Le Tadjikistan

 

 

Antiquité

Dans l'Antiquité, le territoire de l'actuel Tadjikistan appartient aux principaux empires qui se succédèrent entre le Moyen-Orient, l'Asie centrale et l'Inde, tels la Perse Achéménides, l'Empire d'Alexandre le Grand, ses successeurs séleucides, puis le royaume gréco-bactrien. Comme dans toute l'Asie centrale, les influences culturelles et religieuses furent multiples, entre le zoroastrisme persan, les cultes hellénistiques, ou le bouddhisme venu d'Inde ou de Chine. Au premier siècle de notre ère, il fut absorbé dans l'Empire kouchan ; au Ve siècle, il était sous la domination des Hephtalites ou Shvetahûna. Ces nomades furent eux-mêmes remplacés par des groupes turcs, avant que les invasions arabes, au VIIIe siècle, n'entraînent la conversion de la majeure partie de la population à l'Islam.

 

Les Samanides

L'Empire des Samanides fut le premier État persan indépendant à se reformer après la conquête de la région par les Arabes. Fondé par Ismoïl Samani, d'où son nom, il avait pour capitale la ville de Boukhara, dans l'actuel Ouzbékistan, et s'étendait du Khorasan, en Iran, aux limites orientales du Tadjikistan et de l'Afghanistan. Les Tadjiks considèrent cet empire comme leur première structure étatique, d'où ils tirent le nom de leur monnaie, le somoni. La culture tadjike, ou persane d'Asie centrale, se développa dans les florissantes cités de Boukhara et Samarcande : en témoignent les poètes Rudaki et Ferdowsî ou le philosophe et savant Avicenne.

L'État samanide succomba en 999 aux assauts des tribus turques d'Asie centrale, notamment les Qarakhanides. Les siècles suivants, la région subit les conquêtes de Gengis Khan et Tamerlan, puis se stabilisa sous la domination du Khanat de Boukhara, gouverné par des dynasties turco-ouzbèkes. Les montagnes tadjiks, notamment le Pamir, étaient fréquemment traversées par les caravanes de la Route de la Soie, dont l'expédition de Marco Polo. La langue et la culture persanes continuaient de dominer les cités d'Asie centrale malgré la domination politique turque, contribuant à préserver l'identité ethnique tadjike, comme on appelait désormais les Persans de cette région.

 

Colonisation russe

La deuxième moitié du XIXe siècle vit le Tadjikistan, avec le reste de l'Asie Centrale, entrer dans le cadre du Grand Jeu, la rivalité coloniale entre les Empires russe et britannique. Dès 1868, les troupes russes occupaient Khodjent, la principale ville du nord, porte de la fertile vallée de Ferghana. La chute des khanats de Kokand et Boukhara entre 1873 et 1876 entraîna la colonisation d'un vaste territoire, placé sous protectorat. La conquête fut parachevée en 1895 par l'annexion des principautés du Pamir. La vallée du Pyandj, à la limite du Tadjikistan et de l'Afghanistan, marqua dès lors la limite sud de l'influence russe.

Les Révolutions russes de 1917 entraînèrent en Asie centrale comme dans le reste de la Russie une féroce guerre civile. La résistance aux Bolcheviks fut surtout le fait des populations turcophones, derrière le dernier émir de Boukhara, libéré du protectorat tsariste. La résistance Basmatchi s'enracina dans les hautes vallées montagneuses et les collines du Sud, avec la contribution d'Enver Pacha qui périt sur place. Elle persista tout au long des années 1920 et sans doute au-delà dans certaines zones reculées, malgré une violente répression soviétique. Quelques centaines de milliers de Tadjiks se réfugièrent aussi en Afghanistan.

 

Tadjikistan soviétique

La République du Tadjikistan fut créée en 1924 avec le statut de république socialiste soviétique autonome incluse dans l'Ouzbékistan, elle devient République socialiste soviétique à part entière en 1929. Sa création s'inscrivait dans le découpage de l'Asie centrale par Staline en républiques ethniques aux frontières tortueuses, alors même que les différentes nationalités, notamment Ouzbeks et Tadjiks, vivaient côte à côte depuis des siècles dans les villes ou la vallée de Ferghana. Les grandes villes de Samarkand et Boukhara, qui étaient peuplées majoritairement de Tadjiks, furent ainsi données à l'Ouzbékistan, et nombre de leurs habitants persanophones furent contraints de souscrire à leur nouvelle "identité" ouzbèke ou d'émigrer dans la nouvelle république tadjike.

Comme les autres républiques d'Asie centrale, le Tadjikistan soviétique fut gouverné par l'appareil local du Parti Communiste, à la tête duquel alternaient Tadjiks et Russes. L'immigration russe vers la République fut conséquente : entre 1926 et 1959, la proportion de Russes dans la population de la république passa de moins de 1 % à 13 %. Le Tadjikistan demeura la république la plus pauvre de l'Union, celle où le taux d'épargne et la proportion d'étudiants au sein d'une classe d'âge étaient les plus faibles, témoignant d'un retard de développement pourtant nié par les autorités soviétiques.

 

Tadjikistan indépendant

La Perestroïka, engagée en URSS à partir de 1985, n'entraîna de bouleversements majeurs au Tadjikistan qu'à partir de 1990. À la suite des émeutes à Douchanbé, la république proclama sa souveraineté le 24 août 1990. Le 9 septembre 1991, le président du Parlement, Qadriddin Aslonov, qui avait interdit les activités du Parti communiste, fit proclamer l'indépendance, mais fut renversé dès le 23 septembre par le conservateur Rakhmon Nabiyev, ancien secrétaire général du Parti. Les troubles qui s'ensuivirent s'intensifièrent après l'élection de Nabiyev à la présidence le 24 novembre, jusqu'au développement d'une guerre civile entre partisans du gouvernement post-communiste, soutenus par Moscou, et une opposition variée, allant de démocrates libéraux à des groupes islamistes, en passant par une série d'organisations représentant certains groupes ethniques ou régionaux. Les troupes russes, notamment des gardes-frontières, participèrent aux affrontements, tandis que les civils russes ont fui en masse la guerre et la misère grandissante.

 

Dès septembre 1992, Nabiyev, capturé par l'opposition, fut contraint de se retirer du jeu politique, et le Président du Parlement, Emomalii Rahmonov, le remplaça à la tête du pays et de la faction gouvernementale. Rahmonov lui apportait le soutien des milices de sa région natale de Kulob, dans le sud. La guerre se prolongea jusqu'en 1997, sans qu'aucun camp ne parvienne à l'emporter, et fit près de 50 000 morts. La paix, conclue sous l'égide des Nations unies et de la Russie, consacra le pouvoir de Rahmonov, qui fut réélu président en 1999, puis en 2006, avec 99 %, puis 79 % des suffrages.

 

La persistance de la guerre en Afghanistan pèse sur le Tadjikistan. Ahmed Chah Massoud, l'un des chefs de la lutte contre les talibans, assassiné en 2001, appartenait à l'ethnie tadjike, qui constitue plus de 30 % de la population afghane. Avec l'Iran et la Russie, le Tadjikistan était, avant le 11 septembre 2001, l'un des principaux soutiens de l'Alliance du Nord.

Lors de l'invasion de l'Afghanistan en 2001, le gouvernement tadjike autorisa l'emploi de bases aériennes à des fins de réapprovisionnement de fioul sur son sol aux forces de l'OTAN ; aucune présence militaire américaine n'y a cependant été installée (celle-ci était située dans la base aérienne de Manas, au Kirghizistan, et à Karshi-Khanabad (en), en Ouzbékistan). En revanche, la France avait en 2005 près de 200 soldats à Douchanbé. De plus, le gouvernement tadjik autorise les États-Unis et l'OTAN à utiliser des routes tadjikes pour approvisionner, en matériel non militaire, la Coalition en Afghanistan.

Par ailleurs, depuis 2004, une base indienne, la Farkhor Air Base (en), est présente sur le territoire national. La Russie possède aussi, depuis 2005, sa 201e base militaire près de Douchanbé, mais sa présence militaire (5 000 hommes de l'infanterie motorisée), qui visait à aider les garde-frontières tadjikes, faisait l'objet de négociations en 2009.

Le 21 mars 2009, le traité de Semipalatinsk instituant une zone exempte d'armes nucléaires en Asie centrale est entré en vigueur.

Le pays reste d'autre part exposé à la violence de groupes islamistes et au trafic de drogue depuis l'Afghanistan : sa pauvreté l'oblige dans ces domaines à collaborer avec la communauté internationale, l'assistance russe ne suffisant désormais plus.

 

Réélection de Rakhmonov en 2013

Emomali Rakhmonov, grâce à une modification de la Constitution approuvée en 2003 lui permettant de rester à son poste jusqu'en 2020, est réélu en 2013 avec 83,1 % des suffrages.

 

Droits de l'homme

Le respect des droits de l'homme par le pouvoir reste sujet à caution. La liberté de la presse et le droit à un procès équitable sont mal assurés. La violence des forces de sécurité est difficilement contrôlable, et des cas de torture ont été dénoncés. L'état des prisons semble déplorable. Enfin, les droits sociaux et économiques des Tadjiks ont été encore réduits par la paupérisation de la société depuis l'indépendance : travail des enfants, travail forcé, discriminations et violences envers les femmes sont monnaie courante. Enfin, les minorités religieuses (juifs, protestants), semblent avoir été victimes de mesures discriminatoires et de destruction de leurs lieux de culte.

 

La situation empire durant le régime de Emomali Rahmon : si selon Steve Swerdlow (chercheur spécialisé en politique de l'Asie centrale) le Tadjikistan a toujours occupé une place dans la catégorie « optimisme mesuré » (« Tajikistan always occupied a place in the slightly more hopeful category. »), de nombreux observateurs estiment que le pays a basculé en 2015 dans une brutalité sans précédents - tortures, pressions sur les journalistes, arrestations arbitraires...

Le 13 janvier 2016 le parlement a adopté une loi obligeant les parents à donner à leurs enfants un prénom tadjik tiré d'une liste de 10 000 prénoms. L'objectif affiché est d'éviter des prénoms tels que noms d'objets ou d'animaux, ainsi que les prénoms « étrangers à la culture et aux traditions » tadjikes. Cette loi s'inscrit dans un mouvement de dé-russification des noms entamée en 2007 par le Président tadjik Emomali Rakhmon, anciennement Rakhmonov.

 

Politique étrangère

La politique étrangère du Tadjikistan est dominée par les problèmes de l'Afghanistan voisin, les risques de contagion qu'ils impliquent, du trafic de drogue à l'islamisme armé, et la nécessité conséquente de coopération internationale. Le Tadjikistan participe à de nombreuses organisations internationales, et reçoit un volume important d'aide. Il est resté proche de la Russie au sein de la CEI, mais développe les relations avec d'autres puissances régionales, telles la Chine, avec qui un conflit de délimitation des frontières fut résolu par un accord en 2002, et l'Iran, dont le Tadjikistan soutient la candidature à l'Organisation de coopération de Shanghai. Le Tadjikistan est aussi membre de l'OSCE, qui soutient divers programmes humanitaires et de réformes démocratiques dans le pays.

 

Économie

Lors de l'indépendance, le Tadjikistan était déjà le pays le plus pauvre de l'ex-URSS, et suite à la guerre civile de 1992-1997, il était même l'un des pays les plus pauvres au monde. Les sources de revenu, liées à l'exportation du coton et de l'aluminium, sont précaires et rendent l'économie vulnérable aux cours du marché. En 2000 encore, l'aide internationale restait essentielle, notamment pour soutenir les programmes de « réhabilitation », dont le but est de réintégrer d'anciens combattants de la guerre civile dans la société. Elle a également été nécessaire pour limiter la chute de la production de nourriture, conséquence d'une seconde année de sécheresse. En août 2001, la Croix-Rouge a annoncé le début d'une famine au Tadjikistan, et appelé à une aide internationale, risque à nouveau évoqué au printemps 2008.

L'économie du Tadjikistan s'est pourtant considérablement redressée depuis la guerre civile. Selon la Banque mondiale, le PIB a augmenté en moyenne de 9,6 % par an entre 2000 et 2004, ce qui a permis au Tadjikistan d'améliorer sa position économique par rapport à d'autres pays d'Asie centrale comme le Turkménistan et l'Ouzbékistan, pays riches en hydrocarbures dont les économies connaissent une moindre croissance. Il reste pourtant un pays très pauvre. En 2008, suivant le FMI, la valeur du PIB par habitant en parité de pouvoir d'achat serait d'environ 2 000 $, ce qui en fait le 145e État au monde suivant ce classement. 20 % de la population vivrait sous le seuil de pauvreté absolue d'1,25 $ par jour. Enfin, près de 40 % du PNB proviendrait, en 2009, d'envois de fonds d'émigrés tadjiks.

 

 

Source

https://fr.wikipedia.org/wiki/Tadjikistan