Thraces, Scythes, Celtes et Romains
Les populations indo-européennes les plus nombreuses dans la région furent les populations de langues thraco-illyriennes, connues sous les noms de Thraces et Illyres, et appelés au nord du Danube Gètes par les auteurs grecs ou Daces par les auteurs romains ; les historiens parlent de Géto-Daces. Les Thraces étaient présents dans toute la partie orientale de la péninsule des Balkans ainsi que dans le bassin du bas-Danube au nord du fleuve, jusqu'au Boug méridional ; à l'est des Carpates, ils s'entremêlaient de Scythes. Au IVe siècle avant notre ère s'ajoutèrent les Celtes, représentés ici par des Scordisques (ou Scordices) et des Bastarnes (ces derniers, mêlés de Germains), et appelés par les auteurs grecs : Galates. Enfin, à partir du Ier siècle avant notre ère au sud du Danube, et du IIe siècle de notre ère au nord, l'Empire romain étend sa domination sur la région et, procédant à de nombreux transferts de populations et de colons, romanisa les populations au nord d'une ligne correspondant en gros au Grand Balkan actuel (au sud, elles furent hellénisées).
Les Thraces
Les Thraces sont mentionnés par Homère dans L'Iliade, mais en l'absence d'autres écrits, seuls les trésors des rois et des aristocrates permettent une approche de la culture thrace. Les royaumes thraces étaient des États religieux gouvernés par des dynasties de rois-prêtres (polistes) à la tête de troupes de cavaliers aristocrates (tarabostes) et de paysans guerriers (comates c'est-à-dire chevelus). Les nombreuses résidences fortifiées (dava) correspondent à des capitales temporaires, quand le roi y réside. Les Thraces sont refoulés vers l'est et coupés de l'Adriatique par les Illyriens puis par les Macédoniens. À partir du VIe siècle av. J.-C. l'aristocratie thrace, surtout les Besses, les Daces et les Odryses ont des échanges avec les Grecs, utilisent l'alphabet grec pour leur langue et constituent de puissants royaumes. La monarchie n'y est pas héréditaire et ces royaumes se fragmentent souvent à la mort de leur souverain. Les côtes (mer Égée au sud, mer Noire à l'est) sont colonisées par les Grecs au VIe siècle avant notre ère, conquises par les Perses de Darius Ier en -515 et reprises par Philippe II de Macédoine en -342.
Selon Hérodote (livre V), « la nation des Thraces est, après celle des Indiens, la plus importante du monde. S'ils avaient un seul roi et s'ils pouvaient s'entendre entre eux, ils seraient invincibles et, d'après moi, beaucoup plus puissants que toutes les nations ».
Sitalcès, le roi des Odryses (le plus puissant des royaumes thraces de cette période) est l'allié des Athéniens dans la guerre du Péloponnèse. Après sa mort commence une période de déclin malgré les essais d'unification des Thraces sous Cotys Ier, Kersobleptès et Burebista.
Le Ier siècle av. J.-C. est considéré comme l'âge d'or de la civilisation thrace, avec les royaumes des Odryses (au sud du Danube) et de Burebista (au nord du Danube).
La romanisation
En 332, l'empereur Constantin Ier prend le parti d'établir une nouvelle capitale aux confins de l'Europe et de l'Asie, sur l'emplacement d'une ancienne colonie grecque nommée Byzance, et lui donne le nom de Nova Roma, Nouvelle Rome, mais on l'appellera plutôt Constantinople. Au cours des siècles suivants, Constantinople et l'Empire romain d'Orient (dit byzantin) maintiennent l'Empire et l'influence romaine dans la moitié orientale des possessions de Rome, tandis que la moitié occidentale est remplacée par des royaumes barbares (Suèves, Vandales, Wisigoths, Francs, Burgondes, Ostrogoths et Lombards).
L'Empire, dont le nom officiel est Romania, est désormais chrétien et demeure un État de droit régi par le code justinien.
Autour des Carpates se succèdent divers peuples migrateurs poussés par les changements climatiques des Ve, VIe et VIIe siècles. Au VIIIe siècle, un nouvel état se met en place sur le bas-Danube, tant au nord qu'au sud du fleuve. C'est la Bulgarie danubienne (il y en a une autre sur la Volga). À l'origine, les Bulgares sont des cavaliers turcophones, comme les Avars avant eux ; les populations de leur royaume sont des Albanais, des Serbes, des Slavons et des Romans. Les Bulgares adoptent le slavon comme langue usuelle et officielle, bientôt écrite à l'aide de l'alphabet cyrillique ; et la Bulgarie danubienne devient un tzarat chrétien. Dans ce royaume, les Romans, mentionnés dès 586 dans les chroniques byzantines de Théophane le Confesseur et de Théophylacte Simocatta, habitent plutôt le pourtour des montagnes, alors que les plaines sont à majorité slave et les côtes : grecques.
Période byzantine
À partir du VIIe siècle les Romans apparaissent dans les documents sous leur nom germanique de Valaques. Le slavon reste leur langue officielle, liturgique et diplomatique jusqu'au XVIIe siècle.
Les Valaques sont présents au nord et au sud du bas-Danube, par groupes épars (que les historiens nomment « Romanies populaires », et que les chroniques nomment « Valachies », en grec Valacheia, en allemand Walchengaue, en magyar Vlachföldek, en slave Vlashiny ou Volokhiny). De 971 à 1020, le basileus Basile II le Voulgarochtone (tueur de Bulgares) détruit le royaume de Bulgarie au sud du Danube : de nombreux Slavons et Valaques se réfugient alors auprès de leurs compatriotes vivant au nord du Danube, et se placent sous la protection du royaume de Hongrie. Mais il en reste assez au sud du Danube, pour qu'en 1186, les Valaques de Bulgarie fondent, avec les dynasties Deleanu, Caloianu et Asen, un Royaume des Bulgares et des Valaques (Regnum Bulgarorum et Valachorum selon les documents d'époque, mais que les historiens bulgares le nomment « Second Empire bulgare »). Ce royaume s'étend de l'Albanie à la mer Noire et du Pinde aux Carpates méridionales. Il dure 60 ans et est remplacé, au sud du Danube, par les tzarats bulgares d'Ohrid, Vidin et Trnovo, et au nord du Danube par des banats valaques vassaux de la Hongrie : Severin, Litovoi, Arges, Muscel. À partir de 1256, le destin des Valaques se joue exclusivement au nord du Danube, tandis qu'au sud, ce sont les Slaves et les Turcs qui dominent.1
Les principautés roumaines
« Trois entités territoriales se dégagent aux XIIIe et XIVe siècles :
– la Transylvanie, dominée par les minorités magyare et saxonne, jouit d'une certaine autonomie par rapport à la Hongrie. L'élément roumain se réduit à une paysannerie souvent en révolte contre ses maîtres (émeute de Bobîlna, 1437-1438). Le pays est fortement influencé par la culture magyare.
– la Valachie (Ţara Românească), au sud, assimile des Serbes et des Bulgares, s'émancipe avec Jean Basarab par la victoire de Posada sur le roi de Hongrie Charles Ier Robert (1330) et réussit à accroître sensiblement son territoire.
– la Moldavie, à l'est, absorbe des Ruthènes et rejette, avec Bogdan Ier, la suzeraineté hongroise (1359).
Les deux principautés ont leur voïévode, ou hospodar, souverains absolus qui réussissent à se débarrasser de la tutelle hongroise. La société se divise en boyards, en francs-tenanciers et en tenanciers qui peuvent quitter à leur guise les terres qui leur sont confiées. L'élément essentiel de l'économie réside dans l'élevage de chevaux et de bovins, qui paraît plus important que les cultures céréalières (millet). Les ports de Chilia (Kilia) et de Cetatea Albă (Bilhorod-Dnistrovskyi), débouchés des grands fleuves, commercent avec l'Orient et les villes italiennes. Au xve siècle, les principautés sont convoitées par la Hongrie et la Pologne, leurs rois attisant les querelles dynastiques. »2
Sous l'influence ottomane
À peine la Valachie et la Moldavie se sont-elles émancipées au XIVe siècle, que les Ottomans arrivent par le sud, où ils ont encerclé Constantinople et conquis les derniers tzarats bulgares (1396). La Moldavie et la Valachie doivent accepter la vassalité et payer un tribut aux sultans. Elles doivent aussi céder aux Turcs la Dobrogée (1421) et le littoral moldave en 1484 : les Ottomans font de la mer Noire un lac turc et en expulsent les Génois.
Toutefois, la vassalité envers l'Empire ottoman ne fait pas de la Valachie et de la Moldavie des provinces turques. Les deux principautés restent des États chrétiens pourvus de leurs propres lois, leurs propres assemblées (Sfat), leurs voïvodes, ambassadeurs, armées, politiques. Maintes fois elles mèneront une politique contraire à l’Empire ottoman. Au XVe siècle les voïvodes Étienne III le Grand (Ștefan cel Mare) en Moldavie et Vlad III l'Empaleur (Vlad Țepeș ) en Valachie vaincront à plusieurs reprises l'Empire ottoman. Impressionné par ces réussites, le Vatican proclame Étienne le Grand « athlète du Christianisme », en lui promettant soutien complet.
Mais la prise de Constantinople en 1453 isole encore davantage les deux voïvodats, qui dès lors cherchent des appuis du côté de la Pologne et de la Russie. En 1526, la Transylvanie devient à son tour vassale de la Sublime Porte, qui vient de conquérir la Hongrie à la suite de sa victoire dans la bataille de Mohács. Entre le XVIe siècle et le XIXe siècle, les principautés de Transylvanie, Moldavie et Valachie louvoient entre l'Empire ottoman et les puissances rivales de celui-ci. Vers 1600, le voïvode de Valachie Michel Ier le Brave (Mihai Viteazul) envahit avec une armée hétéroclite de paysans et de mercenaires les voïvodats de Transylvanie et Moldavie, et réalise la première réunion des pays roumains. Toutefois, aucun sentiment unitaire n'anime encore les masses rurales que Michel a liées à la glèbe pour se concilier les boyards : sa politique échoue et il finit assassiné par ses propres alliés, dont le général Basta. L'absence de sentiment unitaire au Moyen Âge ne signifie pas pour autant que la conscience d'être "Roumains" soit un artifice lié à l'émergence de la Roumanie moderne, comme l'affirment des historiens occidentaux, soviétiques et "moldavistes" : en effet, elle est attestée dès le XVIe siècle.
En 1683, l’échec du siège de Vienne par les Turcs marque le début du reflux de l’Empire ottoman. Entre 1685 et 1690, les Habsbourg conquièrent la Hongrie et la Transylvanie. En 1718, les Autrichiens conquièrent le Banat, peuplé de Roumains et de Serbes. En 1775, ils annexent la Bucovine partie nord de la Moldavie. Pour assurer leur pouvoir, les Habsbourg catholiques entament dans ces nouvelles régions de leur empire une politique de colonisation systématique : Slaves, Allemands et Ukrainiens gréco-catholiques en Bucovine, Italiens, Souabes, Alsaciens, Lorrains dans le Banat... À la fin du XVIIe siècle s'ajoute la colonisation germanophone et une importante immigration juive en provenance des territoires anciennement polonais. Ces bouleversements démographiques s'accompagnent d'un développement économique et intellectuel qui profite aux nouveaux-venus.
Entre tsar et sultan
Transformée en grande puissance européenne par Pierre le Grand, la Russie entre aussi dans le jeu géostratégique dont la mer Noire et le delta du Danube sont l'enjeu. Le voïvode de Moldavie, Dimitrie Cantemir, joue la carte russe et perd : les Ottomans, échaudés par la politique fluctuante des principautés roumaines, imposent à la place des familles princières autochtones des aristocrates byzantins (parfois descendants de familles impériales), qui résident dans le quartier grec de Constantinople, le Phanar. Ces voïvodes, appelés aussi Hospodars, sont les Phanariotes. Au XVIIIe siècle la paysannerie roumaine serve était exploitée à l'extrême, et de nombreuses jacqueries éclatent. Certains des Phanariotes, pétris de l'esprit des Lumières, vont tenter d'y remédier : Constantin Mavrocordato abolit le servage en 1749. D'autres ouvrent écoles et hôpitaux ou modernisent la législation. En Transylvanie autrichienne, c'est seulement après la révolution transylvaine de 1784 que l'empereur Joseph II abolit le servage.
Après une nouvelle guerre en 1806, la Russie obtient de l'Empire ottoman, par le Traité de Bucarest de 1812, la partie de la Moldavie située entre le Dniestr et le Prut, nommée depuis lors Bessarabie (auparavant, la Bessarabie n'était que le littoral moldave, appelé par les Turcs Boudjak). L'influence russe va, dès lors contrer celle des Turcs dans les Balkans. Une société secrète, l'Hétairie, se constitue à Odessa autour du prince Ypsilanti : elle groupe de nombreux révolutionnaires de toute origine sociale et religieuse, et son but est de substituer à l'Empire ottoman autocratique, une « République hétairique » multinationale et multiconfessionnelle.
Lors de la révolution de 1821 en Moldavie et Valachie, le voïvode est brièvement chassé de son trône par Tudor Vladimirescu. Mais au lieu de proclamer la République, ce dernier tente de s'asseoir sur le trône et finit exécuté par ses « frères hétairistes ». Une nouvelle convention entre Russes et Turcs est établie en 1826. La révolution échoue en Roumanie, et débouchera au bout de huit ans de guerre sanglante sur l'indépendance d'une Grèce diminuée et monarchique, et sur l'établissement d'un protectorat russe en Moldavie et Valachie (régime Paul Kisseleff, « Règlement organique »). L'idée hétairique a vécu : les révolutionnaires se divisent en mouvements nationalistes rivaux (turc, grec, bulgare, serbe, albanais, roumain) qui luttent séparément, chacun pour ses propres réformes, sa propre indépendance.
Durant la révolution roumaine de 1848, les révolutionnaires (Nicolae Bălcescu, Avram Iancu) tentent à nouveau de proclamer la République en Valachie, Moldavie et Transylvanie (en même temps que dans la plupart des capitales européennes), mais l'insurrection est durement réprimée par les Ottomans et les Russes, leur mouvement échoue à nouveau.
En 1853, la Russie envahit une nouvelle fois la Moldavie et la Valachie. Soutenu cette fois par la France et le Royaume-Uni, l'Empire ottoman entre en guerre contre la Russie. Commence alors la guerre de Crimée : les forces franco-britanniques prennent Sébastopol en 1855. Le traité de Paris de 1856 oblige les Russes à rendre la Bessarabie méridionale (Boudjak) à la Moldavie, et le delta du Danube à l'Empire ottoman, mais avec une forte autonomie.
Naissance de la Roumanie
Après l'échec des révolutions et devant des invasions à répétition, les réformateurs de Valachie et de Moldavie, instruits en France auprès des mêmes cercles humanistes qu'Émile Ollivier, Jules Michelet et Edgar Quinet, décident de former une union politique durable. Napoléon III, en partie par conviction (soutien aux nationalités), en partie pour déstabiliser l'Autriche soutient les deux assemblées qui choisissent en 1859 le même candidat pour conduire leur pays, un militaire de carrière, Alexandru Ioan Cuza. Celui-ci réalise l'union des deux principautés, sous le nom de Principautés unies de Moldavie et de Valachie, libère les Roms du servage, sécularise les biens ecclésiastiques et rend obligatoire l'enseignement primaire. Sa politique est contestée par les conservateurs et par les libéraux, les uns la trouvant trop réformiste, les autres pas assez ambitieuse. Il est renversé par leur coalition en 1866.
Cherchant un soutien international suffisant pour faire entendre la voix de leur petit pays au carrefour des empires des Habsbourg, des tsars et des Ottomans, la classe politique roumaine cherche alors un candidat lié aux grandes maisons régnantes en Europe. Leur choix se tourne vers les princes allemands de la famille des Hohenzollern-Sigmaringen.
Ainsi, en mai 1866, Charles Ier de Roumanie (Carol) est proclamé prince-régnant sur la principauté de Roumanie, dans laquelle un régime de monarchie constitutionnelle est instauré. Un tel soutien est un pas vers la reconnaissance par les puissances d'une indépendance complète.
En 1867, craignant l'irrédentisme roumain, l'empereur François-Joseph qui institue la monarchie austro-hongroise, soumet les Roumains de l'ancien Voïvodat de Transylavanie à la Hongrie : l'autonomie de la Transylvanie, où les Roumains avaient commencé à s'émanciper, est supprimée. Une politique de magyarisation forcée s'ensuit, dressant contre la monarchie des Habsbourg les non-allemands et les non-magyars, dont les Roumains.
De son côté, la Roumanie vise toujours à s'émanciper totalement de l'Empire ottoman. Lorsque l'empire de Russie entre à nouveau en guerre contre les Ottomans, à la suite de massacres en Bulgarie, la Roumanie se range aux côtés des Russes. La campagne militaire est victorieuse et l'indépendance du pays est reconnue au Congrès de Berlin en 1878, en même temps que celle de la Principauté de Bulgarie. Le nouvel État perd cependant à nouveau le Boudjak, mais acquiert les deux tiers de la Dobrogée, la Bulgarie recevant l'autre tiers. Carol est couronné roi du nouveau royaume de Roumanie en mai 1881.
Le royaume de Roumanie de 1881-1918
Au début du XXe siècle, les paysans sont maintenus dans la misère par un système d’usure et des contrats de fermage abusifs. En mars 1907, alors que sécheresse et disette sévissent, une révolte éclate dans les campagnes de Moldavie, touche les villes, et s’étend en Valachie. Des fermiers et des propriétaires sont tués, des récoltes incendiées, des boutiques pillées… Le 18 mars 1907, l’état d'urgence est décrété. Les libéraux s’allient aux conservateurs alors au pouvoir et le gouvernement fait appel à l’armée qui réprime la jacquerie dans le sang. La censure ayant été instaurée pendant cette période, on ne connaît pas avec précision le nombre de paysans tués, mais les historiens l’estiment à 11 000. L’événement marque considérablement les consciences et la question agraire s’impose désormais comme une priorité.
Une longue période de paix et de modernisation s'ensuit. En 1913, la Roumanie s'engage dans la seconde Guerre balkanique contre la Bulgarie au côté des Serbes, ce qui empêche la création d'une "grande Bulgarie" (les Serbes, en effet, s'étaient emparés de la Macédoine bulgarophone). La Roumanie obtient le troisième tiers de la Dobrogée (que les Roumains nommaient « quadrilatère »), à la population majoritairement turque et bulgare. Cet épisode dresse durablement les Bulgares contre les Roumains et a de graves conséquences lors de la Première Guerre mondiale.
En août 1914, le gouvernement roumain choisit la neutralité, mais à la mort du roi Carol, son successeur, Ferdinand Ier se joint aux Alliés de la Première Guerre mondiale, qui lui promettent la Transylvanie et la Bucovine comme prix de son ralliement.
Le 27 août 1916, les troupes roumaines pénètrent en Transylvanie et parviennent à prendre brièvement une partie du territoire austro-hongrois. Mais, dès le 15 septembre, avec l'envoi sur le front de troupes allemandes entraînées et bien armées et les erreurs commises par l'armée roumaine en Dobrogée (désastre de Turtucaïa) et la multiplication des fronts, l'armée roumaine doit reculer, évacuer même Bucarest (décembre 1916) avant de réussir à stabiliser le front en Moldavie (ligne du Siret) au début de 1917. En 1917, les tranchées roumaines résistent à Mărășești aux assauts austro-allemands. Mais l'abandon du front de l'Est par les troupes russes après la Révolution russe, oblige la Roumanie à signer le traité de Bucarest de 1918, et à accepter l'occupation d'une partie du pays par les Empires centraux. Toutefois, malgré la défaite, la Roumanie sort agrandie de cette épreuve, car la république démocratique de Moldavie, proclamée en Bessarabie en décembre 1917, décide en avril 1918 de s'unir à la Roumanie.
À la suite de la victoire des Alliés en 1918, les Quatorze points du président américain Woodrow Wilson imposent en Europe le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. La Bucovine et la Transylvanie votent alors leur rattachement à la Grande Roumanie, dont la population passe subitement de 7,77 à 14,67 millions d'habitants. L'unification du pays est reconnue (sauf par la Russie révolutionnaire) au traité de Saint-Germain-en-Laye (1919). La nouvelle frontière entre Hongrie et Roumanie est tracée par une commission de l'Entente, présidée par le géographe français Emmanuel de Martonne. Cette « question des frontières », considérée par la Hongrie comme une injustice, crée un contentieux durable avec ce pays et qui s’aggrave au printemps 1919 lorsque le gouvernement bolchévique hongrois de Béla Kun tente de reprendre la Transylvanie. Ce gouvernement est vaincu par les armées serbes, tchécoslovaques et roumaines, cette dernière encadrée par les officiers français de la mission Berthelot. Les Franco-Roumains occupent Budapest le 6 août 1919. Finalement, le Traité de Trianon attribue la Transylvanie et la moitié orientale du Banat, ainsi que divers territoires de la Hongrie orientale à la Roumanie. La frontière est tracée par une commission internationale coordonnée par le géographe français, Emmanuel de Martonne.
La démocratie parlementaire
Grâce notamment à sa production de pétrole et à un début d'industrialisation, la Roumanie connaît une croissance économique importante. En 1938, le PIB était au-dessus de celui du Portugal ou de la Grèce et à peine inférieur à celui de la France, soit 270 dollars/habitant. C'est une démocratie parlementaire dans le cadre de la monarchie constitutionnelle dominée par le parti libéral et le parti conservateur. Les libertés fondamentales y sont respectées. En 1929, les Roumaines obtiennent le droit de vote aux élections locales et en 1921, la réforme agraire permet à 1,4 million de familles paysannes de recevoir quelque 6 millions d'hectares de terres agricoles, ce qui provoque la disparition des grands propriétaires terriens. L'enseignement obligatoire dès sept ans devient gratuit en 1924.
Une reconnaissance internationale s'ensuit. Le Roumain Nicolae Titulescu devient président de la Société des Nations.
La montée de la Xénophobie
Les minorités magyare, allemande, juive, ukrainienne, russe, turque, rom ou grecque (28 % de la population totale) ont désormais les mêmes droits que la majorité roumaine, inscrits dans la Constitution de 1923 et dans la loi électorale de 1926. Cependant, des tensions se font jour et s'aggravent, car l'ascenseur social profite désormais surtout aux masses rurales et urbaines roumaines ; toutes les minorités, jadis dominantes (sauf les Roms), perdent progressivement leur situation privilégiée d'avant 1918 : leurs plaintes auprès de la Société des Nations se multiplient à la fin des années 1920.
Sous l'impulsion de Corneliu Zelea Codreanu et de son « Mouvement légionnaire » surnommé Garde de fer, un courant nationaliste et antisémite émerge sur la scène politique après les manifestations étudiantes de l'automne 1922 (les étudiants roumains pauvres, boursiers de l'état, pour la plupart venus de province, exigent alors un numerus clausus limitant le nombre d'étudiants juifs, hongrois et allemands) mais reste marginal jusque dans les années 1930. Ce sont la crise économique de 1929 et la corruption qui décrédibilisent la démocratie parlementaire (pas seulement en Roumanie) et profitent aux idées extrémistes. En décembre 1937, un gouvernement xénophobe dirigé par Octavian Goga inaugure une politique de roumanisation qui prive 120 000 Roumains magyars ou juifs de leur nationalité, révoque une partie des fonctionnaires « non-roumains-de-souche » de certaines administrations (justice, police, chemins de fer), impose des quotas dans l'encadrement industriel et l'enseignement universitaire... Le gouvernement Goga est renversé peu après, mais ses successeurs n'osent pas révoquer tous ses décrets.
En 1938, pour lutter contre ce mouvement, le roi anglophile Carol II se dote d'une constitution autoritaire, la « dictature royale » (ou « dictature carliste ») qui met fin à la démocratie parlementaire. Contrairement à ce qu'affirment maints ouvrages occidentaux de vulgarisation, il ne s'agit pas d'une dictature "fasciste", mais d'une dictature anti-fasciste : la police reçoit l'ordre de tirer à vue sur les rassemblements nationalistes, et Corneliu Zelea Codreanu est arrêté, jugé et exécuté pour sédition. Toutefois, Charles II non plus n'ose révoquer en bloc tous les décrets Goga. En politique étrangère, après avoir hésité sur la conduite à tenir face à l'Axe, il fait garantir les frontières roumaines par le Royaume-Uni et la France : Hitler considère alors que la Roumanie est pour l'Allemagne « un État hostile ».
La Seconde Guerre mondiale
En 1939, la Roumanie, encore neutre, fait transiter par son territoire les restes de l'armée polonaise, le gouvernement et le trésor de la banque de Pologne, que la flotte roumaine amène à Alexandrie, en territoire britannique, où les divisions polonaises sont reconstituées. Le roi Charles II, fermement pro-allié à ce moment, réprime violemment le fascisme à l'intérieur de ses frontières, faisant tirer à vue sur les rassemblements de la Garde de fer.
La fin de la Grande Roumanie
La Grande Roumanie (România Mare) désigne le territoire du Royaume de Roumanie dans les années séparant la Première Guerre mondiale et la Seconde Guerre mondiale. Au lendemain de l'effondrement de la France en juin 1940, le Royaume-Uni reste le seul pays encore en lutte contre les pays de l'Axe Rome-Berlin. Ainsi isolé, Charles II change de politique, offre des privilèges économiques à l'« Axe », fait des concessions à l'extrême-droite, et laisse Hitler trancher le conflit territorial entre la Roumanie et la Hongrie au sujet de la Transylvanie à son détriment. La "Grande Roumanie" a vécu : les forces de l'« Axe » et du Pacte Hitler-Staline procèdent alors au démembrement du pays qui doit céder la Bessarabie à l'URSS le 28 juin 1940, le nord de la Transylvanie à la Hongrie le 30 août 1940 (« Diktat de Vienne ») et la Dobroudja du Sud à la Bulgarie le 7 septembre 1940 (Traité de Craiova). Dans les deux premiers de ces territoires, les roumanophones étaient largement majoritaires, et l'opinion tient le roi pour responsable de ce démembrement par lequel 1/3 du territoire passe sous domination étrangère. Pour complaire à l'« Axe », le gouvernement Gigurtu donne, le 8 août 1940, une dimension raciste aux discriminations contre les Juifs, car les chrétiens d'origine juive sont considérés comme Juifs au même titre que les personnes de religion juive.
Le régime du général Ion Antonescu
Le général Ion Antonescu était un militaire conservateur, héros de la Première Guerre mondiale contre l'Allemagne, au parcours et à l'aura assez semblables à celles de Philippe Pétain, auquel il s'identifiait (dans ses interviews aux journaux, il se qualifie de "Pétain roumain"). Le 5 septembre 1940 Ion Antonescu devient premier ministre, nommé par un Décret Royal du roi Charles II (il sera arrêté et destitué par un autre Décret Royal, par le roi Michel Ier, le 23 août 1944). Devenu un homme politique d'extrême droite, Ion Antonescu, par un coup d'État mené avec Horia Sima et sa « Garde de Fer », met en place le lendemain 6 septembre 1940, un régime ultra-nationaliste et xénophobe : l'« État national légionnaire ». Antonescu en devient le « Conducător » ("guide", titre qui sera aussi utilisé par le dictateur communiste Nicolae Ceaușescu), est auto-promu maréchal, chef d'état-major des forces armées et « Chef de l'État national-légionnaire », avec Horia Sima et Mihai Antonescu comme vice-présidents du Conseil. Le roi Charles II est détrôné et chassé du pays : le trône revient au fils de Charles II, Michel Ier, encore mineur et qui ne conserve qu'un rôle purement honorifique. En novembre 1940, le « Conducător » fait adhérer la Roumanie aux pactes l'tripartite et antikomintern et l'engage aux côtés de l'Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale.
Antonescu chasse la Garde de fer et affermi sa dictature
Dans la nuit de 26 novembre 1941 les « Légionnaires » de la Garde de fer perpètrent un massacre dans la prison de Jilava (ro), où le régime détenait des intellectuels et des leaders politiques démocrates. En 1941, la Garde de fer qui trouve Antonescu trop « modéré » tente de le renverser, mais le putsch échoue et les « Légionnaires » sont internés. Le régime avait pourtant institué une politique de pogroms contre les Juifs et les Roms : par exemple en février 1941, il avait laissé impunis les « Légionnaires » de la Garde de fer auteurs d'un pogrom sanglant à Bucarest même : 118 des Juifs assassinés ont été identifiés, tous atrocement mutilés. Mais Antonescu sait que l'opinion est révulsée par ces crimes (l'idée la plus répandue à cette époque est qu'il faut emmener les Juifs en Palestine, comme on a emmené les Polonais à Alexandrie), il doute à juste titre de la fidélité des « Légionnaires », et préfère se débarrasser d'eux. Contrairement à Miklós Horthy en Hongrie, et peut-être sur les instances de son ami de jeunesse Wilhelm Filderman (président des communautés juives de Roumanie), Antonescu refuse de livrer les juifs roumains aux nazis, mais en revanche, il met en place sa propre politique de déportation et d'extermination, notamment en Transnistrie (Filderman lui-même y sera déporté et n'en réchappera que de justesse).
Quoi qu'il en soit, à l'encontre de la politique d'Ion Antonescu, des citoyens roumains, avec humanité et courage, en exposant leurs vies, ont résisté. Dans l’armée roumaine, la guerre était loin de faire l’unanimité : de juin 1941 à août 1944, 86 000 condamnations en cour martiale sont prononcées pour refus d’obéissance et/ou tentative de passage aux Alliés. Comme en France, l'attaque contre l'URSS a fait sortir le P.C. de l’expectative et lui fait rejoindre l’opposition au fascisme. Deux divisions roumaines, nommées « Tudor Vladimirescu » et « Horia-Closca-Crisan », se sont constituées du côté Allié : elles sont l’équivalent roumain des forces françaises libres et combattirent en URSS contre les nazis. « Yad Vashem » étant inconnu dans les pays de l'est pendant la période communiste (1946-1990), la plupart des « justes » moururent sans apprendre son existence et seuls 139 Roumains ont été comptés par Israël comme « Justes » (dont 79 en Moldavie moderne et 60 en Roumanie moderne). Enfin Joseph Goebbels rapporte dans son journal personnel : « Antonescu est au gouvernement avec l'aide des francs-maçons et des ennemis de l'Allemagne. Nos minorités [allemandes en Transylvanie] ont la vie dure. Le Reich a fait un tel effort pour rien. » (19 février 1941).
La guerre au coté des Alliés
Nommé par Décret Royal du roi Charles II, le 23 août 1944 Ion Antonescu fut arrêté et destitué par un autre Décret Royal, celui du roi Michel Ier, qui nomme le général Constantin Sănătescu Premier ministre. Pour ses crimes de guerre, comme son modèle Pétain, Antonescu fut jugé et condamné à mort en 1945. Il fut exécuté en 1946.
Le 24 août, le gouvernement déclare la guerre à l'Axe et dirige ses 550 000 soldats contre l'Allemagne. Le front se déplace de 700 km vers l'ouest et le sud en moins d'une semaine. Selon des estimations d'historiens occidentaux, l'entrée en guerre de la Roumanie aux côtés des Alliés a permis d'éviter la mort de centaines de milliers de soldats russes et a accéléré la fin de la Seconde Guerre mondiale de six mois. Toutefois, l'URSS attendra jusqu'au 12 septembre 1944 pour signer l'armistice demandé par la Roumanie. Durant ces trois semaines, l'armée roumaine, qui subit la contre-attaque allemande, continue à être attaquée par l'Armée rouge, bien qu'elle ait reçu l'ordre de ne pas se défendre. Les Soviétiques s'emparent de nombreux armements et continuent à faire des prisonniers, tout comme les Allemands. Les raffineries et Bucarest sont bombardés, selon les jours, aussi bien par les bombardiers lourds américains venus de Foggia, que par les Stukas allemands basés à Băneasa, au nord de Bucarest et par les Antonov soviétiques venus de Moldavie.
Une fois l'armistice signé, l'armée roumaine est mise sous commandement soviétique, lance ses offensives contre la Hongrie et progresse jusqu'en Slovaquie. Du 24 août 1944 au 6 mars 1945, les institutions démocratiques tentent de se remettre en place sous le gouvernement Rădescu, alors que l'Armée rouge laisse deux divisions en Roumanie et s'y comporte comme en pays ennemi, vivant de réquisitions, occupant tous les services publics, les centres de production industriels et les sites militaires, et contrôlant tous les déplacements.
L'Union Soviétique n'a nulle raison de ménager la Roumanie : des « zones d'influence » ont été discutées le 9 octobre 1944 à Moscou entre Churchill et Staline, prévoyant les « taux d'influence » suivants, respectivement pour les Alliés occidentaux et pour l'URSS : Hongrie et Yougoslavie : 50 - 50 %, Roumanie : 10 % - 90 %, Bulgarie: 25 % - 75 % et Grèce : 90 % - 10 %, nonobstant le poids respectif des non-communistes et des communistes dans les mouvements de résistance et les opinions (par exemple, les communistes étaient très minoritaires en Hongrie, Roumanie et Bulgarie, mais majoritaires en Grèce à la tête de l'ELAS). La contribution de la Roumanie aux côtés des Alliés est généralement inconnue. En effet, le grand public occidental pense l'entrée des Soviétiques dans les Balkans en août 1944 comme la conséquence d'une offensive de l'armée rouge contre les Roumains et les Allemands, sans connaître le changement préalable d'alliance à Bucarest.
Le régime communiste
Le régime communiste débute par le coup d'État organisé le 6 mars 1945 par le ministre soviétique des affaires étrangères Vychinski en visite à Bucarest, avec la logistique de l'Armée rouge et du NKVD. La Roumanie reste une monarchie, mais le coup d'État place les communistes à l'Intérieur, aux Finances et à la Justice. Ce coup d'État renverse Rădescu et met les communistes (ultra-minoritaires) au pouvoir ; c'est alors seulement que l'URSS commence à considérer la Roumanie comme un allié. Le roi Michel reçoit même de Staline l'Ordre soviétique de la Victoire. Toutefois, le Royaume-Uni et les États-Unis protestent et exigent la tenue d'élections libres. Les élections ont lieu le 19 novembre 1946 et donnent 71 % des voix aux communistes, dans un contexte de terreur où les candidats des autres partis qui ont osé se maintenir, sont au mieux rossés et pillés, parfois assassinés, tandis qu'en milieu rural ou dans les banlieues, les électeurs sont menés aux urnes sous la menace des armes. Ainsi les communistes s'emparent du Parlement, de la plupart des préfectures et des mairies, tandis que l'Armée rouge se charge de réprimer toute forme de protestation. Bien que la Roumanie fût encore une monarchie officiellement pluraliste, le régime est déjà en voie de devenir totalitaire : les membres des autres partis politiques, ainsi que ceux des syndicats indépendants et du monde associatif, sont arrêtés et emprisonnés en masse, sauf l'aile gauche des socialistes qui se rallient au P.C. pour former le « Parti ouvrier roumain ». Devenue une monarchie communiste, la Roumanie est dans une situation instable qui prend fin le 30 décembre 1947, lorsque le roi Michel Ier, menacé dans son bureau de représailles contre ses partisans par le ministre soviétique Andreï Vychinski en personne, abdique et quitte le pays.
La République populaire
Le jour même du départ du roi, le 30 décembre 1947, les communistes staliniens proclament une République, qui, malgré ses adjectifs successifs de « populaire », puis « socialiste », est en fait synonyme de terreur, de répression et de dictature : les maquis qui avaient lutté contre le fascisme reprennent le combat contre le communisme dans les montagnes et le Delta du Danube jusqu'à la mort ou la capture de tous leurs membres, au milieu des années 1950.
En 1947, le traité de Paris ne reconnaît pas à la Roumanie le statut de co-belligérant : elle y est traitée en ennemie vaincue, car seul le régime Antonescu est pris en compte, bien qu'il ait pris le pouvoir par un coup d'État et non investi par l'Assemblée nationale comme son homologue français. La Bessarabie et la Bucovine du nord sont définitivement cédées à l'URSS et sont partagées entre la République socialiste soviétique moldave et celle d'Ukraine. De plus, la Roumanie doit d'immenses dommages de guerre à l'URSS qui déménage par trains entiers usines, machines, biens publics et particuliers, confisque les automobiles, les camions, les avions et la quasi-totalité de la flotte, exploite les mines, les forêts et les ressources agricoles par le biais des Sovrom (entreprises mixtes à capital roumain et à bénéfices soviétiques).
La famine de 1946-1947 tue plusieurs milliers de personnes (elle sera ultérieurement mise sur le compte de la seule sécheresse, alors que les réquisitions visant aussi à briser la résistance de la paysannerie en sont la principale cause). La Roumanie sort de la guerre diminuée de près de 60 000 km2, de 3 millions d'habitants et de nombreux biens, équipements et ressources. Toutefois, l'engagement militaire des divisions „Vladimirescu” et „Horia-Cloșca-Crișan” et du gouvernement Sănătescu contre l'Axe, permet que la Transylvanie du nord (cédée le 30 août 1940 à la Hongrie) soit rendue à la Roumanie, sous réserve d'y créer une Région autonome magyare dans les deux départements (Județ) où les Hongrois sont majoritaires.
En 1948, bien que la Roumanie et l'URSS soient désormais des pays frères et alliés et que leur frontière ait été fixée et ratifiée au Traité de paix de Paris de 1947, les Soviétiques annexent encore six îles au détriment de la Roumanie, le long du bras de Chilia dans le delta du Danube et en Mer Noire (île des Serpents).
Le communisme d'épuration
Sous l'égide du « Parti ouvrier roumain », c'est d'abord un « communisme d'épuration » qui, de 1945 à 1953, persécute des centaines de milliers de paysans rétifs à la collectivisation des terres et aux réquisitions, mais aussi les intellectuels et même des « communistes idéalistes » (c'est-à-dire partisans d'un socialisme à visage humain) tels Lucrețiu Pătrășcanu, et emprisonne la totalité de la classe dirigeante du régime pluraliste d'avant-guerre et du régime fasciste d'Ion Antonescu, ainsi que de nombreux membres du clergé. Pendant cette période très stalinienne, le Parti communiste recrute à tour de bras quiconque veut le rejoindre (du moment que le candidat n'avait pas exercé de responsabilités auparavant) et passe de 1 200 à 90 000 membres, tandis que la nouvelle Securitate remplace la Sûreté royale en « nationalisant la pègre » selon l'expression de Gheorghe Gheorghiu-Dej, le Secrétaire général du Parti. L'Académie Stefan Gheorghiu, un ensemble de centres de formation du Parti, applique les principes de « réhabilitation de la pègre » de Friedrich Engels et forme en un an des juges, des policiers et des préfets. Bientôt, le régime ne rencontre plus aucune opposition. Ayant nationalisé la pègre, il a réduit ainsi à zéro la délinquance privée et individuelle : la violence est désormais monopole de l'état. En 1949, la République populaire de Roumanie adhère au Comecon. Pendant cette période, les Présidents de la Roumanie sont successivement Mihail Sadoveanu, Constantin Parhon et Petru Groza, mais le pouvoir réel appartient d'abord à Ana Pauker, puis à Gheorghe Gheorghiu-Dej.
Le communisme de consolidation
Après la mort de Joseph Staline, le 5 mars 1953, c'est un « communisme de consolidation » qui s'instaure de 1953 à 1965 sous l’égide de Gheorghe Gheorghiu-Dej, ami de Nikita Khrouchtchev. De 1954 à 1955 Gheorghe Gheorghiu-Dej est remplacé à la tête du Parti communiste roumain par Gheorghe Apostol avant de reprendre la tête du Parti communiste en 1955. Cette même année, la Roumanie adhère au pacte de Varsovie. Un an plus tard, en 1956, Khrouchtchev lance la déstalinisation lors du XXe congrès du Parti communiste de l'Union soviétique. Gheorghiu Dej suit la nouvelle ligne. À partir de 1963, la République populaire de Roumanie établit des relations diplomatiques et économiques avec les États-Unis et Israël, qui font de la Roumanie un « pays communiste privilégié ». Le Parti passe de 100 000 à plus de 300 000 membres et devient majoritairement un parti de roumains d'origine rurale, alors qu'auparavant, la majorité des communistes étaient des citadins, souvent issus des minorités nationales.3
Le régime sous la direction de Nicolae Ceaucescu
Période de détente
Gheorghe Gheorghiu-Dej meurt d'un cancer du poumon le 19 mars 1965. Une lutte de pouvoir a alors lieu au sein du parti pour sa succession : Gheorghe Apostol, proche collaborateur de Gheorghiu-Dej, apparaît comme l'un des candidats les plus crédibles, mais le premier ministre Ion Gheorghe Maurer contribue à favoriser l'élection comme premier secrétaire du parti de Nicolae Ceaușescu. Ce dernier poursuit dans un premier temps la politique de détente menée par Gheorghiu-Dej, maintenant des relations diplomatiques cordiales avec l'Est comme avec l'Ouest. Le 28 juin 1965, la Grande assemblée nationale adopte une nouvelle constitution : le pays prend comme nom officiel celui de République socialiste de Roumanie, les rapports avec l'URSS étant redéfinis sur la base d'une alliance basée sur l'égalité et la non-interférence réciproque dans les affaires intérieures. L'État accroît son influence sur le domaine économique, ayant notamment le monopole du commerce extérieur. La nouvelle constitution stipule une série de libertés (liberté d'expression, liberté de la presse, liberté de manifestation) qui, dans les faits, demeureront largement théoriques. Le 9 décembre 1967, Nicolae Ceaușescu devient également président du Conseil d'État, soit chef de l'État (le 28 mars 1974, un amendement changera le titre de chef de l'État en président de la République).
Jusqu'en 1971, Ceaușescu alterne les mesures répressives et les gestes de libéralisation, entretenant les espoirs de changement tout en consolidant son pouvoir. La Securitate poursuit une politique très active de surveillance de la population, la politique de relégation intérieure étant maintenue. En 1966, l'avortement est interdit sous peine de prison aux femmes de moins de quarante-cinq ans ayant moins de quatre enfants, entraînant une vague d'interruptions clandestines de grossesse et causant indirectement la mort de milliers de femmes du fait de conditions sanitaires déplorables. En 1968, bien que membre du pacte de Varsovie, la Roumanie refuse que ses troupes participent à l'écrasement du printemps de Prague, cet acte spectaculaire d'indépendance garantissant à Ceaușescu, durant un temps, une certaine popularité auprès de la population roumaine et renforçant à l'étranger son image de dirigeant réformateur. La politique d'industrialisation de la Roumanie entamée sous Gheorghiu-Dej est poursuivie, bien que le pays ne parvienne ni à produire des biens de consommation exportables, ni même à satisfaire la demande intérieure.
Période de resserrement
À partir de juillet 1971, Ceaușescu infléchit sa politique et met fin à la détente intérieure. Les origines de ce changement sont discutées. La version la plus courante en Roumanie est que Ceaușescu aurait été impressionné, durant un voyage en République populaire de Chine et en Corée du Nord, par la révolution culturelle et l'adulation de la doctrine du Juche, et qu'il aurait voulu mettre en place une « révolution culturelle » roumaine, dans le but affiché de créer l'« homme nouveau ». Mais ce but n'avait rien de nouveau, il est l'un des axes de la « construction du socialisme ». L'autre hypothèse est qu'il aurait été inquiet d'une part des réactions de Moscou à ses initiatives internationales, et d'autre part des libertés d'expression gagnées au fil des années par les intellectuels, dont pouvaient aussi profiter ses camarades du Parti, pour contester ses choix. Toujours est-il que progressivement, le parti communiste roumain restreint à nouveau les libertés économiques (autonomie partielle de gestion), intellectuelles et culturelles (création, expression, recherche) pour imposer un strict contrôle de l'économie et un culte de la personnalité de plus en plus prononcé autour de Nicolae Ceaușescu. Les pénuries s'accentuent, tandis que Ceaușescu se voit désigné par la propagande sous le titre de Conducător (guide), de Danube de la pensée ou de Génie des Carpates. Cela n'empêche pas le régime de soigner son image internationale de "régime de l'est dissident et libéral", renforcée par les visites d'état à Bucarest de Charles de Gaulle (1968) ou de Richard Nixon (1969), et par les offres, pour les touristes occidentaux communistes ou non, de vacances joyeuses et bon marché à Mamaia ou Costinești avec cures de jouvence comprises.
En 1972, sous couvert sa politique d'apparente indépendance diplomatique vis-à-vis de l'URSS, la Roumanie adhère au Fonds monétaire international et obtient des crédits importants. Mais, face au remboursement de la dette, Ceaușescu donne la priorité aux exportations, restreignant la demande intérieure bien au-delà des exigences du FMI, au point que même le chauffage et l'éclairage urbain sont arrêtés ; la faim fait son apparition, et les hôpitaux deviennent des mouroirs ; de nombreuses familles abandonnent leurs enfants. Entre 1977 et 1983, l'aggravation désastreuse des conditions de vie cause d'importantes grèves de mineurs et d'ouvriers des combinats. En 1977, Ceaușescu, en visites aux mines du Jiu, est personnellement hué par les ouvriers ; des centaines d'arrestations ont ensuite lieu contre les membres du mouvement. Les intellectuels s'organisent régulièrement en groupes de protestation, plusieurs lettres ouvertes étant adressées au chef de l'État : les dissidents sont réprimés et surveillées, contraints à l'exil ou, pour les personnalités les moins connues, emprisonnés.
Le pays perd progressivement sa capacité d'autosuffisance alimentaire. À partir de 1981, le remboursement de la dette extérieure sert de prétexte pour refuser toute réforme. Le niveau de vie baisse de 15 à 20 % entre 1980 et 1987. La politique sanitaire est notoirement défaillante ; la fin du contrôle des naissances entraîne notamment un grand nombre d'abandons d'enfants, lesquels croupissent dans des orphelinats gérés comme des fermes d'élevage industriel, mais avec pénurie alimentaire et carences hygiéniques et, bien sûr, relationnelles et affectives.
Par une application aveugle du principe d’égalité entre villes et campagnes de Friedrich Engels, une politique dite de « systématisation du territoire » se traduit par la démolition de quartiers historiques en ville, et de villages en milieu rural, avec relogement forcé des habitants en barres et tours d'appartements collectifs, souvent inachevées et où eau courante et gaz de ville ne sont présents qu'au rez-de-chaussée ; l'électricité, quand elle est présente, est contingentée (6h-8h et 18h-20h). Le séisme de 1977, qui cause des dégâts considérables à Bucarest, offre à Ceaușescu l'occasion de « systématiser » le centre de la capitale, détruisant des milliers d'immeubles et des centaines de monuments historiques, et rasant le centre historique de la ville, au profit d'un immense bâtiment, dit Maison du peuple, destiné à abriter les institutions de l'État. La systématisation, conduite au mépris des règles d'urbanisme, aboutit à la destruction d'une partie du patrimoine architectural de la Roumanie, et à la construction de banlieues à la campagne qui, dans les années 1980, bouleversent la vie des campagnes et compromettent ainsi encore plus la survie alimentaire des populations. Des centaines de villages sont détruits et la population est relogée dans des immeubles collectifs à la campagne, avec sanitaires, cuisines et points d'eau collectifs. Les Roms sont sédentarisés de force, tandis que Juifs, Allemands et Grecs de Roumanie quittent le pays en masse, Israël, l'Allemagne et la Grèce acceptant de payer le droit d'émigration au prorata des études effectuées par les partants.
Sous la présidence de Nicolae Ceaușescu, l'omniprésence de la Securitate et le népotisme du régime s'accentuent : une vingtaine de membres de la famille Ceaușescu détient des postes clés dans l'appareil étatique. L'épouse du président, Elena Ceaușescu, se voit attribuer une place prépondérante dans le domaine de la recherche scientifique, au mépris de ses compétences réelles, illustrant, au sommet de l'État, une situation chronique à tous les échelons de la société. Un dicton populaire dit alors que PCR ne signifie plus Parti communiste roumain mais Pistons, combines, relations. La défection d'Ion Mihai Pacepa, un général de la Securitate, achève de discréditer le régime à l'Ouest et montre que même ses principaux soutiens commencent à perdre confiance.
Période de délitement
Du fait des conditions de vie, l'impopularité du régime est telle que, malgré la peur omniprésente, le 15 novembre 1987, 15 000 ouvriers et habitants se révoltent à Brașov. En 1987, à la faveur d'une visite de Mikhaïl Gorbatchev, la Roumanie resserre ses liens commerciaux avec l'URSS, mais Nicolae Ceaușescu demeure insensible à toute idée de perestroïka. À partir de 1987, le mécontentement se fait jour même dans les rangs du Parti communiste roumain et de la Securitate, et au printemps 1989, six anciens membres du bureau politique du parti rendent publiques leurs critiques dans une lettre ouverte à Nicolae Ceaușescu.
Chute du régime
À la fin de l'année 1989 a lieu la chute du bloc de l'Est. Alors que les régimes les plus proches de l'Union soviétique tombent tous les uns après les autres, la relative indépendance, mais réel isolement de la Roumanie, rend sa situation différente. Le ressentiment envers le couple Ceaușescu et le désir de changement face à la situation désastreuse du pays amène même une partie des cadres du Parti à souhaiter la chute du dictateur.4
Début de la révolution à Timisoara
Le 16 décembre 1989, une insurrection populaire débute à Timișoara contre le régime communiste de Nicolae Ceaușescu. La ville est ainsi la première à se rebeller contre le pouvoir. Un ordre d'évacuation administrative du pasteur calviniste László Tökés est donné à la police, surveillé par la police secrète, la Securitate, en réaction duquel sa maison est entourée par des membres de son Église, le 15 décembre. Le 16 décembre, des centaines de citoyens de toutes les religions et croyances, majoritairement roumaines orthodoxes, décident d'exprimer leur désaccord avec les méthodes du régime communiste. Vers 17 heures, les premiers slogans anticommunistes sont lancés : Jos guvernul! Jos Securitatea! (À bas le gouvernement! À bas la Securitate!), et le premier tram est bloqué par les manifestants.5
Pendant la manifestation, la foule entame des chants libertaires et religieux, jugés anti-communistes par le régime. Les troupes spéciales de la Securitate (USLA) réagissent par des tirs de gaz lacrymogènes et par l'usage de canons à eau, mais la manifestation reprend de plus belle le lendemain. L'armée intervient alors : des combats de rue ont lieu, des voitures sont incendiées, des coups de feu retentissent. La manifestation prend fin après l'envoi des blindés. Le 18 décembre, un groupe de 30 jeunes gens arbore des drapeaux tricolores sans l'insigne communiste et chantent l'ancien hymne national "Réveille-toi, roumain !", interdit sous le régime communiste.
Le 21 décembre, 100 000 ouvriers entrent dans la ville de Timișoara et commencent à manifester contre le gouvernement aux cris de : « Nous sommes le peuple », « L'armée est avec nous ».
La capitale Bucarest
Ceaușescu, revenant d'un voyage en Iran, trouve en Roumanie une situation où le pouvoir commence à échapper au régime. Les événements de Timișoara ont été relatés par les radios étrangères (écoutées clandestinement par les Roumains) comme un massacre de masse et des charniers sont décrits (il s'agit en fait de celui de l'Institut médico-légal de la ville). Le 21 décembre 1989 à Bucarest, un rassemblement de masse organisé par la Securitate à la demande de Ceaușescu pour montrer la popularité du régime, est diffusé en direct à la télévision. Or, après huit minutes où tout se déroule selon les ordres, les hauts-parleurs cessent de répéter les slogans habituels (« vive le Parti communiste », « vive le camarade Ceaușescu », « à bas l'ingérence impérialiste »...) et diffusent un enregistrement des manifestations de Timișoara, où l'on entend des coups de feu et des cris. Le rassemblement se transforme alors en manifestation de protestation contre le régime : la foule laisse tomber et piétine calicots, portraits officiels et drapeaux rouges du Parti et crie « Timișoara ! ». Les tentatives de Ceaușescu de calmer son auditoire restent célèbres : « a-lo ! a-llo ! a-llo ! allo, attendez tranquillement, chacun à sa place ! a-llo ! a-llo ! ». Les gens répliquent « changez le dictateur ! ». Ceaușescu se retire, la transmission télévisée est interrompue. Dans le même temps, de plus en plus de gens qui avaient vu cela à la télévision sortent dans la rue. Au soir, une bonne partie des Bucarestois est dans la rue et vers 2 heures du matin l'armée reçoit l'ordre de réprimer le mouvement et prend position aux carrefours, mais sans agir.6
Le 22 décembre, Ion Iliescu, ancien dirigeant communiste marginalisé au sein du parti, décrète la formation d'un gouvernement provisoire au nom du Front de salut national. Iliescu est proclamé chef de l'État par intérim, tandis que Petre Roman prend la tête du gouvernement. Nicolae et Elena Ceaușescu prennent la fuite en hélicoptère et sont capturés quelques heures plus tard. Le bâtiment du comité central est pris d'assaut par la foule. Le Parti communiste roumain est dissout et la fin du système de parti unique est décrétée. Le 25 décembre, les époux Ceaușescu sont fusillés dans une caserne proche de Bucarest après un simili-procès aussi expéditif que les procédures habituellement utilisées contre les victimes du régime (plus de deux millions officiellement reconnues).7
Répression ou manipulation ?
Les manifestations ont eu un caractère d'opposition au régime mais pas nécessairement anti-communiste : on a beaucoup crié « à bas Ceaușescu et sa clique », mais ce n'est qu'à partir du 24 décembre 1989 que sont apparus les slogans « à bas le communisme » et « à bas le Parti », après que dans le centre et autour de la télévision, soient apparus de mystérieux snipers embusqués qui tirèrent sur la population. Il y eut des morts et des dégâts matériels. Dans l'après-midi du 23 décembre 1989, Ion Iliescu, Petre Roman et Gelu Voican-Voiculescu parlent à la télévision de « terroristes à la solde de Ceaușescu » et demandent à l’armée et à la population de « défendre la révolution » ; ils annoncent la création d'un « Front du Salut national ».
Les journalistes agitent les rumeurs les plus folles : Ceaușescu serait en train de rassembler une armée pour noyer la révolte dans le sang ; la toute-puissante Securitate aurait construit un gigantesque labyrinthe sous la ville de Bucarest, ce qui lui permettrait de se déplacer secrètement et d'intervenir par surprise n'importe où. La presse internationale relaie ces rumeurs avec complaisance : le téléspectateur occidental assiste alors à des progressions en caméra subjective dans des couloirs souterrains toujours déserts, mais susceptibles de receler des compagnies entières de jusqu'au-boutistes du régime.
En réalité, de nombreux coups de feu ont été tirés durant ces « journées sanglantes » notamment à Bucarest devant le siège du Comité Central du Parti, autour des aéroports et de la télévision. À l’aéroport Henri Coandă d'Otopeni, deux compagnies de l’armée tirent l’une contre l’autre, chacune persuadée de lutter contre les « terroristes ». Les témoignages recueillis par la suite sont unanimes : les soldats et les civils ayant mis la main sur des armes et qui ont tiré, étaient persuadés de « défendre la liberté contre les sbires du dictateur », et se sont entre-tués « de bonne foi » pour avoir cru aux déclarations télévisées d'Ion Iliescu. Il n'existe aucun témoignage de sniper ou de partisan de Ceaușescu. Ultérieurement (juin 2009) Iliescu a été traduit en justice sous l'accusation d'avoir ordonné à des snipers (restés anonymes) de l'USLA (troupes de la Securitate) d'accréditer le mythe des « terroristes » en tirant sur la foule, mais il a bénéficié de non-lieu soit pour prescription, soit pour absence de preuves selon les faits.
À partir du 24 décembre 1989, le « Front du Salut national » renonce au « socialisme scientifique à visage humain » et se convertit à la démocratie à l'occidentale, tandis que Dumitru Mazilu lance aux manifestants le slogan : « A bas le communisme, mort aux terroristes ». La capture des Ceaușescu (et, le lendemain, leur exécution) est annoncée. Le slogan « aujourd'hui nous avons reçu notre portion de liberté » tracé en grandes lettres blanches apparaît un peu partout dans le centre de Bucarest. Comme personne ne parvient à identifier les fameux « terroristes » (quelques policiers, membres présumés de la Securitate et passants sont pris à partie, tabassés et arrêtés), des journalistes répandent la rumeur qu'il s'agirait de « moudjahiddin » prêtés à Ceaușescu par Mouammar Khadafi. On ne trouve pas plus de « moudjahiddin » libyens que de « terroristes » roumains, et la question « Qui nous a tiré dessus ? » tracée en grandes lettres rouges par les étudiants sur un mur au carrefour de l'Université, restera sans réponse.
Analyse
En 2010, on ne connaît toujours pas toute la vérité. Il y a plusieurs hypothèses, pas forcément contradictoires :
- une révolution spontanée,
- un coup d’État interne,
- un coup d’État avec l'aide de services secrets étrangers.
L’identité des « terroristes » est restée un mystère jusqu'à présent, ainsi que leur relation avec le régime du Front du Salut national. Aucun « terroriste » n’a jamais été retrouvé ou condamné. D’après certaines recherches, il s'agissait principalement d'un coup d’État interne (mais en accord avec Moscou et l'Occident) durant lequel le général Stănculescu aurait créé des scénarios avec des tireurs d'élite, pour maintenir la peur et faire passer les ex-communistes pour des « défenseurs de la Révolution », afin d'empêcher l'émergence d'un « pouvoir des dissidents ». C'est aussi pour éviter pareille évolution que les ex-communistes passèrent d'eux-mêmes du marxisme à la démocratie, au libéralisme, au nationalisme et au christianisme. Quant au slogan : « Aujourd'hui nous avons reçu notre portion de liberté » tracé le 25 décembre 1989 dans Bucarest, à la peinture routière au latex, il serait l'œuvre et exprimerait l'état d'esprit de la branche "réformiste" de la nomenklatura, pour qui la liberté s'octroie par portions, comme du fromage.
Les monographies, les manuels scolaires d'histoire et les émissions télévisées présentent des opinions divergentes sur la révolution de 1989. Avec le temps qui passe, les choses deviennent de plus en plus floues pour les nouvelles générations, bien que les recherches historiques apportent aux spécialistes de plus en plus de détails. Le seul point d'accord est le culte des « victimes de la Révolution », dont la mémoire est unanimement honorée, sans que nul ne doute que toutes soient mortes au nom du désir de liberté et de justice du peuple, et du fait des agissements du pouvoir... quel qu'il soit.8
László Tőkés est à l'origine de la Révolution roumaine. En effet, la tentative de la part du pouvoir communiste de le muter de son poste d'assistant pasteur à Timișoara et de l'expulser de force de son église fut l'élément déclencheur de la Révolution roumaine de 1989, laquelle aboutit à la chute de Nicolae Ceaușescu et à la fin de l'ère communiste en Roumanie.9
Laszlo Tokés est né le 1er avril 1952.
Emmanuel de Martonne est né le 1er avril 1873. Il est connu notamment pour avoir tracé la frontière entre la Roumanie et la Hongrie lorsqu'il était Secrétaire du Comité d'études en 1917.
Laslo Tokés était un hongrois vivant en Roumanie et de Martonne a tracé les frontières entre la Hongrie et la Roumanie.
Dieu nous fait comprendre qu'il TRACE les lignes de l'Histoire en écrivant chaque ligne de l'histoire de l'humanité.
ROUMANIE = ROMAN
Laslo Tokés est né 79 ans - jour pour jour - après Emmanuel de Martonne.
Le chef-lieu du département 79 est la ville de NIORT.
NIORT = N'IGNORE pas les signes que Dieu nous envoie.
Le maire de NIORT s'appelle Jérôme BALOGE.
BAL = 21 12
21 12 = 21 décembre
Le lendemain des protestations du 21 décembre 1989, le peuple roumain a DELOGÉ Ceaușescu du pouvoir.
En effet, la Révolution roumaine a débuté à Timisoara, lorsque plusieurs dizaines de milliers de personnes descendirent dans la rue pour empêcher la mutation forcée de Laslo Tokés de son poste et la rébellion se propagea ensuite à Bucarest notamment quand Ceaușescu pris la décision peu opportune d'y organiser le 21 décembre 1989 un rassemblement de masse, censé confirmer le soutien populaire au régime. La manifestation, diffusée en direct à la télévision, se transforma en une démonstration massive de protestation contre le régime. Huit minutes après le début du discours de Ceaușescu la foule cria « Timișoara » et Ceaușescu, installé sur le balcon du Comité central (Calea Victoriei) interrompit son discours avec inquiétude alors que la transmission télévisée était coupée. Le lendemain les manifestants envahirent le bâtiment du Comité central où le dictateur présidait une réunion. Les époux Ceaușescu rejoignirent un hélicoptère sur le toit du bâtiment pour s'enfuir avec deux conseillers et trois hommes d'équipage dans le but de rejoindre un palais de province et de reconstituer les forces encore fidèles au régime.10
Ainsi, le lendemain des protestations du 21 décembre, le peuple roumain a DELOGÉ Ceaușescu du pouvoir.
Le maire de Niort s'appelle Jérôme BALOGE.
BAL = 21 12
Le 21 décembre, la foule exprima sa colère alors que le dictateur était installé sur un BALCON.
BAL = 21 12
N'IGNORE pas les signes que Dieu nous envoie. Il écrit chaque ligne de l'histoire de l'humanité.
À travers la Révolution roumaine, il nous demande de DÉLOGER nos dirigeants le jour de l'élection présidentielle afin de renverser la dictature capitaliste.
La transition démocratique
La réapparition des anciens partis démocratiques (PNL libéral, PNTCD démocrate-chrétien), interdits par les communistes, et qui exigent une « lustration » (écarter des responsabilités quiconque s’est compromis avec la dictature) ne menace pas le pouvoir du Front de salut national fondé par l’ex-communiste Ion Iliescu, qui est élu président en mai 1990 avec 85 % des voix, après avoir promis que nul ne serait inquiété (Unul dintre noi, pentru linistea noastră - « l'un des nôtres, pour notre tranquillité » fut le slogan officiel de sa campagne). Son régime fut qualifié par ses adversaires politiques de « néo-communiste ». À la fin de l’époque de Ceaușescu, le PC roumain comptait près de 4 millions de membres et, après la chute du régime, l’essentiel de la classe politique sortit de ses rangs et de l’ancienne haute administration, dont les dirigeants bénéficiaient des faveurs du régime. Même les dirigeants du parti libéral étaient d’anciens membres de la « nomenklatura ». Quant à la population, elle était privée depuis 1938 de toute vie démocratique et très mal informée, tandis que les personnes les plus instruites, comme les enseignants, étaient non seulement étroitement surveillées, mais aussi dénigrées en tant que « sympathisants de l’étranger » et même persécutées (mutations abusives, salaires inférieurs à la moyenne...), ce qui avait provoqué, depuis un demi-siècle, une importante « fuite des cerveaux ». Dans ce contexte, une manifestation étudiante pour la démocratie est réprimée brutalement par des milliers de mineurs venus à Bucarest à l’appel d'Iliescu (dans des cars et des trains affrétés par le gouvernement) pour soutenir le pouvoir. Iliescu traite les manifestants de « voyous » et les accuse de vouloir « brader le pays » et « céder aux injonctions du FMI ». Les images de cette « minériade », les affrontements inter-ethniques provoqués en Transylvanie par les gros-bras du régime s’opposant au bilinguisme magyar/roumain revendiqué par les Hongrois (revendication présentée par le pouvoir comme une tentative de sécession), la guerre menée en République de Moldavie voisine par la 14e armée russe, l’éclatement de la Yougoslavie voisine (présenté par les média roumains comme une agression étrangère venue d’Occident) et la persistance de la pénurie, inquiètent profondément une population dont la majorité ne perçoit pas que ses problèmes viennent précisément du maintien des « féodalités » héritées de la dictature. Se présentant en protectionniste sur tous les plans, Ion Iliescu sait utiliser ces craintes et est réélu en 1992 avec une large majorité sur un programme mi-nationaliste, mi-socialiste.
Mais la société civile qui se reconstitue lentement, et la liberté de la presse, qui permet la parution de média critiques envers le pouvoir, changent la donne. La lutte politique gagne en intensité, provoquant une scission à l’intérieur du FSN, qui profite au jeune Premier ministre Petre Roman représentant l’aile la plus réformatrice de la nomenklatura. Suite logique, en novembre 1996, le peuple roumain finit par choisir l’alternance et permet l’arrivée au pouvoir d’Emil Constantinescu, professeur d’université, candidat d’une large et hétéroclite coalition anti-Iliescu où se côtoient d’authentiques démocrates, des libéraux qui veulent en finir avec le protectionnisme, et des néo-communistes réformateurs.
La transition difficile vers l’économie de marché, l’incapacité du nouveau président à imposer son leadership sur la coalition au pouvoir, la corruption rampante et d’incessantes rivalités à l’intérieur même du gouvernement, provoquent la colère et le désespoir des couches populaires, directement touchées par la pauvreté. Une nouvelle « minériade » échoue en 1999, mais, aux élections 2000, Ion Iliescu et son Parti Social-Démocrate (PSD) gagnent grâce à un tour de passe-passe électoral : les anciens chantres de Ceaușescu, Corneliu Vadim Tudor et Adrian Păunescu, passés du communisme à l’ultra-nationalisme, se sont présentés contre lui en épouvantails d’extrême-droite, prenant à ses adversaires la partie la plus désespérée de leurs électeurs, et le faisant passer pour démocrate par contraste. Le PSD profite des réformes commencées par les partis démocrates et change son orientation idéologique pour devenir un parti de gauche à l’image des travaillistes britanniques ; il devient ainsi membre de droit du Parti des socialistes européens ce qui est encore un grand succès politique, car par contraste cela place ses adversaires à droite, ce qui continue d’effrayer beaucoup d’électeurs.
Entre 2000 et 2004, le PSD applique pourtant une politique économique libérale (larges privatisations, indépendance de la Banque centrale), se rapproche fortement de l’OTAN et de l’Union européenne, tandis que la composante sociale reste très limitée. Aux élections de novembre 2004, la majorité relative gagnée par le PSD n’est pas suffisante pour former un gouvernement et c’est une coalition de quatre partis de centre-droit qui prend le pouvoir.
Le nouveau président de la Roumanie est Traian Băsescu, un ancien capitaine de la marine marchande, chef du Parti démocrate (PD) issu du FSN, mais allié du Parti national libéral. Il a moins été élu sur son programme que sur son franc-parler : il est le premier à assumer clairement son passé communiste et à admettre officiellement que le communisme et les manipulations de 1989 ont été criminels (deux millions de morts en 45 ans officiellement recensés). La coalition au pouvoir s'efforce d’achever les réformes (instauration d’un taux d'imposition très bas, à 16 %, aide à la concentration des terres agricoles, réforme d’un appareil de justice peu efficace, lutte contre la « grande » corruption, modernisation de la sécurité sociale) mais elle se heurte aux contradictions politiques internes et à une forte résistance de la part des vieux apparatchiks de la nomenklatura.
La transition économique
La Roumanie adhère à l'Union européenne le 1er janvier 2007. Le 23 juillet 2008, la Commission européenne rend public son troisième rapport sur l’évolution de la démocratie en Roumanie, dans le cadre du Mécanisme de coopération et de vérification qui vise à évaluer les progrès de nouveaux membres de l’Union européenne, et ce rapport conclut à un bilan très mitigé : parmi les points positifs on note une nette amélioration des infrastructures, la liberté des médias, les progrès des libertés publiques ; parmi les points négatifs la lourdeur et la lenteur des administrations, des choix énergétiques et de modes de transport à contre-courant (tout-hydrocarbures, tout-routier), le faible niveau de vie des retraités, la faiblesse des systèmes de solidarité, une législation qui peine à s’aligner sur les nomes européennes, une corruption endémique à tous niveaux et l’absence de mesures prises pour y remédier. La Commission appelle la Roumanie à poursuivre ses efforts dans tous ces domaines.11
La conquête de l’Est
Eric Scavennec, du blog "les dessous de Bruxelles" revient sur l'ouverture de la Roumanie aux investisseurs ouest-européens après la chute du régime communiste, et sur ses conséquences sociales et économiques pour la population roumaine.
« C’est comme si nous avions découvert une nouvelle Asie du Sud-Est à notre porte », explique Keith Richardson, ancien secrétaire de la Table Ronde des Industriels (European Round Table - ERT). Au début des années 90, les lobbyistes des grands groupes européens ont de solides raisons de se réjouir de la chute des régimes communistes d’Europe de l’Est. Avec la réserve énorme d’une main-d’œuvre hautement qualifiée mais à bas salaire, l’addition de 150 millions de consommateurs au marché représentent des perspectives qui excitent au plus haut point l’intérêt des industriels européens.
L’intérêt de l’ERT pour les pays de l’Est part d’une intention parfaitement philanthropique : en proposant un ticket d’entrée pour le grand marché européen, n’offre-t-on pas aux anciens pays communistes la chance d’entrer de plain-pied dans la modernité ? Pour preuve, le lobby des grands groupes européens publie un rapport en 1999, au titre évocateur : « L’infaillible succès du commerce Est-Ouest ». Sa lecture nous enseigne en détail sur les bienfaits de l’investissement des compagnies occidentales à l’Est, tant pour l’Union Européenne que pour les pays d’accueil.
Depuis sa création dans les années 80 (sous le patronage de l’inévitable Vicomte Davignon), l’ERT a toujours offert un soutien sans faille à la politique d’intégration des anciens pays communistes d’Europe de l’Est. Le mot d’ordre : y faciliter les investissements en faisant « tomber les barrières réglementaires ». L’intégration européenne, n’est-elle pas un vaste processus « gagnant-gagnant » ? Pour en avoir le cœur net, les Dessous de Bruxelles enquêtent en Roumanie, dans les plaines du Far Est du libéralisme européen.
Inégalités
Sur une route accidentée, dans les hauteurs des Carpates, un luxueux 4x4 Porsche Cayenne dépasse à toute allure la charrette d’un bûcheron. Celui-ci regarde passer le bolide d’un air indifférent. Une scène a priori anodine, mais néanmoins symbolique de la société roumaine, à plusieurs égards.
La société roumaine demeure assez largement rurale. Ainsi, le bûcheron pourrait représenter les 45,7 % de Roumains qui vivent en milieu rural et pratiquent une activité agricole. Soit 38 % des actifs, qui produisent moins de 12 % des richesses. Ici, les terres cultivées permettent avant tout à de nombreuses familles d’assurer leur autosuffisance. Et pour cause : malgré un sol très riche, ces petites exploitations aux méthodes artisanales ne peuvent rivaliser sur le marché avec les grandes exploitations mécanisées des plus importants exportateurs agricoles. À la campagne, on vit d’échange, voire d’entraide, en dehors des circuits économiques classiques.
La « modernisation » du pays et l’ouverture à l’Ouest ont par ailleurs vu l’émergence d’une nouvelle bourgeoisie urbaine, dont la richesse n’a d’égal que l’arrogance, à l’image de ses Porsche Cayenne et autres 4x4 de luxe qui peuplent les routes roumaines. Pratiques vu l’état parfois désastreux du réseau, ces grosses cylindrées sont à elles seules les symboles d’une inégalité profonde au sein de la société roumaine. Un rapide calcul permettra d’en donner une idée ; En divisant le prix d’un modèle Porsche Cayenne, V6, injection 3,6 L, acheté en Roumanie : 62 438€ ; par le salaire moyen : 350€ ; on trouve que l’Equivalent-Porsche-Cayenne (EPC) correspond à environ 15 ans de travail pour un salarié roumain.
D’autres chiffres sont évocateurs. Selon une étude réalisée par la société de conseil en management Hay Group en octobre 2007, les managers roumains disposent d’un pouvoir d’achat qui est l’équivalent d’un salaire moyen de 115.280 dollars, plus important qu’aux États-Unis, au Japon, au Canada, ainsi que dans une majorité de pays du centre de l’Europe. Ils restent cependant dans ce classement encore loin derrière les managers saoudiens et émiratis.
En 2007, en Roumanie, « 300 personnes se partagent plus de 33 milliards de dollars, c’est-à-dire 27 % du produit intérieur brut de la Roumanie » nous apprend une dépêche de l’agence Rompres. « Les personnes qui ont des affaires dans le domaine immobilier ont enregistré des hausses spectaculaires de leurs fortunes. La plupart de ces avoirs sont concentrés à Bucarest. »
Gabegies immobilières
Mais les fortunes « spectaculaires » des nouveaux magnats de l’immobilier ne font pas le bonheur de tous. Adina, étudiante à Iasi (seconde ville du pays), nous fait part de ses inquiétudes : « Les prix ne cessent d’augmenter. Comment faire quand, une fois le loyer payé, il ne reste plus d’argent ? » Et d’ajouter « Je ne sais pas combien de temps les gens pourront supporter ça. »
L’entrée dans l’Union européenne, accueillie avec un certain enthousiasme par les roumains, s’est accompagnée d’une importante vague de spéculation immobilière. En janvier 2007, (mois d’entrée de la Roumanie dans l’Union européenne) les prix de l’immobilier en Roumanie ont augmenté de 20 %. Une tendance qui se poursuit au point que la Roumanie enregistre en janvier 2008 la hausse la plus importante, en rythme annuel, dans le secteur de la construction (33,7 %) dans l’Europe des 27.
Les investisseurs, eux, viennent d’Europe de l’Ouest ou des États-Unis, et ils viennent pour faire fructifier leur argent. « La Roumanie présente actuellement le potentiel européen le plus important pour les affaires avec un profit élevé et rapide, si bien que l’immobilier représente l’un des domaines les plus attirants. » Au plus fort de l’euphorie, le journal Evenimentul Zilei titre « On construit la nouvelle Roumanie ».
Malheureusement, les plus belles histoires ont une fin. Il semble que les architectes de cette « nouvelle Roumanie » aient vraisemblablement oublié un détail : en Roumanie il existe des gens qui vivent, travaillent... et payent un loyer. « L’affaiblissement du pouvoir d’achat, doublé d’une appréciation du leu (NDR : monnaie nationale roumaine) pourrait provoquer une crise du marché immobilier en Roumanie, similaire à celui de l’Occident » s’effraie le quotidien bucarestois Adevarul. De fait, dès mai 2008, le marché immobilier commence à montrer des signes de faiblesses. Dans les mois qui suivent, c’est la décrue. En septembre 2008, les prix reviennent à ceux de 2006, et laissent la place à une forte récession économique dans le domaine de la construction et de l’immobilier.
L’éclatement de la bulle immobilière roumaine laisse le parc immobilier dans un piètre état. « Les logements de Bucarest sont 10 fois plus chers qu’en 90 et à la moitié du confort de l’UE », titre en septembre 2008 le magazine Business Standard. « Le prix d’un appartement de deux pièces, situé dans une zone semi-centrale de la capitale, a augmenté 10 fois depuis 1990 jusqu’à présent et le confort offert par ce type d’habitation est resté inchangé voire il s’est dégradé. »
Investissements, chômage et pollution
Avec la crise et le chômage, la vie devient de plus en plus chère, l’inflation étant renforcée par l’augmentation des cours du pétrole et des céréales… « Alors que le salaire minimum est ici de dix fois inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance (smic), les produits alimentaires affichent souvent les mêmes prix qu’en France » rapporte le Monde Diplomatique. En dehors des campagnes, où les familles vivent encore dans une relative autarcie et autosuffisance, joindre les deux bouts devient de plus en plus difficile. Au point que « dix ans après la chute du communisme, certains citoyens semblent regretter les conditions de vie du temps de la dictature » rapportent les auteurs du Guide du Routard.
Et pourtant, les investissements sont bel et bien là. En Roumanie, les groupes français tirent même tout particulièrement leur épingle du jeu, à l’image de la Société générale qui a racheté la première banque de Roumanie (BRD), Orange, premier opérateur mobile, et Carrefour dont les grandes surfaces fleurissent aux abords des villes roumaines. Ou encore Renault qui a racheté en 1999 le constructeur automobile Dacia.
Alors, quid des retombées délicieuses de l’« infaillible succès du commerce Est-Ouest » ? En fait, déjà bien avant la crise, les investissements ne tenaient pas toujours les promesses annoncées en grande pompe par l’ERT... loin s’en faut.
À ce titre, le Corporate Europe Observatory (CEO) pointe le cas de la Hongrie, où les entreprises transnationales participent jusqu’à 30 % du PNB : « Dans toute cette région, les entreprises locales se débattent – souvent en vain – pour concurrencer les grandes firmes, qui bénéficient d’énormes avantages d’échelle, d’un accès moins onéreux aux capitaux, d’une technologie supérieure et de très gros budgets publicitaires. » Et de conclure : « Rien d’étonnant donc à ce que sur le sillage des multinationales on trouve un lourd contingent de chômeurs. »
Le bonheur et la prospérité attendront la « fin de l’histoire » ; car dans l’immédiat, l’investissement des grands groupes européens apporte surtout son lot de dommages collatéraux, sociaux et environnementaux : « Unilever et Procter & Gamble sont deux exemples de compagnies ayant profité de ce combat inégal. Ces firmes se sont tout simplement partagé le marché des cosmétiques de l’Europe centrale et de l’Est, provoquant la fermeture des compagnies locales » rapporte le CEO. « En outre, alors que ces industries utilisent plutôt des technologies non polluantes en Europe de l’Ouest, elles profitent des normes de production moins sévères de ces régions pour abandonner de telles exigences. »
Pour les multinationales qui investissent en Roumanie, désignée comme « l’atelier de l’Europe » rapport au coût faible de la main d’œuvre, le succès est certes « infaillible » - qu’il s’agisse de profiter des « avantages comparatifs » du pays, ou de spéculer sur la bulle immobilière roumaine. L’espoir d’adhérer à l’Union européenne et de bénéficier des fameux « bienfaits » de l’afflux d’argent européen a en effet poussé la Roumanie à dérouler le tapis rouge devant les investisseurs.
Intégration et restructuration
Le processus d’adhésion suppose que les nouveaux entrants reprennent à leur compte les bonnes recettes du marché commun, et s’y soumettent. Au menu, « restructuration des économies et des infrastructures nationales, adoption en bloc de la législation de l’UE, réduction du rôle de l’État et augmentation de la dépendance vis-à-vis des investissements directs étrangers. »
À ce titre, les lobbyistes des grandes multinationales européennes peuvent se frotter les mains : l’adhésion des anciens pays communistes à l’UE permet d’ouvrir en grand les portes des marchés de l’Est, sans que leurs investissements ne soit entravé de trop de contreparties ou d’obligations. C’est une véritable leçon de démocratie qui est administrée à ces pays, au sortir de leur longue expérience communiste. « Bien que les critères [d’adhésion] et l’inévitable domination économique des multinationales occidentales soient débattus par les pays concernés, les négociations ne laissent de place à aucune alternative » rapporte le CEO, « ce qui est, sans nul doute, une expérience dégrisante pour ceux qui, dans cette zone, imaginaient une démocratisation progressive de l’économie après la chute du rideau de fer. »
Dans le processus d’intégration, les groupes industriels membres de l’ERT n’hésitent pas à mettre eux-mêmes la main à la pâte, en conseillant directement les gouvernements et des entreprises des pays de l’Est : « l’ERT a créé des Conseils en expansion commerciale [BEC] en Hongrie, en Roumanie et en Bulgarie, respectivement sous la direction de Shell, de la Lyonnaise des Eaux et de Solvay. » Il ne s’agit de rien d’autre que de s’assurer que le travail soit bien fait : « La participation du milieu des affaires constitue une garantie que les fonds servent bien les intérêts prioritaires », explique Eberhard von Kœrber.
Aux officiels, ainsi qu’aux cadres dirigeants des grandes entreprises nationales ou d’ores et déjà privatisées, les Conseils en expansion commerciale délivrent de véritables leçons de libéralisme à la sauce bruxelloise : « La recette préférée de l’ERT offre en particulier comme ingrédients la libéralisation du marché dans les secteurs de l’énergie, des transports et des télécommunications et l’augmentation de l’investissement public dans les infrastructures de transports. »
Une stratégie gagnante qui permet notamment aux compagnies membres de l’ERT d’inonder progressivement les marchés d’Europe centrale et de l’est. Celles-ci jouent en effet un rôle particulièrement actif dans le chiffre des exportations de l’Union vers l’Europe centrale et de l’Est qui a triplé pendant la décennie 90, comme le rapporte le CEO.
Décidément, la réussite du commerce Est-Ouest est véritablement « infaillible ». En effet, pour prescrire les recettes qui permettront une ouverture des économies des pays de l’Europe de l’Est sur mesure pour les grands investisseurs, l’ERT pourra largement s’appuyer sur les programmes de subvention destinés à financer l’intégration des PECO (Pays d'Europe Centrale et Orientale). « Cette approche reflète aussi bien le schéma prescrit par l’Union pour les pays en attente d’intégration que la façon dont les subventions européennes ont été canalisées dans le très controversé programme « Phare » – qu’on a reproché de tourner plus à l’avantage des grandes firmes et des consultants d’Europe occidentale qu’à celui des pays postulants. »
Hormis l’ERT, de nombreux cabinets de conseil spécialisés dans les pays de l’Est font leurs affaires du processus d’adhésion, en offrant leurs services - conseil à l’investissement dans les pays de l’Est, à l’obtention de subventions européennes... On compte notamment la SISIE, filiale Schneider Electrics dirigée un temps par Edith Cresson qui rejoindra en 1995 la Commission européenne (et dont l’ancien chef de service deviendra directeur des programmes PHARE et TACIS à la Commission). Ou encore Euractiv, plateforme en-ligne d’information sur l’Union européenne, qui propose notamment des services de conseil pour l’obtention de fonds européens, via ses franchises implantées localement.
Grèves et mouvements sociaux - Dacia
Et pourtant, cette « conquête de l’Est » par les investisseurs européens ne va pas sans heurts. L’ERT reconnaît que la restructuration brutale des économies des pays de l’Est engendrera des problèmes, mais relègue ces maux au rang de petites choses du quotidien dans un monde en voie de mondialisation, comme le note le CEO en citant le rapport de la Table Ronde sur le commerce Est-Ouest, : « Des changements structurels signifient inévitablement des changements dans les schémas d’emploi ; des emplois sont détruits dans certains secteurs et protégés ou créés dans d’autres. » Pour l’ERT, les destructions d’emploi sont un moindre mal ; « Notre travail consiste à dire que les gains probables ont beaucoup plus d’importance … »
Il faut bien dire que la recomposition industrielle de l’Europe présente de substantiels avantages pour les industriels européens. « Non seulement les emplois détruits à l’Ouest se recréent à l’Est délestés de leurs conquêtes sociales, mais ils exercent une pression à la baisse sur les rémunérations de l’Ouest — divisant les travailleurs européens », comme le fait remarquer le Monde Diplomatique. Il arrive cependant que la mécanique du dumping social se grippe ; à ce titre l’exemple de la grève qui s’est déroulée en 2008 dans les usines de Dacia est significatif.
En 2007, Dacia, racheté en 1999 par Renault, avait connu un record de ventes de la nouvelle Logan, une voiture « low-cost » conforme aux standards européens, avec une hausse de 17,4% de 2007 à 2008. Avec un salaire brut moyen au sein du groupe ne dépassant pas 1 064 lei, soit environ 285 euros, les « gains probables » du commerce Est-Ouest semblaient décidément échapper aux ouvriers de Dacia. Estimant leur salaire inadapté, par rapport à l’augmentation du coût de la vie en Roumanie d’une part, et aux profits dégagés par Renault de l’autre, ceux-ci décidèrent au printemps 2008 d’entamer une grève illimitée avec pour principale exigence une augmentation des salaires de l’ordre de 40%.
Au terme d’un mois de mobilisation et malgré les pressions (menaces de délocalisation), les ouvriers de Dacia ont finalement obtenu une augmentation substantielle de 34% de leur salaire. Une forme de victoire à la fois pour le mouvement syndical, en Roumanie (où les grévistes ont bénéficié du soutien assez large de la part des partis de gauche et des syndicats) mais aussi en France, comme le montre la solidarité exprimée par la CFDT et CGT Renault et les fonds récoltés en soutien des ouvriers roumains.
Les ouvriers français avaient de fait un intérêt objectif à ce que les conditions de vie de leurs homologues roumains s’améliorent, faisant ainsi retomber la « pression compétitive » que le bas coût des salaires à l’Est exerce sur les salaires à l’Ouest.
Intervention du FMI
Mais l’espoir provoqué par la grève des ouvriers de Dacia de voir se gripper la machine à compresser les salaires sera cependant de courte durée. Dans la tourmente de la crise qui frappe de plein fouet la Roumanie en 2009 suite à l’éclatement de la bulle immobilière, le rouleau compresseur de la « rigueur » s’apprête à sévir.
La hausse brutale des prix de l’immobilier, du pétrole ou des denrées alimentaires est-elle dans une large mesure imputable à des phénomènes spéculatifs qui échappent complètement aux salariés ? Qu’importe, ce sont eux qui sont appelés à jouer le rôle de variable d’ajustement : « Pour freiner la hausse des prix, le patronat et le gouvernement roumains réclament en chœur une baisse de la pression salariale » rapporte le Monde Diplomatique, et de noter que « cette thèse fait écho à celle de la réunion de l’Ecofin — rencontre des ministres des finances des pays membres de l’Union —, le 5 avril 2008, à Ljubljana (Slovénie) ».
Au printemps 2009, un an avant la crise grecque, la Roumanie est au bord d’une grave crise de liquidités, et son système financier risque la faillite. Après dix ans de forte croissance, la Roumanie entre en récession en 2009, son produit intérieur brut (PIB) s’étant contracté de 7,1%. Le FMI, l’Union Européenne et la banque mondiale « viennent en aide » au gouvernement roumain en lui accordant un prêt de 20 milliards d’euros en contrepartie d’un plan de rigueur destiné à réduire son déficit public. En octobre 2009, en échange d’un prêt de 20 milliards d’euros du FMI, de l’UE et de la Banque mondiale, Bucarest s’engage à « dégraisser un appareil bureaucratique jugé obèse » pour faire passer son déficit public de 7,1 % du PIB en 2009 à 5,9 % en 2010.
Mais les experts du FMI estiment que le gouvernement roumain tarde à « dégraisser » la fonction publique, et menace de geler les prochains versements du prêt international. Les experts sont scandalisés : « En faisant le bilan aujourd’hui, nous constatons que la majeure partie des fonds est allée au paiement des salaires et des allocations sociales » déclare à l’AFP l’économiste Doru Lionachescu de Capital Partners. Le secteur privé, lui, n’aura pas manqué de faire les « ajustements » nécessaires : le chômage était de 4% en décembre 2008, il atteint 15% courant 2010.
Devant les menaces du FMI, Bucarest a annoncé en mai 2010 un train de mesures d’austérité draconiennes, incluant une baisse de 25 % des salaires de la fonction publique et de 15 % des retraites et allocations chômage, ainsi qu’une hausse de la TVA, de 19 % à 24 %. En réponse à ces annonces, les syndicats roumains ont déclenché, lundi 31 mai, une grève générale illimitée dans la fonction publique, pour protester contre le plan de rigueur que Bucarest vient d’adopter pour contenir le déficit. Une grève très largement suivie, et qui a mobilisé une partie des salariés du secteur privé.
Pourtant, malgré leur mobilisation, il semble que les salariés roumains ne soient pas au bout de leurs peines. En août 2010, M. Franks, chef de la mission du FMI, a appelé Bucarest à poursuivre le plan d’austérité « particulièrement drastique » adopté en juin, qui prévoit notamment des coupes de 25% des salaires du secteur public. Parmi les mesures encore attendues par le FMI, il a mentionné la réforme des « retraites spéciales », une baisse des arriérés du secteur public et un assouplissement du marché du travail. Avant de conclure qu’après avoir supprimé environ 30.000 emplois dans la fonction publique, le gouvernement devrait réduire le nombre d’enseignants à partir de septembre, dans le cadre d’une restructuration de ce secteur.
(NB : Un enseignant gagne moins de 180€ par mois à ses débuts. On laisse au lecteur le soin de calculer l’EPC – l’Equivalent-Porsche-Cayenne)
La mission de la Commission européenne a pour sa part constaté que « les conditions pour le versement d’une tranche d’aide de 1,2 milliard d’euros ont été remplies ». La Commission a effectivement de quoi être satisfaite : le gouvernement roumain a promis, compétitivité oblige, de ne pas toucher à l’impôt sur les sociétés, qui se trouve être parmi les plus bas en Europe, ayant été réduit à 16%. Ni par ailleurs à l’impôt sur le revenu, fixé au même taux de 16% (sans aucune progressivité).
L’essentiel est donc sauf : les intérêts des investisseurs européens en Roumanie ne seront pas menacés. Ce seront bel et bien les salariés qui paieront l’addition. « "Modèle social européen"… Je ne comprends pas bien le sens de cette expression » s’interrogeait Frits Bolkestein, grand promoteur du dumping social dans l’Union européenne. On gage que le cas du « modèle roumain » pourrait lui mettre la puce à l’oreille.
Quant aux procédés « gagnant-gagnant », force est de constater qu’ils figurent d’éternels « perdants-perdants ».12
Les roumains refusent l'austérité (2012)
Ambiance de crise en Roumanie où la révolte s’est emparé des habitants furieux. Le peuple de Bucarest et des autres villes s’opposait en effet à la politique inique du gouvernement, mise en œuvre pour satisfaire le diktat du Fonds monétaire international (FMI) et de l’Union européenne, en échange d’un prêt particulièrement onéreux.
La rage a explosé à cause des mesures draconiennes imposées par le FMI et la privatisation du système de santé voulues jusque-là par l’ex premier ministre Boc. Des dizaines de manifestants s’étaient donné rendez-vous à Bucarest le soir du 12 janvier 2012 pour crier leur colère. Les premiers affrontements avec la police commencèrent… Le mécontentement ne tarda pas à se transformer en révolte populaire et s’étendait désormais aux autres villes du pays. Des milliers de manifestants ont répondu ainsi répondu à l’appel de la rue et ont bravé la police à Bucarest mais aussi Cluj, Iasi, Târgu-Mureş et beaucoup d’autres villes. Ces manifestations ont provoqué en quatre jours 70 blessés et plus de 250 arrestations.
Le 15 janvier, une foule impressionnante est descendue dans les rues de Bucarest pour réclamer le départ du Premier ministre, de son gouvernement et du Président, Traian Basescu. Le gouvernement lâcha du lest et annonça, temporairement, le retrait des réformes ayant trait au système de santé. Mais c’est bien la politique générale voulue par le gouvernement, soi-disant pour équilibrer les déficits publics et obtenir une aide du FMI, qui est mise en cause par les manifestants.
En 2010 déjà, le gouvernement avait abaissé de 15 % les retraites et diminué de 25 % le salaire des fonctionnaires, affamant ni plus ni moins le peuple dont les pensions de retraite avoisinent en moyenne les 160 euros mensuels quand les salaires ne dépassent pas les 350 euros. Des mesures injustes dans le but d’obtenir du FMI et de l’UE un prêt de 20 milliards d’euros qui devait permettre à la Roumanie, selon ce même gouvernement, de sortir de la crise et d’intégrer les pays « vertueux » (selon les paramètres de l’UE), avec un niveau de déficit d’1,9 % par rapport au PIB (produit intérieur brut).
Dans les projets du gouvernement figurait toujours un vaste programme en vue d’assainir les services de santé, avec, à la clé, une forte diminution d’effectifs dans les hôpitaux publics qui préfigurerait, selon les plus pessimistes (mais aussi les plus réalistes), une privatisation du secteur. Un choix que n’acceptait pas le ministre de la santé, Raed Arafat, qui le critiquait lors d’un débat télévisé au cours duquel il a reçu un appel téléphonique en direct du président Basescu qui lui demandait de démissionner. Chose qu’a faite Arafat. « La goutte d’eau qui fait déborder le vase », selon un manifestant de Bucarest opposé aux choix gouvernementaux.
Pendant ce temps, le représentant en Roumanie du Fonds monétaire international et ex-ministre des finances, Mihai Tănăsescu, a souligné lors d’une entrevue donnée à une éminente radio privée que les marchés internationaux ne seraient pas influencés par le vaste mouvement de protestation si la Roumanie continue de suivre le pas des réformes mises en place. « Il s’agit certes d’un mécontentement accumulé sur la durée, et il représente une gêne imposée à la population qui a déjà beaucoup payé, mais ces réformes étaient nécessaires à la Roumanie », a commenté Tănăsescu. L’ex ministre a ajouté que les prochains temps seront durs pour la Roumanie, en raison de la dépendance des flux de capitaux provenant de l’étranger, et en particulier de la zone euro. Mais Tănăsescu a la mémoire courte et il devrait se rappeler les mesures draconiennes prises par son pays au cours des trois dernières années et qui ont provoqué ces révoltes populaires. Et il faut aussi souligner que ces mouvements contre le gouvernement et le président Tănăsescu n’ont jamais atteint un niveau aussi élevé depuis l’élection du chef de l’État, en 2004.
La crise semble irréversible, et le peuple roumain a raison de s’opposer aux mesures vexatoires d’un gouvernement et d’un président à la merci de grands organismes mondialistes qui étaient littéralement en train d’appauvrir et de dépouiller la Roumanie.13
Le candidat de la grande entreprise gagne l’élection présidentielle en 2014
Le gouvernement social-démocrate roumain était en crise politique après que son premier ministre, Victor Ponta, a été battu au deuxième tour des élections présidentielles, le 16 novembre, par le candidat conservateur Klaus Iohannis.
Ponta était considéré large favori pour succéder au président sortant Traian Basescu, ayant terminé en tête au premier tour avec 10 % de plus que son concurrent Iohannis. Les sondages précédant le deuxième tour avaient en effet donné Ponta largement favori. Selon les résultats définitifs cependant, Iohannis a obtenu 54,5 % des voix contre 45,5 % pour Ponta. Au deuxième tour, le taux de participation de 64 % représenta une hausse du nombre de votants par rapport au premier tour. Ponta a perdu des voix dans les bastions de la sociale-démocratie de grandes villes comme Constanta, Iasi et surtout la capitale Bucarest.
Ce net désaveu de Ponta dans les urnes représente un rejet de la politique qu’il a menée pendant les deux dernières années. Installé au pouvoir en 2012 suite à la crise politique créée par des manifestations massives contre l’austérité, le gouvernement mené par les sociaux-démocrates s’est distingué comme une des administrations les plus à droite et les plus brutalement anti-ouvrières que le pays ait connu en 25 ans.
En coopération étroite avec les syndicats, Ponta devint le champion du programme de l’austérité de l’Union européenne et du Fonds monétaire international (FMI). Il supervisa ainsi les licenciements de masse et le gel des salaires dans le secteur public, la privatisation des entreprises publiques et la destruction systématique de ce qui restait de l’État social, y compris la privatisation du système de santé.
Avec le début de la crise en Ukraine et l’encerclement de la Russie par l’OTAN, Ponta devint un ardent défenseur de la transformation de la Roumanie en avant-poste militarisé de l’OTAN et en un centre pour de nouvelles provocations contre la Russie, sans lésiner sur les coûts que cela entraînerait. Sa campagne présidentielle fut utilisée pour aggraver encore les tensions dans la région, encourageant l’ancienne république soviétique de Moldavie à accélérer son intégration européenne. Il fit le serment de devenir le président d’une Grande Roumanie avant 2018, en absorbant la Moldavie.
Un des résultats immédiats de l’intervention de la Roumanie et de l’UE en Moldavie a été la dégradation des relations avec le territoire sécessionniste de Transnistrie, qui reçoit le soutien de la Russie. Le dirigeant transnistrien, Eygheni Seyciuk se fit agresser au début du mois à l’aéroport de Chisinau pendant qu’il tentait de prendre l’avion pour Moscou. Les gardes de corps de Seyciuk furent retenus par les assaillants et remis à la police moldave qui fit une fouille de sa voiture « pour y trouver des armes ». L’attaque fut revendiquée par le Parti national libéral de Moldavie.
Le caractère essentiellement anti-démocratique de la procédure électorale bourgeoise fut clairement visible dans des plateformes électorales rivales mais quasiment identiques et par l’exclusion politique complète d’une vaste majorité de la population.
Le président élu, Klaus Iohannis, bien qu’il ait essayé de se faire passer pour un technocrate non-aligné durant la campagne électorale, représente les intérêts des grandes entreprises et l’impérialisme. Tout comme le président sortant Basescu, il est proche des conservateurs européens et il reçut le soutien de la Chancelière allemande Angela Merkel pendant la campagne électorale.
Iohannis est un transylvanien de 55 ans et d’origine allemande qui a commencé sa carrière politique dans les années 1990 en tant qu’adhérent du mouvement droitier Forum démocratique des Allemands et Roumains (FDGR). À partir de 2000, il a occupé le poste de maire de la ville de Sibiu. Les relations étroites du FDGR avec le Parti national libéral pro-marché poussèrent les libéraux à soutenir Iohannis pour le poste de premier ministre en 2009, cultivant son image de technocrate et de figure extérieure au milieu politique de Bucarest. À cette époque, sa candidature fut rejetée par le président Basescu.
En février 2013, Iohannis fut invité à rejoindre le Parti national-libéral, qui était alors un partenaire minoritaire du gouvernement social-démocrate. Il fut rapidement promu à la direction du Parti, devenant son président en juin 2014. Les libéraux étaient, à ce moment-là, dans l’opposition et Iohannis a conduit le parti dans une alliance avec le Parti libéral-démocratique conservateur de l’ancien premier ministre Emil Boc.
À l’avenir, les deux partis devraient fusionner. Iohannis s’est déjà positionné comme un représentant invétéré de l’élite dirigeante roumaine. En parlant de la « position optimale » occupée par la Roumanie du fait de l’encerclement de la Russie, son programme électoral prône une présence encore plus grande des Etats-Unis en Europe de l’Est, « dans l’esprit de l’article 5 du traité de l’OTAN », et une militarisation grandissante du pays.
Selon Iohannis, « La concentration des forces dans les Etats baltes et en Pologne est importante, mais dans le nouveau contexte, une présence militaire a autant d’importance en Roumaine et en Bulgarie », afin de « créer une équilibre entre les flancs du Nord et du Sud de l’Europe de l’Est ».
La Roumanie va augmenter ses dépenses militaires, moderniser l’industrie de l’armement et accroître le rôle de ses services secrets. Ceci transformerait la Roumanie, d’après le nouveau président élu, en « un point de repère important sur la carte mondiale géostratégique, devenant un fournisseur de sécurité sur le plan régional et consolidant son rôle en tant que base opérationnelle pour les alliés principaux, y compris dans le contexte du système de défense anti-missile des États-Unis, dans l’attente de l’intégration de celui-ci dans le système de l’OTAN. »
Le nouveau président va aussi intensifier les provocations au sujet de la Moldavie, il a juré de rassembler toutes les factions de la bourgeoisie en un « consensus national » pour hâter l’intégration européenne de la Moldavie. Soulignant le rôle pernicieux que l’UE joue en attisant les antagonismes régionaux, Iohannis dit que mettre en opposition « la réunification » et « l’intégration [européenne] » est « faux et inutile », les deux faisant partie du même processus.14
L'incendie de la discothèque Colectiv
Le 31 octobre 2015, pendant un concert de rock dans le club underground Colectiv à Bucarest, un incendie s’est déclaré, tuant 64 personnes et faisant environ 150 blessés.
C’est la plus grande tragédie de l’histoire récente de Bucarest, et ses effets sociaux se feront encore sentir dans un futur proche. À court terme, cet accident dramatique a déclenché une série de développements et dont la portée est encore incertaine. Dans ce texte, j’essaierai de mettre l’accent sur certaines des forces sociales et des processus que cette tragédie à simultanément mis en lumière et qu’elle a ensuite dissimulés, et en particulier par la manière dont elle a été intégrée à un certain univers symbolique et rhétorique.
Alors que les dimensions réelles de la tragédie n’étaient pas encore complètement connues, le Président roumain l’a rendue publique et a proposé ce qui est depuis devenu le cadre principal pour expliquer ce drame : la corruption tue. Étant donné que le lieu dans lequel le concert s’est tenu manquait d’infrastructures et d’autorisations pour de tels événements et que les autorités regardaient ailleurs, la corruption de l’administration locale et de la classe politique en général a commodément été tenue pour responsable de tous ces morts. Une explication aussi immédiate faisait écho à ce qui est déjà le cadre le plus populaire en Roumanie : les choses vont mal à cause de la corruption, et en particulier de la corruption de la classe politique dans son ensemble. Cette tragédie en était juste l’exemple ultime.
Après un jour de deuil et des marches silencieuses dans tout le pays en mémoire des victimes, les gens sont descendus dans la rue le lundi 2 novembre en grand nombre pour demander la démission du Premier Ministre, Victor Ponta. Bien évidemment, il n’y avait aucun lien direct entre lui et la tragédie, mais Ponta est depuis longtemps la personnification de tout ce qui va mal dans la classe politique, et de sa corruption en particulier. Accusé aussi de plagiat, Ponta a récemment été inculpé et il attend son procès pour corruption et abus de pouvoir. En fait, ses jours étaient déjà comptés depuis qu’il avait perdu les élections présidentielles il y a environ un an. Il a alors été mis en échec précisément grâce au discours anti-corruption et par un candidat qui semblait venir de l’extérieur, ou tout au moins des marges, de l’establishement politique actuel. Cette tragédie s’est alors avérée être le moment parfait pour se débarrasser définitivement du Premier Ministre, un fait calculé par le Président qui a proposé la corruption comme cause immédiate de la tragédie.
Par conséquent, ce qui semble être une soudaine et authentique explosion de colère consécutive à la tragédie était depuis le début conduit vers des buts politique très concrets et en lien avec la lutte prolongée qui s’est déroulée en Roumanie ces douze derniers mois. Avant cette tragédie, le Vice Premier Ministre Gabriel Oprea s’était déjà trouvé sous la lourde pression de la rue qui lui avait réclamé sa démission après qu’un policier de son escorte se soit tué dans un accident de la route provoqué alors qu’il avait enfreint la loi. Oprea et sa fraction parlementaire étaient les seules raisons pour lesquelles le Premier Ministre Ponta était encore au pouvoir. Le cauchemar du Colectiv les a renvoyés côte à côte et a ouvert la voie à la nomination d’un nouveau Premier Ministre par le Président.
Alors que la mise en scène de cette tragédie comme étant la conséquence de la corruption était en effet très puissant et qu’elle a continué à façonner la plupart des revendications mises en avant lors des protestations dans les jours qui ont suivis, la révélation des détails exacts de l’accident ont par la suite permis de proposer des interprétations alternatives et ont amené un nouveau lot de questions. Et de tels détails ne peuvent pas être simplement englobés dans un discours anti-corruption.
Par exemple, il est apparu qu’il n’y avait pas assez d’inspecteurs de la sécurité incendie en raison des coupes budgétaires dans l’administration publique résultant des mesures d’austérité imposées après la crise financière. En plus de cela, les dispositions légales avaient été considérablement assouplies dans les dernières années en faveur des propriétaires de commerces. La politique officielle de l’administration locale pour transformer le centre de Bucarest en un lieu de consommation et de loisir a permis aux entrepreneurs d’ouvrir des lieux avec très peu de vérifications officielles, et un investissement minimal dans les infrastructures.
En outre, les détails révélés sur les personnes qui ont péri dans l’accident ont compliqué le tableau encore plus. L’une des victimes était la femme de ménage du club. Maria Ion était une femme sans-domicile fixe, mère célibataire de cinq enfants, qui avait attendu en vain pendant des années pour obtenir un logement social par la Mairie. Sa famille l’a obtenu après sa mort lors d’une émission de télévision pendant lequel ce qui était censé être un droit social s’est transformé en acte de charité. Le club l’employait illégalement, sans les documents appropriés, sans paye régulière ni assurance sociale. Et c’était la même chose pour le barman et le garde du corps qui travaillait là, tous les deux âgés d’une vingtaine d’années, et tous les deux morts dans l’accident.
Le nombre de blessés a vite mis à rude épreuve les hôpitaux de la ville. Ils ont rencontré des difficultés à s’en sortir avec l’afflux de blessés graves, et les médecins et les infirmières ont dû être réquisitionnés et effectuer plusieurs gardes d’affilées pour venir à bout de la situation. Il est apparu très clairement que les hôpitaux de Bucarest sont en sous-effectif et absolument pas préparés à gérer les catastrophes d’une telle ampleur. Le service spécial pour les grands brûlés n’était pas encore en fonction au moment de la tragédie. Tout cela bien sûr n’est pas une surprise étant donné le nombre de médecins qui ont quitté le pays et les salaires ridicules offerts à ceux qui restent. Le système est sous-financé depuis 25 ans et la seule réforme proposée est la privatisation. Comme beaucoup de personne l’ont remarqué, il vaut mieux ne pas penser à ce qui se serait produit si cette tragédie s’était déroulée dans une petite ville de province du pays.
Dans ce contexte, les familles des patients ont demandé à ce qu’ils soient soignés à l’étranger. Il peut s’agir d’une réaction sous le coup de l’émotion dans certains cas, et une demande impossible à satisfaire étant donné l’état des patients, mais il reflète néanmoins l’opinion publique qui pense qu’on ne peut pas avoir confiance dans le système médical local. Par la passé, le Président, le Premier Ministre et beaucoup d’autres personnalités officielles ont choisi de suivre des traitements médicaux à l’étranger révélant ainsi leur méfiance du système national.
Il est également apparu que beaucoup des personnes blessées, dont la grande majorité sont des étudiants ou gens qui travaillaient dans le club, n’avaient même pas d’assurance médicale de base, mettant en lumière une tendance largement répandue chez les jeunes sans-emplois et les travailleurs précaires roumains, qui vivent dans des conditions de précarité basique et de vulnérabilité qui habituellement restent cachées.
À la suite de la tragédie, et à la suite de réactions instinctives typiques de ce genre de cas, une série de contrôles et de déclarations officielles a dépeint une situation encore plus sombre. Il a été révélé par exemple que plus de 90% des écoles en Roumanie ne sont pas conformes à la réglementation anti-incendie. Même au regard la législation actuelle, pourtant très souple, ces écoles devraient être fermées. De la même manière environ 200 bâtiments de Bucarest, regroupant des cinémas, des clubs, des restaurants et des boutiques populaires, sont dans un tel état de délabrement qu’ils devraient être fermés sans attendre. Ils sont toujours en fonction. De plus, des dizaines de blocs d’appartements à Bucarest et des douzaines d’autres édifices menacent de s’effondrer en cas de tremblement de terre. Leur nombre exact n’en est même pas connu.
Alors que c’est politiquement productif et intellectuellement commode de faire peser la mort des gens du Colectiv sur la corruption, la pure vérité est que ces personnes ont été victimes du profond sous-développement de la société roumaine actuelle. La corruption ne peut être exclue tout court, mais elle n’en n’est pas la cause. Il s’agit au contraire d’une conséquence des mêmes mécanismes qui ont contribué à la situation actuelle. La déréglementation, les politiques néo-libérales visant à réduire l’état au strict minimum et à privatiser les biens publics, la flexibilisation (sic) du code du travail et le démantèlement de tous les droits gagnés par la négociation collective, l’assaut contre les services sociaux et la diabolisation des « profiteurs d’allocations », le fondamentalisme de marché et le fétichisme de l’individualisme, du profit et de la réussite – pour faire court le consensus des années de transition – ont rendu inévitable la tragédie du Colectiv.
Dans ce genre de cas l’émotion est forte et les comparaisons fusent. Mais l’ampleur de la tragédie du Colectiv ne doit pas nous aveugler sur le fait qu’il ne s’agit pas d’un cas isolé, même si le nombre de victimes est sidérant. Quelques jours à peine après la tragédie de Bucarest une boulangerie à pris feu à Brasov. Un ouvrier a été tué et les autres ont été gravement blessés. Il s’est avéré que la plupart des ouvriers étaient piégés à l’intérieur car ils n’ont pas pu ouvrir les portes avec leur carte magnétique une fois l’électricité coupée. Pour la majorité des gens, les conditions de travail et les conditions de vie en Roumanie les rendent non seulement vulnérables et précaires, mais aussi presque entièrement jetable par le processus d’accumulation et de profit.
Dans ce contexte, il y a un profond et ironique paradoxe dans le choix des manifestants de demander la démission du gouvernement. En tant que politicien, Ponta se montrait réticent et incapable de rompre avec le consensus néo-libéral et ses politiques principales (le code fiscal, etc) étaient destinées à favoriser les patrons et le capital mondial. De nos jours, et c’est le cas dans toute l’Europe, un tel comportement n’est pas surprenant pour un social démocrate. Mais Ponta était capable de rompre avec les mesures d’austérité du gouvernement conservateur précédent et d’offrir un minimum de répit aux travailleurs et aux fonctionnaires. Il s’est aussi tourné vers des mesures keynesiennes plus libérales comme plus de réglementation de la part de l’état.
En poussant pour sa démission les manifestants qui dénonçaient les événements du Colectiv ont seulement ouvert la voie aux partisans du néolibéralisme et de l’austérité – les principales causes de la tragédie – et à leur retour au pouvoir lors des prochaines élections.15
Manifestations contre la corruption
Des manifestations monstres dans toutes les villes de Roumanie ont obligé le gouvernement à capituler. Le soir du 4 février 2017, le Premier ministre a annoncé l’abrogation du décret scandaleux qui avait fait descendre dans la rue les Roumains, de plus en plus nombreux depuis le 11 janvier dernier.
Revenu au pouvoir en décembre 2016 après en avoir été chassé un an plus tôt suite au terrible incendie qui avait fait 64 morts dans une discothèque où les normes de sécurité n’étaient pas respectées, le Parti social-démocrate voulait faire passer en douce, par décret, un allègement du code pénal sur les délits liés à la corruption. Un petit arrangement qui aurait permis, entre autres, au principal dirigeant de ce parti, Liviu Dragnea, d’être blanchi. Déjà condamné à deux ans de prison avec sursis pour fraude électorale, il passe en outre depuis le 31 janvier en procès pour une affaire d’emplois fictifs portant sur 180 000 lei, un peu moins de 40 000 euros et donc bien loin des 900 000 euros des Fillon... Le décret prévoyait opportunément un seuil minimum de 200 000 lei en-deçà duquel les politiciens pouvaient faire leurs petites magouilles sans être inquiétés par la justice...
Mais leur plan a raté : les Roumains s’en sont mêlés, furieux d’être une fois de plus floués et humiliés, descendant dans la rue par centaines de milliers. Le gouvernement espérait en être quitte après l’abrogation du décret, mais les manifestations ont redoublé. Le voilà donc désormais qui criait au complot et aux atteintes à la démocratie, se revendiquant de sa victoire aux législatives... où 60 % de la population se sont abstenus !
Cela fait des décennies que la corruption sévit en Roumanie, un des pays les plus pauvres d’Europe quel que soit le régime (monarchie, dictature fasciste, dictature stalinienne et « démocratie » néolibérale). Il faut dire que le pays est l’eldorado des multinationales, en particulier françaises : Renault (17 000 salariés), Engie (ex-GDF-Suez, 4 000 salariés), Airbus, Areva, AXA... Les salaires y sont bas – le salaire minimum brut est à 320 euros, alors que le coût de la vie est presque aussi élevé qu’en France –, la main-d’œuvre qualifiée, et une loi encore plus réactionnaire que la loi travail a été adoptée en 2011. Voilà qui vaut bien quelque complaisance à l’égard des pouvoirs en place ! 16
Les Roms
« Rom » (ou Rrom) est un terme qui a été adopté par l'Union romani internationale (IRU) pour désigner un ensemble de populations, ayant en commun une origine indienne, dont les langues initiales sont originaires du Nord-Ouest du sous-continent indien et constituant des minorités connues sous de nombreux exonymes vivant entre l'Inde et l'Atlantique ainsi que sur le continent américain. Rom est un endonyme signifiant « homme accompli et marié au sein de la communauté ». L'adoption de cet endonyme (Rom se dit Romani ou Roma en anglais) peut être à l'origine d'amalgames avec d'autres termes grammaticalement proches tels que la ville de Rome ou encore la Roumanie. Bien qu'à sonorités proches, le terme « rom », qui n'a été adopté que récemment, n'a pourtant étymologiquement rien à voir avec les termes ayant pour origine la ville de Rome tels que « roumain » (du latin romanus qui signifie « romain »). Rom n'est donc en aucun cas le diminutif de roumain.
Présentes en Europe dès le XIe siècle, ces populations y forment au XXIe siècle la minorité « la plus importante en termes numériques ».
Les Roms sont également désignés par d'autres mots : Gitans, Tsiganes (ou Tziganes, Tchiganes), Manouches, Romanichels, Bohémiens, Sintis.
Lors du Congrès mondial tzigane tenu du 8 au 12 avril 1971 à Londres, la communauté se choisit comme emblème un drapeau bleu et vert, avec une roue de couleur rouge. Le mouvement institua la date anniversaire de ce congrès, le 8 avril, comme journée nationale qui « sera désormais, célébrée chaque année par toutes les communautés rom dans le monde » . L'hymne, Djelem, djelem, a été écrit par Jarko Jovanovic sur une chanson populaire tzigane.
L'origine indienne
Les études linguistiques envisagent, vers la fin du XVIIIe siècle, des origines indiennes aux Roms, hypothèse recoupée par un récit historico-légendaire datant du milieu du Xe siècle, la Chronique persane de Hamza d’Ispahan, qui fut reproduite et embellie au XIe siècle par le poète Ferdowsi. Selon cette chronique, plusieurs milliers de Zott, Djâts, Rom ou Dom (hommes) partirent du Sind actuel, et peut-être de la rivière Sindhu vers l'an 900 selon les ordres du roi. Ils devaient rejoindre le roi de Perse, soucieux de divertir ses sujets grâce à leur culture musicale. De là, ils se divisèrent et s'éparpillèrent autour du monde. Longtemps installés en Perse, ces Roms, déjà décrits comme refusant de vivre d’agriculture, finissent par se séparer en deux groupes migratoires : les uns vers le sud-ouest et l’Égypte (Roms orientaux ou Caraques, terme venant soit du grec korakia : « les corneilles », soit du turc kara : « noir »), les autres vers le nord-ouest et l’Europe (Roms occidentaux ou Zingares : mot venant peut-être d'une déformation du terme Sinti). Ce faisant, les Roms sont marqués, dès l'origine, – puisque cette origine les « constitue » en tant que peuple –, par la déportation, l'esclavage, la dispersion :
L'Inde du nord est aujourd'hui clairement la zone géographique d'origine des Roms, comme en témoignent la linguistique et la génétique comparées. Selon les recherches en génétique de l'UWA, les caractéristiques génétiques de la population rom permettent de démontrer leur origine indienne et d'estimer que leurs origines remontent de 32 à 40 générations environ.
Dans les recherches linguistiques, la première hypothèse, plutôt européenne et anglo-saxonne, les rapproche du Sind et du Pendjab, régions dont les langues sont les plus proches des langages actuellement parlés par les Roms.
Ces groupes (peut-être pour échapper au rejet de la société brahmanique) pourraient avoir quitté le nord de l'Inde autour de l'an 1000 vers le plateau iranien et l'Asie centrale, où on les appelle Kaoulis et Djâts, et, à travers ce qui est maintenant l'Afghanistan, l'Iran, l'Arménie, le Caucase, le sud de l'ex-URSS et la Turquie, s'être mis, comme charriers, éleveurs de chevaux, servants et éclaireurs, au service des Mongols, qui les protégèrent et leur laissèrent, en échange, une part du butin. Avec la Horde d'or et Tamerlan, les Roms parvinrent ainsi en Europe, en Anatolie et aux portes de l'Égypte. Des populations reconnues par d'autres Roms comme telles vivent encore en Iran, y compris ceux qui ont migré vers l'Europe, et qui en sont revenus. Au XIVe siècle, les Roms vassaux des Tatars atteignent les Balkans, et au XVIe siècle, l'Écosse et la Suède. Quelques Roms migrent vers le sud. En 1425 ils traversent les Pyrénées et pénètrent dans ce qui deviendra l'Espagne en 1479. On ignore si des Roms ont jamais transité par l'Afrique du Nord, comme certains le pensent. Les preuves manquent.
Tsiganoi parmi les Byzantins (d'où Tsiganes), Cingene parmi les Turcs, Romani-çel pour eux-mêmes (c'est-à-dire « peuple rom », d'où Romanichels pour les Croisés francophones), Manuschen pour les Croisés germanophones et Gypsies pour les Croisés de langue anglaise. La plupart des Roms, une fois parvenus en Europe, se mirent sous la protection des seigneurs nobles et des monastères ou abbayes, échappant ainsi à la vindicte des cultivateurs sédentaires, et continuant à exercer leurs métiers traditionnels au service de leurs nouveaux maîtres (leur esclavage était une servitude de type féodal nommée Roba dans les pays slaves, ce qui ressemble à la fois à leur nom de Roma et au mot « Robota » : travail). Au XIVe siècle, la plupart des groupes de Roms que nous connaissons avaient achevé leur installation en Europe.
Migrations en Europe
L'histoire des Roms en Europe commence en 1416-1417, car c'est à cette époque que l'on trouve les premiers documents attestant de leur passage dans telle ou telle contrée (néanmoins, il est fort probable que de très petits contingents roms circulent en Europe dès le XIIe siècle).
Au XIVe siècle, des récits attestent pour la première fois de leur présence à Constantinople, en Crète, en Serbie, en Bohême, en Roumanie... Au siècle suivant, ils continuent d'avancer vers l'ouest.
À leur arrivée (historique) en Europe, au XVe siècle, les Roms furent en règle générale bien accueillis ; ils obtinrent des protections qui leur permettaient de ne pas être inquiété par l'Inquisition, les groupes hérétiques gyrovagues étant les victimes privilégiées de l'Inquisition ; car c'est ce qu'ils étaient ostensiblement, précisément, mais leur politique fut toujours d'adopter en apparence la religion officielle, en s'accordant ainsi, en Europe occidentale, la protection du pape.
C'est à partir du XVe siècle que l'état de grâce entre les tribus nomades et les populations se renverse : les villes leur ferment les portes, lassées de les entretenir. Des conflits éclatent dans les villages. Leur attitude marginale inquiète, et on les accuse de nombreux maux : maraude, vol de poules, de chevaux, et même d’enfants.
Ils deviennent indésirables et tombent, dès la fin du XVe siècle, sous le coup de décrets qui vont de l’expulsion pure et simple à l’exigence de sédentarisation : ce ne sont pas les Tsiganes qui sont visés, mais les nomades. Les récalcitrants sont emprisonnés, mutilés, envoyés aux galères ou dans les colonies, et même exécutés. La récurrence de ces mesures montre leur manque d’efficacité, sauf aux Pays-Bas, qui parviennent à tous les expulser au milieu du XIXe siècle.
« Roms » dans les principautés roumaines
Les deux premiers documents attestant de la présence des Roms dans l'actuelle Roumanie sont deux actes de donation de familles de robs roms à deux monastères, l'un de Vodița daté de 1385 et l'autre de Tismana daté de 1387, tous deux situés en Olténie dans l'ancienne Principauté de Valachie. La robie est un statut traduit en français et en roumain moderne par « esclavage », mais qui s'apparente davantage à un contrat féodal de servitude personnelle. Le rob appartenait certes à son maître qui pouvait le vendre, mais ce maître ne pouvait être qu'un voïvode, un boyard ou un monastère, et le rob lui-même pouvait racheter sa liberté, et la revendre ailleurs : c'est pour cela que traditionnellement les Roms portent leur or sur eux, bien visible, sous forme de colliers, bijoux ou dents, afin de montrer leur solvabilité et leur capacité à se racheter. Il est la marque de leur dignité. Le mot rob dérive du slave robota, le travail. En 1428, le voïvode moldave Alexandre le Bon fait don de 31 familles tsiganes au monastère Bistriţa en Moldavie. Ces principautés roumaines, vassales des Ottomans, jouissent de leur autonomie contre paiement d’un tribut à Istanbul.
L'entrée de presque tous les Roms en « robie » va contribuer au paiement de ce tribut, tandis que les monastères envoient d'immenses richesses au Mont Athos. Les Roms appartiennent dès lors soit au voïvode, soit aux monastères, soit aux propriétaires terriens : les boyards. Les robs du voïvode sont libres d’aller et venir, mais payent tous les ans une redevance pour ce droit. Ils pratiquent toutes sortes de métiers : commerçants ambulants, forains, ferronniers, forgerons, rétameurs, bûcherons, maquignons, fossoyeurs, chiffonniers, saltimbanques, musiciens. Quant aux monastères et aux boyards, ils utilisent leurs « robs » comme domestiques ou comme contremaîtres pour faire travailler les paysans serfs. Ils offrent à quelques-uns une formation et des postes de majordomes, de comptables ou d’instituteurs pour leurs enfants. Si le maître ou la maîtresse de maison est stérile, une jeune Rom ou un jeune Rom pourvoira à la perpétuation de la famille, en toute simplicité (cas de Ştefan VIII, devenu voïvode de Moldavie). Les « robs » peuvent être donnés, légués ou vendus aux enchères.
XVIIe siècle en France
En France, dès 1666, Louis XIV décrète que tous les Bohémiens de sexe masculin doivent être arrêtés et envoyés aux galères sans procès. Par la suite, lors de l'ordonnance du 11 juillet 1682, il confirme et ordonne que tous les Bohémiens mâles soient, dans toutes les provinces du Royaume où ils vivent, condamnés aux galères à perpétuité, leurs femmes rasées, et leurs enfants enfermés dans des hospices. Une peine était en outre portée contre les nobles qui donnaient dans leurs châteaux un asile aux Bohémiens ; leurs fiefs étaient frappés de confiscation.
XVIIIe et XIXe siècles en Europe
Les philosophes des Lumières ne se sont pas montrés particulièrement tendres avec les Bohémiens, à l'exception peut-être de Jean-Jacques Rousseau. L'abbé Prévost ou Voltaire ont eu des mots assez durs, et Mallet, dans l'Encyclopédie, écrit comme définition pour Égyptiens : « Espèce de vagabonds déguisés, qui, quoiqu'ils portent ce nom, ne viennent cependant ni d'Égypte ni de Bohème ; qui se déguisent sous des habits grossiers, barbouillent leur visage et leur corps, et se font un certain jargon ; qui rôdent çà et là, et abusent le peuple sous prétexte de dire la bonne aventure et de guérir les maladies, font des dupes, volent et pillent dans les campagnes ».
Le 6 décembre 1802, le préfet des Basses-Pyrénées Boniface de Castellane fait arrêter en une seule nuit les Bohémiens des arrondissements de Bayonne et Mauléon (environ 500 personnes) dans l'intention de les déporter par bateau en Louisiane. Mais la guerre maritime empêcha l'exécution de ce projet et ils furent progressivement remis en liberté.
Vers la fin du XVIIIe siècle et tout au long du XIXe siècle, l’Europe éclairée alterne coercition et recherche de solutions « humaines » pour les sédentariser, d’autant que les Roms retrouvent avec la Révolution et le mouvement romantique une image plus positive empreinte de liberté.
L'immigration rom aux États-Unis commence avec la colonisation des Espagnols et les Roms étaient embarqués comme esclaves et certain s'échappèrent en arrivant aux Amériques avec de petits groupes en Virginie et en Louisiane. L'immigration à plus grande échelle commence dans les années 1860, avec des groupes de Romanichels ou assimilés (à tort — ainsi : les Pavees) du Royaume-Uni et les Travellers de l'Irlande.
XXe siècle
C’est, paradoxalement, la première moitié du XXe siècle, époque de libéralisation dans toute l’Europe, qui fut la plus dure pour les « gens du voyage ». En France, une loi sur « l’exercice des professions ambulantes et la circulation des nomades » les oblige pour la première fois, en 1912, à se munir d’un « carnet anthropométrique d’identité » qui doit être tamponné à chaque déplacement. Marcel Waline dira en 1950 à propos de cette loi, en vigueur jusqu'en 1969, qu'elle constitue « un cas probablement unique dans le droit français (...) de législation appliquant à une certaine catégorie de gens, les nomades, un régime d'exception, rejetant cette catégorie hors du droit commun, et adoptant, pour opérer cette discrimination, un critère fondé sur un élément racial ». Ce contrôle administratif et de police existe toujours avec le Livret de circulation.
La répression du nomadisme se conjugue avec le succès des théories eugénistes sur la « protection de la race » dans les milieux scientifiques. La Suisse et la Suède — pour citer deux démocraties considérées comme exemplaires — mettent en place une législation qui vise à détruire la culture tzigane, avec l'assentiment ou l'approbation d'une majorité de la société. En Suisse, le département fédéral de justice et police planifie en 1930 l’enlèvement des enfants sur dix ans. La fondation Pro-Juventute a déjà mis en application en 1926 l'opération « les Enfants de la Grand-Route ». Celle-ci enlève de force les enfants des Yéniches (Tsiganes de Suisse, en allemand Jenische) pour les placer et les rééduquer dans des familles d'accueil sédentaires, des orphelinats voire des asiles psychiatriques en tant que « dégénérés ». Le docteur Alfred Siegfried, directeur des Enfants de la Grand-Route considère en effet les Yéniches comme génétiquement menteurs et voleurs. Non seulement on interdit aux parents biologiques de rencontrer leurs enfants (sous peine de prison) mais des stérilisations sont pratiquées sous prétexte « humanitaire » pour limiter leur reproduction. Cette opération ne prend fin en Suisse qu'en 1972. La Suède pratique une politique similaire jusqu'en 1975.
Le génocide nazi
En Allemagne, le Parti national-socialiste renforce, dès son arrivée au pouvoir, une législation déjà assez dure ; bien qu’Indo-européens, les Zigeuner ne sont pas considérés comme des Aryens mais, au contraire, comme un mélange de races inférieures ou, au mieux, comme des asociaux. Ils sont vite parqués dans des réserves (on envisage d’en classer une tribu comme échantillon, mais le projet est abandonné), puis envoyés en Pologne, et enfin internés dans des camps de concentration sur ordre d’Himmler, puis éliminés dans des camps d'extermination.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, déportés à Auschwitz, à Jasenovac, à Buchenwald, entre 50 000 et 80 000 Tsiganes d'Europe sont morts des suites des persécutions nazies. Les Tsiganes ont aussi participé à la résistance armée en France, en Yougoslavie, en Roumanie, en Pologne et en URSS.
D'autres massacres ont pris une forme particulièrement cruelle dans cette période de chaos : ainsi, en Roumanie, le régime d'Antonescu déporte plus de 5000 Roms vers l'Ukraine occupée par les Roumains (« Transnistrie ») : la plupart meurent de froid, de faim et de dysenterie. Quelques habitants courageux parviennent à protéger certains groupes. Le gouvernement roumain a officiellement reconnu ce génocide (en même temps que la Shoah) en 2005.
L'après-guerre
Le génocide a violemment marqué les consciences et, s’il faut attendre 1969 pour qu’une loi plus libérale remplace en France la loi de 1912, cela se fait sans opposition, ceux qui sont peu favorables aux Tsiganes craignant d'être assimilés aux promoteurs du racisme sous l'occupation allemande.
Les Roms sont mentionnés pour la première fois dans un texte officiel de l'ONU à travers la résolution 6 (XXX) du 31 août 1977 de la Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme exhortant les pays « qui ont des Tsiganes (Romanis) à l'intérieur de leurs frontières à accorder à ces personnes, s'ils ne l'ont pas fait jusqu'ici, la totalité des droits dont jouit le reste de la population ».
Les dernières décennies sont marquées par une conversion massive de la communauté au protestantisme évangélique. En France, 100 000 adultes au moins rejoignent l'association cultuelle Vie et Lumière fondée en 1953 et membre de la Fédération protestante de France.
Situation des Roms en Europe depuis 1990
Avec de 10 à 12 millions de personnes, les Roms sont la plus grosse minorité ethnique d'Europe.
Beaucoup de Roms continuent à vivre selon leur mode de vie nomade, en voyageant en roulottes ou en caravanes, mais souvent en Europe orientale, ils vivent en communautés marginales au taux de chômage élevé.
Dans certains pays comme la Slovaquie ou la Roumanie, où il est possible de constituer des partis ethniques, les Roms ont constitué des partis et ont au Parlement des représentants en tant que tels. Toutefois, leur entrée en politique n'est pas sans risques. Dans ces deux pays, les partis conservateurs (ex-communistes), cherchant à retarder l'intégration en Union européenne, leur ont distribué dans les anciens kolkhozes des terres qui étaient revendiquées par leurs anciens propriétaires, les agriculteurs locaux spoliés par la collectivisation. Les partis rénovateurs pro-européens, favorables à la restitution, soutenaient ces agriculteurs contre les Roms, ce qui a conduit à des désordres civils dans quelques villages. À la suite de ces manipulations, la plupart des dirigeants politiques roms se sont détachés des conservateurs (communistes) et rapprochés des rénovateurs (libéraux).
France
La plupart des Roms de Roumanie et des Roms de Bulgarie sont sédentarisés, salariés, intégrés : en tant que Roms ils sont devenus « invisibles » et on ne les rencontre guère hors de ces pays, mais une « minorité visible » restée semi-nomade pratique le travail à la journée (par exemple dans les vergers à l'époque de la cueillette, ou dans le bâtiment). Cependant, une partie d'entre eux va pratiquer (de manière volontaire ou forcée par des réseaux mafieux) la mendicité et, pour certains, la délinquance (trafics de métaux, cambriolages, mendicité agressive, pick-pockets ...). C'est cette minorité semi-nomade qui a commencé à circuler depuis l'entrée de ces deux pays dans l'Union européenne, le 1er janvier 2007, bénéficiant à partir de ce moment des droits de libre circulation dont bénéficie tout citoyen de l'Union européenne. Selon certaines associations et journaux, « On compte […] en France environ 15 000 Roms migrants de nationalité roumaine, bulgare, tchèque, slovaque, hongroise, moldave ou des pays de l’ex Yougoslavie (Serbie, Croatie, Kosovo notamment). La plupart d’entre eux ont immigré dans les années 1990, peu après la chute des dictatures communistes. »
Si une partie de ces Roms pratique le travail à la journée, c'est parce que jusqu'en 2014, les ressortissants de la Bulgarie et de la Roumanie ne sont pas totalement bénéficiaires du principe européen de libre circulation et, pour travailler officiellement, ont besoin d'un titre de séjour et d'une autorisation de travail : c'est pour cela qu'ils sont expulsables. De plus, la directive communautaire de 2004 sur la libre circulation des ressortissants de l'UE n'a pas été totalement transposée en droit français, notamment ses dispositions relatives aux garanties accordées aux personnes expulsées.
Dans cette situation, les expulsions de Roms sont passées de 2 000 en 2003 à environ 8 000 en 2008. Depuis 2007, le nombre de reconduites à la frontière de Roms roumains en France se situe entre 8 000 et 9 000 par an, représentant environ 30 % des objectifs chiffrés de reconduite à la frontière. Ces retours sont en grande partie volontaires car ils sont assortis de primes de 300 € par adulte et 100 € par enfant et de la prise en charge du billet d'avion.
En 2009, la France a expulsé 10 000 Roms de Roumanie et de Bulgarie. Le 9 septembre 2010, le Parlement européen a réclamé la suspension de ces retours forcés, contraires au droit communautaire.17
Expulsions de l'été 2010
Fin juillet 2010, le président Nicolas Sarkozy décide, à la suite de deux faits divers impliquant des membres français de la communauté des gens du voyage, de l'organisation de retours massifs de Roms en Roumanie, déclenchant une vaste polémique.
Une circulaire du ministère de l'Intérieur diffusée le 5 août 2010 demande aux préfets de faire évacuer « 300 campements ou implantations illicites d'ici trois mois, en priorité ceux des Roms », et d'engager une « démarche systématique de démantèlement des camps illicites, en priorité ceux de Roms ». D'après certains experts en droit constitutionnel, l'expression « en priorité ceux des Roms » contrevient aux principes de non-discrimination, tandis que l'ensemble de la circulaire contrevient à ceux de libre circulation des personnes et de leur droit de séjour garantis par les traités européens et détaillés par la directive de 2004 (38/2004). Elle serait aussi potentiellement contraire à la Convention européenne des droits de l'homme qui interdit les discriminations fondées sur la nationalité, la race ou l'appartenance ethnique.
Saisi par l'association SOS Racisme, le Conseil d'État a annulé la circulaire du gouvernement Sarkozy par un arrêt du 7 avril 2011. La haute juridiction a relevé que cette circulaire mettait en œuvre "une politique d'évacuation des campements illicites désignant spécialement certains de leurs occupants en raison de leur l'origine ethnique" qui était contraire au principe d'égalité.
Le 22 août 2010, le Pape Benoît XVI exhorte les pèlerins à savoir « accueillir les légitimes diversités humaines », ce qui a été interprété par certaines personnes comme une critique de l'action menée par les autorités françaises spécifiquement contre les Roms, interprétation contestée par d'autres personnes. Le 27 août 2010, le Comité pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale (CERD) de l'ONU demande à la France de « garantir l'accès des Roms à l'éducation, à la santé, au logement et autres infrastructures temporaires dans le respect du principe d'égalité » et se demande pourquoi elle n'a « toujours pas mis à la disposition des gens du voyage le nombre nécessaire d'aires d'accueil conformément à la loi du 5 juillet 2000 dite loi Besson », démontrant ainsi sa méconnaissance de la condition des Roms qui sont en réalité sédentaires et ne font pas partie des gens du voyage de nationalité française. Le coût annuel de la reconduite des Roms pour le budget de la France est estimé entre 200 et 250 millions d'euros (selon les chiffres du Sénat français).
Le 9 septembre 2010, le Parlement européen adopte une résolution dans laquelle il presse la France de « suspendre sur le champ » les expulsions de Roms. Le texte, déposé par les groupes S&D, ALDE, Verts/ALE et GUE/NGL, demande à la France et aux autres États membres de « suspendre immédiatement toutes les expulsions de Roms ». Les députés prétendent également que le relevé des empreintes digitales des Roms expulsés est illégal et contraire à la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
Le 14 septembre 2010, Viviane Reding, commissaire européenne à la Justice, aux Droits fondamentaux et à la Citoyenneté, fait part de son « intention de lancer deux procédures d'infraction contre la politique de la France à l'égard des Roms ».
Un an après, Médecins du Monde déplore les conséquences sanitaires catastrophiques des expulsions à répétition, publie une enquête sur la couverture vaccinale des populations roms et dénonce une mise en danger volontaire de personnes en grande précarité.
Présidence de François Hollande
En 2012, après l'arrivée de la gauche au pouvoir, la situation évolue et les expulsions augmentent fortement, ainsi l'Association européenne pour la défense des droits de l'homme publie un rapport faisant état de près de 12 000 expulsions avec un pic sur la seconde partie de l'année, l'AEDH note que cette année-là, les expulsions se sont très majoritairement faite par la force.
Les expulsions doublent entre 2012 et 2013, dépassant les 21 000.
Amnesty International a publié le 25 septembre 2013 un rapport intitulé « Condamnés à l’errance. Les expulsions forcées des Roms en France », ce rapport revient sur les différentes mesures prises par le gouvernement depuis un an et leurs conséquences sur la situation des Roms en France. Il passe notamment en revue plusieurs dispositifs « d’anticipation et d’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites » préconisés par la circulaire interministérielle du 26 août.
En 2014, près de 13 500 Roms ont été expulsés de leurs campements contre 19 380 en 2013 selon les chiffres de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et l’European Roma Rights Center (ERRC). En 2014, la France est critiquée par le rapport d'Amnesty. L'ONG met en exergue en particulier : « les violences évoquant un lynchage infligées en banlieue parisienne à un adolescent rom aujourd’hui dans le coma comptent parmi plusieurs crimes commis récemment contre des personnes appartenant à des minorités, qui pourraient être motivés par la haine ». Dans son rapport 2014/2015, La France est également critiquée en raison d'expulsions réalisées dans des conditions jugées « épouvantables ».
En 2015 et 2016, de nombreuses évacuations de lieux de vie occupés par des personnes Roms ou désignées comme telles ont été mises en œuvre. En 2015, près de 9 000 enfants et adolescents vivaient en bidonville, sans que l'on sache combien sont scolarisés. Selon une étude portant sur 161 jeunes, 53 % ne vont pas à l'école.18
La politique anti-Roms tue !
Dans la nuit du 12 au 13 mai 2013, l’incendie d’une usine désaffectée dans le 8° arrondissement de Lyon a fait trois morts parmi les 200 à 300 Roms qui vivaient là depuis le mois d’octobre. Ce drame était le résultat de la politique raciste que menaient, conjointement, Manuel Valls, le Ministre de l’intérieur, et Gérard Collomb, le maire de Lyon. Ils ont fait, dans la continuité de Sarkozy et Guéant, de la stigmatisation et de la chasse aux Roms un axe revendiqué de leur politique. La circulaire d’août 2012 qui obligeait à la recherche de solutions alternatives aux bidonvilles n’est pas appliquée. Les Roms sont ainsi condamnéEs à être logéEs, expulséEs, relogéEs, et pour cela pourchasséEs par la police, sans qu’aucune situation stable et vivable ne leur soit proposée. Une précarité extrême qui mène à des drames comme celui-ci.19
L’insupportable racisme ordinaire contre les Roms
Christian Leclerc, le maire de Champlan, une commune proche de Massy et de Palaiseau dans l’Essonne, a refusé l’inhumation d’un bébé dans le cimetière de sa commune. Cette petite fille, âgée de trois mois, est morte à l’hôpital de Corbeil-Essonnes le 26 décembre 2014 de la « mort subite du nourrisson ».
Sa famille est rom. Elle vit avec une trentaine d’autres sur un terrain de Champlan, les deux frères du bébé sont scolarisés dans cette commune. Les parents payaient les frais d’inhumation et le prix de la concession. Mais le maire ne l’a pas voulu. Ce petit notable local a abusé de son pouvoir contre cette famille parce qu’elle est rom. Une décision abjecte qui rajoute l’humiliation à la douleur de parents qui viennent de perdre leur enfant.
Leclerc s’était déjà distingué par des campagnes de calomnies répétées contre les familles roms qu’il laisse sans eau ni électricité ni ramassage des ordures dans leur campement, des conditions minimum que devrait leur assurer la municipalité.
Un éluE qui commet de tels actes devrait être démissionné immédiatement. Mais l’exemple du racisme contre les Roms vient des sommets de l’Etat. Le Premier ministre Valls s’était engagé personnellement dans une campagne contre les Roms lorsqu’il était ministre de l’Intérieur en fournissant des justifications aux expulsions de leurs campements. Un racisme dirigé contre les plus pauvres des pauvres, que certains voudraient transformer en boucs émissaires.20
ROMS = 18x15x13x19 = 66690
Dans l'Apocalypse, 666 est le nombre de la BÊTE.
Les ROMS vivent une situation apocalyptique : ils sont exclus du logement, des soins, de l'école et du travail, ils subissent les évacuations policières de leurs camps de fortune, les reconduites à la frontière par milliers, ils sont victimes de polémiques sur leur présupposée délinquance21… Les ROMS sont ainsi traités comme des BÊTES dont tout le monde veut se débarrasser.
666 = 1666
En France, dès 1666, Louis XIV décréta que tous les Bohémiens (Roms) de sexe masculin devaient être arrêtés et envoyés aux galères sans procès.
Dans les années 2000, les gouvernements de droite comme de « gauche » ont employé des méthodes similaires en déportant une dizaine de milliers de Roms chaque année. François Hollande a même battu des records, de 2012 à 2013, les déportations ont doublé, passant de 9 000 à plus de 21 000.
Durant son quinquennat, la précarité a encore gagné du terrain. Les Roms ont alors été utilisés comme des boucs émissaires, ce qui était d'autant plus choquant de la part d’un gouvernement qui se disait socialiste. L'acharnement des autorités contre les Roms et le manque évident de logements décents pour eux comme pour tant d'autres n'est que le reflet du mépris de cette société envers les pauvres... le racisme en plus.22
Dieu nous a envoyé les Roms pour que nous prenions conscience de la misère dans le monde car les Roms vivent dans des conditions similaires à celles de milliards de pauvres sur la Terre, donc Dieu nous les a envoyé pour nous permettre de voir cette misère de nos propres yeux.
Or nous ne voulons pas voir cette misère alors nous détournons le regard en espérant qu'elle s'en aille parce qu'elle nous dérange, elle ne cadre pas avec le décor de notre paysage urbain.
Nous sommes indifférents à la souffrance des Roms de la même manière que nous sommes indifférents à la souffrance des milliards d'êtres humains qui vivent dans une grande pauvreté. Les camps de Roms sont les bidonvilles du monde entier. Ces populations vivent dans les mêmes conditions que des animaux puisque nous votons pour des animaux. Il y a suffisamment de richesses pour permettre à tous les habitants de la Terre de vivre dignement mais les richesses ne sont pas équitablement redistribuées vu que nous votons pour le pouvoir de la BÊTE : le capitalisme, et par conséquent, des milliards d'êtres humains vivent comme des BÊTES.
ROMS = 66690
Le département 90 est celui du Territoire de BELFORT.
BE L = 25 12
Le 25 12 (25 décembre) célèbre la naissance de Jésus.
Jésus a permis au pouvoir de la BÊTE de régner en laissant le pouvoir politique entre les mains de César alors nous vivons dans un État de nature où le plus FORT dicte sa loi. Les plus faibles sont ainsi condamnés à rester en marge de la société donc notre devoir est de leur venir en aide pour qu'ils ne vivent plus comme des BÊTES.
Les Roms, comme d'autres migrants, fuient la misère et l'ostracisme qu'ils subissent dans leur pays d'origine. Les premiers responsables sont bien sûr cette société incapable de répondre aux besoins les plus élémentaires, tandis que le gouvernement utilise l'argent public à arroser le patronat.
Si on regarde les chiffres de plus près, les Roms sont seulement 20 ou 30 000 sur notre territoire, ce n'est rien, c'est une goutte d'eau, alors les dominants sont typiquement dans la stigmatisation. Ils s'en prennent à ceux qui sont les moins « cotés », en les utilisant comme boucs émissaires pour les rendre responsables des problèmes du pays, car pendant ce temps-là, les vrais responsables s'enrichissent de manière démesurée à l'abri de tous les regards – donc ce sont eux que nous devrions pointer du doigt et non la minorité de Roms vivant sur notre territoire.
Situation actuelle des Roms en Roumanie
La situation actuelle des Roms en Roumanie est préoccupante puisque 40 % d'entre eux vivent en dessous du seuil de pauvreté soit avec moins de 2,15 euros par jour. Ce qui explique les vagues de migration que l'Europe de l'Ouest observe ces dernières années.
La santé physique des Roms est bien plus mauvaise que le reste de la population dans une majorité de pays. L'espérance de vie des Roms est de 15 ans de moins que la majorité de la population dans le centre et l'Est de l'Europe.
La pauvreté des Roms en Roumanie est à multi-facettes : Les Roms sont souvent privés des ressources nécessaires à des conditions de vie adéquates, mais surtout ils n'ont pas accès à l'éducation, à certains postes de travail, aux services sanitaires et sociaux et aux canaux pour être actifs dans la société.
La population Rom est sans cesse discriminé :
• violences physiques, morales,
• injustices juridiques,
• discrimination raciste de la part des autorités,
• crimes racistes impunis,
• discrimination pour l'accès aux services sociaux, comprenant la discrimination dans l'allocation des fonds publics municipaux pour la réalisation des infrastructures de base (eau, électricité, gaz...),
• utilisation systématique de propos racistes par les média ce qui perpétue les stéréotypes et attitudes racistes,
• nombreux accès limités à une éducation normal pour les enfants roms, discrimination raciste dans les institutions scolaires.
et la liste pourrait être encore longue ! 23
Rapport d'Amnesty International
Fuyant leur pays, les Roms d’Europe de l’Est les plus démunis vivent dans des conditions si indignes, notamment en France, que leur intégration à la société française devient un rêve inaccessible.
- Ils sont fréquemment victimes d’expulsions forcées de leurs bidonvilles et campements et de reconduites à la frontière ;
- La scolarisation des enfants est pratiquement impossible dans ces conditions de précarité, quand elle n’est pas purement et simplement refusée par certains maires ;
- Ils sont stigmatisés par les autorités et sont les victimes de comportements voire de violences racistes, quand on leur reproche leurs conditions de vie et leur grande pauvreté tout comme leur origine ethnique ;
- Pendant l’été 2010, ils se sont retrouvés la cible d’une politique de « lutte contre les campements illicites » et la destruction de campements, entreprise depuis plusieurs années, s’est poursuivie à grand renfort de publicité. À plusieurs reprises, Amnesty International, avec d’autres organisations, a exhorté le gouvernement à respecter les droits de ces populations et déploré l’orientation essentiellement répressive des mesures prises à leur encontre ;
- Leur possibilité de trouver un emploi était fortement limitée jusqu’au 31 décembre 2013 en raison de mesures transitoires qui restreignaient l’accès au marché du travail pour les ressortissants roumains et bulgares. Depuis le 1er janvier 2014, ils peuvent accéder à l’emploi en France comme tous les autres ressortissants européens.
Les "Gens du voyage"
Constamment discriminés en raison de leur origine et de leur mode de vie, les Roms (plutôt appelés Tsiganes) français itinérants ou souvent semi-itinérants ont été particulièrement ciblés par les politiques discriminatoires de la première partie de 20ème siècle : notamment la loi discriminatoire du 16 juillet 1912 (abrogée en 1969) distinguant les "nomades" des autres Français et instaurant un "carnet anthropométrique" pour les repérer ; ou leur internement dans des camps français au cours de la deuxième guerre mondiale et jusqu’en 1946.
Mais aujourd’hui encore, les "Gens du voyage" sont discriminés en matière de :
- liberté d’aller et venir : obligation du livret de circulation
- liberté d’installation : obligation d’un rattachement administratif
- droits économiques, sociaux et culturels : accès à l’emploi, scolarisation des enfants, santé, habitat (non respect de la loi Besson du 5 juillet 2000 qui fait obligation aux communes de plus de 5000 habitants de créer des aires d’accueil).
Quels changements depuis 2012 pour les Roms ?
Le 26 août 2012, une circulaire interministérielle « relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuations des campements illicites » a été signée par sept ministres. Non contraignante, elle incite les préfets à trouver des solutions en termes d’accompagnement des populations roms installées dans des campements illégaux par le biais de diagnostics sociaux.
Parallèlement, une mission de coordination "sur l'organisation de l'accompagnement des personnes touchées par l'évacuation d'un campement" a été mise en place et confiée au délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement (DIHAL).
En 2015, peu d’avancées…
Plus de deux ans après cette circulaire du 26 août, dans la grande majorité des cas, des familles continuent d’être expulsées sans avoir été ni informées, ni consultées et sans se voir proposer de solutions d’hébergement adaptées ou de relogement.
Ce constat amène bon nombre d’associations à penser que le diagnostic social fait davantage office d’alibi que de dispositif ouvert vers une insertion possible des familles. Si quelques avancées ont eu lieu dans le cadre de la mise en place d’une mission nationale de résorption des bidonvilles en février 2014, elles n’ont pas encore véritablement fait leurs preuves et souffrent des délais qui lui sont imposés par les préfets et d’un manque de moyens.
Il faut donner une vraie place aux Roms
En avril 2015, Amnesty International France a lancé une nouvelle campagne intitulée « Une place pour les Roms ! » qui repose sur la mise en avant de témoignages de personnes roms insérées, d’élus locaux qui ont donné une chance à des familles d’avancer sur le chemin de l’insertion, de jeunes en service civique, autant de parcours qui démontrent qu’une autre politique que celle des expulsions est possible !
AIF demande aux autorités françaises de :
- Mettre en place des garanties effectives contre la pratique des expulsions forcées ;
- Enjoindre aux préfets d'appliquer la circulaire interministérielle du 26 août 2012 « relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuations des campements illicites » ;
- Garantir l’accès aux services essentiels de base pour la dignité des personnes habitant dans des campements informels, comme l’approvisionnement en eau, le ramassage des ordures et l’accès à des installations sanitaires suffisantes ;
- Garantir l’accès et la continuité des droits à l’éducation et à la santé.
Pour les gens du voyage :
- de s’attacher à faire appliquer la loi Besson du 5 juillet 2000 qui oblige chaque commune de plus de 5000 habitants à aménager une aire d’accueil ;
- d’abroger toutes les dispositions discriminatoires notamment l’obligation d’être muni d’un livret de circulation. 24
Sources