La Turquie

 

 

Antiquité

La péninsule anatolienne (ou Asie Mineure), qui représente aujourd'hui 97 % de la Turquie moderne, compte parmi les régions du globe qui ont continuellement été habitées tout au long de l'histoire de l'humanité. Les premières implantations comme celles de Çatalhöyük, Çayönü, Hacılar, Göbekli Tepe et Mersin comptent parmi les plus anciennes au monde. Le toponyme turc Göbekli Tepe se traduit en français par « la colline au nombril », en référence à sa forme. Sur ce site repose le plus ancien temple de pierre jamais découvert (datation estimée entre 11 500 et 10 000 avant notre ère). L'agglomération de Çatal Höyük située dans la plaine de Konya, en Anatolie centrale, sur les bords de la rivière Çarşamba, est l'un des plus grands sites du Néolithique du Proche-Orient. Il fut fondé vers 7000 avant J.-C. et devint un centre important seulement entre -6500 et -5700.

 

Le premier empire à émerger en Anatolie a sans nul doute été l'Empire hittite, du XVIIIe au XIIIe siècle av. J.-C. Par la suite, les Phrygiens, un autre peuple indo-européen, ont gouverné ces terres jusqu'à leur anéantissement par les Cimmériens au VIIe siècle av. J.-C. D'autres peuples indo-européens se sont succédé en Anatolie, dont les Lydiens et les Lyciens.

Vers -1200, la côte ouest de l'Anatolie subit l'invasion des Grecs éoliens et ioniens. Puis l'Empire perse achéménide domine toute l'Asie Mineure aux VIe et Ve siècles av. J.-C. En 334 av. J.-C., Alexandre le Grand, débutant ses grandes conquêtes, envahit l'Anatolie, qui se divise après sa mort en royaumes grecs comme ceux de Bithynie, de Cappadoce, de Pergame ou du Pont.

Ces derniers sont submergés par la conquête romaine. En 324 apr. J.-C., l'empereur romain Constantin Ier choisit Byzance comme nouvelle capitale de l'Empire. Elle est dénommée Constantinople, la nouvelle Rome. Conquise par le sultan Mehmed II en 1453, elle devient Istanbul.

 

L'Empire seldjoukide et les premiers Turcs d'Anatolie

Les Turcs, à l'origine peuple nomade originaire d'Asie, des plaines de Mongolie à celles de l'Asie centrale, ont connu un vaste et continu mouvement d'émigration vers l'ouest du continent. Organisés en tribus et en fédérations de tribus non exclusivement turques, ils ont constitué au cours du temps des royaumes (comme celui des Göktürk ou Turcs Célestes) plus ou moins vastes et plus ou moins durables. La première fois que l'histoire retient le nom des Turcs au Moyen-Orient, c'est en tant que mercenaires des califes abbassides, qu'ils dirigent de fait dès le Xe siècle. Les Seldjoukides, des Turcs Oghouz, fondent un empire qui s'étend de l'Anatolie jusqu'aux plaines d'Asie centrale. Les invasions mongoles de Gengis Khan achèvent l'Empire seldjoukide, déjà mis à mal par ses luttes internes et par les Croisades.

 

L'Empire ottoman (1299-1923)

En 1299, le sultan oghouz Osman Ier conquiert la ville byzantine de Mocadène. Cet événement est considéré comme le début de l'Empire ottoman. Dès lors, l'Empire ne va cesser d'accroître son territoire et il atteint son apogée au XVIe siècle sous le règne de Soliman le Magnifique.1

L'Empire ottoman conquiert Gallipoli, son premier territoire européen, en 1347, puis s'étend à travers les Balkans. En 1389, la victoire décisive à la bataille du champ des Merles en Serbie, dans l'actuel Kosovo, marque la fin de l'existence des royaumes serbes. La Serbie est définitivement annexée par les Ottomans après la chute de Smederevo, en 1459. En 1453, commandées par le sultan Mehmet II, les armées ottomanes prennent Constantinople et mettent fin à l'Empire byzantin, établissant ainsi la domination de l'empire sur la partie à majorité chrétienne de la Méditerranée orientale. Plusieurs croisades européennes sont écrasées à Nicopolis et Varna ou encore Alger.

 

Un nouvel Empire

Les Ottomans appellent Roumis les populations chrétiennes, en référence à leur origine issue de l'Empire romain d'orient. L'Empire établit ensuite progressivement sa souveraineté sur toute la partie à majorité musulmane du monde méditerranéen. Les sultans ottomans voient leur titulature s'enrichir au XVe siècle du vieux titre turc de khan, de celui, iranien, de padichah, puis de celui de calife au XVIe siècle, c'est-à-dire successeur de Mahomet et chef de l’oumma, la communauté musulmane. Le contrôle qu'ils exercent sur leurs terres est variable ; les provinces lointaines de Tunis et d'Alger ou le khanat de Crimée jouissent d'une large autonomie. Certains États à majorité chrétienne, comme les principautés roumaines de Valachie, Moldavie et, pour un temps, la Transylvanie, payent au sultan un tribut aux XVe siècle-XVIe siècle, mais ne deviennent pas pour autant provinces ottomanes.

L’Empire ottoman est organisé selon le système des millets. De la Bosnie au fin fond de l’Anatolie en passant par les Pomaques, de nombreux chrétiens pauvres (Slaves, Grecs, Arméniens, etc.) ainsi que des Juifs (dönme) et des Roms (çingene) se convertissent à l’islam pour ne plus payer le haraç (double imposition sur les non-musulmans) et ne plus subir la παιδομάζωμα / pédomazoma, ou devchirmé (enlèvement des enfants) pour les Yeni-çeri (janissaires : « nouvelles troupes », instituées au XIVe siècle par le sultan Orhan). Devenus avdétis (convertis), ils n’en étaient, pour la plupart, que plus fidèles sujets de la Sublime Porte, afin de bénéficier de la confiance due aux mumīnīn (croyants). C’est pourquoi les Turcs actuels de Turquie sont, en majorité, de type caucasien, alors que les peuples turcs d’Asie centrale ont un phénotype asiatique. Et c’est pourquoi au XIXe siècle, la majorité des membres des millets Rum et Arménien était plutôt composée de propriétaires et de commerçants aisés que de pauvres manœuvres, car seuls les gens aisés pouvaient aisément payer le haraç.

Le nouvel empire assura sa cohésion en ouvrant largement l’ascenseur social ottoman : tout janissaire sorti du rang pouvait, si ses capacités le lui permettaient, espérer accéder aux plus hautes fonctions, telles que bey, drogman, capitan pacha, pacha ou vizir, et les exemples foisonnent. Même les aristocrates grecs restés chrétiens pouvaient espérer être nommés hospodars (voïvodes) des principautés chrétiennes tributaires.

 

L'Âge d'Or

Pragmatiques et non dogmatiques, les sultans ottomans n’ont pas fait table rase de la civilisation byzantine mais l’ont au contraire adaptée et développée, comme en témoignent la mosquée bleue qui sublime l’architecture de la basilique Sainte-Sophie ou les thermes, que nous appelons bains turcs. L’Empire a su hériter de l’éducation, des sciences, des techniques et des universités byzantines, devenues ottomanes et admirées dans toute l’Europe à la fin du Moyen Âge. Ces universités orientales se tenaient au courant des découvertes occidentales : l’amiral Piri Reis a ainsi pu faire une copie de la carte de l’Amérique de Christophe Colomb, et celle-ci ayant été perdue, la copie de Reis est à ce jour la plus ancienne carte du nouveau continent. De grandes forces vives, aussi bien intellectuelles que financières, vinrent renforcer la Sublime Porte. On peut citer les migrations et installations des juifs sépharades, fuyant l’Espagne répressive et l’Inquisition, puis celles des Morisques andalous.

En 1517, Sélim Ier conquiert l’Égypte et met fin au sultanat mamelouk. Le calife abbasside Al-Mutawakkil III est emmené à Istanbul comme otage, et aurait cédé son titre de Commandeur des croyants (Emir al-mumimin). Si Sélim procède au transfert de certaines reliques de Mahomet à Istanbul, la thèse selon laquelle il aurait voulu recueillir l’héritage du califat est cependant sujette à caution et apparaît beaucoup plus tardivement. Moins d’un siècle après avoir mis fin à l’Empire byzantin moribond, les Turcs ottomans prennent la succession de la dynastie arabe des Abbassides.

Au XVIe siècle, sous le règne de Soliman le Magnifique, les armées ottomanes parviennent jusqu’à Vienne en 1529 et 1532, dont elles font le siège en vain. Cette avancée marque la limite de l’expansion de l'Empire en Occident (comme Aden en fixera la limite au sud).

De 1533 à 1536, l’Empire ajoute l’est de l’Anatolie, l’Azerbaïdjan et le Yémen. Les corsaires turcs installés à Alger prennent Tunis aux Hafsides en son nom en 1534, puis la perdent face aux troupes de Charles Quint. Le pacha turc de Tripoli prend Kairouan en 1557 et Tunis est reconquise, définitivement cette fois, en 1569.

L’Empire crée une flotte militaire, tente de s’imposer en Méditerranée au détriment des cités italiennes et y parvient un moment. La défaite navale de Lépante en 1571, devant les flottes espagnole et vénitienne, met fin à sa suprématie. Réorganisée par Sokullu Mehmed pacha, la flotte ottomane restera certes ensuite une puissance importante, et les possessions vénitiennes (Chypre et des îles en mer Égée) rejoindront progressivement l'Empire mais une partie toujours plus importante du commerce méditerranéen était sous le contrôle de Venise, de Gênes, du Portugal et de l'Espagne.2

Au XVIe siècle, l'Empire trouve sa place dans le jeu diplomatique européen où il est un allié traditionnel de la France, dans une alliance de revers contre les Habsbourg dès le règne de François Ier. La défaite de l'Empire à la bataille navale de Lépante en 1571 porte un premier coup à la puissance ottomane.

 

Déclin de l'Empire

L'Empire décline à partir du XVIIIe siècle. La défaite à la bataille de Vienne de 1683 marque le début du déclin effectif et des premières pertes territoriales. Au XIXe siècle, l'Empire désagrégé tente de se reconstruire en se modernisant par de nombreuses réformes. Mais cette période de réformes, appelée Tanzimat, s'achèvera en 1876 sans empêcher la perte de la Grèce, de l'Égypte ou de l'Algérie. À la fin du siècle, ce sont les Balkans qui retrouvent leur liberté. Dans le même temps, les populations arméniennes se révoltant pour obtenir davantage de droits et de libertés deviennent un véritable problème au sein de l'Empire. Le sultan Abdülhamid II ordonne de les massacrer entre 1894 et 1896. Les massacres hamidiens feront 200 000 victimes arméniennes.

En 1912, l'Empire ottoman perd, à l'issue de la guerre italo-turque, la Tripolitaine et la Cyrénaïque (Libye) ainsi que Rhodes.3

En 1913, la défaite de la Seconde Guerre balkanique amène les Jeunes-Turcs (Parti Union et Progrès) au pouvoir. Leur volonté de relever l'empire les entraîne dans l'alliance avec l'Empire allemand. En 1914, ils déclarent la guerre à l'Entente, et entreprennent de grandes offensives vers l'Égypte et le Caucase. Ce sont des échecs : l'empire n'a pas les moyens de sa politique, il est ravagé par les épidémies et les famines. Des tensions internes apparaissent alors dans tout l'empire. La Grande révolte arabe a lieu entre 1916 et 1918. La rébellion est menée par Hussein ben Ali, chérif de La Mecque, afin de libérer la péninsule Arabique et de créer un État arabe unifié allant d’Alep à Aden. L'appel à la guerre sainte, lancé par le sultan comme calife de l'islam, a peu d'échos. L'existence même de l'Empire est menacée aussi bien de l'intérieur que de l'extérieur.

En 1915, le noyau du parti organise, sous le commandement du ministre de l'Intérieur Talaat Pacha, une politique de déportation et de massacre des Arméniens ottomans, politique appelée génocide arménien, faisant entre 800 000 et 1 500 000 morts selon la majorité des historiens, et entre 300 000 et 500 000 victimes selon l'État turc actuel. Celui-ci refuse le terme « génocide » et préfère parler de massacres, en les justifiant parfois par la menace que constituait pour la Turquie une population chrétienne arménienne vivant de part et d'autre de la frontière Russo-Turque. La culpabilité de Talaat, Enver Pacha et autres dirigeants Jeunes-Turcs, a bien été reconnue par la justice ottomane qui les a condamnés à mort par contumace en juillet 1919, mais ce verdict a été annulé ensuite par la réaction nationale turque. En fait, certains considèrent qu'il s'agit du premier génocide du XXe siècle : les deux tiers de la population arménienne de l'Empire ottoman furent exterminés. C'est également dans ce contexte troublé que, entre 1914 et 1920, a lieu le génocide assyrien causant la mort de 500 000 à 750 000 personnes ce qui représente environ 70 % de la population assyrienne de l'époque. Le génocide grec pontique fait lui entre 350 000 et 360 000 morts entre 1916 et 1923.4

 

Démembrement et résurgence (1918-1923)

À la fin de la Première Guerre mondiale, et après le génocide arménien, l'Empire ottoman, qui appartenait au camp des puissances centrales (Allemagne, Autriche-Hongrie, Bulgarie) est démantelé. La France et le Royaume-Uni se partagent les provinces du proche-orient (Syrie, Irak, Liban, Palestine, Jordanie, côtes de l'actuelle Arabie Saoudite, Yémen). La Thrace (sauf Istanbul) et les côtes égéennes sont attribuées à la Grèce, tandis qu'à l'est, une république arménienne est proclamée sous la conduite du parti Dachnak. Le reste de l'Empire (alors monarchie constitutionnelle) est lui-même divisé en « zones d'influence » italiennes, françaises et anglaises, et les Turcs craignent de se voir bientôt réduits à l'état de colonies.

Le mouvement nationaliste, mené par Mustafa Kemal, avait dès juin 1919, défini dans la déclaration d'Amasya les raisons pour lesquelles le gouvernement impérial ottoman, considéré comme illégitime, devait être remplacé pour que les intérêts nationaux des Turcs soient défendus. Il obtint un soutien important de la population et de l'armée. Lors du congrès de Sivas, un gouvernement provisoire fut élu. Définies par le traité de paix de Sèvres, signé le 10 août 1920 par le gouvernement impérial, les frontières de l'Empire Ottoman sont dénoncées par le nouveau gouvernement provisoire du mouvement nationaliste.

Le gouvernement provisoire conduit par Mustafa Kemal tenta de récupérer une partie des territoires cédés par le traité de Sèvres.

À l'est, il signa un autre traité avec le gouvernement bolchevik russe : le Traité de Kars (1921). Par ce traité, la Russie soviétique rend à la Turquie un territoire pris à l'Empire ottoman en 1878, peuplé de tribus arméniennes et kurdes, et les deux partis turc national et russe bolchevique s'entraident pour mettre fin aux velléités d'indépendance des peuples du Caucase, et pour chasser les Anglais des réserves de pétrole de Bakou.

À l'ouest, le mouvement nationaliste engagea la guerre gréco-turque pour récupérer les côtes ouest de l'Anatolie. Au sud, en Cilicie (Tarsus) il empêcha la constitution d'une région autonome arménienne sous protectorat français, prévue par le traité de Sèvres.

Conformément aux demandes des alliés, les membres du gouvernement impérial ottoman impliqués dans la déportation des arméniens d'Anatolie vers le Liban et le désert de Syrie et dans le génocide arménien avaient été traduits en justice et condamnés, mais le gouvernement provisoire n'accepte pas d'être tenu pour responsable d'un crime commis sous le régime précédent. C'est le début d'une controverse historique et politique qui dure encore aujourd'hui.

Le 24 juillet 1923, le traité de Lausanne, signé entre le gouvernement provisoire de Mustafa Kemal et le Royaume Uni, la France, l'Italie, le Japon, la Grèce, et la Yougoslavie, redéfinit les frontières de la Turquie et annule le traité de Sèvres. Ce traité renonce à créer un Kurdistan turc, qui était prévu par le traité de Sèvres. De plus, les restrictions imposées par le traité de Sèvres, tel que le contrôle par les armées alliées, sont levées. Bien que Mustafa Kemal ait proclamé la laïcité du futur état turc, le traité de Lausanne prévoit une « purification ethnique » pour « éviter de futurs conflits » : environ trois millions de personnes, les habitants de Turquie de religion chrétienne orthodoxe doivent rejoindre la Grèce, tandis qu'un demi-million d'habitants de la Grèce de religion musulmane doivent rejoindre la Turquie sans considération ethnique (la plupart étaient des Pomaks de langue bulgare). Sur les trois millions de « Roumis » (nom turc des orthodoxes), la moitié rejoignit en fait non la Grèce, incapable d'en accueillir tant, mais les États-Unis.

Finalement, le sultanat est aboli le 1er novembre 1922.

Enfin, clef de voûte du processus initié par Mustafa Kemal, 29 octobre 1923, la République de Turquie est proclamée : il est aussitôt élu président.

 

La révolution kémaliste (1923-1938)

Mustafa Kemal avait appartenu au mouvement des Jeunes-Turcs. Il était partisan d'un nationalisme restrictif (modèle de la Petite Turquie) et anticlérical. Son modèle de référence restait ancré dans la France des Lumières. Il avait l'ambition de modeler une civilisation turque moderne, souhaitant pour cela la « Révolution à toute vapeur ». Ses méthodes restaient fondées sur le volontarisme et un populisme : « malgré le peuple, pour le peuple » ; une société unie/unique, sans lutte des classes, mais turque avant tout (Jacobin, il se méfiait des différences régionales depuis le Traité de Sèvres).

L'armée reste un pilier de la nation ; l'école laïque, gratuite et obligatoire, le modèle d'école républicaine de Jules Ferry est instauré, une forte action culturelle est entreprise avec les « maisons du peuple » (la Turquie restera un « État papa » jusque dans les années 1980). Une nouvelle capitale, Ankara, est choisie, au détriment d'Istanbul, la capitale historique deux fois impériale (Empire romain d'Orient et ottoman). La langue est remaniée, une politique nationale est alors appliquée par Mustafa Kemal, qui remplace par exemple l'alphabet ottoman d'origine arabe par l'alphabet latin en 1928. L'histoire turque est réécrite afin de donner des racines à cette nation, à l'instar des États occidentaux au XIXe siècle. Le problème est pour eux de localiser la mère patrie, puisque l'on trouve des turcs de la Grèce à l'Afghanistan. Ils y sont aidés par de nombreux conseillers étrangers.

La période de 1923 à 1945 se caractérise par l'imposition d'un système de parti unique, le Parti populaire (rebaptisé en 1924 Parti républicain du peuple), avec seulement deux brèves tentatives avortées de créer des partis d'opposition en 1925 (Parti républicain progressiste) et en 1930 (Parti républicain libéral). Les députés étaient élus au second degré, et les « grands électeurs » étaient tous membres du parti unique.

En politique étrangère, Atatürk tient fermement au principe de neutralité. À part un contentieux difficilement réglé avec la Grèce en 1933, et l'affaire du Sandjak d'Alexandrette, donné en 1938 à la Turquie par le Mandat français en Syrie, la Turquie se garde d'intervenir dans les conflits régionaux.

Dès la Révolution de 1908, les femmes émergent sur la scène politique. En 1919, à la suite de grandes manifestations, des mesures sont prises visant à faire évoluer le statut de la femme : égalité avec les hommes reconnue dans le code civil, mariage civil obligatoire, interdiction de la polygamie, de la répudiation, du port du voile à l'école, scolarisation des filles, embauche de femmes dans l'administration... En 1930, elles votent et sont éligibles aux élections locales et en 1934 aux élections nationales.

La Turquie kémaliste se veut résolument laïque. Le califat est abandonné le 3 mars 1924. C'est alors largement perçu comme un sacrilège par le monde-arabo musulman. En 1928, l'islam cesse d'être la religion d'État, puis, en 1937, la laïcité est inscrite dans la Constitution. Le Calendrier grégorien est adopté, et le dimanche devient le jour de repos hebdomadaire. Poursuivant la laïcisation du droit entamée dès 1839 par les Tanzimat (réformes) de l'empire ottoman, le régime kémaliste adopte, en 1926, un code civil inspiré du code suisse, un code pénal inspiré du code italien, et un code commercial inspiré du code allemand. Mais c'est plus qu'une laïcité, car elle est dynamique et autoritaire. L'anticléricalisme est prononcé, mais le spiritualisme musulman n'est pas pour autant abandonné. La laïcité turque et kémaliste se distingue de la laïcité française et jacobine par le contrôle exercé par l'État sur les religions, et surtout la tendance majoritaire (sunnite) de l'islam, via la direction des Affaires religieuses, créée en 1924. Ce mouvement laïc sera surtout efficace dans les grandes villes de l'ouest du pays.

En 1925, 1930 et 1937, des révoltes kurdes sont sévèrement réprimées. Le 8 juillet 1937, la Turquie, l’Irak, l’Iran et l’Afghanistan signent le traité de Sa'dabad qui prévoit entre autres une coordination de la lutte contre la « subversion » kurde.

 

Les minorités

Le souhait du gouvernement kémaliste était d'avoir une Turquie homogène ethniquement et religieusement, car il voyait l'addition de différentes nationalités en Turquie comme une faiblesse, dont se serviraient les Britanniques pour diviser et détruire la Turquie. Dans les régions et les grandes villes côtières, les Turcs étaient en minorité, que ce soit à Istanbul, en Thrace ou dans les provinces orientales. La Turquie possédait de nombreuses minorités héritées de l'Empire romain d'Orient dit byzantin : des Arméniens, des Juifs, des Albanais, ainsi que des Grecs ottomans dits en turc roumis (à la différence des Grecs de Grèce dits yunan). Bien que d'origine indo-européenne, les Kurdes ne sont pas considérés comme une minorité mais comme des Turcs des montagnes. Les Kurdes parlent une langue de type perse et sont musulmans sunnites comme la plupart des Turcs, à la différence des Iraniens (Musulmans chiites).

Mais les Kurdes acceptaient mal d'obéir au gouvernement d'Ankara qui décida de mettre fin à leur mode de vie patriarcal, féodal et religieux. Ils se trouvaient dans un état de tension voire d'insurrection incessante de 1921 à 1926. Le Royaume-Uni encourageait de son côté les rebelles kurdes à la révolte pour mettre en difficulté le gouvernement kémaliste. Il fournissait aux insurgés des armes et des subsides.

Une grande révolte kurde menée par le Cheikh Saïd éclate en 1924. Il lança les tribus kurdes sur Elazığ, Maras et Bitlis et fit placarder sur les murs de Diyarbakır des affiches où l'on lisait : « À bas la République ! Vive le Sultan-Calife ! » Mais la révolte était également soutenue par des sociétés secrètes islamiques et des journalistes. Mustafa Kemal décide alors d'envoyer neuf divisions dans le Kurdistan et donna l'ordre à ses soldats de réprimer les insurgés. Puis il y envoya des tribunaux, dits Tribunaux d'indépendance. Des cours martiales exécutèrent ou emprisonnèrent tous les Kurdes reconnus coupables d'atteinte à la sûreté intérieure de l'État. Quarante-six meneurs furent pendus sur la grande place de Diyarbakir. Le but du gouvernement d'Ankara était de faire d'eux des exemples et de dissuader les Kurdes de la révolte.

Il décide par la même occasion de supprimer les derviches tourneurs, les sectes religieuses, les couvents et les confraternités qu'il accuse d'avoir soutenu la révolte kurde.

Le traité de Lausanne inclut également un échange démographique : un million et demi de Grecs de Turquie sont échangés contre 385 000 musulmans de Grèce (turcophones et bulgarophones), en dépit de la volonté desdites populations. Seuls les Grecs d'Istanbul (environ 100 000 personnes) et les musulmans de Salonique (environ 5 000 personnes) sont exemptés. Mais depuis quatre-vingt ans, les tensions nationalistes ont poussé même ces exemptés à émigrer, et en 2006, il reste environ 50 000 musulmans en Grèce et 3 000 orthodoxes grecs en Turquie.

Des minorités sont donc encore présentes en Turquie : Arméniens et Grecs d'Istanbul, Juifs, Assyro-chaldéens et Kurdes. Mis à part ces derniers, elles représentent cependant un très faible pourcentage de la population.5

 

Jeunesse de Mustapha Kemal à Monastir

Les trois années passées à Monastir, en Macédoine, ont fortement marqué la personnalité de Mustapha Kemal. Grâce à un condisciple, Ömer Naci, il a découvert la littérature, et commence à composer des poèmes pendant une assez longue période. D'autre part, les textes des grands penseurs français du siècle des lumières, surtout ceux de Voltaire, Rousseau, Auguste Comte, Camille Desmoulins et Montesquieu, lui ont révélé les principes qui constituent l'essence même des sociétés européennes mais il est également un fin admirateur de la France révolutionnaire et de Napoléon.

Durant son séjour à Monastir, il revenait régulièrement à Salonique pour les vacances scolaires, y passait de longues soirées dans les cafés grecs avec ses camarades. Il fréquentait également des cours où il apprenait à danser la valse et la polka et passait surtout beaucoup de temps chez des frères enseignants auprès desquels il perfectionnait son français.

 

La « Révolution des signes »

En 1928, Moustapha Kemal décrète que l'alphabet arabe sera remplacé par l'alphabet latin avec les lettres spéciales "ğ Ğ ı ş Ş", cette réforme sera connue sous le nom de Révolution des signes. Le changement d'alphabet devait prendre plusieurs années selon les conseils des linguistes et universitaires, mais Mustafa Kemal décide que le changement se fera en trois mois ou ne se fera jamais. Tous les Turcs âgés de 6 ans à 40 ans doivent ainsi retourner à l'école pour apprendre le nouvel alphabet. Il a enseigné l'alphabet latin pour la première fois à Sinop. Ce changement colossal est le symbole de la volonté de sortir de la sphère culturelle arabo-musulmane remplacée alors par la culture occidentale.6

Pour Atatürk, cette réforme était pour purifier la langue turque. Dans un discours tenu au parlement, il explique :

« Il faut donner au peuple turc une clef pour la lecture et l'écriture et s'écarter de la voie aride qui rendait jusqu'ici ses efforts stériles. Cette clef n'est autre que l'alphabet turc dérivé du latin. Il a suffi d'un simple essai pour faire luire comme le soleil cette vérité que les caractères turcs d'origine latine s'adaptent aisément à notre langue et que, grâce à eux, à la ville comme à la campagne, les enfants de ce pays peuvent facilement arriver à lire et à écrire. Nous devons tous nous empresser d'enseigner l'alphabet à tous les illettrés, hommes ou femmes, qu'il nous sera donné de rencontrer dans notre vie publique ou privée. Nous sommes dans l'émotion d'un succès qui ne souffre de comparaison avec les joies procurées par aucune autre victoire. La satisfaction morale éprouvée à faire le simple métier d'instituteur pour sauver nos compatriotes de l'ignorance a envahi tout notre être. »

Seulement 10 % de la population turque était alphabète. Le savoir était le plus souvent dans la main du clergé et d'une petite élite intellectuelle. Mustafa Kemal décida donc de supprimer totalement l'alphabet arabe en Turquie pour le remplacer par l'alphabet latin, mieux adapté à la langue turque.

 

L'historien français, Jacques Benoist-Méchin explique :

« D'un seul coup, il modifierait le système de communications écrites entre chacun de ses sujets et bouleverserait la littérature nationale ; il révolutionnerait toutes les formes de la pensée, d'un bout à l'autre de la Turquie. Plus encore : il amènerait le peuple à changer de philosophie scientifique, de méthode intellectuelle et finalement de destinée. Aucun des grands révolutionnaires du passé — que ce fût Cromwell, Robespierre ou Lénine — n'avait osé aller aussi loin. »

Mustafa Kemal créa en 1932, la Türk dil kurumu (« Association de la langue Turque »).

Il expliqua ensuite en détail à son public pourquoi il fallait à tout prix changer d'alphabet et le faire vite. Il illustrait sa démonstration à l'aide d'un petit tableau noir, et il n'était pas rare de le voir demander à des analphabètes d'écrire leur nom en turc. Devant le succès de sa conférence, il décide de parcourir lui-même le pays pour expliquer aux citoyens turcs les raisons de cette réforme.

« Les paysans furent séduits d'emblée par la réforme de l'écriture. Comme tous les peuples arriérés, les Turcs avaient un désir ardent d'apprendre et de s'instruire. Savoir lire et écrire leur semblait un privilège merveilleux… Pour eux, vaincre l'ignorance, c'était vaincre la misère. »

Le pays entier se remit à l'école.

« Villageois, cultivateurs, bergers, commerçants, notaires, journalistes, hommes politiques, sans distinction d'âge ni de rang social, tous se retrouvèrent au coude à coude sur les bancs des salles de classe. C'était un spectacle étonnant de voir ainsi tout un peuple repartir à zéro.»

 

Dans une entrevue donnée à un journaliste américain, Kemal s'expliqua :

« Beaucoup de crimes commis dans le passé ont été dus à l'ignorance. L'État promulgue des lois qui doivent être respectées par tous. Mais il ne remplit pas pleinement sa tâche, s'il ne fournit pas en même temps, à chaque citoyen, une instruction suffisante pour lui permettre de les lire. »7

 

 

Mustafa Kemal a aboli l'Empire Ottoman et instauré une République laïque.

 

Le 1er novembre 1922, le sultanat OTTOMAN fut aboli par la Grande Assemblée nationale turque et le Sultan Mehmed VI quitta le pays.

 

1er novembre 1922 = 1 11 1922

 

1x11x1922 = 21142

 

21142+28 = 21170

 

Le code postal 21170 est celui de la commune de MONTOT.

 

28 = 2+8 = 10

 

10 = 01

 

La lettre numéro 01 est le A.

 

Il manque uniquement la lettre « A » à MONTOT pour obtenir le mot OTTOMAN.

 

MONTOT = OTTOM(A)N

 

C'est la RÉVOLUTION des SIGNES car Dieu nous prouve à travers eux qu'il écrit chaque ligne de l'histoire de l'humanité et il veut désormais nous convaincre de faire la RÉVOLUTION contre le règne du RICHE.

 

Le sultanat OTTOMAN fut fondé par SELIM 1er en 1537.

SELIM = LE SIM

L'homme est un SIM programmé par Dieu.

Pour ma part, je suis programmé pour mener la RÉVOLUTION DES SIGNES.

À l'instar des Turcs lorsque Mustafa Kemal a mis en place la « Révolution des signes », les Français vont retourner à l'école. En effet, depuis 2016 – l'année de la mise en ligne de ce site internet – Dieu leur réapprend à lire en leur transmettant une nouvelle forme d'écriture.

L'historien français, Jacques Benoist-Méchin, explique que lors de la « Révolution des signes », Mustafa Kemal a décidé de supprimer totalement l'alphabet arabe en Turquie pour le remplacer par l'alphabet latin, mieux adapté à la langue turque.

« D'un seul coup, il modifierait le système de communications écrites entre chacun de ses sujets et bouleverserait la littérature nationale ; il révolutionnerait toutes les formes de la pensée, d'un bout à l'autre de la Turquie. Plus encore : il amènerait le peuple à changer de philosophie scientifique, de méthode intellectuelle et finalement de destinée. »

C'est exactement la volonté de Dieu car à travers la nouvelle « Révolution des signes », il nous fait comprendre que RICHE = REICH – étant donné que le RICHE extermine des millions d'êtres humains chaque année en accaparant la majeure partie des richesses de la Terre. La « Révolution des signes » nous permet ainsi de prendre conscience que le RICHE est un criminel qui a instauré une « démocratie » totalitaire dans laquelle nous sommes endoctrinés tout au long de notre vie ; alors à l'instar de Mustapha Kemal et sa « Révolution des signes » en Turquie, la volonté de Dieu à travers la transmission du langage des « signes » est de révolutionner toutes les formes de la pensée et plus encore, amener le peuple à changer de philosophie scientifique, de méthode intellectuelle et finalement de destiné. Il nous demande ainsi d'éradiquer le nazi-capitalisme pour permettre à chaque être humain sur Terre de vivre dignement

 

TURQUIE = R QUI TUE

 

La « Révolution des signes » en TURQUIE est symbolique car à travers la nouvelle « Révolution des signes », Dieu nous révèle que nous vivons dans une ÈRE QUI TUE un enfant toutes les 5 secondes, par conséquent, nous devons faire la révolution pour empêcher le RICHE d'exterminer le pauvre.

 

TURQUIE = R QUI TUE

 

R = 18

 

18 = AH

 

AH sont les initiales d'Adolf Hitler : le dirigeant du IIIe REICH (RICHE).

 

Le chef-lieu du département 18 est la ville de BOURGES.

 

À travers les signes, Dieu nous montre que c'est le RICHE, le BOURGE, QUI TUE un enfant toutes les 5 secondes.

 

J'ai commencé à comprendre le langage des SIGNES à la fin de l'année 2012, lorsque je séjournais à MONASTIR en Tunisie, et j'ai compris par la suite que j'étais programmé pour apprendre le langage des SIGNES à partir de mon séjour là-bas car dans sa jeunesse, Mustafa Kemal a étudié à MONASTIR en Macédoine. (Cette ville s'appelle aujourd'hui Bitola).

Mustapha Kemal est entré à l'école de Monastir en 1896.

Un cahier est composé traditionnellement de 96 pages.

Mustapha Kemal était ainsi programmé pour réapprendre aux Turcs à lire et à écrire.

Durant son séjour à Monastir, Mustafa Kemal revenait régulièrement à SALONIQUE – sa ville de naissance – pour les vacances scolaires.

SALONIQUE se prononce SALONIC.

SALONIC = NICOLAS

Mon prénom est NICOLAS.

Dieu vous fait comprendre qu'il m'a programmé pour vous réapprendre à lire et à écrire, car je dois vous transmettre la traduction du langage des signes, et la nouvelle Alliance pour obtenir la vie éternelle nous impose désormais de lutter afin d'abolir le « sultanat » capitaliste.

 

Le sultanat a été aboli le 1er novembre 1922.

 

Le 1er novembre est le jour de la TOUSSAINT.

 

TOUSSAINT = TOUS SAINT

 

SAINT = TA NIS

 

T+A = 20+1 = 21

 

21 = U

 

En remplaçant les lettres « TA » par le « U », le mot SAINT devient UNIS.

 

TOUSSAINT signifie ainsi TOUS UNIS.

 

Dieu nous demande d'être TOUS UNIS le jour de l'élection présidentielle pour abolir le pouvoir des SULTANS qui nous INSULTENT en nous traitant de « pauv'con », de « sans-dents », de « racailles », « d'illettrés » ou de « fainéants ».

 

SULTAN = STAN LU

 

STAN = SATAN

 

LU est une marque française de biscuits dont l'un des produits phares est le Petit écolier.

 

À travers la « Révolution des signes », Dieu nous réapprend à lire et nous oblige ainsi à retourner à l'école.

 

LU est une entreprise qui a été fondée à NANTES.

 

NANTES = SATAN

 

Dieu apprend à lire à de nouveaux ÉCOLIERS afin que SATAN ne soit plus le MAITRE de la Terre.

 

Mustapha Kemal a aboli le sultanat le 1er novembre 1922. Il a ainsi privé le sultan de ses prérogatives politiques puis il acheva ensuite « la liquidation de l'héritage ottoman en abolissant le califat. Cette fonction religieuse faisait du sultan ottoman le chef spirituel de tous les musulmans et le successeur des premiers compagnons du prophète. Sa disparition après quatorze siècle fut accueillie avec indifférence en Turquie. »8

 

Actuellement, l'objectif de l'État Islamique (Daech) est d'établir un califat dans le monde musulman en y instaurant la charia, et il y est notamment parvenu, entre 2014 et 2017, en prenant le contrôle d'un territoire à cheval entre l'Irak et la Syrie.

 

Mustapha Kemal a aboli le califat le 3 mars 1924.

 

3 mars = 3 3

 

Le chef-lieu du département 33 est la ville de Bordeaux, mondialement connue pour son VIN.

 

Jésus avait 33 ans lorsqu'il a transmis aux chrétiens l'Alliance du VIN qui laisse le pouvoir politique entre les mains de César.

 

Dieu nous fait comprendre que César – le RICHE capitaliste – est responsable de la naissance du califat de l'État Islamique entre 2014 et 2017 – car ce califat a pu surgir notamment en Irak à partir du moment où César y est intervenu militairement en 2003 pour agrandir son empire en pillant les ressources naturelles du pays. L'Irak a alors été ravagé, ce qui a permis au califat islamique de surgir quelques années plus tard.

 

Nous devons ainsi renverser le règne de César afin que les richesses mondiales soient équitablement redistribuées entre chaque être humain, car pour abolir l'État Islamique, il faut l'empêcher de recruter, et pour y parvenir, nous devons créer un monde fraternel, égalitaire, sans guerre, afin que les jeunes de demain n'aient aucune raison de vouloir rejoindre un califat totalitaire, barbare et arriéré.

 

En abolissant le califat en 1924, Mustapha Kemal achevait définitivement l'héritage ottoman qui avait débuté en 1517 avec le règne de Selim 1er.

 

1924-1517 = 407

 

Lorsque l'UMP est devenu Les Républicains, le siège du parti se situait rue de Vaugirard, la plus longue rue de Paris avec 407 numéros d'immeubles.

 

Dieu associe le califat aux Républicains car l'idéologie impérialiste et capitaliste de ce parti politique est responsable de la création du califat de l'État Islamique en Irak et en Syrie.

 

407 = DOG

 

« DOG » est l'inverse de « GOD » qui signifie « DIEU » en anglais.

 

Dieu nous montre que pour mettre un terme au terrorisme islamiste, nous devons faire exactement l'inverse des mesures préconisées par Les Républicains, c'est-à-dire que nous devons arrêter les guerres  impérialistes et partager équitablement les richesses entre chaque citoyen. Dieu nous demande ainsi de créer une société fraternelle, pacifique, alors que Les Républicains veulent que la société reste inégalitaire et guerrière. Ce parti politique est donc dirigé par l'inverse de DIEU, c'est-à-dire le DIABLE.

 

Dieu associe également Les Républicains – dont le siège est à PARIS – au CALIFE musulman, car lors de l'élection présidentielle, tu PARIS sur un parti politique pour gagner ta QALIF' au PARADIS, et en associant le mot DOG au parti Les Républicains, GOD (Dieu) te fait comprendre qu'en votant pour ce parti politique, tu prendras le chemin inverse du PARADIS, c'est-à-dire que tu iras en enfer.

 

Le CALIFAT symbolisait le pouvoir du sultan qui était un monarque musulman donc Dieu associe Les Républicains au CALIFAT parce que ce parti politique est le serviteur des rois du capitalisme.

 

SELIM 1er fut le premier sultan de l'Empire ottoman à porter le titre de calife. Il le devint quand il entra dans ALEP en Syrie le 28 août 1517.

 

L'homme est un SIM programmé par Dieu.

 

ALEP = APEL

 

SELIM = LE SIM

 

Dieu APPEL LE SIM pour lui demander de se révolter contre le système capitaliste car c'est l'une des conditions de la nouvelle Alliance pour obtenir la vie éternelle.

 

Dieu te lance également un APPEL pour te faire comprendre que ce n'est pas en rejoignant le CALIFAT de l'État Islamique que tu deviendras immortel, au contraire, tu iras directement en enfer.

 

CALIFAT = CALIFIQUATION

 

Si tu veux te QUALIFIER là-haut pour le second tour, tu dois participer aux matchs de POULE en jouant dans notre équipe humaniste.

 

POULE = LOUP E

 

E = 5

 

Tu dois choisir avec les 5 doigts de ta main qui tiennent le bulletin de vote si tu rejoins l'équipe des agneaux ou celle des LOUPS.

 

Or si tu tombes dans le piège des LOUPS au premier tour, tu ne seras pas qualifié pour le second tour au paradis.

 

À travers la « Révolution des SIGNES », Dieu reformate les SIMS.

 

 

TURQUIE = R QUI TUE

 

R = ÈRE

 

Dieu APEL LE SIM pour qu'il se révolte car nous vivons dans une ÈRE QUI TUE un enfant toutes les 5 secondes.

 

TURQUIE = 20+21+18+17+21+9+5 = 111

 

111 = AAA

 

AAA = le triple A

 

Le TRIPLE A est la note financière maximale attribuée par une agence de notation, chargée d'évaluer le risque de non-remboursement de la dette d'un État, ou d'un emprunt faisant partie de cette dette.

 

Dieu associe la TURQUIE au triple A parce que la dette des pays du Tiers Monde est responsable en grande partie du génocide de la faim. Dans son ouvrage L'Empire de la honte, Jean Ziegler nous explique : « La faim est le produit direct de la dette, dans la mesure où c'est elle qui prive les pays pauvres de leur capacité d'investir les fonds nécessaires pour le développement des infrastructures agricoles, sociales, de transport et de services.(...) En 2003, 36 millions de personnes sont mortes de faim ou de maladies dues aux carences en micronutriments. La faim est donc la principale cause de mort sur notre planète. Et cette faim est faite de main d'homme. Quiconque meurt de faim meurt assassiné. Et cet assassin a pour nom la dette. »9

TURQUIE = R QUI TUE

Dieu nous fait comprendre que nous vivons actuellement dans une ÈRE QUI TUE un enfant toutes les 5 secondes, et la dette est l'un des principaux responsables de ce massacre.

 

En Grèce, les mesures d'austérité imposées par la Troïka à cause de la dette, ont fait grimper le taux de mortalité de nouveau-nés de plus de 40 %.

Selon Eric TOUSSAINT : « Derrière ce AAA, se cachent des régressions sociales de grande ampleur, des violations des droits humains, du sang et des larmes pour les populations les plus fragiles.

AAA...C'est le ricanement des hyènes que sont les créanciers quand les droits des peuples sont sacrifiés avec la complicité active des dirigeants des pays européens, de la Commission européenne, du FMI , de la BCE. »10

Ces notes financières ont en effet pour conséquence de gonfler le poids de la dette des pays pauvres qui sont alors soumis aux créanciers internationaux (FMI, club de Paris, Banque mondiale...).

Cette soumission se traduit par une généralisation et accentuation des politiques d'ajustement structurel dont notamment l'accélération des privatisations, ce qui entraîne la dégradation de l'enseignement et de la santé – aboutissant à l'augmentation du chômage et du nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté absolue. Le FMI impose également l'abolition du « prix maximum » de quelques produits alimentaires de haute nécessité qui jette dans la malnutrition des millions de familles pauvres.

Par ailleurs, « le montant total de tous les prêts et de l'aide accordés par le Nord au Sud est inférieur aux sommes qui proviennent de la direction opposée, ne serait-ce qu'en paiements pour le service de leurs dettes contractées à l'étranger. Ainsi, entre 1998 et 2002, les pays du Sud ont reçu 855 milliards de dollars d'aide et de prêts, tandis qu'ils dépensaient 922 milliards en remboursement de leurs dettes aux institutions financières du Nord, soit un gain net de 67 milliards de dollars en faveur des pays riches. »11

« Le fardeau de la dette du Sud est un exemple classique de la façon dont on fait violence à des dizaines de millions de citoyens innocents. La dette donne au couple FMI-Banque mondiale un immense pouvoir ; leurs programmes d'ajustement structurel sont la quintessence de la violence, et parfois la provoquent directement. Quand les prix de produits de base essentiels à la survie comme le pain, le riz, l'eau, l'huile de cuisson ou le combustible doublent ou triplent, les gens descendent dans la rue. Ces ''émeutes FMI'', comme les appellent ceux qui y prennent part, ont eu lieu dans des dizaines de pays. Elles ont fait des centaines de morts, de blessés et d'emprisonnés – mais d'où vient vraiment la violence ? Des manifestants ou des institutions qui leur ont imposé des sacrifices impossibles ? »12

« Pour certains pays endettés, le service de la dette atteint jusqu'à 50 % des dépenses de l'État. Avec la dévaluation des taux de change et la hausse des taux d'intérêt, les prix intérieurs montent en flèche. Les populations voient alors leur pouvoir d'achat se réduire, parfois de moitié, du jour au lendemain. Ne parvenant plus à vendre leurs denrées, des millions de paysans abandonnent leurs terres pour se ''réfugier'' dans les favelas et autres bidonvilles surpeuplés. L'abandon du travail de la terre contribue à aggraver la famine dans le monde. »13

 

Nous vivons ainsi dans une ÈRE QUI TUE un enfant toutes les 5 secondes car le profit passe avant la vie humaine : le TRIPLE A est l'un des symboles meurtriers du nazi-capitalisme.

 

Le drapeau de la TURQUIE représente un CROISSANT de lune et une étoile de couleur blanche sur fond rouge.

 

 

À travers le CROISSANT sur le drapeau de la TURQUIE, Dieu nous révèle que nous vivons dans une ÈRE QUI TUE un enfant toutes les 5 secondes car le nazi-capitalisme interrompt brutalement la CROISSANCE de 6 millions d'enfants chaque année.

TURQUIE = R QUI TUE

R = 18

18 = AH

AH sont les initiales d'Adolf Hitler : le dirigeant du IIIe REICH.

C'est le RICHE QUI TUE un enfant toutes les 5 secondes puisque c'est lui qui endette les pays pauvres en leur faisant payer des intérêts exorbitants pour s'enrichir.

L'étoile sur le drapeau de la TURQUIE symbolise CESAR étant donné que le mot « étoile » se dit « STAR » en anglais.

STAR = TSAR

« TSAR » est un nom russe dérivé de « CESAR ».

Le drapeau de la TURQUIE a été adopté officiellement en 1936.

Jules CESAR est mort en 44 av. J.-C.

44x44 = 1936

Dieu nous fait comprendre que tous les peuples doivent s'unir sous le même DRAPEAU afin de renverser CESAR pour mettre un terme à cette ÈRE QUI TUE un enfant toutes les 5 secondes.

CESAR est le capitaliste qui s'enrichit sur la misère humaine.

Le drapeau turc est de couleur rouge, la couleur du VIN, et l'Alliance du VIN avec Jésus a donné le pouvoir politique entre les mains de CESAR, donc Dieu remplace désormais l'Alliance du VIN par celle de l'EAU afin que nous lui prenions le pouvoir des mains.

 

Le drapeau turc a été officiellement adopté le 5 juin 1936.

 

5 juin = 5 6

 

Le chef-lieu du département 56 est la ville de VANNES.

 

Les VANNES sont un dispositif qui permet de laisser passer l'eau ou non.

 

Les VANNES symbolisent ainsi les larmes et lorsque nous pleurerons la mort des 6 millions d'enfants assassinés chaque année par CESAR, nous aurons alors la volonté de mettre un terme à cette ÈRE QUI TUE un enfant toutes les 5 secondes.

 

 

ÉRIC TOUSSAINT est le porte-parole du réseau international du Comité pour l'Annulation de la Dette du Tiers Monde (CADTM). Il déclare : « Refuser d'annuler la dette équivaut à refuser aide à personnes et à peuples en danger ».

ÉRIC TOUSSAINT a coécrit un livre intitulé AAA (Audit, Annulation, Autre politique).

 

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La TOUSSAINT est célébrée le 1er novembre.

1er novembre = 1 11

111 = AAA

ÉRIC TOUSSAINT a écrit un ouvrage intitulé AAA donc Dieu nous prouve qu'il ÉCRI l'histoire de chacun d'entre nous et il nous demande désormais de faire la révolution pour notamment annuler la dette des pays du Tiers Monde. Comme le dit ÉRIC TOUSSAINT : « Refuser d'annuler la dette équivaut à refuser aide à personnes et à peuples en danger ».

Le 1er novembre est le jour de la TOUSSAINT.

Le sultanat a été aboli en TURQUIE le 1er novembre 1922.

ÉRIC TOUSSAINT a coécrit le livre AAA avec Damien MILLET.

Le sultan est le titre porté par des monarques musulmans depuis l'an 1000 environ.

1000 = MILLE

MILLET = MILLE

Dieu met en lumière Éric TOUSSAINT et Damien MILLET car il nous fait comprendre que la DETTE des pays pauvres met à la DIETTE des centaines de millions d'êtres humains – dont nombre d'entre eux meurent de faim tous les ans. Par conséquent, nous devons être TOUS UNIS pour nous révolter contre cette ÈRE QUI TUE des millions de nos frères et sœurs chaque année à cause d'une minorité de RICHES qui veulent vivre comme des ROIS. Il est donc hors de question que le IIIe REICH  dure MILLE ANS.

TOUSSAINT = TOUS UNIS

Pour mettre un terme au IIIe REICH, nous devons être TOUS UNIS contre le nazi-capitalisme le jour des élections, car lorsque les peuples auront le pouvoir en main, nous annulerons les dettes illégitimes de chaque pays du monde.

ERIC = ÉCRI

En France, dès la prochaine élection présidentielle, nous pourrons annuler la dette du Tiers Monde en choisissant le bulletin de vote sur lequel sera ÉCRIT le nom de notre candidat(e).

Dieu APPEL le SIM à voter avec son cœur afin que cet organe ne reste pas éternellement virtuel.

 

SELIM 1er est mort le 20 septembre 1520 (20 9 1520).

20 9 = BOI

15 = O = EAU

20 = VIN

Dieu te transmet désormais le message suivant : « BOIS l'EAU de la nouvelle Alliance »  – car celle du VIN avec Jésus laisse le pouvoir politique entre les mains de César, et je pense que tu commences à comprendre que ce dernier tue un enfant toutes les 5 secondes, alors combats ce criminel.

 

Dieu APPEL ainsi LE SIM à changer le CD ROME pour mettre un terme à une dictature qui dure depuis plus de 2 000 ans.

 

Le califat a débuté en 1517 et il a été aboli en 1924.

1924-1517 = 407

407 = DOG

« DOG » est l'inverse de « GOD ».

« DOG » signifie « CHIEN » en anglais.

J'ai expliqué précédemment que Benoît XVI était un Berger allemand et le Pape François un DOG argentin car en restant neutres politiquement, ils demeurent des chiens de garde du capitalisme alors qu'il suffirait juste qu'ils aboient un bon coup sur leurs fidèles pour les faire changer de direction le jour de l'élection présidentielle.

En France, ces dernières années, les chrétiens ont voté majoritairement pour l'UMP et Dieu nous a bien fait comprendre que ceux qui voteront pour ces CHIENS de l'UMP n'obtiendront jamais la QALIF pour aller au paradis, donc le Pape François doit changer le VIN en EAU et guider ses fidèles en leur demandant de voter pour L.O. et le NPA afin qu'ils obtiennent la vie éternelle.

 

 

FAIM = FMI A

 

Le FMI est l'un des responsables de la FAIM dans le monde.

 

Christine LAGARDE est devenue la directrice du FMI le 5 juillet 2011.

 

5 juillet = 5 7

 

Le chef-lieu du département 57 est la ville de METZ.

 

Un METS est repas.

 

Dieu nous montre que le FMI empêche les pauvres d'avoir des METS à leur table – en imposant notamment aux pays pauvres de payer les intérêts de leur dette au lieu de nourrir leur population.

 

Christine LAGARDE fut directrice du FMI du 5 juillet 2011 au 12 septembre 2019. Elle succédait au prédateur Dominique Strauss-Khan suite à sa démission en 2011 après une accusation de tentative de viol sur une femme de chambre dans un hôtel à Washington. Cette femme était d'origine africaine donc son agression symbolisait l'agression quotidienne des prédateurs du FMI sur les peuples africains.

 

Christine LAGARDE est née le 1er janvier 1956 (1 1 1956).

 

111 = AAA = triple A

 

TURQUIE = 111

 

Le triple A symbolise le nazi-capitalisme, qui nous oblige à vivre dans une ÈRE QUI TUE un enfant toutes les 5 secondes.

 

Actuellement présidente de la Banque centrale européeenne, Christine LAGARDE est l'un des principaux CHIENS de GARDE du nazi-capitalisme, et ce n'est pas un hasard si elle s'appelle CHRISTINE, l'Alliance du VIN avec le CHRIST ayant obligé César à se doter de CHIENS dangereux pour monter LA GARDE sur son empire.

 

1er janvier 1956 = 111  956

 

956 = 9+5+6 = 20

 

20 = VIN

 

L'Alliance du VIN avec Jésus a laissé le pouvoir politique entre les mains de César, par conséquent, Christine LAGARDE et le FMI peuvent affamer les peuples et les empêcher de se soigner pour enrichir une minorité de créanciers vautours. Les prédateurs comme Christine LAGARDE « détruisent les acquis des peuples, ils détruisent le tissu social, ils plongent les peuples dans le chômage de masse et la misère sans remords, avec le sentiment qu’il faut faire payer les pauvres pour que eux, les valets de la grande bourgeoisie, continuent de se gaver. »14

En effet, Christine LAGARDE est un chien de GARDE très bien rémunéré pour les services rendus à César. Lorsqu'elle était à la tête du FMI, elle bénéficiait d’un traitement annuel de 323 257 euros sans oublier 57 829 euros de frais de représentation, et elle ne payait pour sa part aucun impôt sur ce revenu grâce à son statut de fonctionnaire internationale15. Nous vivons ainsi à une époque où une femme est payée 323 257 euros par an pour exterminer des enfants afin d'enrichir une minorité de créanciers, et nous restons indifférents face à ce massacre. La place de Christine LAGARDE est en prison, condamnée pour crimes contre l'humanité.

 

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Lagarde.jpg.

 

Aujourd'hui, elle règne, elle fait la belle, elle est glorifiée dans les médias mais lorsque nous aurons aboli le IIIe REICH capitaliste, son nom sera associé pour l'éternité dans tous les livres d'Histoire à celui d'Adolf Hitler. Elle est d'ailleurs née en 1956 et Adolf Hitler est mort à l'âge de 56 ans.

 

L'exemple du Niger

En 2012, en se disant davantage préoccupée par les conditions déplorables de scolarisation des enfants nigériens que par la brutale austérité qui frappe les Grecs, Christine Lagarde a soulevé l’indignation. Mais le mépris avec lequel la directrice générale du FMI considérait la Grèce vallait aussi pour le Niger : deuxième pays le plus pauvre du monde, embourbé depuis vingt ans dans une situation désastreuse à cause des plans d’ajustement structurel, qui y ont notamment détruit l’école publique.

Interrogée par un journaliste du Guardian, Christine Lagarde, a affirmé que « les Grecs devraient commencer par s’entraider mutuellement », et ce en « payant tous leurs impôts ». Les femmes doivent accoucher sans sage-femme ? Les malades n’ont plus accès aux médicaments vitaux ? Les personnes âgées meurent faute de soins ? La faute aux Grecs. « Je pense davantage aux enfants dans une école d’un petit village du Niger, qui ont deux heures d’école par jour, partageant une chaise pour trois (…). Je pense qu’ils ont besoin de davantage d’aide que les gens d’Athènes », comparait l’ancienne ministre de l’Économie et des Finances. Comme quoi, les Européens ne devraient pas trop se plaindre. Christine Lagarde oubliait de préciser que si les enfants du Niger ont bien du mal à être scolarisés, c’est aussi à cause de l’institution qu’elle dirigeait.

En décembre 2011, Christine Lagarde a honoré le Niger de sa première visite sur le continent africain. Reçue en grande pompe, la directrice du FMI a tenu à se rendre au chevet d’un pays où une personne sur trois vit dans l’insécurité alimentaire, ce qui n’aide pas non plus à bien suivre en classe. Lors de sa mini-tournée hors de la capitale, elle a même assuré que le FMI « n’est pas seulement une institution désincarnée qui prescrit des mesures d’austérité à travers le monde ». Il est aussi « très sensible aux particularités » de chaque pays. Charmante marque de générosité.

 

Quand le FMI taille dans le budget de l’Éducation nationale

L’une des particularités du Niger est qu’il est l’un des États les plus mal classés en terme de développement humain. 61 % des habitants y survivent avec moins d’un dollar par jour, un enfant sur cinq meurt avant l’âge de 5 ans, principalement de maladies évitables et de la malnutrition. La faible scolarisation, particulièrement des filles, contribue au taux de 85 % d’analphabétisme du Niger. Selon l’Unicef, « la précarité des moyens d’existence des femmes a de graves conséquences sur l’accès des enfants à l’éducation, et sur l’abandon et la traite des enfants ». Point commun entre la misère au Niger et l’austérité en Grèce ? Le FMI.

Le budget 2012 du Niger a été sévèrement taillé… sur ordre du FMI. « De 2,2 milliards d’euros, le budget a été ramené à 1,9 milliard  avec des coupes substantielles dans les secteurs sociaux, qui concentrent les deux tiers des montants supprimés », informe le le Réseau national dette et développement (RNDD). Le budget le plus amputé ? Celui de l’Éducation nationale, avec 73 millions d’euros (48 milliards de francs CFA) de moins que prévu. L’Agriculture, la Santé et l’Enseignement supérieur sont aussi privés de moyens.

 

Des enseignants qui ne sont plus payés

Des choix budgétaires arbitrés en contradiction avec les engagements du président nigérien, Mahamadou Issoufou, et de son gouvernement, selon le Réseau national dette et développement. L’ONG appelle les parlementaires nigériens à refuser le diktat du FMI et le gouvernement à plus de responsabilités, rappelant que « les prêts consentis par les institutions internationales ne feront que faire flamber le service de la dette, qui est un frein à tout développement ». Cela fait plus d’une décennie que le Niger agonise, en partie à cause des plans d’ajustement élaborés à Washington.

Le FMI, alors dirigé par Michel Camdessus et la Banque mondiale débarquent à Niamey à la fin des années 1990. Et concoctent un « Plan décennal de développement de l’éducation ». Ce plan envisage le recours massif aux enseignants au statut précaire, les « volontaires et contractuels ». Lesquels représentent, en 2012, 80 % des effectifs. Censés être pris en charge par les collectivités régionales et les communautés de base, dans un souci de décentralisation, ces enseignants sont en fait de moins en moins nombreux… Puisque personne ne peut les payer ! Les réformes imposées par le FMI ont aussi encouragé la réduction du nombre d’heures de classe, la limitation des attributions de bourses, et la baisse du taux de scolarisation. « Une parfaite illustration des dérives auxquelles peuvent conduire des politiques d’inspiration néolibérale », commentait en 2004, Mamane Sani Adamou, figure altermondialiste locale.

 

L’économie nigérienne déstructurée par le FMI

Autre beau programme d’émancipation de la pauvreté imaginé par le FMI : le plan triennal au titre de la « facilité de réduction de la pauvreté et de croissance » (sic). Signé en 2000 en échange de nouveaux prêts, il a déstabilisé la fragile économie nigérienne en lui imposant la suppression de barrières douanières, la baisse de taxes à l’importation et la privatisation d’entreprises publiques. C’est ainsi que Vivendi (désormais Veolia environnement) a récupéré la société nationale de gestion de l’eau.

Autre obligation criminelle : celle de supprimer son office national vétérinaire pour pouvoir rééchelonner sa dette. Incapables de payer les prix demandés par les entreprises privées pour les vaccins, les médicaments, ou les vitamines, les nomades et les paysans ont vu leurs bêtes dépérir. Alors que le cheptel de 20 millions de bovins, d’ovins et de chameaux était une des richesses principales du pays, la liquidation des réserves alimentaires imposée par le FMI a accéléré le rythme des famines.

Pour trouver de quoi payer des chaises aux enfants qui peuvent se rendre à l’école, le Niger pourrait augmenter la redevance que paie Orano (ex-Areva), qui exploite ses ressources en uranium (dont le Niger est le 3ème producteur mondial), ou la multinationale chinoise China National Petroleum qui s’y implante. Qu’en pense Christine Lagarde, dont le salaire pourrait permettre de rémunérer plusieurs dizaines d’instituteurs nigériens, à défaut d’être imposable ? » 16

 

« Cela défie ainsi toute logique qu'un petit nombre d'économistes installés dans la 19e rue à Washington puisse imposer un quelconque mode de vie à 1,4 milliard de personnes vivant dans 75 pays en développement. Comme la moitié du temps de travail du FMI est consacré à ces États, cela fait en moyenne 7 économistes par pays…"

Or, si les banquiers sont largement représentés au sein des organes de direction du FMI, les populations jetées ''sur le bord de la route'' n'ont pratiquement aucune voix dans le processus de décision. Ni voix délibérative, ni même voix consultative. Ni même représentation au sein d'un groupe de réflexion indépendant – dont la création n'a même jamais été décidée…

Et pour faire bonne mesure, non seulement la répartition des droits de vote donne un poids exorbitant aux pays industrialisés, mais le processus de décision – apanage de ces mêmes pays – ne pourrait être plus opaque. » 17

 

Le destin de centaines de millions d'ENFANTS dans le monde est ainsi décidé dans des bureaux du FMI à WASHINGTON.

L'architecte qui a tracé les plans de la ville de  WASHINGTON en 1790 était Français, il s'appelle Pierre-Charles l'ENFANT.

Il avait été recruté par le général WASHINGTON.

Chaque année, des millions d'ENFANTS sont exterminés à partir de décisions prises par l'état major du système capitaliste dont le QG principal se trouve à WASHINGTON.

Nous devons nous unir avec tous les peuples du monde afin de pouvoir tenir en laisse ces CHIENS de GARDE du capitalisme et leur mettre une muselière pour qu'ils ne puissent plus jamais dévorer des ENFANTS.

 

 

TURQUIE = ÈRE QUI TUE

 

TURQUIE = 111 = AAA

 

Dieu associe ainsi le TRIPLE A à l'ÈRE QUI TUE un enfant toutes les 5 secondes, c'est-à-dire l'ère du nazi-capitalisme, et il est important que vous ayez connaissance de l'histoire scandaleuse de la dette du Tiers Monde pour que nos dirigeants ne puissent plus vous manipuler en vous faisant croire que leur système économique n'est pas responsable de la misère dans les pays du Tiers Monde.

 

 

La dette du Tiers Monde

La dette est une catastrophe pour l’humanité, maintenant dans la plus extrême pauvreté des contrées entières possédant pourtant d’importantes richesses matérielles et humaines. Une tragédie sous-jacente, qui provoque en aval une multitude de drames insupportables. Mais cette tragédie n’est pas arrivée toute seule comme peut survenir un tremblement de terre ou un cyclone dévastateur. Elle est la conséquence de choix géopolitiques bien précis. Surtout elle est un puissant mécanisme de subordination des pays du Sud, un nouveau colonialisme en somme. Comme toujours, elle s’est jouée en 5 actes.

 

Acte 1 : les années 1960-1970

Après la seconde guerre mondiale, les États-Unis ont instauré le plan Marshall pour la reconstruction de l’Europe. Ils ont investi massivement dans l’économie européenne pour l’aider à se remettre debout et les pays européens sont redevenus très vite des partenaires commerciaux privilégiés. De plus en plus de dollars (la monnaie de référence) circulent à travers le monde, et les autorités américaines tentent de freiner les demandes de conversion de dollars en or, pour ne pas assécher leurs coffres-forts. Elles encouragent alors les investissements des entreprises américaines à l’étranger, pour éviter le retour des dollars en excès et une flambée de l’inflation chez eux. Voilà pourquoi dans les années 1960, les banques occidentales regorgent de dollars (les eurodollars) pour lesquels elles sont en recherche de débouchés et d’investissements. Elles les prêtent alors aux pays du Sud, qui cherchent à financer leur développement, notamment les États africains nouvellement indépendants et les pays d’Amérique latine.

À partir de 1973, le choc pétrolier apporte des revenus confortables aux pays producteurs de pétrole qui les placent à leur tour dans les banques occidentales : ce sont les pétrodollars. Là aussi les banques les proposent aux pays du Sud, à des taux faibles pour les inciter à emprunter. Tous ces prêts provenant de banques privées constituent la partie privée de la dette extérieure des Pays en voie de développement (PED).

S’ajoutent à cela les États du Nord où à partir de ce choc pétrolier, la crise s’est installée. Les marchandises produites au Nord ont du mal à trouver preneur à cause de la récession et du début du chômage massif. Ces pays riches décident alors de distribuer du pouvoir d’achat au Sud, afin de les inciter à acheter les marchandises du Nord. D’où des prêts d’État à État, souvent sous forme de crédits d’exportations. En gros, je te prête 10 millions à bas taux, à condition que tu achètes chez moi des marchandises pour 10 millions... C’est la partie bilatérale de la dette extérieure des PED.

Le troisième acteur de cette histoire de l’endettement est la Banque mondiale. Institution née en 1944 alors que les États-Unis étaient en position de force sur la scène internationale, elle est profondément antidémocratique puisque le système adopté pour les États-membres est “1 dollar, 1 voix”. Les États-Unis possèdent plus de 17 % des droits de vote (ce qui leur fournit une minorité de blocage), alors que le groupe formé par 24 pays d’Afrique subsaharienne n’en détient que 2 %. À partir de 1968, son président est Robert McNamara, ancien ministre de la Défense américain qui a géré l’escalade de la guerre au Vietnam. Par l’intermédiaire de la Banque mondiale, McNamara va agir pour contrecarrer l’influence soviétique et les différentes tentatives nationalistes. Son combat va se placer sur le plan financier. De 1968 à 1973, la Banque mondiale va accorder davantage de prêts que pendant toute la période 1945-1968.

Ces prêts ont plusieurs buts parfaitement clairs. Tout d’abord soutenir les alliés stratégiques des États-Unis (Mobutu au Zaïre, Suharto en Indonésie, la dictature brésilienne puis plus tard les dictatures argentine et chilienne...) pour renforcer la zone d’influence américaine. Ils servent également à stopper le développement de certaines politiques visant à l’obtention d’une indépendance économique (Nasser en Égypte avec la nationalisation du canal de Suez, N’Krumah au Ghana, Manley en Jamaïque, Sukarno en Indonésie, etc.).

La Banque mondiale incite les pays du Sud à emprunter dans l’espoir affiché de financer la modernisation de leur appareil d’exportation et les connecter au marché mondial. C’est la partie multilatérale de la dette extérieure des PED.

Pendant ces années, l’endettement est encore supportable pour les pays du Sud car ces prêts leur permettent malgré tout de produire davantage, donc d’exporter plus et de récupérer des devises pour les remboursements et de nouveaux investissements.

Ces trois intervenants (banques privées, États du Nord, Banque mondiale), avec la complicité des classes dirigeantes du Sud, sont à l’origine d’une augmentation exponentielle de la dette (elle est multipliée par 12 entre 1968 et 1980), précédant un tournant tragique.

 

Acte 2 : la crise de la dette

À la fin de l’année 1979, pour sortir de la crise qui les frappe, lutter contre une inflation importante et réaffirmer leur leadership mondial après les échecs cuisants au Vietnam en 1975, en Iran et au Nicaragua en 1979, les États-Unis amorcent un virage ultralibéral, qui sera poursuivi après l’élection de Ronald Reagan à la présidence. Depuis quelques mois déjà, le Royaume Uni fait de même avec le gouvernement de Margaret Thatcher. Paul Volcker, le directeur de la Réserve Fédérale américaine, décide une forte augmentation des taux d’intérêt américains dans le but d’attirer les capitaux et ainsi de relancer la machine économique américaine. Les investisseurs de toute la planète sont donc fortement incités à placer leur argent aux États-Unis. Mais quel rapport avec la dette ?

C’est que jusque là les taux d’intérêt des emprunts accordés aux États du Sud étaient certes faibles, mais variables et liés aux taux américains. De l’ordre de 4-5 % dans les années 1970, ils passent à 16-18 % au moins, voire davantage au plus fort de la crise, car la prime de risque devient énorme. Par conséquent, du jour au lendemain, le Sud doit rembourser trois fois plus d’intérêts. En plein milieu du jeu, les règles ont été changées de façon délibérée : le piège s’est refermé.

De surcroît, les pays du Sud sont confrontés à un autre changement brutal : la baisse des cours des matières premières et des produits agricoles qu’ils exportent. La grande majorité des prêts a été contractée dans des monnaies fortes comme le dollar. Au cours des années 1970, les pays débiteurs doivent donc se procurer de plus en plus de devises pour rembourser leurs créanciers. Ils tentent alors d’exporter encore plus (café, cacao, coton, sucre, arachide, minerais, pétrole, etc.) pour récupérer davantage de devises, ce qui fait encore baisser les cours, vu l’absence de demande supplémentaire au Nord. Le Sud se retrouve pris dans l’étau de la dette sans bien sûr pouvoir faire face à ses échéances. C’est la crise de la dette.

En août 1982, le Mexique est le premier à annoncer qu’il n’est plus en mesure de rembourser. C’est la fin de l’acte 2, court mais brutal.

 

Acte 3 : les plans d’ajustement structurel

Cette crise de la dette résonne comme un coup de tonnerre dans le monde politique et économique. Les institutions internationales, censées réguler le système et prévenir les crises, n’ont rien vu venir.

Dès qu’un pays est contraint de stopper ses remboursements, le Fonds Monétaire International (FMI) arrive en pompier financier. Mais un drôle de pompier, qui a exacerbé le vice des pyromanes...

Plus personne d’autre ne veut prêter à ces pays qui ne peuvent plus rembourser. Le FMI est leur seul recours. Il accepte de prêter l’argent nécessaire (qui permet surtout de sauver les créanciers - souvent privés - du Nord), au taux fort bien sûr, mais à condition que le pays concerné accepte de mener la politique décidée par ses experts : ce sont les fameuses conditionnalités du FMI. En un mot, la politique économique de l’État endetté passe sous contrôle du FMI et de ses experts ultralibéraux. Là se situe l’apparition d’une nouvelle colonisation : une colonisation économique. Même plus besoin d’entretenir une administration et une armée coloniale sur place, le mécanisme de la dette se charge tout seul de gérer la dépendance.

Les mesures préconisées sont inscrites dans un Plan d’ajustement structurel (PAS), qui correspond toujours au même schéma : abandon des subventions aux produits et services de première nécessité : pain, riz, lait, sucre, combustible... ; austérité budgétaire et réduction des dépenses, en général baisse drastique des budgets sociaux “non-productifs” (santé, éducation, subventions aux produits de base) ; dévaluation de la monnaie locale ; taux d’intérêt élevés, pour attirer les capitaux étrangers avec une rémunération élevée ; production agricole toute entière tournée vers l’exportation (café, coton, cacao, arachide, thé etc.) pour faire rentrer des devises, donc réduction des cultures vivrières et déforestation pour gagner de nouvelles surfaces ; ouverture totale des marchés par la suppression des barrières douanières ; libéralisation de l’économie, notamment abandon du contrôle des mouvements de capitaux et la suppression du contrôle des changes ; fiscalité aggravant encore les inégalités avec le principe d’une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et la préservation des revenus du capital ; privatisations massives des entreprises publiques, donc un désengagement de l’État des secteurs de production concurrentiels... La potion est très amère.

Par exemple, au Mali, Alpha Oumar Konaré est élu Président en 1992, après la dictature du général Moussa Traoré. Sa politique est docile à l’égard du FMI et son but est le rétablissement des grands équilibres macro-économiques. Il s’applique à promouvoir les activités marchandes privées et à assainir le secteur public, comme on dit au FMI. Les effectifs de la fonction publique passent alors de 45 000 en 1991 à 37 700 en 1998, et les salaires publics subissent une baisse en valeur réelle comprise entre 11 % et 18 %. La pression fiscale est passée de 8,5 % en 1988 à 14 % en 1998, tandis que les dépenses courantes sont passées de 15 % du PIB à 10,8 %. Et le gouvernement est tout fier d’en déduire que sur le plan des grands équilibres, “la politique d’ajustement a permis une amélioration notable” ! Sur les 90 entreprises publiques en 1985 au Mali, il en reste 36 en 1998, 26 ayant été liquidées et 28 privatisées. Si bien qu’en 1988, 75 % des recettes fiscales du gouvernement passaient dans la masse salariale de ses fonctionnaires, contre 27 % en 1998. C’est ce que le gouvernement qualifie d’ “assainissement notable des dépenses”. Et ça continue : en 2000, audits de la Caisse de Retraite du Mali (CRM) et de l’Institut National pour la Prévoyance Sociale (INPS) et adoption d’un plan d’assainissement de leurs finances ; vente de 60 % du capital d’Électricité du Mali (EDM) ; vente de l’Hôtel de l’Amitié ; privatisation à 35 % de la Société Nationale des Tabacs et Allumettes du Mali (SONATAM), avec privatisation totale en vue ; liquidation de la Société Malienne de Matériel de Travaux Publics (SLMTP), de l’Office des Relais Touristiques (ORT) et de la Société Nationale de Recherche et d’Exploitation Minière (SONAREM).

Pourtant le niveau de vie des populations ne décolle pas pour autant. Quelques chiffres suffisent : en 1999, le taux brut de scolarisation primaire est de 56 % ; le nombre moyen d’élèves par enseignant dans le primaire est 79 ; 27 % des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition ; 59 % de la population a accès à un centre de santé à moins de 15 km ; 17 % des logements sont équipés de l’eau courante et 12 % de l’électricité.

Autre exemple : en juillet 1999, le FMI a accordé un crédit à Madagascar. En échange, le gouvernement procède à d’importantes réformes structurelles, comme la privatisation de la seconde banque publique du pays (une banque agricole), ainsi qu’à la libéralisation des secteurs des télécoms, de la pêche et des ressources minières. La compagnie pétrolière publique (Solima) fut privatisée avec retard, en juin 2000 seulement. Mais, comme le pays appliquait gentiment la politique qu’on entendait lui imposer, il méritait une nouvelle bouffée d’oxygène financière. Dès juillet 2000, la première tranche d’un nouveau crédit d’ajustement structurel de la Banque mondiale fut débloquée. C’est donnant-donnant...

En outre, le FMI a l’habileté de faire reposer la responsabilité de ces décisions sur les gouvernements en place au Sud. Tous les ans, chaque État doit établir des rapports analysant la situation économique et traçant des perspectives pour l’avenir. Dans un sens ultralibéral, bien évidemment. Les prêts et rééchelonnements divers ne sont accordés qu’à condition que ces rapports aillent dans le “ bon ” sens, complétés par des visites de gentlemen de la Banque Mondiale ou du FMI pour s’en assurer directement. En fait, les institutions financières internationales font signer par les autorités en place la liste de leurs propres revendications, pour mieux expliquer le cas échéant qu’elles n’ont fait qu’entériner les choix des autochtones... Le mécanisme de la dette est un mécanisme de subordination très subtil et très impressionnant.

 

Acte 4 : L’utilisation des sommes au Sud

Les emprunts massifs contractés par les dirigeants des pays du Sud n’ont pourtant que très peu profité aux populations. La majeure partie fut décidée par des régimes dictatoriaux, alliés stratégiques de grandes puissances du Nord. Une partie importante des sommes empruntées a été détournée par ces régimes corrompus. Ils ont d’autant plus facilement accepté d’endetter leur pays qu’ils ont prélevé au passage des commissions avec le soutien des autres acteurs de l’endettement. Comment expliquer qu’à sa mort, Mobutu Sese Seko, à la tête du Zaïre pendant plus de 30 ans, disposait d’une fortune estimée à 8 milliards de dollars, équivalant aux deux tiers de la dette de son pays, sans compter l’enrichissement de ses proches ? Ou qu’à Haïti, en 1986, la dette extérieure s’élevait à 750 millions de dollars lorsque la famille Duvalier, qui a gouverné d’une main de fer pendant trente ans (d’abord François - dit Papa Doc - puis Jean-Claude - dit Bébé Doc), a pris la fuite vers la Côte d’Azur française avec une fortune évaluée à plus de 900 millions de dollars ? Quelle autre explication trouver à l’enrichissement de la famille de Suharto en Indonésie dont la fortune, au moment où il a été chassé du pouvoir en 1998 après 32 ans de règne, était estimée à 40 milliards de dollars, alors que son pays était en plein marasme ?

Parfois, comme dans le cas de la dictature argentine (1976-1983), la situation est ubuesque. Pendant cette période, la dette a été multipliée par 5,5 pour s’élever à 45 milliards de dollars en 1983, essentiellement contractée auprès de banques privées, avec l’accord des autorités américaines. Dès 1976, un prêt du FMI avait donné un signe fort aux banques du Nord : l’Argentine de la dictature était fréquentable. La junte au pouvoir a recouru à un endettement forcé des entreprises publiques, comme la compagnie pétrolière YPF dont la dette externe est passée de 372 millions de dollars à 6 milliards de dollars, elle a donc été multipliée par 16 en 7 ans. Mais les devises empruntées à cette époque ne sont pratiquement jamais arrivées dans la caisse des entreprises publiques. Les sommes empruntées aux banques des États-Unis y étaient en grande partie replacées sous forme de dépôts, à un taux inférieur à celui de l’emprunt. On a assisté alors à un enrichissement personnel des proches du pouvoir dictatorial via des commissions importantes. À titre d’exemple, entre juillet et novembre 1976, la Chase Manhattan Bank a reçu mensuellement des dépôts de 22 millions de dollars et les a rémunérés à environ 5,5 % ; pendant ce temps, au même rythme, la Banque centrale d’Argentine empruntait 30 millions de dollars à la même banque à un taux de 8,75 %. Tout cela s’est fait avec le soutien actif du FMI et des États-Unis, permettant un maintien du régime de terreur tout en rapprochant l’Argentine des États-Unis après l’expérience nationaliste de Peron et de ses successeurs.

Ainsi, la dette s’est accrue très vite, tout comme la richesse personnelle des proches du pouvoir. Ce fut également bénéfique pour les banques du Nord : l’argent revenait en partie dans leurs coffres, et pouvait être prêté de nouveau à d’autres qui l’ont eux aussi remboursé... De plus, la fortune des dictateurs était très utile aux banques car elle leur servait de garantie. Si soudain le gouvernement d’un pays endetté montrait de la mauvaise volonté à rembourser les prêts contractés au nom de l’État, la banque pouvait gentiment menacer de geler les avoirs personnels secrets des dirigeants, voire de les confisquer. La corruption et les détournements ont donc joué un rôle important.

Par ailleurs, l’argent qui parvenait tout de même dans le pays emprunteur a été utilisé de manière bien ciblée.

Les crédits sont allés en priorité aux méga-projets énergétiques ou d’infrastructures (barrages, centrales thermiques, oléoducs...), très souvent inadaptés et mégalomaniaques, que l’on a surnommés « éléphants blancs ». Le but n’était pas d’améliorer la vie quotidienne des populations sur place, mais plutôt de parvenir à extraire les richesses naturelles du Sud et les transporter facilement vers le marché mondial. Par exemple, le barrage d’Inga au Zaïre a permis de tirer une ligne à haute tension sans précédent de 1.900 kilomètres vers le Katanga, province riche en minerais en vue de leur extraction. Mais cette ligne ne s’est pas accompagnée de l’installation de transformateurs pour fournir de l’électricité aux villages qu’elle survole...

Cette logique prévaut encore régulièrement, comme le prouve la construction du pipe-line Tchad-Cameroun, lancé au milieu des années 1990 et permettant d’amener le pétrole de la région de Doba (Tchad, enclavé) au terminal maritime de Kribi (Cameroun), à 1.000 kilomètres de là. Sa mise en place se fait au plus grand mépris des intérêts des populations. Par exemple, à l’origine, pour indemniser les populations des dommages causés par ce projet cofinancé par la Banque mondiale et associant Shell, Exxon et Elf, les responsables ont proposé 3000 FCFA (4,5 dollars) par pied de manguier détruit, alors que selon le député tchadien Ngarléjy Yorongar, la première production de cet arbre peut donner 1000 mangues dont chacune peut se négocier environ 100 FCFA (0,15 dollar)...

L’achat d’armes ou de matériel militaire pour opprimer les peuples a aussi compté dans la montée de l’endettement. Nombre de dictatures ont maintenu leur emprise sur les populations en achetant à crédit des armes, avec la complicité active ou passive des créanciers. Les populations d’aujourd’hui remboursent donc une dette qui a permis d’acheter les armes responsables de la disparition des leurs, que l’on pense aux 30.000 disparus en Argentine sous la dictature (1976-1983), aux victimes du régime d’apartheid en Afrique du Sud (1948-1994) ou du génocide au Rwanda (1994). L’argent emprunté servait aussi à alimenter les caisses noires des régimes en place, pour compromettre les partis d’opposition et financer des campagnes électorales coûteuses et des politiques clientélistes.

Les prêts vont aussi en priorité à l’aide liée. L’argent sert alors à acheter des produits fabriqués par les entreprises du pays créancier, contribuant à redresser sa balance commerciale. Les besoins réels des populations des PED passent au second plan.

Infrastructures imposées par les multinationales du Nord, aide liée, achat d’armes pour une répression massive, détournements et corruption, voilà à quoi ont servi les sommes empruntées pendant des décennies.

 

Acte 5 : la coupe déborde

Dans les années 90, dans leur très grande majorité, les pays en développement sont tombés sous la coupe du FMI. Mais rien n’est réglé pour autant, bien au contraire. La dette continue sa course folle, on l’a vu, et les crises financières se multiplient. L’ouverture totale du Tiers Monde aux capitaux étrangers et les mesures libérales imposées par le FMI ont attiré des capitaux fortement volatils, prêts à déguerpir dès les premiers signes de fragilité économique. Ce fut le cas en Amérique du Sud en 1994, puis en Asie du Sud-Est en 1997, en Russie en 1998, de nouveau en Amérique latine en 1999, en Turquie entre 1999 et 2002, en Argentine en 2001-2002, au Brésil en 2002. Mais toujours et partout, les mêmes recettes sont imposées : de nouveaux prêts en échange d’une libéralisation accentuée de l’économie. D’ailleurs ces nouveaux prêts alourdissent la dette, mais ne sont pas destinés à restaurer un peu de bien-être pour les populations du Sud. Ils sont juste là pour permettre à l’État en crise de rembourser ses créanciers du Nord, souvent responsables d’investissements risqués et hasardeux...

À chaque fois, la priorité est donnée à la poursuite du remboursement de la dette. Ainsi, depuis la crise de 1994, les revenus des exportations de pétrole du Mexique transitent par un compte situé au États Unis, et un magistrat américain a l’autorisation de bloquer les flux de ce compte vers le Mexique s’il ne rembourse pas sa dette. Les États ainsi dominés par le FMI perdent leur souveraineté : c’est effectivement une colonisation économique.

La dégringolade du prix des matières premières se poursuit inexorablement. Ce que l’on observe ressemble bien plus à du pillage des ressources du Sud qu’à des échanges commerciaux équitables.

Au milieu des années 90, les dirigeants des pays les plus riches sont particulièrement inquiets pour le système financier international. En 1996, le sommet du G7 de Lyon décide donc de lancer une initiative fort médiatisée pour alléger quelque peu la dette des pays pauvres : l’initiative PPTE (« Pays pauvres très endettés »).

Cette initiative, renforcée au sommet du G7 de Cologne en 1999, est censée alléger la dette des pays pauvres et très endettés. Mais elle est mal née : elle ne résout rien. Elle ne concerne qu’un petit nombre de pays très pauvres (42 sur 165 PED) et son but se limite à rendre leur dette extérieure soutenable. Le FMI et la Banque mondiale essaient d’alléger la dette juste ce qu’il faut pour mettre fin aux arriérés et aux demandes de restructurations, sans même y parvenir d’ailleurs. Mais surtout ils profitent de cette initiative qui semble généreuse pour imposer un renforcement de l’ajustement structurel. Malgré une apparence de changement, la logique demeure.

Pour bénéficier d’un allégement de dette dans le cadre de l’initiative PPTE, les étapes sont nombreuses et exigeantes, et nécessitent un temps démesurément long.18

 

 

Dette du Sud : où en est-on ?

Entre 1970 et 2011, les pays du Tiers Monde ont remboursé près de 100 fois le stock initial de leur dette extérieure publique et celle-ci a malgré tout été multipliée par 33 (de 46 milliards de dollars elle est passée à 1.532 milliards, et ils ont depuis remboursé plus de 4.000 milliards...). Leur situation s’est-elle améliorée depuis ? Pas vraiment... Aujourd’hui l’épicentre de la crise de la dette s’est déplacé au Nord, plus particulièrement en Europe, et certains pays du Sud ont considérablement augmenté leur poids économique sur la scène internationale. Toutefois, cela ne s’est pas traduit en une amélioration des conditions de vie de leurs populations ni en une remise en cause du système dette.

 

Où en est-on ?

Les montants remboursés n’ont donc pas vraiment diminué, et la domination sur les économies du Sud par les multinationales (financières et non financières) du Nord a perduré. Cependant, plusieurs évolutions récentes dans l’hémisphère Sud sont à souligner et le contexte international a évolué depuis la crise de la dette des pays du Sud.

Première évolution notable, la dette publique interne augmente plus vite que la dette externe (qui, dans certains cas, diminue). La première est due en monnaie locale, la seconde en monnaie étrangère. Il s’agit d’une nouvelle manière de se financer (la dette publique interne des pays émergents a par exemple plus que quintuplé entre 2000 et 2013) mais qui peut revêtir des caractères tout autant illégitimes qu’avec une source de financement extérieure. Il s’agit donc de s’attaquer également à cette nouvelle montagne de dette publique et de ne pas juste écouter les discours rassurants des gouvernements.

Certains pays du Sud ont récemment vécu une conjoncture favorable, mais cette situation peut se retourner. En effet, les prix des matières premières ont augmenté depuis 2003-2004, et donc les rentrées qu’elles occasionnent, mais il s’agit d’un marché très volatil dont ces pays resteront dépendants s’ils restent dans un modèle économique extractiviste-exportateur. Aujourd’hui, les réserves de change des pays du Sud pris ensemble sont trois fois plus importantes que leurs dettes extérieures. Le Sud est donc un créancier net du Nord. Bien entendu, ils ne sont pas tous logés à la même enseigne, les grandes économies s’en tirent mieux. Le Brésil et la Chine prêtent par exemple aux États-Unis en leur achetant leurs bons du trésor et les détiennent à hauteur de, respectivement, 250 et 1.300 milliards de dollars. L’Algérie, elle, a remboursé anticipativement le FMI en 2006 et lui prête aujourd’hui.

Ce dont il faut s’inquiéter c’est que les pays en situation favorable n’ont pas utilisé leurs réserves pour autre chose que continuer à assurer le service de la dette et le développement de projets qui ne leur permettent pas de sortir du modèle de production capitaliste.

Plus fort encore, c’est le Sud qui finance le Nord et non l’inverse. Entre 1985 et 2009, on considère que le transfert net financier – c’est-à-dire les prêts et les dons moins les remboursements – ont été de 666 milliards de dollars du Sud vers le Nord. C’est l’équivalent de 6,5 plans Marshall qui leur ont été soutirés à travers le remboursement continu de dettes illégitimes. La dette extérieure, en tout cas pour les pays les plus faibles, continue de servir de moyen pour leur imposer des politiques contraires à leurs intérêts.

Nous restons dans un monde où les 82 % de la population vivant au Sud ne se partagent que 32 % du PIB mondial, et le reste du monde les 68 % restant. Tout en sachant que les 10 % les plus riches au niveau mondial détiennent entre 80 % et 90 % du patrimoine mondial, et le 1 % le plus riche 50 %. Un cinquième de la population mondiale vit avec moins de 2$ par jour ; la crise alimentaire de 2008-2009 (entre autres provoquée par la bulle spéculative faisant suite à celle des subprimes) a rajouté 120 millions de personnes aux 900 millions souffrant déjà de la faim ; 70 % de ces personnes sont des femmes et des filles ; les effets des changements climatiques se font chaque année sentir plus fortement au Sud et dans les régions les plus pauvres ; 1 personne sur 6 n’a pas accès à des installations sanitaires élémentaires ; 6 millions d’enfants meurent chaque année avant leurs 5e anniversaire ; etc. Dans ce monde, une première étape pour assurer les besoins fondamentaux de toutes les populations et leur émancipation est l’annulation de la dette des pays du Tiers Monde, dette qui de plus ne représente que 2 % des créances mondiales...

 

Quel que soit le pays débiteur, une opération unilatérale d’annulation de la dette – quelle soit odieuse, illégale, illégitime ou tout simplement impayable – est une condition nécessaire (bien qu’insuffisante) pour assurer le droit au développement autodéterminé de sa population.

 

De même, les pays créanciers peuvent tout à fait auditer et annuler leurs créances envers les pays du Sud, à l’exemple de ce qu’a fait la Norvège en 2006 en annulant sans condition les dettes de l’Équateur, de l’Égypte, de la Jamaïque, du Pérou et de la Sierra Léone tout en reconnaissant sa part de responsabilité dans cet endettement illégitime. En Belgique, la plateforme d’audit citoyen ACiDe rappelle que l’État s’était engagé à faire de même et ne l’a toujours pas fait. Le montant total des créances de la Belgique envers les pays du Sud s’élève à environ 2 milliards d’euros, soit près de cinq fois moins que ce qui a été injecté dans la seule banque Dexia depuis 2008 (ou +- 0,5 % du PIB). Au niveau Européen et international, c’est le réseau ICAN (International Citizen debt Audit Network) qui remet la question de la désobéissance au système dette au centre du débat.19

 

 

Dette illégitime (odieuse) des pays en voie de développement : la fonctionnalité de la cessation de paiement

C’est parfaitement possible pour un pays de refuser de payer sa dette.

Entretien avec Éric Toussaint, président du Comité pour l’annulation de la dette du Tiers monde (en 2011).

Le Comité pour l’annulation de la dette du Tiers monde invite les gouvernements africains à suivre l’exemple de certains pays de l’Amérique du Sud qui ont refusé de payer la dette illégitime, réclamée aux pays en développement. De l’avis d' Eric Toussaint, ‘'c’est parfaitement possible pour un pays de refuser de payer sa dette’'. Et les exemples sont légion dans le monde.

Équateur, Argentine, Paraguay. Voilà autant de pays qui ont refusé de payer leurs dettes à la Banque mondiale, au FMI, au Club de Paris et aux banquiers. C’est le Belge Eric Toussaint, le président du Comité pour l’annulation de la dette du Tiers monde (CADTM) qui l’a révélé au cours d’une conférence de presse à l’Ucad dans le cadre du Forum social mondial. ‘'Si je vous donne tous ces exemples, c’est pour vous montrer que c’est parfaitement possible pour un pays de refuser de payer sa dette. Et que contrairement à ce qu’on fait passer comme message, cela ne produit pas le chaos. L’Argentine a connu un taux de croissance de plus de 8 % de 2003 à 2011. L’Équateur connaît un taux de croissance de 3 à 4 %. Ces pays n’ont pas connu le chaos. Bien au contraire, ils ont enregistré une amélioration des salaires, des pensions et des conditions de vie des populations'’, soutient Eric Toussaint qui a participé à l’audit de la dette de ces pays.

Ce qui lui fait dire que cela peut inspirer les pays africains à qui on réclame une '‘dette illégitime et illégale'’. Parmi toutes ces expériences, sources d’inspiration en Amérique latine, le plus intéressant, c’est l’Équateur où le CADTM a directement participé à l’audit de la dette. ‘'Un nouveau président a été élu fin 2006 qui s’appelle Raphaël Corréa à la tête d’un processus qu’il appelle lui-même révolution citoyenne. Immédiatement il s’est engagé à faire l’audit de l’endettement de l’Équateur de 1976 à 2006 par une commission de dix-huit experts en dette dont moi-même. Après quatorze mois de travaux, après avoir épluché des dizaines de milliers de dossiers et des centaines de contrats, nous avons soumis nos recommandations au gouvernement. Et après avoir identifié que 80 % de la dette publique de l’Équateur était de la dette illégitime, et sur la base de nos recommandations, le gouvernement a unilatéralement décidé de suspendre le paiement de la dette sous forme de bons'’, renseigne Toussaint.

Il s’agit, dit-il, des titres de la dette publique vendus sous forme de bons sur les marchés financiers, en particulier à Wall Street. Des bons qui venaient à échéance entre 2012 et 2030 pour un montant de 3 230 millions de dollars. ‘'Il y a eu donc un acte souverain unilatéral de suspension du paiement de la dette. Du coup, les détenteurs de ces titres de la dette, qui étaient des banquiers nord-américains, se sont mis à les vendre sur le marché à 20 % de leur valeur. Finalement, le gouvernement équatorien est arrivé à racheter 91 % des titres pour un coup total de 900 millions de dollars. Ce qui fait une économie, si on calcule le stock de capital racheté à bas prix et les intérêts qui ne sont pas payés jusqu’en 2030, d’où un bénéfice de plus de 7000 millions de dollars. Ce qui a permis au gouvernement très concrètement de faire passer dans le budget de l’État le service de la dette qui était de 32 % à 15 % et de faire passer les dépenses sociales qui représentaient 12 % à 25 % du budget. Donc, il y a une inversion des priorités’', informe-t-il.

Eric Toussaint révèle que '‘l’Équateur, et vous n’en avez pas entendu parler, a expulsé le représentant permanent de la Banque mondiale. Parce que la Banque mondiale ne veut pas qu’on sache qu’on peut expulser ses représentants. L’Équateur a mis dehors le FMI qui avait ses locaux au sein de la banque centrale. L’Équateur a quitté le tribunal de la banque mondiale qui est le Centre international de règlement des différends. Ce que la Bolivie a fait, deux ans auparavant. Donc nous pensons que cet exemple, qui s’est passé en Équateur, peut parfaitement se passer dans la majorité des pays en Afrique. Cela devrait être reproductible en Grèce, par exemple, qui est confrontée à une crise terrible de la dette'’.

 

Le temps des audits de la dette

Autre exemple servi lors de cette conférence : l’Argentine. D’après Toussaint, ce pays a suspendu en 2001 le paiement de la dette, justement après un mouvement social un peu comparable à celui de la Tunisie de janvier 2011. ‘'L’Argentine a suspendu le remboursement de 1000 milliards de remboursement de titres de la dette de décembre 2001 à mars 2005. L’Argentine a également suspendu les remboursements de la dette au Club de Paris qui est un des principaux créanciers des pays d’Afrique subsaharienne avec le FMI et la BM… L’Argentine a suspendu le paiement de sa dette à l’égard du Club de Paris pour un montant de 6 milliards de dollars de 2001 jusqu’à aujourd’hui. Il n’y a aucun journaliste qui a entendu parler de cela. Parce que le Club de Paris ne veut pas qu’on sache ailleurs dans le monde qu’on peut refuser de le payer. Le Club de Paris ne dit rien et fait tout pour que cela ne se sache pas. Après dix ans de non paiement, l’Argentine dit qu’on peut recommencer à dialoguer avec le Club de Paris, mais le FMI n’en fera pas partie. Le Club de Paris a accepté ; alors que d’habitude, il exige la présence du FMI’, fait-il remarquer.

Le dernier exemple qu’Eric Toussaint a donné, c’est le Paraguay qui a répudié sa dette à l’égard des banquiers suisses en 2005. '‘La Suisse n’est pas contente et a porté plainte contre le Paraguay qui a dit: 'on s’en fout de ces condamnations. Mieux que cela, nous allons déposer une plante à la Haye contre la Suisse qui protège ses banquiers suisses'. ''Et la Suisse ne dit rien non plus", ajoute-t-il. Avant de souligner qu’il donne cet exemple, pour qu’on sache qu’il y a d’autres sources d’inspiration pour d’autres gouvernements. ‘'Les gouvernements sous la pression des mouvements sociaux doivent lancer des audits de la dette. Et prendre des mesures unilatérales de non-paiement de la dette'’, commente Toussaint. Il pense que la Tunisie pourrait suivre l’exemple '‘si on a un gouvernement dont sont absents les représentants du Rcd, un gouvernement réellement en rapport avec les mouvements sociaux pourra mettre en place une commission d’audit de la dette et à l’issue des résultats décider la suspension du paiement'’.20

 

 

Brisons l’engrenage mortifère de la dette publique !

Par Éric Toussaint.

Il est possible et nécessaire de désobéir aux institutions financières internationales et à la Troïka, de refuser les diktats des créanciers privés afin de retrouver une marge de manœuvre pour améliorer la situation des pays et de leur population. La fermeté paie ! Plusieurs exemples concrets de pays qui ont osé défier leurs créanciers le démontrent.

 

Au Sud, puis, aujourd’hui, au Nord, l’endettement des États, des gouvernements est un prétexte et une arme redoutable pour justifier et imposer les « réformes » au profit du capitalisme, des banques privées, des fonds de placements financiers. C’est à une thérapie de choc, à des mesures de régression sociale sans précédent que la « Troïka » - Le fonds monétaire international, la Commission européenne et la Banque centrale européenne-, avec l’aval des gouvernements-, veut soumettre la population des différents pays.

L’endettement des États n’est-il pas, pour une grande partie, le résultat des politiques néolibérales, menées depuis une trentaine d’années par des gouvernements de droite et de « gauche », avec les cadeaux fiscaux au patronat , aux groupes financiers et aux grosses fortunes ? Le gonflement récent des dettes publiques n’aurait-il rien à voir avec les milliards d’euros puisés dans les budgets publics pour « sauver » les banques privées ? Des budgets alimentés, pour l’essentiel, par les revenus du travail ! Les emprunts successifs, contractés parles États, à des taux d’intérêts scandaleux, auprès de ceux-là mêmes- les banques, les fonds de placements financiers- qui accumulent les cadeaux fiscaux, sont assortis, en Grèce et ailleurs, de plans d’austérité drastique, de dépeçage des biens publics. Quant au service de la dette - du remboursement des intérêts-, il est devenu, dans bien des États, un des premiers postes des dépenses publiques ! Le cercle vicieux, cynique et mortifère de la dette publique est ainsi bouclé.

 

Il y a un choix à faire entre privilégier la vie, les droits humains fondamentaux et, d’autre part, rembourser la dette. La dette, c’est une question centrale. Si on veut maintenir des droits conquis par les luttes, stopper des mesures de régression sociale, sans précédent dans les pays de l’Union européenne, et aussi améliorer l’accès à toute une série de droits fondamentaux, il faut une solution radicale concernant la dette publique, en commençant par annuler la dette illégitime.

 

Aujourd’hui, la dette publique au Nord est le prétexte tout trouvé pour justifier l’application de plans d’austérité sur le modèle des plans d’ajustement structurel supportés, dès le début des années 1980, par les pays du Sud de planète. (...)

Si, récemment, le CADTM s’est penché sur la réalité de l’endettement public des pays du Nord, ceux de l’Union européenne en particulier, c’est que, depuis l’éclatement, en 2007-2008, de la crise la plus importante depuis 1929, ces pays sont confrontés aux mêmes politiques d’ajustement structurel qu’ont subi et subissent toujours les pays du Sud. Sous la férule de la « Troïka » - le FMI, l’Union européenne et la Banque centrale européenne-, les pays périphériques de l’UE (Roumanie, Lettonie, Hongrie), puis la Grèce, l’Irlande, le Portugal, l’Espagne et, déjà dans une moindre mesure actuellement, la France, l’Allemagne, la Belgique…) sont soumis à une régression sociale sans précédent. Les mesures sont partout les mêmes : réduction des salaires dans la fonction publique, licenciements, non remplacement du personnel partant à la retraite, allongement de l’âge pour la pension, privatisations, etc. Nous assistons à une nouvelle phase de l’offensive du capital contre le Travail. La « Troïka et les gouvernements ne conçoivent pas d’autres voies pour réduire l’endettement et les déficits publics, qui ont atteint un seul insoutenable.

On constate un peu partout une augmentation de l’endettement des États. Mais, posons-nous la question : pourquoi une telle situation? Je voudrais évoquer trois aspects de l’explosion de l’endettement public au Nord.

Début des années 1980, les taux d’intérêts, au Sud et au Nord, ont explosé, à partir d’une décision prise à Washington.

Les années 1990-2000 ont vu l’application en Europe de politiques néo-libérales se cristallisant sur des contre-réformes fiscales, avec une réduction des recettes fiscales due à une diminution importante des impôts sur les bénéfices des sociétés privées et sur les revenus des ménages les plus riches. Les États ont pallié partiellement à cette situation par l’augmentation des impôts indirects, la TVA, par l’augmentation de la fiscalité chez les travailleur-euse-s et par le recours à de nouveaux emprunts auprès des plus riches.

Puis, il y eu, en octobre 2008, dans toute une série de pays du Nord, le sauvetage des banques privées, qui avaient pris des risques inconsidérés, s’adonnant à la spéculation financière. Un sauvetage à coup de centaines de milliards de dollars et d’euros, par les États, avec l’argent des contribuables. En Belgique, c’est plus de 20 milliards d’euros que l’État a injecté pour « sauver » Fortis, KBC, Dexia et Ethias. Un sauvetage des banques qui a joué un rôle déterminant dans l’augmentation de la dette publique belge. Tous ces éléments m’amène à taxer d’illégitime une partie de la dette publique.

Le CADTM prône l’annulation de la partie illégitime de la dette publique. Il y a d’ailleurs différentes conventions internationales, la Charte des Nations unies, la Déclaration universelle des droits de l’Homme, la Déclaration de l’ONU sur le droit au développement, les pactes internationaux de 1966 sur les droits économiques sociaux et culturels, etc., sur lesquelles on peut s’appuyer pour justifier qui légitiment la suspension et la répudiation/annulation de la dette publique.

Le concept d’illégitimité comprend notamment les dettes odieuses et illégales.

Les dettes contractées auprès du FMI, de la Commission européenne, de la Banque centrale européenne ou encore sur les marchés financiers et qui justifient, pour ces instances, l’application de politiques d’ajustement structurel ou d’austérité, en violation des droits économiques, sociaux, culturels, civils et politiques peuvent être qualifiées de dettes odieuses. Les plans d’austérité brutaux, appliqués dans des pays comme la Roumanie, la Hongrie, la Lettonie, puis en Grèce, en Irlande, au Portugal pour éponger la dette et les déficits publics, entraînent la violation des droits humains fondamentaux. La dette liée à ces plans d’ajustement structurel peut être considérée comme odieuse et doit être annulée.

Il y a aujourd’hui une autre catégorie de pays, la France, la Grande-Bretagne, la Belgique et d’autres pays de l’Union européenne, qui ont contracté des dettes pouvant être qualifiées d’illégitimes. Dans ces pays, les gouvernements ont sciemment appliqué des politiques injustes socialement et qui ont entraîné une augmentation de la dette publique à travers des mesures favorables à la classe capitaliste. C’est ce que j’ai déjà expliqué en présentant les raisons principales de l’endettement de ces États : les contre-réformes fiscales au profit des sociétés privées et des hauts revenus, le sauvetage des banques avec l’argent de la collectivité, etc. Trente ans de politique néo-libérale marquent d’illégitime cette partie de la dette publique, qui réalise, au-delà de toutes les espérances du capital, un transfert gigantesque de richesses vers les banques et les fonds de placements financiers aux dépens des salariés. Cette dette illégitime devrait être annulée.21

 

 

Ce n'est pas un hasard si le porte-parole du réseau international du Comité pour l'Annulation de la dette du Tiers Monde s'appelle Eric TOUSSAINT, car Dieu nous fait comprendre que nous devons être TOUS UNIS derrière le mouvement humaniste le jour de l'élection présidentielle afin d'annuler les dettes illégitimes.

 

Le BRESIL est l'inventeur de l'audit de la dette. Ainsi « en 1932, le premier audit fut pratiqué par le Parlement. Celui-ci mit au jour de multiples irrégularités, des prêts gigantesques ayant été obtenus et attribués sur la base de documents falsifiés et d'irrégularités subtiles commises lors de l'établissement des contrats. Le gouvernement de l'époque refusa d'honorer la partie de la dette marquée du sceau de l'escroquerie. Il eut gain de cause : les banquiers étrangers renoncèrent ''librement'' à celles de leurs créances qui avaient été frauduleusement constituées. »22

 

BRESIL = LIBRES

 

À travers le BRESIL, Dieu nous montre le chemin à suivre pour nous libérer du nazi-capitalisme car les plus riches nous imposent leur dictature en utilisant notamment l'arme redoutable de la dette pour nous imposer des mesures de régression sociale au profit du capitalisme, donc désormais, nous devons prendre le pouvoir en main et refuser de payer LEURS dettes illégitimes !

 

Alors TOUS UNIS derrière le mouvement humaniste le jour de l'élection présidentielle !

 

 

De la « neutralité » de la Turquie dans la Deuxième Guerre mondiale…à son allégeance à l’impérialisme américain

En novembre 1938, Mustafa Kemal mourut d’une cirrhose du foie, car il ne détestait pas les soirées dans les cabarets et la consommation d’alcool. Cela n’ébranla pas le pouvoir. Son principal lieutenant, Ismet Inönü, lui succéda en continuateur et en gardien de sa pensée. En hommage à Mustafa Kemal, toutes les places des villes et des villages s’ornèrent de statues de ce héros national, avec sa devise « quel bonheur de pouvoir se dire turc ».

Face à la menace grandissante d’une nouvelle guerre mondiale, puis au cours du conflit lui-même, les dirigeants alternèrent les gestes envers l’impérialisme français ou britannique, les traités de non-agression avec l’URSS, puis avec l’Allemagne. Restée officiellement neutre, la Turquie attendit opportunément février 1945 pour déclarer la guerre à l’Allemagne.

La bourgeoisie s’enrichit considérablement durant la Seconde Guerre mondiale : ses aspirations et ses exigences s’en trouvèrent décuplées. Cela impliquait de s’intégrer au commerce international, de pouvoir accéder au marché des capitaux et donc de renoncer aux discours anti-impérialistes.

Après 1945, avec la guerre froide et la naissance des blocs américain et soviétique, la situation internationale se trouvait elle-même profondément changée. Pour leur part, les dirigeants des États-Unis étaient en position de force pour exercer leurs pressions et imposer leur politique dans cette région stratégique.

La Turquie leur fit allégeance et elle fut ajoutée, en 1947, aux bénéficiaires du plan Marshall. Elle intégra le conseil de l’Europe en 1949, l’OTAN deux ans plus tard, mais aussi la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International et l’OCDE. Un corps expéditionnaire turc fut envoyé aux côtés des troupes américaines lors de la guerre de Corée en 1950.

En 1955, la Turquie signa le pacte de Bagdad qui devait réunir les dictatures alliées des USA et de la Grande-Bretagne au Moyen-Orient. Et ses dirigeants furent de fervents opposants aux nationalistes algériens puis à Nasser, dont le langage radical et l’influence inquiétaient les grandes puissances. D’un État construit sur une opposition au contrôle de l’impérialisme, la Turquie devenait un allié dévoué de celui-ci.

 

De la mainmise réactionnaire du Parti Démocrate au régime des « colonels » (1950-1960)

Les dirigeants des États-Unis impulsèrent également un ravalement de façade du régime turc.

Le système du parti unique fut abandonné. Dès 1946, un parti concurrent au CHP vit le jour : le Parti démocrate. Il était dirigé par plusieurs anciens cadres du parti de Mustafa Kemal, dont Celal Bayar, son dernier premier ministre et proche des milieux financiers et Adnan Menderes, lui-même grand propriétaire foncier.

Lors des élections de 1950, le Parti démocrate s’appuya sur les fractions les plus rétrogrades de la société dont les rancœurs étaient attisées par le clergé, les grands propriétaires terriens et tous ceux qui avaient des comptes à régler avec le régime kémaliste. Ces forces sociales, en particulier dans les campagnes, qui considéraient Kemal comme un adversaire des traditions, de la religion, voire, horreur, un socialiste voyaient leur revanche arriver. Le Parti démocrate s’empara des rênes du pouvoir pour une décennie, ouvrant ainsi une période de profonde réaction politique.

Tout le fatras dont le régime kémaliste pensait s’être débarrassé refaisait brutalement surface.

Le Parti démocrate adopta une série de mesures destinées à réintroduire en force les tenants de la religion musulmane. Des mausolées furent de nouveau accessibles, l’interdiction de l’appel à la prière en arabe fut levée, les cours de religion à l’école, puis dans le secondaire, furent étendus. Il fallait désormais faire une demande pour en être dispensé… Des écoles d’imams furent rouvertes. Un Institut islamique fut créé pour former les enseignants ainsi qu’une faculté de théologie.

À la fin des années cinquante, de larges couches de la jeunesse commencèrent à s’éveiller à la politique et à exiger des changements. Chômeurs et travailleurs se joignirent aux manifestations étudiantes contre le pouvoir. Au début de 1960, la situation était si tendue que l’état de siège fut proclamé.

L’opposition au gouvernement du Parti démocrate fut menée de façon résolue par de jeunes officiers de l’armée représentant l’aile progressiste du kémalisme. Ils puisaient notamment parmi les discours tiers-mondistes alors à l’honneur dans les pays pauvres et celles des nationalistes algériens ou des partisans de Nasser, l’idée que la Turquie ne devait plus se soumettre de façon aussi vile à l’impérialisme et qu’elle devait reprendre la voie de la modernisation.

En mai 1960, ces officiers formèrent un « Comité d’Union nationale » puis renversèrent le gouvernement. Ne se contentant pas de ce coup de force, ils firent passer en justice le Président de la République, Beylal, le Premier ministre Menderes et plusieurs membres du gouvernement dont ils dévoilèrent les agissements à la tête de l’État, les tricheries électorales et la corruption. Menderes et deux de ses ministres furent même pendus.

Les officiers kémalistes promulguèrent une constitution plus démocratique qui prévoyait des élections libres. Sans en préciser les conditions d’application, ce texte reconnaissait pour la première fois le principe général du droit de grève, le droit de se constituer en syndicat et d’obtenir des conventions collectives dans toutes les branches.

Ainsi, le coup d’État de 1960 desserrait un peu le carcan qui pesait sur toute la société.23

 

Instabilité politique

La situation politique se dégrade au cours des années 1970. Un nouveau coup d'État a lieu en 1971 ; les militaires, constatant que leur action n'a en rien amélioré la situation, retournent dans leurs casernes l'année suivante. La guerre froide s'intensifie, l'extrême gauche et l'extrême droite se radicalisent, des groupes révolutionnaires se forment, notamment le Devrimci Sol, en 1978. Les Kurdes subissent l'influence de formateurs léninistes et maoïstes, et le Parti des travailleurs du Kurdistan met en place des groupes de guérilleros marxistes-léninistes en Anatolie orientale dans la région du Kurdistan turc. Enfin, La guerre civile au Liban commencée en 1975 provoque l'arrivée de nombreux réfugiés libanais en Turquie.

Cette situation provoque le 12 septembre 1980 un nouveau coup d'État militaire suivi d'une forte répression. Tous les partis sont dissous, les militaires prennent la tête des nouvelles organisations. À la différence des deux interventions précédentes de l'armée, ce coup d'État se traduit par un net recul de la démocratie. Les militaires se donnent un rôle important dans la Constitution et mettent en place un Conseil national de sécurité pour préparer le retour des civils au pouvoir.

Celui-ci est mis en place par Turgut Özal, Premier ministre en 1984, président en 1989, qui tente de concilier la nature démocratique du régime, les principes fondateurs de la République et l'islam. La Turquie, qui avait perdu son droit de vote au Conseil de l'Europe à la suite du coup d'État militaire, le retrouve.

À partir de 1991, la Constitution est réformée pour satisfaire aux critères démocratiques exigés par la candidature à la CEE, puis à l'UE.

 

Une guerre permanente contre le peuple kurde

L’état de guerre permanent contre le peuple kurde pesait par ailleurs sur toute la société, notamment après le lancement de la lutte armée par le PKK en 1984. C’était de la part du PKK une réponse au coup d’État de 1980 et à la répression qui l’avait suivi. Mais cela servit encore d’argument pour prolonger la législation d’exception.

Le pouvoir organisa dans cette période le déplacement de trois millions de personnes, la destruction de milliers de villages, des arrestations, des exactions et des assassinats destinés à terroriser la population. Des forces paramilitaires de « protecteurs de village », constituées de 100 000 hommes armés et salariés par l’État, appartenant aux « tribus fidèles » furent mises sur pied. Des groupes islamistes paramilitaires furent équipés dans ce même but.

Le PKK répondit par des attentats et une politique d’assassinats qui ne fit qu’élargir un peu plus le fossé de sang entre les communautés. Il y eut 3000 morts entre 1984 et 1991, et environ 35 000 la décennie suivante, pour les trois quart répertoriés comme des combattants du PKK.

Les organisations défendant les droits des Kurdes furent interdites les unes après les autres.

 

Les années 1990 : instabilité politique et affaires en tout genre

Sur le plan politique, les années 90 furent marquées par une succession de coalitions gouvernementales en tout genre et par une série de scandales. Le retrait de l’armée dans les coulisses à la fin des années quatre-vingt avait mis au premier plan la façade parlementaire du pouvoir, et on vit qu’elle n’avait rien de reluisant. Elle montra même au grand jour toutes ses tares.

Ministres puisant dans les fonds publics, relations avec des mafieux et des tueurs d’extrême droite, corruption généralisée : la gangrène gagnait jusqu’aux sommets de l’appareil d’État. C’est à ce propos que l’on parla en Turquie de l’« État profond » (« derin devlet »). Autrement dit, derrière la façade parlementaire du pouvoir, il y avait les profondeurs de l’appareil d’État où policiers, militaires, juges, politiciens menaient en toute impunité leurs complots et souvent leurs vols et leurs assassinats.
Dans cette période, les islamistes furent associés au gouvernement à plusieurs reprises, occupant même pour la première fois le poste de Premier ministre avec Erbakan. Mais encore une fois l’armée décida d’intervenir. Le prétexte en fut la volonté des islamistes d’autoriser le port du « foulard » pour les fonctionnaires comme dans les universités. L’armée manifesta son opposition. Après avoir organisé une sortie démonstrative de chars, le Conseil de sécurité nationale adressa un ultimatum le 28 février 1997. Ce coup d’État baptisé « postmoderne » provoqua la chute du gouvernement puis la dissolution du parti islamiste.

Seul le vieil Ecevit, désormais dirigeant d’un nouveau parti social-démocrate, le Parti démocrate de gauche (DSP), avait encore l’image d’un homme non corrompu, un cas rare en Turquie. Il saisit sa chance lors des élections de 1999 dont il sortit vainqueur. Il allait rester au pouvoir jusqu’en 2002, main dans la main avec le parti de droite ANAP et l’extrême droite. Un type d’alliance qui n’a jamais posé de problèmes aux dirigeants sociaux-démocrates.

La traque, puis la capture en février 1999 d’Abdullah Öcalan, le dirigeant historique du PKK, furent rythmées par des mois de propagande et de délire nationaliste. Mais cette démagogie, si souvent utilisée, ne put faire oublier les mesures très impopulaires parmi les travailleurs, notamment celle contre les retraites. La loi, repoussant l’âge de départ de cinq ans pour les femmes et de trois pour les hommes et augmentant de 40 % le nombre de jours de travail nécessaire, passa sans que les bureaucraties syndicales ne proposent de véritables réponses, à l’exception d’une manifestation nationale.
L’incurie des services de l’État lors du tremblement de terre du 17 août 1999 à Izmit, qui fit 27 000 morts et 25 000 blessés, amplifia encore le discrédit d’Ecevit et de ses alliés.
Dans le drame, les seuls secours efficaces furent organisés par la population elle-même et par des organisations non gouvernementales. La mouvance islamiste se plaça en première ligne contre le gouvernement. Elle fut appuyée par les grands médias, relayant la bourgeoisie qui trouvait là une occasion de régler quelques comptes avec un appareil d’État jugé trop coûteux et insuffisamment efficace dans la défense de ses propres intérêts.

Enfin, en 2001, le pays fut précipité brutalement dans une profonde récession, conséquence de la crise financière partie de Russie en 1998 et qui s’était étendue au Sud-Est asiatique puis au Mexique. La montée du chômage et la quasi paralysie financière du pays indiquaient que son essor industriel, largement dû à l’intégration de son économie aux marchés européens depuis le milieu des années soixante et à l’installation des multinationales, ne faisait que rendre la Turquie plus dépendante des soubresauts de l’économie capitaliste et du bon vouloir des financiers.
Lourdement endetté, le pays était au bord de la faillite.

L’inflation en était le signe le plus frappant et le plus perceptible par la population. Tandis que la banque centrale avait fait imprimer ses premières coupures d’un million de livres en janvier 1995, elle dut imprimer des coupures de 5 millions en 1997, de 10 millions en 1999 et de 20 millions en 2001. C’était bien la seule façon pour les travailleurs de se retrouver millionnaires, car ces billets ne valaient pas cher…

Supervisé par le FMI, et avec l’appui des États-Unis, Ecevit prit des mesures amputant le niveau de vie des travailleurs et lança une vague de privatisations. Ce gouvernement se réclamant de la gauche favorisait de nouveau les conditions d’un glissement politique vers la droite.

 

2002 : Erdogan au pouvoir

Aux élections de 2002, toutes les formations qui avaient participé aux gouvernements précédents, de la gauche social-démocrate aux partis représentant la bourgeoisie libérale ou au parti islamiste d’Erbakan se présentèrent discréditées. Elles furent balayées. Majoritaire au parlement trois ans plus tôt, le parti d’Ecevit recueillît à peine plus de 1% des voix. Et c’est l’AKP, en turc « Parti de la Justice et du Développement » mené par Recep Tayyip Erdogan, qui obtint la majorité absolue.

Ce parti avait été créé pour donner l’image d’une formation nouvelle et non compromise avec les autres politiciens. Ses dirigeants avaient notamment pris leurs distances d’avec le parti islamiste d’Erbakan dont ils avaient longtemps été membres. Ils présentaient un projet dit « post-islamiste » se voulant plus modéré et plus moderne.

D’un milieu populaire, Erdogan dit lui-même avoir été un vendeur de « simit » dans les rues quand il était enfant. Les simit, ce sont des pains au césame en forme d’anneaux que l’on mange en Turquie quand on a une petite faim et que l’on achète aux vendeurs de rue. Autant dire qu’il n’était pas issu du sérail de la bourgeoisie ni de la bureaucratie ! Il avait acquis ensuite une certaine notoriété en tant que maire d’Istanbul de 1994 à 1998 en menant campagne contre la corruption et en engageant notamment la modernisation du réseau des transports publics. Il bénéficiait de l’appui des deux grandes confréries religieuses, de leurs réseaux d’aide et d’associations implantées dans les quartiers populaires. Destitué et jeté quatre mois en prison pour avoir prononcé un poème jugé subversif et « contraire à l’esprit laïque du kémalisme », il se posait en outre en victime de l’armée et du régime.

Au-delà de la phraséologie et des références à l’Islam, et tout en se présentant comme « le parti des pauvres et des déshérités », son programme économique était dans la continuité de la politique de ses prédécesseurs : privatisations, appel aux capitaux étrangers ainsi que tout ce qui pouvait séduire les capitalistes et les petits patrons de l’Anatolie qui l’avaient financé. Avec de tels gages, Erdogan reçut l’appui bienveillant des États-Unis.

L’AKP disait vouloir normaliser la Turquie et l’engager dans la voie de la prospérité. Alors que le courant islamiste avait multiplié dans le passé les déclarations contre l’occident, l’AKP avait fait du projet d’adhésion à l’Union européenne l’axe de sa campagne. Erdogan se faisait fort d’y parvenir en quelques années. Cela impliquait d’apporter une solution au problème de la partition de Chypre qui l’opposait à la Grèce, mais aussi d’aboutir à un règlement de la situation au Kurdistan, conformément d’ailleurs aux aspirations de la bourgeoisie à une paix plus propice aux affaires dans cette région stratégique.

Après l’arrivée au pouvoir de l’AKP en 2002, la principale opposition politique resta celle des sociaux-démocrates du CHP. Elle s’exprima notamment en 2007, à l’approche des élections, par une mobilisation importante derrière l’objectif de défense de la laïcité. On vit se dérouler des manifestations massives durant des mois.

Mais cette soi-disant préoccupation « laïque » était très largement factice car depuis bien longtemps les kémalistes s’étaient compromis au gouvernement avec les islamistes. Et ils avaient eux-mêmes continué à renforcer la place de la religion et des religieux dans la société. Au point que l’AKP sur ce plan n’apparaissait pas vraiment différente, du moins pour la majorité des électeurs. En outre, les sociaux-démocrates apparaissaient une fois de plus comme les défenseurs inconditionnels de la hiérarchie militaire.

En fait, dans cet affrontement entre kémalistes et islamistes, les différences se sont estompées, les islamistes reprennent une grande partie du kémalisme... et les kémalistes sont devenus de plus en plus islamistes. Il s’agit en fait de deux grands partis bourgeois ayant un discours un peu différent en fonction de leur clientèle. Et surtout, il s’agit d’un affrontement pour des postes au sein de l’appareil d’État, dans lequel l’affrontement idéologique a bien peu de place.

C’est ce qui permet d’ailleurs à l’AKP de se tailler à bon compte un costume de démocrate auprès de l’opinion et de marquer des points. Le parti d’Erdogan est apparu en effet comme celui qui entendait mettre au pas l’armée et une partie de « l’État profond ». Erdogan prit des décisions qui semblaient aller dans ce sens : la presque totalité du commandement fut renouvelée et des dizaines d’officiers supérieurs furent inculpés à la suite de la révélation du scandale Ergenekon en 2008. Des officiers étaient accusés en effet d’avoir préparé un nouveau putsch ou d’avoir couvert des assassinats de personnalités de gauche. Des procédures ont même été engagées depuis deux ans par Erdogan contre les auteurs du coup d’État de 1980, dont le général Evren, ce que les sociaux-démocrates s’étaient bien gardés de faire avant lui.

Mais ce qui a favorisé l’AKP durant toutes ces années a été surtout le contexte économique, marqué par une forte croissance. Il a ainsi remporté les deux élections qui ont suivi, d’abord en 2007 puis en 2011 avec une forte majorité.

 

La Turquie après dix ans de l’AKP aux affaires

Alors quel bilan pouvait-on faire de la politique de l’AKP après dix ans de pouvoir sans partage ?

En ce qui concerne les relations avec l’Union Européenne, la politique d’Erdogan n’a pas été couronnée de succès. Malgré une série de réformes constitutionnelles, qui faisaient suite à celles déjà engagées, comme l’abolition de la peine de mort en 2001, les dirigeants de l’AKP se sont heurtés à l’opposition des grandes puissances, dont la France, peu soucieuses de partager un peu de leurs prérogatives dans les institutions européennes avec la bourgeoisie turque.

On a entendu les prétextes les plus réactionnaires, comme le « caractère musulman » de la Turquie opposé à une Europe « chrétienne ». Depuis 1996, il existe déjà une union douanière qui ouvre le marché turc aux grandes entreprises européennes. L’entrée de la Turquie dans l’Union européenne ne changerait donc pas grand-chose sur le plan économique, mais permettrait à des Turcs de jouer un rôle politique à l’échelle européenne, ce dont les Chirac, les Sarkozy ou Merkel ne voulaient pas.

Erdogan a aussi essuyé un camouflet à Chypre, dont la partie grecque s’est vue élevée au rang d’État de l’Union Européenne, alors que la « République turque de Chypre du Nord », l’autre partie de l’île, ne tient que par le soutien de l’État turc et par la présence de son armée qui n’entend pas lâcher cette chasse gardée.

Concernant la « question kurde », Erdogan, suivant l’exemple de bien d’autres dans le passé, a d’abord entretenu une image de partisan du dialogue. Il a assoupli la législation réprimant l’usage de la langue kurde, que l’État turc a nié pendant longtemps en déclarant que les Kurdes n’étaient que des « Turcs des montagnes ». Mais la guerre a continué sous la pression des militaires et de l’extrême droite.

Qu’en est-il enfin de la transformation annoncée des institutions de la Turquie dans un sens plus démocratique ? En fait, le gouvernement d’Erdogan se montre de plus en plus répressif. Les arrestations et les procédures judiciaires visent à intimider les médias, les intellectuels, les élus et les organisations défendant les droits des Kurdes et au-delà toute opposition. En 2013, le pays comptait 8000 prisonniers politiques et près de trois mille étudiants en prison. L’association Reporters sans frontières avait par ailleurs qualifié la Turquie de « plus grande prison pour les journalistes dans le monde ».
La « démocratie avancée turque » dont se vante Erdogan est donc une mauvaise plaisanterie.

 

L’oppression et les violences faites aux femmes

Et du point de vue des progrès de la société, la situation des femmes reflète les mêmes limites. La situation des femmes n’est certes pas comparable à celle qu’elles subissent en Iran ou en Arabie Saoudite. De ce point de vue, la révolution kémaliste a profondément changé la société. Néanmoins, la période de gouvernement de l’AKP, dans la continuité d’un mouvement engagé depuis 1980, a renforcé le conservatisme social et marqué une lente régression de la situation des femmes.

Sur le plan juridique, des droits pour les femmes existent, y compris depuis 1983 le droit à l’avortement pendant les dix premières semaines de grossesse. L’AKP a même adopté le 8 mars 2012 une loi sur « la protection de la famille et la prévention de la violence contre les femmes », présentée comme « un cadeau fait aux femmes ». Mais dans les faits les femmes conservent un statut de mineures, surtout dans les régions rurales où elles sont souvent privées de l’accès à l’éducation.

Les violences domestiques, qui tuent cinq femmes par jour, s’ajoutent au harcèlement au travail et aux mariages arrangés. Les « crimes d’honneur », cette honteuse appellation, sont en augmentation. Ils tuent chaque année plusieurs centaines de femmes et font l’objet de la clémence des tribunaux. Il en va de même des innombrables viols. En 2011, la cour suprême a ainsi validé un jugement affirmant qu’une fillette de 13 ans avait « consenti » à son viol par 26 hommes.

Et aujourd’hui, c’est l’avortement qui est dans la ligne de mire des religieux. Erdogan, lui-même désireux de plaire aux milieux réactionnaires, l’a assimilé à un « meurtre ». Le maire islamiste d’Ankara a dit à propos des femmes qui le pratiquent : « c’est la mère qui a fauté, qu’elle se donne la mort » ! Ces propos abjects ont provoqué d’importantes manifestations en défense au droit à l’avortement au printemps 2012 derrière le slogan « c’est mon corps, c’est ma décision ».

 

La situation de la classe ouvrière

Qu’en est-il de la situation des travailleurs aujourd’hui ?

La Turquie reste derrière le Mexique le pays de l’OCDE où les inégalités de revenus sont les plus fortes et où le pourcentage de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté est le plus important. Eau, électricité, téléphone, transports publics, égouts, système d’évacuation des eaux de pluie, voirie, logements exigus : autant de problèmes qui pèsent sur le quotidien des travailleurs.

Malgré le boom économique, le pays comptait en 2013 trois millions de chômeurs, sans compter le chômage masqué que constitue le sous-emploi dans l’agriculture et les millions de travailleurs sans contrat de travail. Exclus de tout droit et d’accès à la sécurité sociale, ils subissent le diktat des petits patrons et de leurs donneurs d’ordre. Indice des conditions de travail, dix mille travailleurs sont morts à la suite d’accidents du travail de 2002 à 2011.

Erdogan est le premier à vanter le fait que la productivité dans l’industrie a augmenté de plus de 20% entre 2005 et 2010, tandis que les salaires réels ont baissé de 10 %. L’inflation, qui était utilisée auparavant pour comprimer les revenus des travailleurs, a certes baissé mais elle oscille entre 5 et 28 % depuis dix ans, et elle a été de 9 % en 2012.

Quant à l’âge de la retraite, il va être progressivement relevé pour atteindre 65 ans et ce pour des pensions qui ne concernent que les travailleurs déclarés et dont les montants sont dérisoires. Pour la grande majorité des retraités, continuer à travailler d’une façon ou d’une autre est donc une nécessité.

La loi régissant les « relations du travail » adoptée en 2003 au nom de « l’occidentalisation » du droit a encore renforcé la législation faite sur mesure durant des décennies pour la bourgeoisie. Elle exclut tout bonnement de son périmètre d’application les entreprises employant moins de trente personnes, soit les deux tiers environ des travailleurs. Les fonctionnaires, de leur côté, n’ont toujours pas le droit de grève.
Désormais, la durée hebdomadaire légale de travail est de 45 heures pour un salaire minimum d’environ 330 euros. Dans les faits, elle s’élève dans de nombreux secteurs, comme les services de santé, à 60 ou 65 heures. Le contrat à durée déterminée n’a plus aucune limite dans le temps et la flexibilité a été généralisée.
Les obstacles mis en place par l’État et le patronat sont d’ailleurs tels que 500 000 travailleurs seulement sont protégés aujourd’hui par une convention collective dans le secteur privé. Bien des luttes sont encore menées parce que les rares lois qui protègent les travailleurs ne sont pas appliquées. Et dans tous les cas, l’arbitraire patronal domine si les travailleurs ne s’organisent pas.

La grande bourgeoisie et les innombrables petits patrons n’ont donc aucune envie de voir évoluer la législation ni le cadre très étroit fixé aux activités syndicales. Ils leur ont permis en effet de limiter la syndicalisation, mais aussi quand celle-ci existe de s’appuyer sur une bureaucratie syndicale qui se livre à de multiples arrangements sur le dos des travailleurs. Longtemps occupé par la seule TÜRK-IŞ, ce rôle est désormais assuré par les autres centrales syndicales, y compris la DISK.

Malgré les freins juridiques, et souvent malgré cette bureaucratie, les travailleurs n’ont cessé de s’affronter au patronat, comme aux potentats de la fonction publique ou du secteur nationalisé.

Depuis son arrivée au pouvoir, l’AKP a certes bénéficié du reflux des luttes ouvrières. Le programme de privatisations a ainsi été mené relativement sans encombre, ramenant le nombre de salariés dans le secteur nationalisé de 435 000 à 170 000.
Mais la classe ouvrière n’a pas dit son dernier mot.

D’abord parce que l’opulence et l’arrogance des patrons des grands groupes capitalistes, Koç, Sabancı, Cukurova, Doğan, Doğuş ou Anadolu ont de quoi révolter. Istanbul serait même une des villes dans le monde abritant le plus de milliardaires.

L’année 2010 a été ainsi marquée par la grève des travailleurs de Tekel, l’ancien monopole des tabacs privatisé. Le gouvernement proposa un « choix » ressenti comme une provocation par les 12 000 travailleurs restés sous contrôle public et dont l’emploi était supprimé : soit ils acceptaient le licenciement et les primes qui l’accompagneraient, soit ils optaient pour le statut dit « 4/C », qui signifiait la perte de la sécurité de leur emploi, la baisse de moitié de leurs salaires, et la fin d’une grande partie de leurs droits.
Erdogan ajouta l’insulte à son attaque en expliquant que ces travailleurs étaient des « fainéants qui veulent gagner de l’argent sans faire aucun travail ». À cette annonce, les travailleurs, dont beaucoup venus des usines du Kurdistan, affluèrent à Ankara et s’installèrent dans des camps de toile durant plusieurs semaines, avec l’appui et l’aide de nombreux habitants malgré un froid intense. Ils exigèrent, indépendamment de leurs origines, hommes et femmes au coude à coude, un véritable reclassement avec maintien de leur statut et de leurs droits. Malgré la charge brutale de la police, la mobilisation ne faiblit pas.

Elle entraîna même le soutien matériel et fraternel de milliers de salariés et d’étudiants d’Ankara dans une atmosphère festive et combative. « Mourir dans l’honneur plutôt que vivre dans la misère » pouvait-on lire sur certaines banderoles.
Même si au final cette lutte ne fut pas victorieuse, elle fut suivie avec une grande sympathie par des millions de travailleurs. Certains prirent des jours de congés pour aller soutenir les grévistes et le mécontentement contre les dirigeants de TÜRK-IŞ commença à s’exprimer. Aussi, les confédérations syndicales appelèrent pour la deuxième fois en deux ans à une « journée nationale de mobilisation », le terme même de « grève générale » étant banni par la loi.

Malgré la législation antigrève dans la fonction publique, les trois journées de grève appelées en 2012 ont été bien suivies, notamment dans l’éducation, la santé et les transports. Dans ce secteur, l’ampleur de la grève à la compagnie aérienne Turkish Airlines, a été aussi remarquée.

En 2012, des ouvriers du textile de la zone industrielle de Gaziantep, près de la frontière syrienne, ont déclenché une grève - sans l’appui d’un syndicat et donc illégale du point de vue de la loi- contre leurs conditions de travail et les bas salaires. La grève, dirigée par un comité de lutte, s’est rapidement étendue à plusieurs usines, impliquant plusieurs milliers de travailleurs. Ayant peur de la contagion, le patronat a reculé.
Tout cela fait penser que dans la période qui vient, les mouvements de grève pourraient se multiplier. On l’a vu avec la grève à l’usine Renault de Bursa en novembre 2012.
Reste que durant la décennie passée au pouvoir, l’AKP a bénéficié d’un contexte économique qui lui a été favorable.

Et c’est en quelque sorte aujourd’hui seulement que l’on peut mesurer l’œuvre historique du kémalisme pour la bourgeoisie turque, car il lui a apporté un État qui lui permet de tenir sa place dans le monde impérialiste. Au point même que les dirigeants de l’AKP se sont mis à évoquer le « nouvel ottomanisme » du pays, en d’autres termes leur volonté d’influencer toute une partie du pourtour méditerranéen et du Moyen-Orient grâce à la force de l’économie turque. Cela s’appelle rêver tout haut car si les dirigeants de l’impérialisme peuvent apprécier le rôle de la Turquie, ils ne veulent pas non plus qu’elle devienne une puissance qui pourrait gêner leur propre domination dans cette région.24

 

Le mouvement protestataire de 2013

Le mouvement protestataire de 2013 en Turquie débute le 28 mai à Istanbul par un sit-in d'une cinquantaine de riverains auxquels s'associent rapidement des centaines de milliers de manifestants dans 78 des 81 provinces turques. Par leur ampleur, la nature de leurs revendications et les violences policières qui leur ont été opposées, ces manifestations ont été comparées au printemps arabe, au Occupy movement, au mouvement des Indignés, ou encore à Mai 68.

Les mouvements de protestations sont initialement menés par des écologistes et des riverains qui s'opposent à la destruction du parc Taksim Gezi. Ce parc qui est l'un des rares espaces verts du centre d'Istanbul doit disparaître dans le cadre du Projet de piétonnisation de la place Taksim. Ce projet immobilier prévoit la reconstruction de la caserne Taksim, un bâtiment historique démoli en 1940 devant accueillir un centre commercial. Les manifestations s'intensifient à la suite de la violence de la charge de la police pour déloger un groupe occupant le parc. Les protestations se sont généralisées avec des revendications anti-gouvernementales. Les manifestations se sont également étendues à d'autres villes en Turquie, ainsi que dans d'autres pays ayant d'importantes communautés turques.

Les manifestants se sont emparés du parc Gezi et de la place Taksim à Istanbul ainsi que des rues de la capitale, Ankara ainsi que Bursa, Eskişehir, Izmir, Mersin, Adana, Izmit, Konya, Samsun, Trabzon et Bodrum. Certains des manifestants s'identifiaient sous le tag #OccupyGezi.

Les protestataires viennent d'horizons divers. On retrouve des partisans de droite aussi bien que gauche, des nationalistes turcs, mais aussi kurdes.

 

Contexte

Ce mouvement s'inscrit dans un climat social tendu. Le Premier ministre a appliqué un programme islamiste, en particulier depuis 2011, et affaibli l'influence laïque de l'armée turque. Une réforme de l'éducation votée en 2012 a ainsi renforcé les enseignements islamiques dans l'école publique primaire ainsi que dans les collèges et lycées. Erdoğan a expliqué qu'il voulait élever une « génération pieuse ». Des personnes ont été emprisonnées pour blasphème. La décision unilatérale de nommer le troisième pont au-dessus du Bosphore pont Yavuz Sultan Selim (en), selon Sélim Ier, a été critiquée par les groupes Alevi (qui représentent de 15 à 30 % de la population turque), car les Alevis considèrent ce sultan responsable de la mort de dizaines de milliers d'Alevis durant la bataille de Tchaldiran. D'autres démocrates et libéraux auraient souhaité un nom plus neutre sur le plan politique, tel Mario Levi qui a suggéré de nommé le pont Rumi ou Yunus Emre. Enfin, la décision politique de fermer le musée Sainte-Sophie de Trabzon pour le transformer en mosquée, alors même que d'éminents leaders musulmans de cette ville soulignaient l'inutilité de cette décision, a suscité une controverse au sein des communautés progressistes.

Durant la même période, il a mis en place une série de restrictions aux droits de l'homme, malgré les améliorations résultant du processus d'adhésion à l'Union européenne. Ainsi depuis 2011, la liberté d'expression, la liberté de la presse, y compris télévisuelle et sur Internet, ainsi que la liberté de réunion ont été restreintes. Le droit à l'avortement et le droit à la commercialisation d'alcool ont également été réduits. Les parlementaires du parti au pouvoir se sont opposés à l'extension des droits LGBT en Turquie au cours des débats parlementaires du 29 mai 2013. La position du gouvernement sur la guerre civile en Syrie est une autre cause de tension sociale dans le pays.

Le gouvernement est perçu comme de plus en plus islamiste et autoritaire. Un responsable du parti indiquait en avril 2013 qu'il s'attendait à perdre l'appui des libéraux. Dans un discours prononcé lors de la cérémonie d'inauguration du pont Yavuz Sultan Selim (en) le 29 mai, Erdoğan déclare : « Quoi que vous fassiez, nous avons pris notre décision et nous allons la mettre en œuvre », se référant à la décision du gouvernement d'abattre les arbres du parc Gezi de la place Taksim, afin de reconstruire la caserne militaire de l'époque ottomane, Taksim (qui avait été démolie en 1940). Le gouvernement avait prévu de remplacer le parc Gezi avec la réplique d'une caserne de l'époque ottomane contenant un centre commercial. Selon Koray Çalışkan, politologue à l'Université du Bosphore d'Istanbul, les manifestations sont « un tournant pour l'AKP. Erdogan est un homme politique très confiant et très autoritaire, qui n'écoute plus personne. Mais il doit comprendre que la Turquie n'est pas un royaume, et qu'il ne peut pas s'imposer à lui tout seul, à Istanbul, depuis Ankara ».

 

Répression policière

Ces affrontements sont l'un des événements les plus difficiles que le premier ministre Recep Tayyip Erdoğan ait eu à traiter en dix ans de mandats.

Le 31 mai 2013, la police réprime les 10 000 manifestants avec des gaz lacrymogènes. 60 personnes au moins sont arrêtées et des centaines sont blessées. L'action de la police a été largement relayée sur Internet. Des milliers de manifestants se sont rassemblés sur l'avenue İstiklal dans la nuit du 31 mai. Les numéros des casques qui permettent d'identifier les policiers abusant de la force, sont cachés par leurs porteurs, soit avec un marqueur, soit avec un emballage de bouteille en plastique, pour empêcher toute enquête ultérieure.

Le 4 juin, le vice-Premier ministre Bülent Arınç, agissant pour Erdoğan qui était en voyage à l'étranger, a présenté ses excuses aux protestataires, pour la violence excessive de la police à l'origine des manifestations, tout en précisant qu'il n'avait pas à excuser les violences policières ayant eu lieu ensuite.

Le 6 juin, six personnes étaient mortes, plus de 4000 manifestants (dont 14 journalistes) étaient blessés, dont 47 grièvement.

Le 4 juin, une collecte de fonds via Indiegogo lève 54 000 $. Un espace publicitaire dans le New York Times est ainsi acheté, appelant à « la fin des brutalités policières », à « des médias libres et impartiaux », à « un dialogue ouvert », dénonçant « le diktat d'un autocrate ». Les manifestants exigent également globalement la démission du gouvernement et du premier ministre Erdogan.

 

Médias turques

Les médias étrangers ont noté que les manifestations n'avaient guère attiré l'attention des médias en Turquie, ce qu'ils ont supposé être la conséquence d'une pression gouvernementale. Rares sont les chaînes de télévision à avoir couvert les événements en direct, à l'exception notable de Halk TV. De fait, le 19 décembre 2012, 72 professionnels des médias étaient emprisonnés en Turquie, que reporters sans frontières qualifie déjà de « plus grande prison du monde pour les journalistes. » La BBC a noté que si certains des principaux médias sont explicitement alignés avec l'AKP ou sont proches de M. Erdogan, « la plupart des grands médias - tels que les nouvelles chaînes de télévision HaberTurk et NTV, et le principal quotidien centriste Milliyet - répugnent à irriter le gouvernement en raison des intérêts commerciaux de leurs propriétaires qui sont parfois amenés à solliciter le soutien du gouvernement. Tous ces médias ont eu tendance à éviter de couvrir les manifestations. » À titre personnel, quelques animateurs TV ont parfois exprimés leurs soutien au mouvement protestataire. Kenan Doğulu ôta sa chemise sur ​​une émission de télévision turque (Elidor Miss Turquie, Star TV, le 31 mai) pour révéler un T-shirt Occupy Gezi.

 

« [L'après-midi du vendredi 31 mai 2013], CNN Turk diffusait une émission culinaire, au sujet des « saveurs de Niğde ». Les autres grandes chaînes d'information turques montraient un concours de danse et une table ronde sur les programmes d'étude à l'étranger. Cela illustre parfaitement le propos de The Revolution Will Not Be Televised. Tout le pays semblait vivre une expérience de déconnexion cognitive, avec Twitter disant une chose, le gouvernement en disant un autre, et les téléviseurs perdus sur une autre planète. »

« [Le 1er Juin], la plupart des manifestants se sont plaints de l'absence de couverture à la télévision turque. Certains journaux étaient aussi largement silencieux sur les manifestations. Samedi matin, le principal article de Sabah, un journal important pro-gouvernemental, concernait la promotion par M. Erdogan d'une campagne contre le tabagisme. »

À 1 h du matin, le 2 juin CNN Türk diffusait un documentaire sur les manchots pendant que CNN International assurait la couverture en direct des manifestations en Turquie. Au matin du 2 juin, la Une de Sabah ne présentait aucune information relative au mouvement protestataire, mais elle trouvait de la place pour montrer « Le président Abdullah Gul côtoyant un cheval durant sa visite officielle au Turkménistan ». Le 3 juin, le jeu télévisé Kelime Oyunu (« Jeu de mot »), sur Bloomberg TV, menée par Ali İhsan Varol a supportée les manifestants en choisissant des questions et des réponses (e.g. « gazmaskesi », masques à gaz) qui faisaient références au mouvement. Ce même 3 juin, des milliers de cols blancs travaillant dans les quartiers financiers de Maslak et Levent se sont réunis en face du centre Doğuş Media pour protester contre le manque de couverture médiatique des événements par la Holding Doğuş (i.e. NTV), l'une des principales chaînes de télévisions. NTV a été contraint de diffuser des événements en direct, tandis que les manifestants scandaient « Satılmış Medya istemiyoruz » (« Nous ne voulons pas de ces médias qui sont à vendre. »), « Tayyip istifa » (« Démissionner Tayyip »), « Her yer Taksim, her yer direniş » (« Taksim partout, la résistance partout »). Le 5 juin, le service public turc TRT a diffusé des images de gens brûlant le drapeau turc. Ces images avaient été diffusées à l'origine en 2010, mais en falsifiant les dates afin de laisser entendre que les manifestations actuelles étaient sécessionnistes par leurs nature.

Certains membres du personnel NTV ont démissionné en signe de protestation contre le manque de couverture. Le PDG du Groupe de Média Doğuş (en), Cem Aydın, a admis que les critiques étaient « justifiées dans une large mesure », et que « Notre public se sent trahis »

 

Réseaux sociaux

En conséquence, les réseaux sociaux ont joué un rôle clef dans l'information des citoyens turcs, en adoptant par exemple les hashtag Twitter #OccupyGezi et #DirenGeziParki ("Résistez Gezi Park"). De 16 heures à 4 heures du matin, le 31 mai, il y a eu plus de 2 millions de tweets pour les 3 principaux hashtags utilisés, dont 88 % en turc et 90 % géolocalisés en provenance de Turquie. CNN Türk diffusait un documentaire sur les manchots tandis que CNN International montrait la couverture en direct des manifestations en Turquie. 69 % des manifestants ont déclaré avoir appris les événements via les réseaux sociaux contre seulement 7 % par la télévision. Erdogan a déclaré dans un discours qu'« Il existe aujourd'hui une nouvelle menace qui s’appelle Twitter. Les meilleurs exemples de mensonges peuvent y être trouvées. Pour moi, les médias sociaux sont la pire menace pour la société ». En décembre 2012 une étude du Pew Research Center a montré que 35 % des Turcs utilisaient des sites de réseaux sociaux.

Il a été rapporté que le signal 3G dans certaines zones a été désactivé. En réaction, des magasins et des bureaux ont ouverts leurs réseaux Wi-Fi. Des rumeurs de censure ont conduit à une utilisation croissante de réseaux privés virtuels (VPN) au cours des manifestations, par les utilisateurs de l'Internet mobile turcs. Le 3 juin 2013, un collectif Anonymous propose aux contestataires turcs un moyen de secours pour accéder à l'Internet via bas débit au cas où le gouvernement leur couperait l'accès.25

 

Atermoiements tactiques et mensonges

Le vernis de légitimité démocratique dont se prévalait Erdogan – qui répétait à qui voulait l’entendre qu’il avait été élu avec 51% des voix – a volé en éclats sous le choc des grenades lacrymogènes, la pression des canons à eau, les coups de matraques, les atermoiements tactiques et l’énormité des mensonges qui furent depuis le début la seule réponse à la contestation et contribuèrent ainsi à son amplification. Pourtant, malgré l’efficacité des réseaux sociaux dans la diffusion de l’information, l’appareil de propagande intérieure mis en place par le gouvernement AKP a été déterminant pour conserver le soutien de la majeure partie de sa base électorale. Majoritairement sous-éduquée, peu habituée à diversifier ses sources d’information et payée ou menacée pour participer aux réunions de soutien, cette frange de la population restait convaincue qu’Erdogan était l’homme providentiel et que les manifestations et occupations agitant la Turquie étaient le fait de terroristes membres d’organisations illégales à la solde de l’étranger. Les soirs du samedi 1er et du dimanche 2 juin, alors que la répression policière faisait rage contre des manifestants entre Besiktas et le stade Inönü, la mosquée de Dolmabahçe fut investie par les manifestants afin que les nombreux blessés puissent y être évacués et soignés. Erdogan déclara par la suite que les manifestants y étaient entrés en chaussure (ce qui fut effectivement le cas le second soir) et qu’ils y avaient bu des bières. Un éditorialiste proche du pouvoir avança même qu’ils s’étaient probablement livrés à des actes sexuels collectifs. Les vidéos prises sur place montrent tout autre chose : la panique, le sang, la douleur, mais aussi l’énergie et la générosité des médecins et soignants bénévoles tentant de soulager le calvaire des gazés et des blessés. Lorsque l’imam réfuta ces accusations dans le journal Radikal, il fut mis en congé d’office. Il n’était pas de bon ton de contredire la parole officielle et, en ces temps de crise, les porteurs de mauvaise nouvelle devaient raser les murs. Ainsi la journaliste de Today’s Zaman Rumeysa Kiger qui annonçait dans un article paru le lundi les résultats d’une enquête d’opinion selon laquelle les intentions de vote en faveur de l’AKP avait chuté à 35 %. Elle a été brièvement interpellée le lendemain sur la place Taksim en compagnie de sept autres personnes et emmenée au poste de police de Karaköy.26

 

Réponse gouvernementale

Le 1er juin, le premier ministre Tayyip Erdoğan donnait une allocution télévisée condamnant les manifestants et promettant que « là où ils seront 20, nous seront 200 000. Là où ils seront 100 000, nous réunirons un million de membres de mon parti ». Le 2 juin, il qualifie les contestataires de « çapulcular » (c'est-à-dire « pillards » et « fainéants »).

 

Le 6 juin, Erdoğan a rejeté les manifestations, en les déclarants anti-démocratiques et manipulées par les extrémistes, et en déclarant que les manifestants incluaient des « extrémistes, dont certains étaient impliqués dans le terrorisme ». Il a déclaré que le plan de restructuration serait poursuivi. Peu de temps après que ses commentaires aient été diffusés les marchés boursiers turcs chutaient de 5 %. Pour l'arrivée d'Erdoğan, de retour de sa tournée à l'étranger, l'AKP avait lancé une campagne de SMS pour réunir des milliers de supporters à l'aéroport d'Ataturk. L'AKP fut aidé de la municipalité d'Istanbul qui a affrété des bus et étendu l'heure d'ouverture du Métro d'Istanbul, jusqu'à 4 heure du matin. La foule chantait « Nous allons mourir pour toi, Erdogan », « Allons tous les écraser » et « Allons, allons écraser Taksim ».27

 

 

Le soi-disant miracle économique d’Erdogan

Peu avant les manifestations, une grande partie de la presse internationale ne tarissait pas d’éloges sur la Turquie, capable selon elle de produire de la richesse et d’assurer un développement comme peu d’autres pays avaient pu le faire ces dernières années. Hier encore, le modèle turc avait presque valeur d’exemple aux yeux des démocraties européennes touchées par la crise et engluées dans des processus décisionnels européens technocratiques. La Turquie n’a-t-elle pas connu un taux de croissance extrêmement favorable au point de devenir la seizième économie mondiale ?

Les manifestations de la place Taksim et la répression violente de la police ont depuis douché les plus optimistes. Les canons à eau, les gaz lacrymogènes, les blindés envoyés contre la foule rassemblée au parc Gezi et les coupures de réseau Internet ont soudainement éclipsé les bons résultats de l’économie. Les cinq mille blessés et le millier d’arrestations survenus lors des manifestations ont montré le vrai visage du président Erdogan à une opinion internationale jusque-là accaparée par les gratte-ciels qui ont poussé comme des champignons dans les riches quartiers d’Istanbul. Il est vrai qu’aux yeux de certains (la majorité ?), la Turquie avait accompli un petit miracle économique appuyé par des méthodes pour le moins musclées.

Si nous nous contentons d’une analyse superficielle qui englobe l’intégralité du pays en ignorant les Turcs dans leur individualité, M. Erdogan pourrait aisément passer pour un champion du capitalisme moderne. En suivant à la lettre les recommandations du Fonds monétaire international, le président turc a sorti son pays de la crise dans laquelle la Turquie était engluée jusqu’en 2001. En dix ans à peine, son PIB a triplé en valeur et ses exportations ont décuplé. Les infrastructures rivalisent quant à elles avec ce qu’on peut trouver sur la rive nord de la Méditerranée.

Le pays connaissait depuis une certaine euphorie. Aux environs de 2040, d’après les prévisionnistes de Goldman Sachs, Ankara ne devait-elle pas dépasser Paris en termes de PIB et se hisser au neuvième rang mondial ? Nageant à contre-courant, de rares observateurs avaient cependant fait remarquer que le fossé ne cessait de se creuser entre les classes sociales les plus aisées et les autres. Dans le barème établi périodiquement par l’OCDE pour mesurer l’inégalité des revenus au sein de ses 34 membres, la Turquie occupe ainsi sans surprise une peu glorieuse troisième place. L’institut turc de la statistique tirait d’ailleurs la sonnette d’alarme quelques mois en arrière : la moitié de la population percevait un salaire inférieur à 230 $ mensuels (données 2008). Quant aux 20 % des ménages les plus riches, ils gagnent huit fois plus (25.894 $ par an) que les 20 % les plus pauvres (3.179 $). Pis, 16 % de la population vivaient en 2011 sous le seuil de pauvreté. Allez parler à ces gens-là de miracle économique…

Mais ce n’est pourtant pas tout. La Turquie occupe un pitoyable 90ème rang dans l’indice de développement humain développé par les Nations-Unies. Rien d’étonnant quand son sait que c’est l’un des pays où les enfants qui travaillent ont le plus gros volume horaire, soit 51 heures par semaine (la Turquie n’occupe que le 132ème rang mondial en matière d’alphabétisation). La seizième économie du monde n’est manifestement pas prête à tenir tête en matière de qualité de vie à des pays comme la Roumanie, l’Albanie, le Costa Rica, le Liban ou Palau.

Ce n’est pas tout. Obéissant à des objectifs à courte vue, la Turquie n’a quasiment pas porté attention à la qualité de son aménagement urbain. Istanbul, littéralement envahie par les hôtels de luxe, des gratte-ciels déprimants et des dizaines de centres commerciaux, en est un bien triste exemple. La capitale turque est devenue la ville européenne avec le plus faible pourcentage d’espace vert. Le dernier espace bucolique du centre-ville était justement le parc Gezi, un des rares lieux de détente et de sociabilisation entre les habitants. Ces derniers ont tenté de le défendre face à la fureur destructrice des bulldozers. Les arbres doivent disparaître pour laisser la place à la reconstruction d’une ancienne caserne qui avait été démolie en 1940. Les manifestations représentaient la cristallisation d’un certain ressentiment social, d’une frustration, face à un gouvernement qui utilise des méthodes de plus en plus autoritaires, voire liberticides. Les raisons de se révolter ne manquent pas. Les gens n’ont plus peur.28

 

 

Affaires de corruption

Le 25 décembre 2013, Recep Tayyip Erdoğan procède à un important remaniement ministériel qui affecte dix postes sur vingt-cinq de son gouvernement, à la suite d'opérations judiciaires et policières ayant mis à jour un possible réseau de corruption concernant des membres éminents de l'AKP et leurs proches. Même s'il s'en défend et dénonce un complot de l'étranger, le propre fils du Premier ministre est mis en cause dans ces affaires de corruption ; le procureur qui menait l'enquête à son sujet a pourtant été dessaisi du dossier, ce qui a provoqué l'indignation du Conseil supérieur des juges et des procureurs, Erdogan étant accusé de vouloir « étouffer » l'affaire. Ces événements ont également engendré des manifestations, l'effondrement de la livre turque à la Bourse d'Istanbul. Par la suite, six députés démissionnent, une première dans l’histoire du parti, ne manquant pas au passage de critiquer le Premier ministre. Ertugrul Günay, ancien ministre de la Culture dénonce ainsi « l'arrogance du gouvernement » alors qu'Erdal Bayraktar, jusque là député d'Ankara déclare : « Un parti politique ne peut pas être géré comme s'il était la propriété d'une personne, particulièrement de M. Tayyip Erdogan » et que d'autres demandent même sa démission.29

 

 

Plus de 300 morts à la mine de Soma : ce n'était pas un accident, c'était un crime

Selon les chiffres officiels, 301 travailleurs ont perdu la vie dans l'accident survenu le 14 mai 2014 dans la mine de lignite de Soma, en Turquie. Quatre jours après l'incendie qui a été au départ de l'accident, son patron Alp Gürkan est sorti de son silence. Dirigeant de la société qui loue la mine à l'État et l'exploite en échange d'une redevance, il a tenu une conférence de presse aux côtés de trois autres responsables.

« Nous ne connaissons pas les raisons de l'incendie mais en tout cas nous n'avons commis aucune faute » : telle est en substance leur conclusion. Voilà ce que des patrons, pour qui les ouvriers ne sont que des outils de production, ont l'audace de dire : ils ne savent rien, sauf qu'ils ne sont pas responsables.

Ces travailleurs sont morts des conditions dans lesquelles ils produisaient pour le profit des patrons. Les mineurs ont multiplié les avertissements pendant des jours. Tout montrait qu'en matière d'insécurité les bornes étaient dépassées. Mais, au lieu de faire le nécessaire, ces patrons ont contraint les travailleurs à continuer de produire. Des changements ont même été introduits, sous prétexte que la production n'allait pas. La quantité de poussière de lignite augmentant à l'intérieur de la mine, la quantité d'oxygène injectée a été augmentée. Il ne manquait plus que l'étincelle et celle-ci n'a pas tardé à surgir, provoquant la catastrophe.

Dès les premiers jours, des dirigeants politiques aux prétendus spécialistes, tous ont déclaré que la mine était parmi les meilleures, les plus modernes, les plus contrôlées. Ils ont ensuite précisé qu'il en allait autrement pour les autres sociétés sous-traitantes. Mais ces mêmes patrons sans vergogne ont montré tranquillement à la presse les vestiaires lamentables réservés aux ouvriers, en osant déclarer qu'ils ressemblent « à des hôtels de luxe ».

Les proches des mineurs ont attendu pendant des jours, aux entrées de la mine ou aux portes des hôpitaux, les mineurs rescapés ont crié, protesté, manifesté. Ils n'ont eu en réponse que des coups, les canons à eau de la police et certains ont été arrêtés. Mais Alp Gürkan continuait de se promener au-dehors, bien propre sur lui !

D'où lui venait cette tranquillité, sinon du seul fait d'être patron ? Un patron qui, aux heures mêmes ou les travailleurs perdaient la vie, se réunissait avec des ministres qui ne trouvaient aucun problème à dégager sa responsabilité. Il est de ceux qui savent que les politiciens, les lois, l'État avec sa police et tous leurs hommes travaillent pour eux. Avec les hauts dirigeants de l'État, avec les dirigeants politiques, ceux-ci ont des milliers de liens. Il est de ceux qui peuvent les siffler et dire « c'est à moi » quand il s'agit de la vie des ouvriers et des biens accumulés au prix de leur sueur.

Même pour un travail aussi dur et dangereux que celui de mineur, ces patrons méprisent la vie humaine, les seules mesures qu'ils appliquent sont celles visant à augmenter la production. Les mêmes patrons deux ans auparavant, en modifiant la loi dite de « santé et sécurité des travailleurs » sous le nom de « santé et sécurité au travail », ont obtenu du gouvernement une loi correspondant à leurs désirs. Le gouvernement s'est alors vanté d'avoir su travailler avec les représentants patronaux. Il a dit vrai.

La richesse produite par 5 000 mineurs, dans des conditions très dures et dangereuses, peut aboutir dans les mains d'un seul homme et il peut l'utiliser selon ses souhaits : voilà la logique de ce système. Si les travailleurs avaient donné leur avis, cet argent aurait dû bien sûr servir en priorité à leur sécurité et à protéger leur santé. Au lieu de cela, ce patron l'a utilisé pour édifier un gratte-ciel à Maslak, un quartier de luxe d'Istanbul, un gratte-ciel d'un tel luxe que l'argent utilisé pour un seul de ses étages aurait pu sauver la vie de tous les mineurs. Cette société lui en donne le droit. Voilà pourquoi ce qui s'est produit le 14 mai dans la mine de Soma n'est pas un accident, c'est un crime.30

 

Après la catastrophe

Après la mort des  mineurs, les manifestations de protestation ont continué en Turquie et le scandale est resté à l'ordre du jour des médias. Ceux qui étaient au service du gouvernement d'Erdogan ont d'abord cherché à le dédouaner, lui et ses amis capitalistes gestionnaires de la mine, tandis que ceux liés à l'opposition soulignaient ses responsabilités, non sans hypocrisie. Mais c' était bien d'assassinat qu'il fallait parler car, si dans cette mine de charbon les mesures de sécurité les plus élémentaires avaient été prises, aujourd'hui les mineurs seraient encore en vie.

Au lendemain de l'accident, une bonne partie des médias ont menti sans vergogne, expliquant que la mine de Soma était une mine modèle, que toutes les mesures de sécurités étaient prises, que les inspections de sécurité étaient effectuées en temps et en heure, qu'il n'y avait pas de sous-traitance. Erdogan parlait de « fatalité ». Mais on a vite su que le patron mentait. L'explosion n'était pas due, comme il avait été dit, à l'incendie imprévisible d'un transformateur. Depuis des jours, des mineurs attiraient l'attention sur l'élévation de la température dans la mine et sur celle du taux de monoxyde de carbone dans l'atmosphère. Pourtant, malgré le niveau du danger largement dépassé, la mine n'a pas été évacuée : il fallait continuer à battre les records de production.

Le gouvernement Erdogan a dû faire volte-face et a décidé l'arrestation des responsables de la société minière. Les mineurs morts ont été déclarés « héros nationaux » et des compensations financières ont été promises. Mais rien n'est pour autant réglé. Dans cette zone rurale où l'agriculture elle-même n'offre plus de débouchés, la mine est le seul emploi possible. Les patrons prendront-ils les mesures nécessaires pour y assurer une véritable sécurité ? Rien ne l'indique, à moins que les travailleurs ne les y contraignent.31

 

 

L'élection présidentielle de 2014 : après Erdogan, Erdogan

Premier ministre sans interruption depuis douze ans, Recep Tayyip Erdogan a remporté dès le premier tour l'élection présidentielle turque, le 10 août, qui pour la première fois se déroulait au suffrage universel direct. L'issue ne faisait guère de doute : à la télévision, dans la presse, dans la rue sur les panneaux publicitaires, on ne voyait pratiquement qu'Erdogan et ses slogans l'assimilant à l'ordre et à l'État.

Erdogan affirme sans rire que l'élection du président au suffrage universel était nécessaire pour qu'enfin, en Turquie, « la volonté du peuple » soit respectée... même si on voit mal pourquoi elle devrait mieux l'être avec à la présidence l'homme qui s'est distingué par la répression violente des manifestants de la place Taksim au printemps 2013. En fait de « réforme », Erdogan et son parti, l'AKP, ont surtout réussi à imposer leur domination sans partage en éliminant leurs concurrents, kémalistes du parti social-démocrate CHP ou nationalistes du parti d'extrême droite MHP présents aux différents niveaux de l'appareil d'État, de l'armée à la police et à la justice. La présidence Erdogan s'annonce dans la tradition autoritaire et policière de tous les gouvernements turcs, à commencer par le sien entre 2002 et 2014.

Comme l'ont montré les 51,8 % obtenus, Erdogan dispose toujours d'une forte base dans l'opinion, et pas seulement parmi la petite bourgeoisie traditionaliste des campagnes d'Anatolie. Le gouvernement de l'AKP, parvenu au pouvoir en 2002 au terme d'une série de crises politiques et financières, peut se présenter comme celui qui a ramené la stabilité, et brandir comme un drapeau l'essor qu'a connu l'économie turque ces dernières années. Même si maintenant la crise se profile à l'horizon, elle est encore peu sensible pour une grande partie de la population, qui a sans doute voté sur ce qui apparaît encore comme le bilan d'Erdogan.

De plus, au cours de la campagne électorale, les événements de Gaza ont donné à Erdogan l'occasion de se présenter comme celui qui défend, y compris contre les États-Unis, les droits des Palestiniens écrasés sous les bombes et comme le champion du nationalisme turc, y compris contre les puissances occidentales.

 

Un islamiste face à un islamiste

En instaurant cette élection au suffrage universel, les dirigeants turcs avaient pris leurs précautions. Pour être candidat à la présidence, il fallait recueillir au préalable la signature de vingt députés, ce qui rendait évidemment impossible une candidature se plaçant hors du système politique. D'autre part, le candidat Erdogan s'est arrogé pratiquement le monopole des médias avec, par exemple, près de deux heures d'antenne sur la télévision publique TRT contre un peu moins de trois minutes à son principal concurrent Ihsanoglu et... huit secondes au troisième candidat, Demirtas.

Mais surtout, face à Erdogan, ces candidats concurrents ne semblaient pas proposer de changement crédible. Le parti CHP, dit social-démocrate, se présente comme une opposition laïque, combattant la dérive religieuse imposée par l'AKP d'Erdogan, islamiste et conservateur. Mais dans cette élection présidentielle le CHP avait choisi de s'allier avec l'extrême droite nationaliste du MHP et à d'autres partis de droite pour présenter un candidat tout aussi islamiste qu'Erdogan, Ekmeleddin Ihsanoglu. Celui-ci, qui ne manque jamais de s'affirmer très croyant, a été longtemps secrétaire général de l'Organisation de la conférence islamique. Même si Ihsanoglu reproche à Erdogan de confondre les affaires de l'État et celles de la religion, il est évident qu'en soutenant ce candidat islamiste et conservateur le CHP a voulu se placer sur le même terrain qu'Erdogan.

On peut en dire presque autant du troisième candidat, Selahattin Demirtas. Celui-ci se positionnait à gauche, se présentant comme le candidat de toutes les minorités, les Kurdes en particulier, partisan de la concorde entre tous, du respect de la nature et de la paix, avec quelques mots sur les droits des femmes et sur ceux des travailleurs. Mais Demirtas, lui aussi, est resté sur le même terrain qu'Erdogan en ne manquant jamais de s'affirmer comme un bon musulman, respectueux de l'islam et de ses traditions. Ainsi, tous s'inclinaient devant la présence croissante de la religion, telle que l'AKP a réussi à l'installer à tous les niveaux de la société turque.

 

La crise montre son nez

Avec 38,4 % des suffrages pour Ihsanoglu et 9,8 % pour Demirtas, ceux-ci sont maintenant renvoyés à l'opposition. L'élection terminée, le problème immédiat de l'AKP est surtout la guerre fratricide qui se déroule en son propre sein entre les deux confréries ennemies : celle d'Erdogan et celle de Fethullah Gülen, imam exilé aux États-Unis et disposant de l'appui des dirigeants américains. Cette guerre se poursuivait depuis plus de deux ans, à coups de révélations dans la presse et d'accusations de corruption et de complot.

Quant aux travailleurs et aux couches populaires, dont les problèmes n'ont guère été abordés au cours de la campagne, ils pourraient maintenant ressentir de plus en plus la dégradation de la situation économique. L'inflation s'accélère avec la perte de valeur de la livre turque. Selon des chiffres récents, 2,5 millions de personnes sont sur la liste noire pour retard ou non-paiement de leurs traites, 93 % des fonctionnaires vivent sur des crédits et 68 % d'entre eux ne parviennent plus à les régler à temps, devant subir des pénalités. L'endettement des ménages a été multiplié par 124 en douze ans. D'autre part, la bulle immobilière risque maintenant d'éclater à tout moment. Enfin, les conséquences de la guerre qui sévit dans deux pays voisins, l'Irak et la Syrie, deviennent de plus en plus sensibles, avec d'un côté l'afflux de réfugiés et d'un autre de grosses pertes pour l'économie turque.

Malgré tous les mensonges et les déclarations triomphalistes d'Erdogan, la crise montre son nez. Face à elle les travailleurs devront compter sur eux-mêmes et pas sur le prétendu respect de la « volonté du peuple » brandi par le vainqueur de l'élection du 10 août.32

 

 

Élections, libertés et culte de la personnalité...

Confrontée à la guerre civile syrienne, à l’avancée de Daech (qui utilise son territoire et ses frontières pour s’approvisionner en pétrole, munitions, combattants), la Turquie est également divisée intérieurement par la personnalisation du pouvoir entre les mains d’Erdogan et la menace d’une nouvelle Constitution qui ne répondra pas aux aspirations d’une partie de la société turque.

Recep Tayyip Erdogan, président depuis août 2014, et l’AKP détiennent au Parlement la majorité des sièges, mais pas les deux tiers qui leur permettraient de modifier une Constitution datant du coup d’état militaire de 1980. Afin d’assurer cette majorité lors des prochaines élections législatives de juin 2015, les hauts fonctionnaires turcs ont donc démissionné en masse pour être éligibles, posant dès lors des problèmes de gestion du pays.

Le Président du Conseil constitutionnel ayant déclaré certaines réformes inconstitutionnelles, notamment certaines touchant aux libertés, est prié de quitter ses fonctions...
Et saisi de folie des grandeurs, Erdogan s’est fait construire pour 350 millions de dollars un palais ultraluxueux, rasant pour cela une forêt classée site naturel. Une université et un stade de football portent déjà son nom, et une mosquée géante est en route, dans laquelle il souhaiterait, dit-on, être enterré...33

 

 

Élections législatives en 2015, une claque pour Erdogan

Les élections législatives du 7 juin 2015, auxquelles ont participé plus de 86 % de votants, soit 53 millions d’électeurs, le vote étant une obligation, se sont soldées par une claque pour le parti d’Erdogan, l’AKP, le Parti du développement et de la justice, dit islamiste modéré et qui l’est de moins en moins.

Depuis treize ans, l’AKP avait remporté la majorité des sièges à toutes les élections, notamment 327 sièges sur 550 aux précédentes élections législatives. Cette fois-ci, il n’a même plus la majorité absolue avec 258 sièges, loin des 276 requis pour former seul un gouvernement.

 

Un désaveu pour l’AKP

Dans cette campagne électorale, Erdogan ne s’est pas fait faute de se mettre en avant. Élu président de la République en août 2014 avec 52 % des suffrages, il était censé d’après la Constitution rester au-dessus des partis et ne pas participer à la campagne électorale. Il y est pourtant intervenu de multiples façons, sans compter l’usage quasi exclusif qu’il avait des médias officiels. Erdogan aurait voulu atteindre les 400 sièges nécessaires à l’AKP pour réformer la Constitution et faire adopter un régime présidentiel qui, entre autres, aurait mis son leader à l’abri de toute poursuite judiciaire. Or l’opposition, notamment ses anciens amis devenus ses meilleurs ennemis, la confrérie de Fethullah Gülen, détient des dossiers compromettants pour Erdogan et son entourage, veut le traduire en justice et parle de le faire juger pour haute trahison. Désormais, le projet d’Erdogan tombe à l’eau, avec des résultats qui sont un désaveu venant d’une partie de son électorat.

La bonne situation économique dont la Turquie a bénéficié depuis 2002 a longtemps profité à l’AKP d’Erdogan, en tant que parti au pouvoir. Mais l’économie est maintenant touchée par la crise et l’inflation érode les revenus des classes populaires. L’attitude d’Erdogan face aux scandales qui le touchent, sa politique répressive et autoritaire, notamment après les manifestations du parc Gezi en juin 2013, sa politique d’aide aux mouvements djihadistes de Syrie ont aussi contribué à dégrader l’image d’islamiste modéré qu’il avait voulu se donner. Le succès du parti d’opposition HDP traduit certainement en partie cette évolution de l’opinion.

 

Le succès du HDP

Le HDP (Parti démocratique des peuples) n’était pas sûr au départ de franchir la barre des 10 % nécessaires pour avoir des sièges. Or il a obtenu 13 % des voix et 80 sièges et a bénéficié du soutien d’une partie de la gauche et de l’extrême gauche turques. Voulant dépasser l’image de parti préoccupé exclusivement des intérêts de la minorité kurde, la campagne de son dirigeant Selahattin Demirtas visait à mettre en avant la bonne entente entre les différents peuples de Turquie, notamment entre les Turcs et Kurdes et les autres minorités, l’égalité entre hommes et femmes, le respect des droits des peuples de Turquie. Une partie de la population, et pas seulement kurde, a exprimé en votant pour lui son mécontentement et son désaveu d’Erdogan et de sa politique.

Le HDP ne se place certes pas du point de vue de l’intérêt des travailleurs, mais sur le plan des droits démocratiques et d’une démocratie bourgeoise idéale, opposée au régime policier et de plus en plus obscurantiste de l’AKP. Mais le HDP dérange et est en butte aux attaques de l’extrême droite et d’une partie de l’appareil d’État. Pendant la campagne, plusieurs de ses locaux ont été attaqués et, fait plus grave, lors de son grand meeting du vendredi 5 juin à Diyarbakir, où était rassemblée une foule de 100 000 personnes, deux bombes ont explosé, faisant trois morts et 243 blessés, dont plus d’une dizaine très grièvement.

Parmi les autres partis d’opposition, le CHP (Parti républicain du peuple), kémaliste social-démocrate, a du mal à apparaître comme une alternative et n’a pas progressé, malgré une campagne qui promettait de faire passer le salaire minimum de 960 livres turques à 1 500 (500 euros) et d’offrir aux retraités un double mois à l’occasion des deux périodes de fêtes. Il obtient à peine plus de 25 % des voix et 132 sièges.

Quant au MHP (Parti du mouvement nationaliste), d’extrême droite, il a quelque peu progressé et obtient 16,5 % des voix et 80 sièges, contre 13 % et 53 sièges en 2011, mais il reste loin de retrouver les résultats déjà obtenus dans le passé.

 

Le revers politique s’ajoute au revers social

Après des années de stabilité et de toute-puissance de l’AKP, ces élections du 7 juin étaient en tout cas un revers politique sérieux pour le parti d’Erdogan. Il s’ajoutait à un autre revers, sur le plan social celui-là, même s’il n’en était certainement pas indépendant. Les dernières semaines précédant l'élection, les grèves qui se sont étendues dans le secteur de la métallurgie, à partir de la grève de l’usine Renault de Bursa, ont forcé le patronat à d’importantes concessions. Elles ont montré que les travailleurs n’en sont plus à subir et à se contenter de promesses, et sont de plus en plus prêts à se fier à leur propre action. Pour la bourgeoisie turque, cela pourrait devenir à terme un problème plus grave que celui de l’instabilité éventuelle résultant des élections du 7 juin.34

 

 

Attentat à Ankara

Le 10 octobre 2015, à Ankara, capitale de la Turquie, deux bombes ont explosé durant une manifestation pour la paix appelée par des organisations syndicales. Elles ont explosé à proximité des manifestantEs faisant au moins 120 mortEs et des centaines de blesséEs. La police, restée bien à l'écart, n'a eu aucun blessé mais a par contre immédiatement fait usage de gaz lacrymogènes et de canons à eau sur les survivants affolés et les blessés à terre.

Ce n'est pas le premier attentat de ce type qui frappe la Turquie : à Diyarbakir en juin, une bombe a explosé dans un meeting du HDP (parti pro-kurde et défendant les libertés démocratiques) et en juillet à Suruç, une petite ville à la frontière syrienne, 33 jeunes qui venaient aider à reconstruire les écoles de Kobané sont morts dans un attentat à la bombe similaire.

 

À qui profite le crime ?

Le président turc Rajip Erdogan rêvait d'un pouvoir absolu et s'était personnellement investi dans la campagne électorale de juin 2015. Mais le score imprévu du HDP, avec 13,5% des voix lui a non seulement fait perdre tout espoir de remporter les 2/3 des sièges qui lui auraient permis de transformer la Turquie en « République » islamique, mais aussi la majorité absolue au Parlement. Erdogan qui ne veut pas d'un gouvernement de coalition, a donc choisi une stratégie de guerre civile, bombardant les positions du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) en Irak, emprisonnant des centaines de militants et d'élus HDP, terrorisant des villes entières dans la province à majorité kurde du sud-est de la Turquie. Les locaux du HDP ont été incendiés par ses partisans et l'extrême droite turque. Il a ainsi balayé deux ans et demi de processus de paix dans l'unique but de créer un climat de peur dans le pays qui lui permettrait peut-être de retrouver une majorité au Parlement lors des prochaines élections de début novembre.35

 

Le fruit pourri de la politique impérialiste régionale turque

Quel que soit le degré d’implication de l’État turc dans ce massacre, et même s’il n’a aucun rôle direct dans son organisation, il est indiscutable qu’il en est le premier responsable. Tout d’abord parce que les services de renseignements et la police, qui traquent ceux qui, dans la rue ou sur internet, commettent le crime « d’insulter Erdogan », ont été incapables d’empêcher cet attentat... si bien sûr ils en avaient manifesté l’intention.

Mais d’autre part, cet attentat est le résultat de la politique aveugle, interventionniste, « impérialiste régionale » du régime Erdogan vis-à-vis de la Syrie. C’est la conséquence de plusieurs années de soutien logistique, financier et militaire à maintes organisations djihadistes afin de les aider à renverser le régime d’el-Assad. C’est aussi l’aboutissement d’une obstination de la part de l’AKP au pouvoir d’empêcher par tous les moyens la consolidation d’une région autonome kurde (sous la direction du PKK-PYD), quitte à laisser Daech occuper ces terres...

 

Le mouvement kurde réprimé

Erdogan n’a ainsi pas hésité à pousser le pays dans un état de guerre civile et d’état d’urgence pour mieux réprimer le mouvement kurde et son parti légal, le HDP, afin de rester au pouvoir. Il n’a pas hésité à pousser la société dans une division ethnique et culturelle-religieuse difficilement réparable pour consolider sa propre base. Enfin, il n’a pas non plus hésité à s’allier aux plus sombres acteurs politiques, tels que le Hezbollah de Turquie ou bien certaines forces de l’extrême droite fasciste. Ainsi, un jour avant le meeting d’Ankara, le mafieux-fasciste Sedat Peker, très populaire parmi l’extrême droite et notamment chez les « loups-gris », organisait dans la ville de Rize un rassemblement « contre le terrorisme » et en soutien à Erdogan, où il affirmait que « le sang allait couler à flot »36

Les assauts de l’armée turque contre le PKK et les ripostes de celui-ci ont permis à l’AKP de lancer une vaste campagne de propagande contre le PKK et le HDP en forçant l’amalgame entre le PKK qui a une très mauvaise image auprès de la population turque et le HDP, et entre le PKK et Daech.

L’AKP considère que le PKK et l’EI sont deux organisations terroristes et qu’il n’y a aucune différence entre les deux, foulant au pied ainsi toutes les revendications légitimes du PKK, qui sont une conséquence des répressions subies au cours de l’histoire par les populations kurdes en Turquie et encore actuelles.

Les médias dominants turcs se sont mis à marteler l’idée que c’est le PKK qui a mis fin au cessez le feu alors que la cause est clairement due aux décisions déplorables d’Ankara. Les funérailles des soldats turcs ont tous les jours été sur-médiatisées et ces soldats furent présentés comme des « martyrs morts pour la nation ». Ce qui venait alourdir encore le matraquage faisant passer le PKK pour une organisation terroriste ayant pour seul but de semer la terreur.

 

Dans ce contexte, l’AKP s’est lancé dans une grande campagne contre le HDP, que le gouvernement montrait comme la frange électorale du PKK au mépris de toute vérité, dans le but évident de salir l’image du HDP auprès de la population. Tout cela par le biais du classique matraquage médiatique et le lancement d’une enquête judiciaire contre Selahatin Dermitas (leader du HDP) sous le prétexte de troubles à l’ordre public pour des « faits » remontant à 2014. Il est évident que ces poursuites sont une réaction au succès inattendu du HDP sur le plan électoral.

Les affrontements de l’armée et de la police avec le PKK, le DHKP-C (gauche révolutionnaire turque) et le MLKP (parti marxiste léniniste de Turquie), permettait à Erdogan de se positionner, lui et son parti, comme seul capable de gérer les tensions internes du pays et de montrer l’opposition comme responsable de ces tensions. Tout cela dans l’espoir de reconquérir la majorité absolue qui lui était absolument nécessaire pour encore une fois amplifier son pouvoir, ce qu’il n’a cessé de faire durant ses mandats successifs. Sans compter le fait que, si l’AKP n’obtenait pas la majorité absolue, Erdogan aurait du rendre compte de ses dérives autoritaires.

C’est ainsi que le 21 Août, Erdogan confirma l’évidence en annonçant la tenue d’élections législatives anticipées le 1er novembre 2015. Il pouvait donc retenter sa chance au suffrage en profitant comme à son habitude de la peur de la population et de l’instabilité de la société turque. Victoire qui lui permettrait via une réforme de la Constitution d’étendre son pouvoir, ce dont l’a empêché la défaite du 7 juin.37
 

 

Victoire d'Erdogan aux élection législatives

Les élections législatives du 1er novembre, jugées décisives au niveau de la consolidation ou de l’affaiblissement du régime d’Erdogan, se sont soldées par la victoire impressionnante du Parti de la justice et du développement (AKP).

Il y a tout juste cinq mois, à la suite des élections du 7 juin, le HDP avait obtenu un résultat exceptionnel avec 13 % des voix,  lui permettant de dépasser la barrière des 10 % et d’accéder au Parlement avec 80 députés. Le déclin des voix de l’AKP (de 50 % en 2001 à 40,8 %) était interprété comme une désapprobation des tendances autoritaires d’Erdogan et de son parti, de son discours visant à polariser la société et des affaires de corruption. On aurait pu penser que c'était le « commencement de la fin » pour l’AKP. Eh bien, malheureusement, non !

 

Pour l’AKP, le plein des voix... et d’autoritarisme

Mécontent des résultats de juin, le président de la République Erdogan avait par la suite imposé des élections anticipées et empêché la formation d’un gouvernement de coalition. Au cours de ces cinq mois marqués par la reprise de la guerre contre les Kurdes, des blocus de villes kurdes, des pogroms, par des massacres d’activistes anti-guerre, par une répression inouïe envers la presse oppositionnelle, l’AKP a réussi à regagner les voix qu’il avait perdues, gagnant haut la main ces nouvelles élections, où il a obtenu 49,4 %. Ainsi, avec ses 316 députés (contre 258 précédemment) sur 550 au total, l’AKP est en position de reformer, pour la quatrième fois depuis 2002, un gouvernement tout seul.

Cette hausse des voix de l’AKP provient en grande partie de l’extrême droite. En effet, le MHP essuie une perte de 4,3 %, obtenant 11,9 %. Cela constitue son pire résultat depuis les élections de 2002, où il était resté en dessous de la barrière des 10 %. Une partie de l’électorat nationaliste-conservateur avait préféré voter pour le MHP le 7 juin dernier afin d’exprimer son opposition aux négociations avec le leader du PKK Abdullah Öcalan dirigées par Erdogan (et menées par les services de renseignement turcs qui lui sont inféodés), ce qui avait permis au parti d’obtenir 16,3 %. Le niveau de violence infligée par l’État au peuple kurde a dû probablement être suffisamment convaincant pour qu’une part significative de l’électorat d’extrême droite (1,8 million de voix) rejoigne l’AKP... Le leader du MHP Devlet Bahceli avait misé sur une politique d’opposition absolue à l’AKP, en refusant par exemple de former un gouvernement de coalition avec ce dernier, ce qui lui aurait permis d’accéder au pouvoir et d’avoir sa part du gâteau dans l’appareil d’État qui se trouve totalement sous la domination de l’AKP. C’est ce choix tactique de la direction du MHP qui a aussi dû être sanctionné en provoquant une faillite indiscutable du parti.

 

Préparer une nouvelle période de résistance

Malgré l’attente d’une hausse de ses voix, le Parti républicain du peuple (CHP, centre gauche), premier parti d’opposition, a quasiment stagné, obtenant 25,4 % contre 24,9 % aux élections de juin. Avec ses 134 députés, le CHP maintient sa position de deuxième parti dans le Parlement.

Les résultats du HDP, parti réformiste de gauche issu du mouvement kurde et soutenu par la majorité de l’extrême gauche, sont pour le moins décevants. En chutant de 13,1 % à 10,8 %, le HDP a ainsi perdu un million de voix, en grande partie au profit de l’AKP, et obtenu 59 députés contre 80 en juin. Le parti s’attendait à subir une petite perte de voix provenant de secteurs républicains de gauche qui avaient voté pour lui en juin afin qu’il dépasse les 10 %, perte qu’il pensait compenser avec une hausse des voix venant des régions kurdes en réaction à la répression de l’État et la reprise de la guerre. Toutefois l’atmosphère de guerre civile, les actions du PKK, les déclarations d’autonomie (« d’autogestion ») dans les villes et quartiers kurdes, ont profité à l’AKP. Les critiques exprimées par le HDP au PKK n’ont pas été jugées suffisantes par cette partie de l’électorat kurde, et le désir de mettre fin aux conflits a ainsi trouvé son expression déformée dans un vote pour l’AKP.

Un gouvernement de l’AKP sans coalition a ainsi été jugé comme étant la solution à un besoin de  « stabilité », face à la crise économique, aux conflits armés, aux attentats meurtriers. La gauche et le mouvement kurde doivent en tirer les leçons pour entreprendre une réorganisation des forces démocratiques et se préparer à une nouvelle période de résistance contre un État encore plus fort, encore plus autoritaire et violent.38

 

 

Mauvais traitements et violences envers les migrants

Dans un rapport publié le 16 décembre 2015, Amnesty International dénonce les conséquences dramatiques des accords conclus les derniers mois par l’Union européenne (UE) avec la Turquie au sujet des migrants.

La Turquie s’est engagée à multiplier les moyens pour garder sur son sol les 2,3 millions de réfugiés syriens ainsi que ceux qui continuent à arriver, moyennant la promesse de 3 milliards d’euros et peut-être d’un réexamen de sa candidature à l’Union européenne.

« Il est choquant que l’argent de l’UE serve à financer des détentions illégales et un programme de renvoi », écrit Amnesty. Depuis des mois, des migrants syriens parvenus jusqu’à l’ouest de la Turquie, qui s’apprêtaient à continuer vers la Grèce ou l’Italie ou avaient déjà tenté un passage, ont été arrêtés sans explication ni motif légal. Frappés et menottés, ils ont été transférés à Düziçi près de la frontière syrienne, ou à plus de 1 200 km à l’est, dans le centre détention d’Erzurum. Ce centre reçoit des subsides européens dans le cadre d’un programme de préadhésion à l’UE, comme l’attestent des étiquettes observées par des détenus sur les lits, les tasses et les serviettes. Il a par ailleurs été confirmé à Amnesty que les six futurs « centres d’accueil » financés en Turquie par l’UE, présentés dans le projet de plan d’action le 6 octobre, seront en fait des centres de détention fermés.

L’État turc traite les migrants avec brutalité, sans le moindre respect de leur dignité et de leurs droits. Avec un parfait cynisme, les dirigeants européens déclarent qu’ils versent de l’argent à la Turquie pour qu’elle améliore « les conditions humanitaires d’accueil des réfugiés », tout en sachant très bien quels sont les moyens mis en œuvre par le gouvernement turc et sa police dans leur rôle de garde-frontière de l’Europe.39

 

 

Attentat suicide à Ankara

Le 13 mars 2016 en fin d’après-midi, un attentat-suicide s’est produit en plein centre d’Ankara, où sont localisés de nombreux ministères, l’état-major des armées, le Parlement turc. Une voiture a foncé sur un autobus pour se faire exploser, causant 37 morts, 125 blessés et de nombreux dégâts.

C’est le troisième attentat en cinq mois dans la capitale turque. Un autre du même genre avait eu lieu le 17 février, faisant 29 morts et des dizaines de blessés, et un autre encore le 10 octobre 2015 près de la gare centrale d’Ankara. Il était le fait de deux kamikazes djihadistes qui avaient visé des manifestants de gauche et prokurdes, faisant 103 morts et plus d’une centaine de blessés.

Fait curieux, aussitôt après chacun de ces attentats, la première mesure prise par le gouvernement a été d’interdire toute information sur le sujet. Cette fois-ci, le gouvernement a ordonné la fermeture de l’accès à Facebook et à Tweeter, une étrange façon d’essayer de trouver les coupables. Autre fait curieux, peu de temps après ce dernier attentat, le premier ministre Davutoglu a assuré, bien qu’il n’y ait eu encore aucune revendication ni aucune preuve, que les enquêteurs disposaient d’éléments « très sérieux, quasi certains » impliquant l’organisation « terroriste-séparatiste » du PKK. Et comme à chaque fois, quelques heures après l’attentat, l’aviation turque a bombardé les bases du PKK au Nord de l’Irak tandis que onze personnes, proches du milieu nationaliste kurde, ont été arrêtées.

Pourtant le parti proche des nationalistes kurdes, le HDP, et même le PKK, non seulement n’ont pas revendiqué l’attentat mais ils l’ont au contraire ouvertement condamné. Une organisation mystérieuse « Les faucons de la Liberté du Kurdistan (THK) » qui serait en rupture avec le PKK aurait revendiqué les deux derniers attentats, mais cela ressemble beaucoup à de l’intoxication venant, comme cela s’est déjà produit, de certains secteurs de l’appareil d’État.

Même si on ne peut avoir de certitude sur l’origine de ces attentats et les possibles manipulations de l’État, il est certain que le terrain a été créé par la politique du gouvernement Erdogan. En soutenant les mouvements islamistes intégristes puis en relançant la guerre civile contre la population kurde, en détruisant plusieurs villes, en y tuant des civils et en provoquant la fuite de milliers de personnes, il a fait monter le climat de violence et certainement fait naître de nouvelles vocations terroristes. Pourtant, c’est ce même Erdogan qui a déclaré pendant plusieurs années, et jusqu’en juin 2015, que les Kurdes étaient ses frères et qu’il était partisan d’un « processus de paix » avec les nationalistes kurdes.

La politique de ce gouvernement envers le peuple kurde et envers l’ensemble de la population turque est criminelle. Tout le pays en subit les conséquences.40

 

 

La tentative de coup d'État

Une tentative de coup d'État a eu lieu dans la nuit du 15 au 16 juillet 2016 principalement à Ankara et Istanbul. Elle a été commanditée par un « Conseil de la paix dans le pays », une faction des Forces armées turques que le gouvernement turc accuse d'être liée à Fethullah Gülen. La tentative s'est soldée par un échec et le dernier bilan officiel fait état de 350 morts dont 179 civils.

Dans les jours suivants le putsch, les autorités turques entreprennent une série d'arrestations et de renvois aux seins des Forces armées du pays, militaires, gendarmes, dans la police, mais aussi de l'enseignement, de la justice, du secteur de la santé, des médias et du secteur privé. Durant la purge, 16 chaînes de télévision accusées d'être proche du mouvement güleniste sont mise hors service et supprimés du satellite Türksat par le Conseil supérieur de l'audiovisuel et 24 journalistes sont arrêtés. L'état d'urgence est décrété pour une durée de 3 mois et la Turquie annonce qu'elle va temporairement déroger à la Convention européenne des droits de l'homme. Ainsi, de nombreux médias internationaux n'hésitent pas à accuser le pouvoir central d'une « purge à grande échelle » visant à écarter les opposants du président Recep Tayyip Erdoğan des institutions étatiques.

 

Conséquences politiques

Pour le politologue turc, analyste politique et chroniqueur au quotidien de gauche laïc Cumhuriyet, Ahmet Insel, les conséquences seront multiples : le président turc va utiliser ces événements pour « réprimer durement ses ennemis », « éradiquer les supposés sympathisants du réseau Gülen dans la justice », utiliser le soutien du MHP pour proposer un référendum sur l'instauration d'un régime présidentiel en Turquie et « accentuer la répression du parti kurde, le HDP ».

Djordje Kuzmanovic, analyste politique français et secrétaire national du Parti de gauche, avance sur son blog hébergé par Médiapart que ce coup d’État, qui n'aurait, selon lui, à aucun moment présenté le moindre risque réel pour le gouvernement, pourrait avoir été monté par Erdoğan lui-même pour justifier le durcissement de son régime, dans une période où l'opposition gagnait du terrain. Cette thèse est également avancée par Fethullah Gülen. Ahmet Insel indique néanmoins que cette hypothèse est « absurde » mais que « la Turquie est un terrain fertile pour les théories du complot ». Il ajoute que si Erdoğan avait été au courant, il aurait eu tout intérêt à déjouer le complot en procédant aux arrestations juste avant, avec un impact similaire sur l'opinion. Enfin, la thèse ne serait pas plausible selon lui, étant donné le nombre important de morts. Cependant pour Jean Marcou, il est possible que le gouvernement turc ait laissé les putschistes réaliser la tentative de coup d'État pour pouvoir ensuite riposter et renforcer son pouvoir.

La tentative de coup d'État peut aussi avoir été perpétrée par la frange kémaliste de l'armée, comme en 1980, qui serait ici inquiète de la politique islamo-conservatrice prônée par le gouvernement. Il peut également s'agir d'une alliance objective entre gülénistes et kémalistes. Les putschistes peuvent aussi avoir agi en prévision d'un coup de filet à leur égard.41

 

 

Attentats et répression

Le soir du samedi 10 décembre 2016, à Istanbul, un nouvel attentat meurtrier a eu lieu à la sortie d’un match de football, faisant 44 morts, dont 36 policiers, et 155 blessés. L’attentat a été revendiqué par le TAK (Les faucons de la liberté du Kurdistan), un groupe qui serait lié au PKK.

La police a arrêté aussitôt treize personnes, mais n’a donné aucune information précise. Par contre, le gouvernement a profité de l’émotion suscitée par l’attentat pour poursuivre sa chasse aux sorcières. Pour l’instant, dans onze départements, 372 personnes ont été arrêtées, dont deux députés du parti pro-kurde HDP. Huit autres députés sont recherchés pour être arrêtés. Le HDP, le Parti démocratique des peuples, créé pour donner une voix légale aux aspirations des minorités, et en particulier des populations kurdes, est ainsi en voie d’être totalement interdit. En interrompant il y a plus d’un an le processus de négociation avec la guérilla kurde, le gouvernement Erdogan lui-même a fini par renforcer ceux qui recourent au terrorisme et en tire maintenant argument pour réprimer tous ceux qui le contestent, fût-ce par les voies légales.

Erdogan a choisi une véritable stratégie de la tension. Depuis la tentative de coup d’État militaire du 15 juillet, son gouvernement AKP a décrété l’état d’exception et règne à coups de décrets. Dans ce cadre, il peut faire arrêter qui il veut en l’accusant simplement de terrorisme. C’est ainsi que déjà plus de 125 000 personnes ont été suspendues ou limogées, principalement dans les milieux de la justice, de la police, de l’enseignement ou plus généralement des fonctionnaires. Du jour au lendemain, ces personnes se retrouvent sans aucun revenu et sans aucune possibilité de recours contre la décision qui les frappe. Plus de 39 000 d’entre elles sont en prison.

Par ailleurs, plus de 2 600 établissements ou associations ont été fermés dont cinq agences d’information, seize chaînes de télévision, 24 stations de radio, 62 journaux, 19 revues, 29 maisons d’édition, et ce ne sont évidemment pas que des partisans de Fethullah Gülen, l’ex-complice d’Erdogan maintenant réfugié aux États-Unis et accusé d’avoir fomenté le coup d’État.

En 2002, au début du gouvernement de l’AKP, Erdogan faisait de grands discours sur la démocratie et dénonçait la dictature de la période qui avait suivi le coup d’État militaire de 1980. Mais la situation devient pire qu’à cette époque : un rapport de l’ONU a fait un bilan inquiétant sur la situation de l’après-15 juillet 2016, parlant de « tortures, mauvais traitements apparemment répandus (…), les suspects sont enfermés jusqu’à 30 jours en garde à vue, sans accès à l’air libre ».

Tous les jours ont lieu des dizaines d’arrestations et n’importe qui peut être arrêté sur simple dénonciation, comme dans les deux exemples récents cités par la presse : un chauffeur de taxi a enregistré à son insu les critiques d’un de ses clients contre le gouvernement, et ce dernier a été arrêté. Une autre personne a osé critiquer Erdogan dans un café et a subi le même sort.

Erdogan et le gouvernement AKP craignent visiblement une deuxième tentative de coup d’État, ou bien une conjuration venue de leur propre camp et qui pourrait les balayer. Ils réagissent en tentant de faire régner une ambiance de terreur dans l’ensemble du pays. Mais il n’est pas sûr qu’ils puissent poursuivre encore longtemps leur fuite en avant dans une répression tous azimuts.42

 

 

Victoire contestable d’Erdogan

Si Erdogan et son parti l’AKP ont remporté les élections présidentielle et législatives du 24 juin 2018, c’est de justesse et aussi en commettant certainement de nombreuses irrégularités ; sans oublier le fait que le contrôle absolu du pouvoir sur les médias n’a pratiquement pas permis aux partis d’opposition de s’exprimer.

Ces élections ont été anticipées justement parce que le président et le parti au pouvoir assistaient, au sein de la population, à une usure très rapide de leur crédit. Erdogan avait dit à plusieurs reprises qu’anticiper les élections serait « trahir la patrie ». Il faut croire que la peur de perdre le pouvoir s’il avait attendu la date normale, dans dix-neuf mois, a été la plus forte.43

 

 

Après le séisme, Erdogan mis en cause

Le 6 février 2023, les deux séismes qui ont secoué le sud-est de la Turquie et la région du Hatay au sud-ouest ont fait officiellement un peu plus de 40 000 morts, mais les chiffres semblent largement sous-évalués : Osman Bilgin, le gouverneur turc de la province kurde de Şırnak, a déclaré que les chiffres réels des victimes du séisme étaient quatre à cinq fois bien plus élevés que ceux annoncés.

Le nombre de morts pourrait atteindre 200 000 selon les aveux du gouverneur Bilgin. Il a même déclaré que plusieurs villes touchées par le séisme du 6 février allaient être rayées de la carte et que de nouvelles villes allaient être construites à leur place.

 

« Nous n’avons reçu aucune aide »

La Turquie se situe au point de rencontre de trois plaques tectoniques différentes, la plaque arabe, la plaque africaine et la plaque anatolienne, donc les secousses y sont fréquentes. Le tremblement d’Izmit, en 1999 avait fait des dizaines de milliers de morts et blessés, et il avait servi de tremplin à Racep Tayip Erdogan dans sa conquête du pouvoir. Il avait à l’époque dénoncé la corruption et le manque de prévoyance du DSP de Bülent Ecevit alors Premier ministre.

Dès son arrivée au pouvoir en 2002, avec son parti l’AKP, Erdogan avait instauré un impôt pour la prévention des risques sismiques qui a rapporté des milliards de livres turques à l’État. « Nous continuons à recevoir les feuilles d’impôt sismique dans nos boîtes aux lettres et, une semaine après le tremblement de terre, nous n’avons reçu aucune aide, les gens dorment dehors tous les bâtiments sont fissurés, ils s’écrouleront à la prochaine secousse » témoignait une amie et militante du HDP de Diyarbakir. « Nous nous organisons nous-mêmes pour fournir aux sinistrés la nourriture et les produits d’hygiène, le lait pour les bébés, nous ne recevons rien ! » La solidarité était aussi très grande du côté des commerçants et restaurateurs qui ont laissé leurs établissements ouverts toute la nuit pour que les gens puissent se réchauffer (il faisait un froid glacial dans la région), se restaurer et utiliser les toilettes.

Mais Diyarbakir, éloignée de l’épicentre, n’a pas été la ville la plus touchée. Certaines villes kurdes comme Adyaman et Marash ont été pratiquement rayées de la carte et les secours officiels ont mis des jours et des jours à arriver, aggravant dramatiquement le nombre de victimes.

 

Des critiques de plus en plus sévères

Pourtant l’élan de solidarité de la société civile a été fantastique, le HDP a organisé des centaines de convois de secours et de volontaires, bloqués par l’armée en raison de l’état d’urgence décrété dans les zones kurdes sinistrées. L’aide a été en grande partie confisquée par l’armée, et distribuée au nom du gouvernement, les volontaires écartés.

Une autre zone très touchée, celle d’Hatay, au sud ouest de la Turquie a été tout aussi délaissée par l’État. La ville d’Antakia (Antioche), détruite à plus de 80 %, a attendu en vain plusieurs jours. Il faut dire que cette province syrienne donnée à la Turquie par la France en 1939 est majoritairement peuplée de Kurdes et surtout d’Alévis, une branche du chiisme particulièrement démocrate, très peu appréciée par l’AKP sunnite.

Fort de ses succès comme médiateur dans la guerre en Ukraine, en particulier dans le déblocage des exportations de céréales ukrainiennes, fort du soutien des États-Unis, Erdogan comptait sur les élections prévues en mai 2023 pour repartir sur un nouveau mandat, malgré la situation économique catastrophique, une inflation à trois chiffres et la chute abyssale de la livre turque.

Mais passé l’état de choc, les critiques se font plus sévères : où sont passés les milliards en impôts destinés à consolider les immeubles d’habitation ? Comment se fait-il que des centaines d’immeubles très récents se soient effondrés sur la tête de leurs habitantEs alors que les normes de construction anti-­sismique étaient obligatoires ? La corruption et les passe-droits seraient ils donc les mêmes que ceux dénoncés par Erdogan en 1999 ?

Le CHP (parti social-démocrate nationaliste turc), qui a pu remporter les grandes villes comme Ankara, Istanbul et Izmir grâce en grande partie au HDP qui n’a pas présenté de candidatEs, donnait de la voix en espérant mettre l’alliance AKP-MHP en difficulté.

Pendant ce temps, l’armée turque, apparemment non concernée par le désastre, continuait à bombarder le Rojava, Kobané et même le quartier kurde d’Alep, Cheikh Masoud.44

 

 

Erdogan reste, la crise continue

Le 28 mai 2023, au deuxième tour des élections présidentielles en Turquie, Recep Tayyip Erdogan a été élu, pour la troisième fois, par 52,2 % des voix contre 47,8 % à son adversaire, Kemal Kiliçdaroglu, candidat de l’ensemble des partis de l’opposition, l’Union nationale.

Malgré le rejet d’une grande partie de la population à l’idée d’un troisième mandat, le président et son parti l’AKP l’ont emporté. Erdogan a, au passage, bafoué la Constitution qu’il avait lui-même élaborée et qui lui interdisait de se présenter de nouveau. Dans les sondages, il était donné perdant au premier tour, ce qui était vraisemblable, ne serait-ce qu’en raison de l’incurie manifestée par les pouvoirs publics après le tremblement de terre du 6 février ainsi que de l’incapacité du gouvernement à répondre aux problèmes des classes populaires.

Et, en effet, Erdogan non seulement n’a pas été élu au premier tour, mais jamais l’écart entre son adversaire et lui n’avait été aussi faible. Les 2,8 millions d’électeurs de Sinan Ogan, arrivé en troisième position, appelés à reporter leurs suffrages sur Erdogan, ont pu faire la différence, l’écart au deuxiè­me tour étant d’environ 2,3 millions de voix. Mais, surtout, tous les moyens d’État ont été mobilisés par le ­président-­candidat. Les médias, déjà presque tous à son service, ont été saturés de sa propagande. Les fausses nouvelles, comme celle du soutien apporté à Kiliçdaroglu par le parti nationaliste kurde interdit, le PKK, n’ont pas manqué de circuler. La propagande électorale du candidat de l’opposition a été muselée. Ainsi ce dernier a subi une interdiction d’envoi de SMS aux électeurs, tandis que l’AKP y était autorisée. Les menaces émanaient du ministre de l’Intérieur, qui avait déployé gendarmes et policiers. Enfin, il est certain que des fraudes ont été commises, comme à l’élection présidentielle de 2017 lors de laquelle des quantités importantes de faux bulletins avaient été retrouvés. Lors du dernier scrutin, des opposants, connus, comme le dirigeant du parti communiste turc, le TKP, ont eu la surprise de constater, au dépouillement de son propre bureau de vote, que Kiliçdaroglu n’avait aucune voix.

Cependant, ce dernier, dirigeant du parti kémaliste CHP, allié en l’occurrence avec le Bon parti, nationaliste de droite, a choisi de tourner sa campagne d’entre les deux tours vers les électeurs de l’extrême droite, flattant les préjugés anti-immigrés, attaquant les Syriens dont la situation est de plus en plus difficile en Turquie, menacés de reconduite à la frontière au moindre contrôle policier. Or, dans ce domaine, Erdogan avait de l’avance, de même que dans la propagande militariste et nationaliste antikurde.

Le seul point commun à l’alliance de l’opposition, l’Union nationale, était son hostilité à Erdogan et à l’AKP, son candidat se bornant à quelques promesses de lendemains merveilleux. Les travailleurs, écrasés par la crise et l’inflation, n’avaient pas, et n’ont pas, à lui faire confiance. Pour imposer leur droit à une vie décente, ils ne devront compter que sur leurs propres forces.45

 

 

Sources

(1) https://fr.wikipedia.org/wiki/Turquie
(2) https://fr.wikipedia.org/wiki/Empire_ottoman
(3) https://fr.wikipedia.org/wiki/Turquie
(4) https://fr.wikipedia.org/wiki/Empire_ottoman
(5) https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_Turquie
(6) https://fr.wikipedia.org/wiki/Mustafa_Kemal_Atat%C3%BCrk
(7) https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volution_des_signes
(8) Hérodote.net
(9) Jean Ziegler, « L'empire de la honte », Fayard, 2005, p.118.
(10) Damien Millet, Éric Toussaint, « Triple A : Audit, Annulation, Autre politique », Seuil, 2012, p.7.
(11) Gary Leech, «  Le Capitalisme : un génocide structurel, ou les mécanismes meurtriers de la mondialisation néolibérale », Le retour aux sources, 2012, p.148.
(12) Susan George, « Un autre monde est possible si », Fayard, 2004.
(13) A.Bertrand, L.Kalafatides, « OMC,le pouvoir invisible », Fayard, 2002, p.95.
(14) http://www.initiative-communiste.fr/articles/prcf/lady-lagarde-la-chienne-de-garde-du-capital-international-doit-demissionner/
(15) http://www.reporterre.net/spip.php?page=redirect&id_article=2995
(16) Nolwenn Weiler http://www.bastamag.net/De-la-Grece-au-Niger-comment-le
(17) ?
(18) Damien Millet  http://cadtm.org/La-dette-du-Tiers-Monde
(19) Jérémie Cravatte  http://cadtm.org/Dette-du-sud-ou-en-est-on
(20) Entretien avec Éric Toussaint, président du Comité pour l’annulation de la dette du Tiers monde. Par Mamadou Sarr et Éric Toussaint  http://resistance71.wordpress.com/2011/02/11/dette-illegitime-odieuse-des-pays-en-voie-de-developpement-la-fonctionalite-de-la-cessation-de-paiement/
(21) Entretien avec Eric Toussaint  http://www.lcr-lagauche.be/cm/index.php?view=article&id=2155:brisons-lengrenage-mortifere-de-la-dette-publique-entretien-avec-eric-toussaint&option=com_content&Itemid=53
(22) Jean Ziegler, « L'empire de la honte », Fayard, 2005, p.234.
(23) http://www.lutte-ouvriere.org/documents/archives/cercle-leon-trotsky/article/la-turquie-du-kemalisme-a-l
(24) https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_Turquie
(25) https://fr.wikipedia.org/wiki/Mouvement_protestataire_de_2013_en_Turquie
(26) Gregory Dziedzic  http://www.algeriepatriotique.com/article/reportage-en-turquie-des-racines-du-soulevement-contre-le-regime-derdogan-son-essoufflement
(27) https://fr.wikipedia.org/wiki/Mouvement_protestataire_de_2013_en_Turquie
(28) Capitaine Martin  http://www.legrandsoir.info/le-soi-disant-miracle-economique-d-erdogan.html
(29) https://fr.wikipedia.org/wiki/Recep_Tayyip_Erdo%C4%9Fan
(30) Sinif Mücadelesi (Turquie - UCI)  http://www.lutte-ouvriere-journal.org/lutte-ouvriere/2390/dans-le-monde/article/2014/05/22/32453-turquie-plus-de-300-morts-la-mine-de-soma-ce-nest-pas-un-accident-cest-un-crime.html
(31) Julien Silva  https://www.lutte-ouvriere-journal.org/lutte-ouvriere/2392/dans-le-monde/article/2014/06/05/32616-turquie-apres-la-catastrophe-miniere-de-soma.html
(32) Julien Silva  http://www.lutte-ouvriere-journal.org/lutte-ouvriere/2402/dans-le-monde/article/2014/08/13/33029-turquie-lelection-presidentielle-apres-erdogan-erdogan.html
(33) http://www.npa2009.org/actualite/turquie-elections-libertes-et-culte-de-la-personnalite
(34) Julien Silva  http://www.lutte-ouvriere-journal.org/2015/06/10/turquie-elections-legislatives-une-claque-pour-erdogan_37319.html
(35) https://npa2009.org/agir/erdogan-assassin-hollande-complice
(36) Uraz Aydin  https://npa2009.org/actualite/turquie-ankara-lattentat-sanglant-contre-la-paix-et-la-democratie
(37) Erdal  http://www.michelcollon.info/Turquie-entre-conflits-et.html?lang=fr
(38) Uraz Aydin  https://npa2009.org/actualite/international/turquie-lecons-de-la-victoire-derdogan
(39) Jean Sanday  http://www.lutte-ouvriere-journal.org/2015/12/22/turquie-mauvais-traitements-et-violences-envers-les-migrants_64395.html
(40) Julien Silva  http://www.lutte-ouvriere-journal.org/2016/03/16/turquie-attentat-suicide-ankara_66471.html
(41) https://fr.wikipedia.org/wiki/Tentative_de_coup_d%27%C3%89tat_de_2016_en_Turquie
(42) Julien Silva http://journal.lutte-ouvriere.org/2016/12/14/turquie-attentats-et-repression_73307.html
(43) Julien Silva https://journal.lutte-ouvriere.org/2018/06/27/turquie-victoire-contestable-derdogan_108945.html
(44) Mireille Court https://nouveaupartianticapitaliste.org/actualite/international/turquie-apres-le-seisme-erdogan-mis-en-cause
(45) Julien Silva https://journal.lutte-ouvriere.org/2023/05/31/turquie-erdogan-reste-la-crise-continue_694973.html