La période précoloniale
« Dès le IIIe siècle avant notre ère, le territoire de l'actuel Turkménistan abrite Nisa, la capitale du royaume des Parthes arsacides. À partir du Ve siècle, des tribus nomades turcophones originaires de haute Asie s'installent dans la région. Mais il faudra attendre le XIe siècle pour que les Seldjoukides, dynastie turkmène issue des tribus oghouz, prennent le contrôle de cette région méridionale de l'Asie centrale. Les steppes turkmènes sont ensuite intégrées au khanat mongol de Gengis Khan puis de son fils Djaghataï (XIIIe-XIVe siècles), au grand émirat de Tamerlan (XIVe-XVe siècles), puis au khanat de Khiva (XVIe-XIXe siècles). »1
La période coloniale et soviétique
Chronologie
- 1863-1885 : les Russes conquièrent la région et en font la Province transcaspienne.
- 1897 : la province est intégrée au Turkestan.
- 1924 : création de la République socialiste soviétique du Turkménistan, qui est intégrée à l'URSS un an plus tard (1925).
- Octobre 1991 : indépendance du Turkménistan. Saparmourat Niazov devient président, Sähet Myradow (Mouradov) devient président du Conseil suprême, et le pays adhère à la CEI. 2
La présidence de Saparmyrat Nyyazow (1990-2006)
Nyýazow était un dirigeant autoritaire, connu pour le fort culte de la personnalité qui lui était voué et auquel il associait le souvenir de sa mère disparue de longue date lors d'un séisme, Gurbansoltan Eje. Considérant le Turkménistan comme une nation dépourvue d'identité nationale, il a tenté de reconstruire le pays à son image tout en en effaçant les influences russes et occidentales. Il a ainsi rebaptisé la ville au nom russe de Krasnovodsk, sur la mer Caspienne du nom de Türkmenbaşy. Il a, en outre, donné son nom, ou celui de membres de sa famille, à divers écoles, aéroports et même à une météorite. Le visage de Nyýazow orne tous les billets de banque, et de larges portraits du président sont affichés dans tout le pays, en particulier sur les bâtiments importants, et dans les principales avenues. Des statues à son effigie, ou à celle de sa mère, sont disséminées dans tout le Turkménistan. L'une d'entre elle est située au milieu du désert du Karakoum. Une autre, plaquée d'or, se trouve au sommet d'un des plus hauts bâtiments d'Achgabat, l'Arche de la Neutralité, et pivote sur elle-même afin d'être toujours orientée vers le soleil. Une autre encore, gardée par une sentinelle, orne le parvis du Monument de l'indépendance turkmène. Nyýazow a ordonné la construction d'un palais monumental à Achgabat pour commémorer la règle qu'il a édictée : « Personnellement, je suis opposé à ce que l'on voie des images ou des statues de moi dans les rues... mais c'est ce que veut le peuple. »
Le système éducatif endoctrine les jeunes Turkmènes et fait l'apologie de Nyýazow. Les ouvrages scolaires sont presque exclusivement constitués de travaux ou de discours de Nyýazow. Le texte fondamental est le Ruhnama, ou Livre de l'Âme, une épopée nationale écrite par Nyýazow. Ce livre, un mélange d'histoire révisionniste et de lignes de conduites morales a pour vocation d'être le « guide spirituel de la nation », et le socle des arts et de la littérature nationaux. En mars 2006, il déclare d'ailleurs : « Celui qui par trois fois lira le Ruhnama trouvera une richesse spirituelle, deviendra plus intelligent, reconnaîtra l'existence divine et ira directement au paradis ».
De plus, l'alphabet a été changé : l'ancien alphabet cyrillique proche de celui utilisé par le russe a été remplacé par un alphabet latin proche du turc et les livres de la période soviétique dans l'ancien alphabet ayant été interdits, sans avoir été remplacés par de nouveaux ouvrages, il ne reste pas grand chose d'autre dans les bibliothèques que les œuvres de Nyýazow. En 2004, le dictateur a même ordonné la fermeture de toutes les bibliothèques rurales sous prétexte que d'après lui, les villageois turkmènes ne lisent pas. La plupart des observateurs occidentaux y voient là une volonté de maintenir le Turkménistan dans l'ignorance afin de mieux y régner.
À Gypjak, le village natal de Nyýazow, un complexe à la mémoire de sa mère a été construit en 2004. Il inclut une mosquée, la Mosquée de Gypjak, estimée à cent millions de dollars (construite par Bouygues), et conçue comme un symbole de la renaissance du peuple turkmène. Sur les murs de cet édifice seront inscrits des préceptes extraits du Ruhnama mêlés à des sourates du Coran.
Parmi les autres tentatives de Nyýazow pour transformer la culture turkmène, on peut citer la définition d'étapes de la vie et le changement de nom des jours et des mois de l'année, renommés en hommage à des héros ou symboles nationaux. Ainsi, janvier est devenu türkmenbaşy, avril gurbansoltan eje (nom de sa mère), septembre ruhnama et décembre bitaraplyk, c'est-à-dire « neutralité ». Tous les autres noms de mois sont concernés dans le même état d'esprit. L'année 2003 a d'ailleurs été proclamée année Gurbansoltan Eje (nom de sa mère). En 2002, il a rendu obsolète le mot traditionnel turkmène çörek, qui désigne le pain, pour le remplacer par gurbansoltan eje. En 2005, il a substitué au serment d'Hippocrate un serment au président. En 2006, une nouvelle variété de melon est baptisée türkmenbaşy.
Il prétendait que son livre, le Ruhnama, a la même valeur que le Coran et la Bible.
Politique présidentielle et affaires étrangères
Nyýazow s'est fait remarquer à plusieurs reprises pour sa politique peu conventionnelle. Il a, par exemple, ordonné en août 2004, qu'un gigantesque palais de glace fût construit en plein milieu de son pays désertique, bien que de nombreux observateurs eussent affirmé que ce rêve resterait une chimère à moins qu'il n'obtînt une assistance technique.
Seules deux religions ont reçu l'autorisation de mettre en place des lieux de culte au Turkménistan : l'Église orthodoxe russe et la religion d'État, le sunnisme. Les organisations culturelles non turkmènes ne sont pas habilitées à opérer dans le pays.
À la suite d'une prétendue tentative d'assassinat sur la personne de Nyýazow le 25 novembre 2002, les autorités turkmènes ont procédé à l'arrestation d'un très grand nombre de conspirateurs supposés ainsi que de membres de leur famille. Certains détracteurs de Nyýazow affirment que cette tentative a été mise en scène afin de prendre des mesures contre l'opposition politique qui, à l'intérieur comme à l'extérieur du pays, allait crescendo.
Durant l'été 2004, la capitale Achgabat a été le théâtre d'une campagne de distribution de tracts appelant au renversement et au procès de Nyýazow. Les autorités se montrèrent impuissantes à mettre un terme à cette campagne, ce qui eut pour conséquence le licenciement télévisé par le président du ministre de l'Intérieur et du recteur de l'Académie de police. Nyýazow accusa le ministre d'être incompétent et déclara : « Je ne peux pas dire que vous avez eu le moindre mérite ni que vous avez combattu le crime avec beaucoup d'ardeur. »
En 2004 Nyýazow renvoya quinze mille employés médicaux, les remplaçant par des conscrits de l'armée. Dans la continuité de cette action, il ordonna, le 1er mars 2005, la fermeture de tous les hôpitaux en dehors d'Achgabat. Il affirma le 28 février 2005 : « Pourquoi gâcherions nous de bons médecins spécialistes en les laissant dans des villages, alors qu'ils pourraient travailler dans la capitale ? » On rapporte que Nyýazow était gravement malade et avait besoin d'assistance pour marcher vers la fin de sa vie.
Fin 2004, Nyýazow rencontra l'ancien Premier ministre canadien Jean Chrétien pour discuter d'un contrat pétrolier au Turkménistan pour une société canadienne. En mars 2005, la nouvelle de cette entrevue souleva une levée de boucliers parmi les cercles d'opposition au Canada, ces derniers proclamant que l'affaire risquait d'endommager l'héritage de Chrétien.
En 2005, Nyýazow annonça que son pays allait affaiblir ses liens avec la Communauté des États indépendants, l'alliance des anciennes républiques soviétiques.
À la surprise générale, Nyýazow a promis en 2005 que des élections libres et équitables auraient lieu en 2009.
Le 21 décembre 2006, Saparmyrat Nyýazow, décède. Le vice-premier ministre Berdimoukhamedov est désigné pour organiser ses funérailles, puis comme président par intérim (alors que ce rôle revenait constitutionnellement au président du Parlement) en attendant les prochaines élections ; selon la constitution du Turkménistan, celles-ci doivent se tenir dans les deux mois suivant la nomination d'un président par intérim.3
Sale noël au Bouygménistan
À sa mort, la presse et la télé ont eu la dent dure contre le régime de Nyýazow. Encore de son vivant, il avait fait ériger une immense statue plaquée or, de soi-même, pivotante avec le soleil, que le « président prophète » pouvait ainsi regarder toujours en face. Délires et mégalomanie. Mais surtout, régime féroce. Contre l'ensemble de la population : le dictateur avait entre autres fait fermer les bibliothèques et les hôpitaux jugés inutiles, voire nuisibles, et faisait réciter des versets de sa bible personnelle aux étudiants. Féroce plus particulièrement contre ses opposants, jetés par milliers dans des geôles abjectes et systématiquement torturés.
Ancien apparatchik soviétique nommé par Gorbatchev en 1985 à la tête du Turkménistan et de son parti communiste, il était devenu, avec l'ouverture de l'URSS au marché mondial, le champion de l'indépendance de sa république et surtout de la vente de son gaz, dont il plaçait une grande partie des revenus sur ses comptes personnels à l'étranger, en Allemagne notamment. Un pur produit de la mondialisation en quelque sorte.
Mais présidents et hommes d'affaires occidentaux entretenaient les meilleures relations avec ce tyran cousu d'or. Bouygues le premier, ce 24 décembre 2006, perdait un Père noël qui 2000 ans après l'heureuse naissance, lui faisait encore bâtir des palais, des usines de marbre... et jusqu'au mausolée familial dans lequel le corps a été déposé lors des funérailles à Achkhabad.
Bouygues bénéficia des largesses du Turkmenbachi (père des Turkmènes), payées avec l'argent du gaz, la principale richesse du pays dont la population, l'une des plus pauvres de la région, ne voit pas un centime. En douze ans à peine, le bétonneur français a réalisé plus d'un milliard de commandes, rien qu'en construction d'édifices à la gloire du dictateur.
Certes il fallait se plier aux caprices du client, voire se faire tancer, comme en juin 2004 Martin Bouygues, pour avoir « négligé la qualité » d'une coupole dorée de la grande mosquée, ternie en moins d'un an. Certes il fallait ruser, voire fabriquer cette vraie-fausse émission spéciale de TF1 à la gloire du dictateur, avec la participation du Pdg de Gaz de France et d'un directeur d'EDF, mais jamais passée à l'antenne... sauf au Turkménistan. Certes il fallait savoir fermer les yeux, et construire une « maison de la créativité » destinée aux journalistes dans la ligne, tandis que les autres crevaient en prison.
Mais la dictature avait tant d'avantages. Au Turkménistan, à part un personnel d'encadrement et quelques équipes techniques envoyées sur place et recluses dans leurs « bases de vie » gardées 24 heures sur 24, Bouygues exploitait à loisir les ouvriers indiens, pakistanais et turcs entassés dans des baraquements. Sans parler des ouvriers turkmènes. Sans parler des habitants d'Achkahad expulsés sans indemnisation pour laisser place aux chantiers : un préavis réduit à cinq jours pour éviter les manifestations, et arrivaient alors les engins de Bouygues, pour tout raser. L'entreprise de bâtiment française venait d'obtenir un nouveau contrat, de 90 millions de dollars pour la construction d'un palais du Conseil populaire, dont le contrat venait d'être signé... en grandes pompes entre Saparmyrat Nyýazow et Martin Bouygues. C'était le mardi 19 décembre 2006, veille de la crise cardiaque du client, manque de pot !
Les hommes politiques français fréquentaient eux aussi leur homologue turkmène. Dès 1992, lors du premier voyage d'affaires de Nyýazow en France, pour signer quelques contrats de béton, gaz et équipement de contrôle aérien avec Bouygues, Elf et Thomson, Mitterrand en personne, ainsi que Juppé et Pasqua, avaient tenu à le rencontrer. L'année suivante, Mitterrand se rendait au Turkménistan.
Et, concurrence oblige, en particulier pour le gaz turkmène, les trusts américains s'étaient également branchés, mieux même qu'Elf. Même si l'enclavement géographique du Turkménistan oblige encore à emprunter les gazoducs russes contrôlés par Gazprom. Même si le projet de gazoduc à travers l'Afghanistan, mis au point par un consortium de compagnies pétrolières, butte sur l'état de guerre permanente que connaît ce pays (et que la croisade américaine entreprise en 2001, avec l'aide de l'Angleterre, de la France et quelques autres, n'a fait qu'amplifier).
Le représentant du département d'État américain (son numéro 2) était aux côtés du premier ministre Russe et du patron de Gazprom aux obsèques de Nyýazow. La banque d'investissement américaine Goldman Sachs s'est empressée d'alerter ses clients sur les craintes que cette mort ne mette « en question la stabilité du pays et le contrôle de ses substantielles exportations gazières ».
Dites qui vous pleurez, on saura qui vous êtes ! 4
Pas de révolution en "kit"
Toujours à l’affût d’une crise déstabilisatrice dans l’ex-empire soviétique, les médias occidentaux et certainement en coulisses les diplomates, les pétroliers et les banquiers ont caressé pendant quelques jours l’espoir de mettre la main sur le trésor gazier qu’est le Turkménistan.
En effet, le décès soudain du tout puissant Nyýazow, sorte de pacha oriental issu de la décomposition des partis communistes de l’ex-URSS qui se faisait appeler Turkmenbashi : « père de tous les turkmènes », pouvait laisser espérer que sa succession non préparée permettrait de mijoter vite fait une petite « révolution » de couleur permettant de mettre à la tête du pays un dirigeant « démocratique » qui laisserait les multinationales pétrolières et gazières occidentales s’emparer des immenses réserves de gaz naturel que renferme le sol du pays.
Las, il ne s’est pas trouvé de leader de rechange de bonne pointure, ni d’ONG bien organisée et copieusement financée par la NED étasunienne pour mener une fronde contre le régime. Nyýazow, en disparaissant prématurément, a créé la surprise.
Les médias occidentaux ont bien fait surgir de l’ombre à toute vitesse un exilé turkmène ancien ministre de Nyýazow mais, sans relais intérieurs, ce candidat improvisé au pouvoir n’a pas pu s’imposer.
Très vite, l’organe dirigeant a choisi à l’unanimité un successeur à Nyýazow. Il s’est agi du Ministre de la Santé : Gurbanguly Berdimuhamedow.
Celui-ci assura l’intérim de la présidence et fut le seul candidat aux élections présidentielles qui avaient été fixées, avant le décès de Nyýazow, au mois de Février 2007.
Le calme gouvernemental règne donc au Turkménistan. Le gaz turkmène, abondant, satisfait bien sûr largement les besoins du pays et s’exportait vers l’Iran où il alimentait l’énorme agglomération de Téhéran et le nord du pays, les gisements iraniens, eux-mêmes abondants, se trouvant dans le Sud du pays loin de la capitale, et vers l’Europe par le réseau de gazoducs russes de GAZPROM.
Un autre projet gazier grandiose consistait à construire via l’Afghanistan un gazoduc pour alimenter le Pakistan et l’Inde. Ce projet, porté jadis par la société pétrolière US UNOCAL – dont le Président afghan d'alors (avec la double nationalité afghane/étasunienne) Karzai était à l’époque le délégué dans la région – a été suspendu pour cause d’invasion militaire US. Mais son intérêt économique demeurait pour les deux pays clients, très pauvres l’un et l’autre en ressources énergétiques.
En politique étrangère, le Turkménistan est discret : membre de la CEI, il n’a pas cédé aux sirènes proétasuniennes du GUAM (groupe Géorgie, Ukraine, Azerbaïdjan, Moldavie) pas plus qu’il n’a accepté de bases US au moment de l’invasion de l’Afghanistan. À l’inverse des autres républiques d’Asie Centrale il n’a pas adhéré non plus à l’Organisation de Coopération de Shanghai qui, animée par la Chine et la Russie, est en train de devenir un réel contrepoids aux visées dominatrices des USA en Eurasie. Il s’est également tenu à l’écart de l’Organisation de sécurité collective fondée par une partie des États membres de la CEI autour de la Fédération russe.
Selon les sources et les périodes les estimations des réserves gazières turkmènes varient. Présentées quelquefois comme les troisièmes du monde elles sont minimisées par d’autres. Le problème n’est probablement pas d’ordre géologique ou technique mais plutôt géographique. Le Turkménistan est un État enclavé, éloigné des zones de consommation. La mise en exploitation intensive de son gaz supposerait un environnement politique stable. Ce n’est pas le cas aujourd’hui puisqu’il est frontalier de l’Afghanistan occupé et de l’Iran menacé. Ses voisins du Nord et de l’Ouest : Kazakhstan, Azerbaïdjan (à travers la Caspienne) et Russie sont eux-mêmes producteurs et exportateurs donc pas intéressés économiquement par le développement de ce concurrent.
La situation du Turkménistan pourrait être comparée à celle d’un riche propriétaire foncier, gardant jalousement son trésor et dont les voisins et d’autres grands propriétaires plus lointains attendraient tranquillement la disparition pour élargir leur domaine (qui n’est intéressant que pour son sous-sol, en surface le pays est un désert à 90 %). Mais le vieillard est méfiant, autoritaire et capricieux, il ne se fie à personne et il faut le ménager tant que les dispositions de son testament ne sont pas connues. Ses héritiers directs : l’équipe au pouvoir comme la population turkmène qui, même si elle subit ses caprices de vieillard riche, bénéficie gratuitement à vie de l’eau du gaz et de l’essence, ne se laisseront pas dépouiller si facilement.5
La présidence de Gurbanguly Berdimuhamedow
Le 11 février 2007, Berdimoukhamedow est élu avec 89 % des suffrages lors de l'élection présidentielle.
Le régime de Gurbanguly Berdimuhamedow est considéré par plusieurs organismes indépendants comme une dictature : en effet, le culte de la personnalité, les scores soviétiques aux élections, les projets pharaoniques comme le soi-disant « Palais du bonheur » inauguré en grande pompe pour les 20 ans de l'indépendance pour des sommes sans commune mesure avec la richesse du pays sont autant d'indices qui convergent vers cette conclusion : à la fin du mois de mai 2015, une statue de 21 mètres de haut, fondue en bronze et recouverte de feuilles d'or à Achgabat, rappelant le culte de la personnalité de son prédécesseur, fut dévoilée. Son prédécesseur Nyýazow, avait fait ériger une statue en or de lui-même tournante pour toujours faire face au Soleil. Elle est aujourd'hui reléguée dans la banlieue d'Achgabat.6
Droits de l'homme
Amnesty International a dressé un tableau très noir de la situation au Turkménistan en 2003, et s'est notamment montrée pessimiste sur une éventuelle évolution positive à cause de :
- l'assentiment tacite des États-Unis et de la Russie au pouvoir turkmène, grâce à la non-ingérence du pays chez ses voisins et son absence de prétentions militaires et territoriales ;
- la présence de réserves de gaz naturel attirant des investissements étrangers très profitables ;
- un relatif désintérêt des médias occidentaux, de par la situation géographique du pays et sa faible démographie ;
- une opposition politique traquée et muselée ;
- l'absence de presse intérieure indépendante.
La situation des droits de l'homme au Turkménistan est toujours critique en 2006. Le régime dictatorial, un des plus autocratiques au monde, restreint un grand nombre de libertés. Selon Human Rights Watch, on peut citer parmi les atteintes aux libertés :
- assimilation forcée des minorités ethniques ;
- discriminations, restriction de la liberté de mouvement, interdiction des langues minoritaires ;
- limitations délibérées de l'accès à la culture et à l'art (fermeture des bibliothèques en province) ;
- interdiction des partis politiques (à l'exception du parti officiel) ;
- justice expéditive (non-respect des droits de la défense) pour les opposants politiques ;
- non-respect des droits des détenus, morts suspectes en prison ;
- pas de liberté d'expression, notamment de liberté de la presse, pour ce qui touche à la politique du président ;
- pas d'accès à la presse internationale, peu à Internet (moins d'un internaute pour cent habitants en novembre 2006) ;
- non-respect des droits des enfants, programmes scolaires fortement marqués par la propagande officielle au détriment des disciplines classiques (mathématiques, histoire du pays, géographie, littérature…) ;
- liberté de religion restreinte.
- quadrillage massif du pays et de la capitale par les forces de l'ordre, subissant une forte corruption et procédant à du racket sur les populations.7
Le dictateur turkmène à Paris : entre eux, ça « gaz »
Le Turkménistan a les quatrièmes plus importantes réserves de gaz au monde. Pour en protéger les revenus contre une population composée à 60 % de chômeurs, le pays a surtout un des régimes dictatoriaux les plus féroces d'une région qui n'en manque pourtant pas.
C'est le chef de ce régime, Gourbangouly Berdymoukhamedow, que Sarkozy a reçu à l'Élysée le 1er février 2010. Ils ont, dans un communiqué commun, « encouragé le renforcement des liens d'amitié et de dialogue politique » entre les deux pays et « affirmé leur volonté de développer la coopération bilatérale ». De Mitterrand à Chirac, le « dialogue politique » et la « collaboration » avaient déjà été fructueux avec le prédécesseur et mentor de Berdymoukhamedov.
Pendant des années, Nyýazow avait fait fermer les établissements d'enseignement, mais rendu obligatoire l'étude d'un recueil de ses préceptes. Il avait fait quadriller le pays par l'armée, éliminé physiquement toute forme d'opposition réelle ou supposée. Mais il en aurait fallu plus pour perturber ses relations avec les gouvernements français successifs. Berdymoukhamedov, qui a hérité de cette dictature infâme, a aussi hérité de l'amitié de l'Élysée : cela tombe bien pour Accor, Thales, Vinci, Bouygues qui lorgnent de gros contrats publics dans le BTP, la construction d'un aéroport, le transport aérien et l'hôtellerie au Turkménistan.
Quant aux très nombreux chômeurs turkmènes, il y a peu de risque que certains fassent un jour partie d'un rapatriement de sans-papiers comme l'ancien ministre de l'Immigration Besson les aime : au Turkménistan, la dictature veille à ne laisser sortir personne.8
Sources