régions qu’elles affectent.

Dans le cas du rutile, le minerai est obtenu en utilisant une technique consistant à créer de vastes lacs artificiels, puis à extraire le minerai de ces lacs. Le régime se charge, pour le compte de l’entreprise exploitante, de chasser les paysans de leurs terres sans compensation d’aucune sorte. Cela explique sans doute que l’entreprise de Jean-Raymond Boulle soit la seule du pays qui soit autorisée à entretenir une armée privée, pour protéger les terres volées... contre ceux qui y habitaient.

Dans le cas du diamant, les 4 500 personnes qui vivent aux abords du filon diamantifère exploité par Koidu Holdings doivent évacuer leurs villages chaque fois que la compagnie attaque la veine à l’explosif. Mais malgré les promesses de Kabbah de construire de nouveaux villages où ces populations puissent aller vivre, seules dix ridicules cases ont été construites, malgré deux années de campagne pour faire valoir leurs droits.

 

Un feu qui continuera à couver

Le régime de Kabbah ne serait certainement jamais arrivé ni resté au pouvoir sans l’intervention occidentale et la présence continue des troupes britanniques et de celles de l’ONU. Et il n’aurait aucune chance de s’y maintenir dans l’avenir sans les 9 000 policiers entraînés par l’ONU et équipés conjointement par l’ONU et Londres, ni sans la nouvelle armée sierra-léonaise formée et équipée par l’armée britannique.

Quant au régime de Kabbah, après trois ans d’existence, il avait déjà toutes les caractéristiques des dictatures corrompues du passé. Qu’importe, pour les leaders occidentaux comme Blair, si le semblant de démocratie institutionnelle dont se parait ce régime cachait non seulement ce caractère corrompu et répressif, mais surtout le dénuement de toute une population condamnée à survivre comme elle pouvait, c’est-à-dire dans des conditions dramatiques.

La pauvreté endémique du pays qui fut le terreau dont se nourrit la guerre civile dans les années quatre-vingt-dix n’a pas changé. Mais aujourd’hui, cette pauvreté et le désespoir qu’elle engendre risquent d’être encore aggravés par les haines qu’a pu laisser dans la population une décennie de souffrances dues à la guerre.

Quelle importance pour les dirigeants impérialistes, pourvu que les régimes qu’ils mettent en place réussissent à imposer juste assez de stabilité politique pour permettre aux trusts impérialistes de piller les richesses du pays ? Au moins, jusqu’au jour où les mêmes facteurs mettront de nouveau le feu aux poudres.5

 

Depuis la fin de la guerre civile

Le 8 septembre 2007, Ernest Bai Koroma succède à Kabbah. Il est élu président de la République en battant au second tour son adversaire, Solomon Berewa, vice-président et candidat du Parti du peuple de Sierra Leone (SLPP) avec 54,6 % des suffrages contre 45,4 %.6

En 2007, selon l'indicateur de développement humain (IDH) qui était 0,365, la Sierra Leone était parmi les 3 pays les moins développés au monde, avec le plus faible PIB/habitant du monde (330 dollars par an et par habitant). En 2011, son IDH est encore plus faible (il s'établit désormais à 0,336) mais le nombre de pays recensés par le Programme des Nations unies pour le développement ayant augmenté, le pays se classe désormais 180e sur 187. Mais cette remontée dans le classement ne traduit pas une amélioration de la situation sanitaire et sociale dans le pays, car si l'on tient compte des inégalités, la Sierra Leone continue à occuper en 2011 la troisième place parmi les pays dont l'IDH (ajusté aux inégalités) est le plus faible au monde.7

 

Bai Koroma est réélu pour un deuxième mandat le 17 novembre 2012 en remportant 58,7 % des suffrages contre 37,4 % pour son adversaire, le général Julius Maada Bio, brièvement chef de l'État en 1996.8

 

 

Sierra Leone : dans les tentacules de Bolloré

En 2011, des manifestations avaient eu lieu pour dénoncer un accord signé par le gouvernement du Sierra Leone permettant à la société Socfin, domiciliée au Luxembourg, et dont le groupe français Bolloré est actionnaire à hauteur de 38,7 %, de faire main basse sur des terres agricoles. En 2013, cinq militants d'une association furent traduits en justice, accusés d'avoir détruit des plants de palmiers à huile, ce qu'ils niaient. En revanche, la justice ne s'interrogea pas sur les cultures vivrières qui disparaissaient.

Or la Socfin a obtenu l'usage, pendant cinquante ans, de 6 500 hectares avec en option 5 000 hectares supplémentaires, lui permettant de remplacer notamment des cultures de manioc par des plantations de palmiers à huile. Les loyers payés par Socfin sont dérisoires, équivalant à 9,3 euros par hectare et par an, encaissés pour moitié par les autorités locales. Ils ne pourront être révisés qu'au bout de sept ans, alors que le pays connaît une inflation galopante. De quoi réaliser de plantureux bénéfices, exonérés de l'impôt sur les sociétés.

Les liens de Bolloré sont étroits avec la Socfin, nom abrégé de la Société financière des caoutchoucs. Vincent Bolloré y siège au conseil d'administration. Par ailleurs, il gère directement le port de Freetown, la capitale du Sierra Leone, point de passage pour l'exportation des métaux, et il a supplanté les transporteurs locaux pour l'acheminement du minerai de fer de la mine de Marampa, exploitée par une société anglaise. Et le Sierra Leone n'est qu'un tout petit morceau de l'empire que Bolloré s'est taillé en Afrique.9

 

 

Les paysans de Sierra Leone refusent de laisser accaparer leurs terres pour une plantation de palmiers à huile

Des membres des communautés affectées par ces plantations en monoculture et des organisations de la société civile venues d’Afrique, d’Europe, d’Amérique du Nord et du Sud et d’Asie, se sont rencontrés à Calabar, au Nigeria, du 2 au 5 novembre 2013. Ils ont partagé leurs témoignages et leur analyse des conséquences de la rapidité et de la brutalité de cette expansion des plantations d’huile de palme en monoculture imposée par les multinationales dans divers pays et communautés.

Le 9 décembre 2013, une réunion a été organisée dans le district de in Pujehun à propos de la location de 6 500 hectares de terres agricoles de qualité dans cette partie sud-ouest de la Sierra Leone. Selon des sources locales, les anciens avaient organisé cette réunion pour permettre aux gens d’exprimer à nouveau au chef suprême leurs griefs concernant le bail foncier accordé à la Socfin Agricultural Company.

Dans le village de Libby Malen, des centaines de personnes attendaient l’arrivée des autorités de la chefferie quand ils ont appris que neuf habitants du village avaient été battus, puis arrêtés par la police alors qu’ils se rendaient à la réunion. Plus de trois cents personnes ont immédiatement quitté la réunion pour aller au commissariat de Sahn, la ville voisine, et demander la relaxe des villageois.

En chemin, ils ont rencontré une troupe de policiers qui ont lancé des gaz lacrymogènes et tiré à balles réelles sur la foule, faisant de nombreux blessés graves. Une personne a reçu une balle dans le cou et au moins 57 villageois ont été arrêtés et passés à tabac. Peu après, un groupe de voyous qui, selon des témoins, feraient partie de la police et/ou de l’entreprise, ont attaqué les villageois à Libby Malen même, forçant les gens à s’enfuir dans la jungle.

Depuis un certain temps déjà, ceux qui travaillent avec les communautés locales tentent d’avertir le gouvernement et l’entreprise de la dégradation de la situation dans le district de Pujehun.

« Actuellement, les gens de cette communauté souffrent de la faim, » a expliqué Frank Williams, responsable réseaux de l’ONG Green Scenery au cours d’un entretien avec GRAIN en novembre. Williams est également le coordonnateur d’ALLAT – “Action for Large scale Land Acquisition Transparency’’ [Action pour la Transparence dans l’Acquisition de Terres à Grande Échelle]– une coalition d’organisations de la société civile formée en 2012 pour surveiller les questions foncières.

« Ils n’ont pas assez de terres à cultiver. Leurs terres leur ont été enlevées. Les emplois que la société leur a proposés… leur rapportent moins de 50 dollars par mois. […] Tout ça, ce sont des problèmes pour la communauté. Et on imagine très bien les conflits à venir si le gouvernement ne réagit pas immédiatement pour trouver des solutions. »

Le district de Pujehun, situé dans le sud-est de la Sierra Leone, a été sévèrement affecté par la guerre civile qui s’est terminée en 2002. Aujourd’hui, ce district fait partie des régions où le gouvernement tente d’attirer les investissements étrangers pour installer des plantations industrielles de palmiers à huile. Mais les communautés locales refusent que de vastes parcelles de terres soient cédées aux sociétés étrangères.

Deux sociétés – Socfin, la filiale d’une entreprise luxembourgeoise contrôlée par le groupe Bolloré et le groupe indien Siva Group/Biopalm Star Oil – ont à elles deux acquis les droits d’exploiter une zone de près de 90 000 hectares s’étalant sur cinq des chefferies du district.

Les villageois concernés déplorent qu’il n’y ait eu aucune consultation pour permettre aux membres de la communauté de comprendre la transaction avant qu’on ne leur demande de signer les document et beaucoup refusent de céder leurs terres.

L’incident de décembre fait suite à une série de réactions hostiles de plus en plus violentes de la part des autorités, face à la résistance des communautés qui perdent leurs terres.

En décembre 2012, 101 membres de familles du district propriétaires de leurs terres avaient écrit à la Commission des Droits humains de Sierra Leone pour se plaindre de l’absence de consultation, de la destruction de leurs récoltes et de leurs terres et d’un constant harcèlement de la part du chef suprême du district, de la police et du personnel de Socfin. L’ONG locale Green Scenery a mené une mission d’investigation sur les transactions foncières réalisées dans le district et a publié un rapport.

La réponse de la filiale locale de Socfin a été de déposer plainte pour diffamation contre l’ONG.

Puis, en octobre 2013, indique Williams, la société a accusé plusieurs membres de la communauté d’avoir détruit des palmiers lui appartenant.

« Six personnes ont été arrêtées, » dit Williams. « Les plaintes déposées contre elles : un, incitation à la violence, deux complot, et trois, destruction de biens appartenant à la société. Telles sont les charges portées contre les six personnes arrêtées par Socfin. »

Elles ont ainsi été incarcérées pendant plusieurs semaines avant d’être libérées sous caution fin novembre. L’une d’entre elles faisaient partie des villageois arrêtés devant le commissariat de Sahn le 9 décembre.

Williams rappelle que les membres de la communauté sont fermement résolus à mettre fin aux manœuvres de la société, malgré la violence et l’intimidation dont ils sont victimes. Il fait part de l’histoire de Safiya Vandi, qui a refusé d’accepter que sa terre, vendue sans son consentement, ne soit détruite pour laisser la place à une grande plantation de palmiers à huile.

« Avec courage et détermination, cette femme s’est placée devant le bulldozer pour les empêcher de défricher sa terre, » raconte Williams. « Et son intervention a arrêté le travail ce jour-là. Des cas comme ça risquent de se reproduire fréquemment, parce que les membres de la communauté n’arrivent pas à faire entendre leurs griefs. »10

 

 

Une catastrophe aggravée par la pauvreté

La capitale de la Sierra Leone a été, dans la nuit du 14 août 2017, victime de pluies torrentielles, qui ont entraîné inondations et glissements de terrain.

Au moins 500 personnes sont décédées, mais à cela s’ajoutent des centaines de disparus. Des milliers de personnes d’un quartier pauvre de la capitale, Freetown, se retrouvent sans abri, démunies de tout.

Face à cette situation, les autorités de ce pays, qui est l’un des plus pauvres du monde, manquent de moyens. Les corps ont été inhumés sans avoir pu être identifiés. Rassemblés dans des écoles ou des mosquées, les survivants avaient besoin d’eau, de nourriture, de médicaments, de vêtements, mais l’aide fut insuffisante. De jeunes adolescents se sont vu refuser de la nourriture parce qu’ils ne pouvaient prouver qu’ils avaient perdu leur logement dans la catastrophe. Près d’une dizaine de jours après la catastrophe, tous les corps n’ont pas été trouvés : il aurait fallu pour cela des excavatrices, des hélicoptères, que les autorités n’avaient pas. Les risques d’épidémie de choléra et de malaria étaient bien présents.

Des inondations se produisent régulièrement à Freetown, dévastant les quartiers les plus pauvres et les bidonvilles, car les infrastructures n’existent pas pour évacuer les eaux, les habitations précaires n’offrent aucune sécurité à la population.

Le gouvernement de la Sierra Leone ayant demandé de l’aide aux autres pays, le Royaume-Uni, dont la Sierra Leone est une ancienne colonie, a annoncé qu’il débloquait une aide de 5 millions de livres. La Chine a promis un million de dollars. Quant à l’Union européenne, elle n’a parlé que d’une aide de 300 000 euros, moins que le Togo, qui a promis 500 000 euros ! Par ailleurs, le responsable d’une ONG présente sur place dénonçait : « Les nombreux engagements financiers internationaux pris envers le pays au moment de l’épidémie d’Ebola (en 2014) n’ont pas tous été tenus. »

Alors, que ce soit dans l’urgence ou sur le long terme, ce pays ne reçoit pour ainsi dire aucune aide. Par contre, de grandes sociétés en pillent les richesses : la population pauvre des campagnes dénonce l’appropriation des terres par des sociétés internationales comme Socfin, très présent dans le pays.

Appropriation des richesses agricoles ou minières, exploitation de la population qui ne touche que des salaires de misère, c’est dans ce cadre que les catastrophes naturelles ont des conséquences dramatiques pour les populations de ces pays.11

 

 

Sources

(1) https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_Sierra_Leone
(2) http://www.lutte-ouvriere-mensuel.org/documents/archives/la-revue-lutte-de-classe/serie-actuelle-1993/sierra-leone-les-diamants-enjeu-d
(3) http://www.lutte-ouvriere-mensuel.org/documents/archives/la-revue-lutte-de-classe/serie-actuelle-1993/sierra-leone-le-bilan-d-une
(4) http://www.lutte-ouvriere-mensuel.org/documents/archives/la-revue-lutte-de-classe/serie-actuelle-1993/sierra-leone-les-diamants-enjeu-d
(5) http://www.lutte-ouvriere.org/documents/archives/la-revue-lutte-de-classe/serie-actuelle-1993/sierra-leone-le-bilan-d-une
(6) https://fr.wikipedia.org/wiki/Ernest_Bai_Koroma
(7) https://fr.wikipedia.org/wiki/Sierra_Leone
(8) https://fr.wikipedia.org/wiki/Ernest_Bai_Koroma
(9) ?
(10) Organisation Grain http://www.mondialisation.ca/les-paysans-de-sierra-leone-refusent-de-laisser-accaparer-leurs-terres-pour-une-plantation-de-palmiers-a-huile/5364745
(11) Gaëlle Regent https://journal.lutte-ouvriere.org/2017/08/30/sierra-leone-une-catastrophe-aggravee-par-la-pauvrete_96088.html